Chevaux et cinéma

Après 25 ans de barreau, vous voilà directeur du Standard. Cette décision a dû bouleverser votre vie ?

Pierre François (47 ans) : Disons que c’est mon démon de midi (il rit). Au lieu de prendre une jeune maîtresse, j’en ai pris une vieille, puisque j’étais déjà avocat du Standard ! En fait, j’étais à un âge-charnière. C’était le moment ou jamais de changer de vie. Le Standard m’en a vaguement parlé en septembre, puis vers novembre-décembre, sans que je sache exactement dans quel rôle on me voyait. Mes nouvelles fonctions me prennent beaucoup de temps. Par exemple, je n’aurais pas pu garder mes gros clients. Je réserve quand même une demi-journée aux HEC, où je donne cours de droit commercial en deuxième candidature. J’ai trois mémoires à lire en juin. Comme par hasard, l’un d’entre eux traite de la problématique des droits TV et un autre de l’image du Standard !

Quels contacts conservez-vous avec vos anciens collègues ?

C’est un milieu très jaloux. Mon épouse Dominique et moi étions associés. Elle a réussi à boucler les dossiers en trois mois au lieu de six, pour limiter les désagréments des clients et leur éviter un transfert. Mais elle a été dégoûtée par certaines remarques de collègues. D’autres ont été très courtois. Me Misson, que j’ai souvent affronté, m’a envoyé un mot très gentil.

Vous avez un c£ur pour les animaux !

Nous avons dix chevaux, un chien de garde plutôt méchant et un petit chien, et huit chats sensés tuer les souris attirées par les grains. Et nous avons racheté un cheval qui était destiné à la boucherie. Sinon, nous acquérons de jeunes chevaux que nous dressons. Il faut miser sur la jeunesse, n’est-ce pas (il rit). Ainsi, l’équitation ne nous coûte pas une fortune.

Qui est à l’origine de cette passion pour l’équitation ?

Dominique. Elle a commencé très jeune elle-même, elle m’a converti et elle a tenu à ce que Samuel (20 ans) monte dès l’âge de quatre ans. (Dominique :  » Je voulais l’écarter du football : me voilà punie  » !) Il combine maintenant l’équitation avec ses études en communication, option cinéma. Il effectue beaucoup de stages. Vous voyez ces cassettes vidéo de Jean D’Orgeix, un grand cavalier des années 40 ? A plus de 80 ans, il continue à bourlinguer et Samuel a été le filmer pour ces cassettes de formation. D’Orgeics participe à des jumpings internationaux en seniors, avec beaucoup plus de succès qu’il ne l’avouera lui-même. (Une pause). Il y a peu de jeunes qui émergent. Evidemment, la Fédération organise le championnat de Belgique et une autre épreuve importante en juin, en pleine bloque !

Pratiquez-vous d’autres sports ?

J’ai été champion du monde de football avec le barreau de Liège en 1983. J’ai marqué contre Düsseldorf en demi-finales. Ce matin, j’ai effectué une promenade à cheval. Nous accompagnons Samuel aux compétitions, évidemment. J’ai d’ailleurs dû passer mon permis camion ! Lors d’un concours en Normandie, le Standard me tenait au courant du score par téléphone.

A quoi occupez-vous vos rares loisirs ?

Nous adorons aller dans un petit restaurant simple et convivial avec des amis. Nous n’aimons pas la gastronomie. Nous venons d’aller dans un restaurant arabe, sur un trottoir en Outremeuse. Il n’y avait pas du tout d’alcool mais quelle ambiance, avec la musique arabe et tout… Nous partons en vacances en Moselle et puis à Aix-en-Provence. Nous n’aimons pas les destinations lointaines. Au programme, cinéma et piscine.

Dominique a été votre partenaire de travail. La voilà femme au foyer. C’est un changement pour vous deux ?

Oui, un changement que nous avons évidemment discuté au préalable. Mais elle s’implique au Standard. Elle m’accompagne régulièrement aux soirées de supporters. Ce soir, j’assiste à une soirée des Minimes. Elle en est également. L’entretien de la maison et des dépendances ne lui laisse guère de temps. Elle s’est mise au bricolage depuis que nous avons acquis cette demeure, en fait.

