Changement DRASTIQUE

C’est un euphémisme de dire que St-Trond a beaucoup changé. Afin de commencer la saison, les Trudonnaires ont d’abord vu venir deux nouveaux patrons. Des hommes d’affaires accomplis avec une carrière politique : Roland Duchâtelet, président et fondateur du parti politique Vivant, et Herman Schueremans, organisateur de concerts, dont le festival Rock Werchter. Sous leur impulsion, St-Trond est passé sous une structure de société anonyme (S.A.) car à leurs yeux, un club de football doit être géré comme une société. Déléguer est la nouvelle devise au Staaienveld.

Marc Wilmots a été désigné responsable de la politique des transferts entrants et sortants, il dirige les entraînements et trouve encore le temps d’exercer son mandat politique. Dans la foulée, un staff technique entièrement renouvelé s’est installé avec le français comme langue véhiculaire : l’entraîneur physique Mario Innaurato vient du Standard, l’entraîneur de terrain Zoltan Kovac dirigeait le noyau B de La Louvière et Vince Briganti était encore il y a deux ans l’assistant de Robert Waseige à la tête de l’équipe nationale. Au STVV, Briganti est le seul à disposer d’un diplôme d’entraîneur professionnel et obtient pour cette raison une place sur le banc au cours des matches.

A part l’ancien personnel technique, un demi-noyau de joueurs a aussi été poussé vers la porte de sortie.  » Nous avons souri de la situation de Beveren, mais regardez-nous à présent « , est la réaction souvent entendue chez les supporters car les nouveaux venus sont, dans une large mesure, africains.

 » Si un Belge gagne cinquante euros nets, le club doit débourser cent euros bruts pour lui « , explique Thomas Caers,  » Pour un Africain, seulement soixante. Pour redevenir sain financièrement, St-Trond a donc été obligé de choisir cette voie « .

Caers figure parmi les footballeurs qui sont restés. A 31 ans, il est le joueur de champ le plus âgé du groupe. Seul le gardien Dusan Belic (33 ans) le précède. Son expérience a décidé Wilmots à le nommer vice-capitaine. Le brassard a été confié à un véritable Hesbignon : Peter Delorge, qui n’a pourtant que 24 ans. Caers :  » Lorsque je suis revenu au club pour la reprise des entraînements, j’ai été surpris de voir que je connaissais encore certains joueurs… C’est bel et bien un tout nouveau club, même pour ceux qui sont restés. Le club s’est débarrassé de tout ce qu’on connaissait bien. Lorsque les choses changent, on est toujours critique dans un premier temps. Cela a été dur à avaler, disons-le honnêtement. Nous avions un groupe très solide, nous nous connaissions par c£ur. Alors, au début, le négatif prenait le dessus chez moi, mais peu à peu l’optimisme revient. Le mérite revient en partie aux anciens. Si nous entraînons les nouveaux garçons dans uns spirale positive, cela donnera un bon mélange. Nous avons notre avenir en main « ..

Marc Wilmots les encourage dans ce sens.

Caers :  » Déjà lors du premier entraînement il a appelé quatre joueurs : Nicky Hayen, Claude Kalisa, Delorge et moi. Il a dit : – Vous êtes le c£ur du groupe, vous devez veiller à ce que le reste suive. Je pense que nous sommes les joueurs idéaux pour ça. Il s’adresse souvent à nous, ce que je trouve bien. En ce qui me concerne j’estime que c’est un avantage que beaucoup de joueurs soient jeunes : ils sont avides d’apprendre et sont ouverts à la critique. Et aux conseils des anciens, aussi. Nous ne tolérerons pas que les choses tournent éventuellement mal. Il faudra travailler durement et nous veillerons étroitement à ce que cela se passe de manière disciplinée « .

 » L’orgueil joue aussi  »

Au cours du premier match lors du stage à Bordeaux, c’était 3-0 à la mi-temps pour les pensionnaires de D3 française de Libourne.

Caers :  » A ce moment-là, Dries Jacquemyn, Kris Buvens et Tom Van Imschoot sont montés au jeu et nous avons directement inscrit un but. Nous avons alors tous eu une réaction d’orgueil. Je le voyais à quelques visages. On s’est dit que l’adversaire n’allait pas jouer avec nos pieds ! C’est aussi ce qui peut faire