Vous portez le nom de votre époux ?

Dominique Lycops (45 ans) : Oui. Les gens ne savent jamais comment prononcer le mien et même au barreau, je portais le nom de mon mari.

Ne regrettez-vous pas votre métier ?

Nous avons construit quelque chose ensemble. Je me voyais mal continuer seule et comme Pierre vous l’a dit, les réactions de certains m’ont dégoûtée. J’ai arrêté le premier avril et depuis, je n’arrête pas un instant : j’essaie de juguler le jardin, j’ai repeint la façade, les boxes, je m’occupe des chevaux… Je bénéficie d’une aide mais soigner les chevaux, et surtout les sortir, représente un travail considérable. Je me suis découvert une passion pour le bricolage, depuis que nous habitons ici. Nous avons acheté cette maison en 1997. Nous y avions été invités par des connaissances et nous étions tombés sous le charme. Nous avions demandé que le propriétaire nous prévienne s’il souhaitait vendre. Las du climat, il a vendu. Il y avait une piste, quatre boxes et un foutoir. J’ai tout retapé.

N’était-il pas difficile de travailler en couple ?

Nous nous voyions peu. Pierre plaidait le matin puis effectuait des expertises alors que je tenais le bureau, que je m’occupais des relations avec les clients…

Montez-vous en jumping ?

Non, je suis trop stressée. Je préfère l’endurance. D’ailleurs, je me cache quand Samuel fait des parcours. Par peur d’un accident, oui, mais aussi par superstition. C’est pareil dans tous les sports : si je regardais, je lui porterais peut-être malheur. Son premier départ au GP d’Anvers, avec des obstacles de 1m50 et des cavaliers du niveau de Phillipaerts, a été particulièrement stressant. Pierre, lui, craint plutôt que Sam ne soit déçu.

Vous intéressez-vous au football ?

Avant, j’allais au Standard quand il ne faisait pas froid. (Pierre :  » On la voyait jusqu’à la mi-octobre puis elle disparaissait jusqu’en mars « .) Me voilà maintenant tombée dedans, avec plaisir. Si je m’y connais ? (Pierre opine). Je fais confiance à l’arbitre. De toute façon, on ne peut contester ses décisions. C’est le côté juriste qui ressort, là (elle rit). Je m’occupe de la salle VIP avec Carine. Samuel actualise le site du Standard pendant les matches, en introduisant les différentes actions et tout ça, en direct.

Vous avez un joueur favori, paraît-il ?

Bjorne Riise ! Il est arrivé en même temps que nous et nous avons effectué ensemble notre première sortie, au club de supporters de Tirlemont. L’ambiance était fantastique et les supporters ont insisté pour que nous dansions sur le podium, une danse compliquée. Bjorne et moi avons fait de notre mieux, en imitant les autres. Pierre a eu plus de chance car sa cavalière connaissait les pas et les gestes à effectuer ! C’est un milieu agréable. La méchanceté y est inexistante. Nous allons souvent à Metz. Nous avons assisté à la fête pour la montée en D1.

Vous avez énormément de livres…

J’aime la lecture, en effet, avec une prédilection pour l’histoire de France. Je ne parle pas d’histoire romancée mais des faits. Sam a eu un cours d’histoire en première candidature. Il portait sur le 19e siècle, la guerre de 1870 et tout ça. J’ai trouvé le sujet passionnant et je me suis plongée dedans.

Vous êtes tous trois des cinéphiles. De qui vient cette passion ?

Sam nous l’a communiquée. L’option qu’il a choisie l’amène à analyser des films, à les voir sous un angle différent. Nous avons vu de vieux Hitchcock, des films muets ou des contemporains moins commerciaux. C’est grâce à Sam que nous avons découvert les Jacques Tati. Ceci dit, nous regardons aussi les Sous-doués, Julie Lescaut et le Loft. Samuel supportait Thomas et moi Angela. Au fil du temps, on inclut ces gens dans la famille. Nous avons voté. Pierre est bon public. Il s’y est intéressé également et a même suivi le Loft sur internet. Mais nous n’aimons pas Nice People.

Pascale Piérard

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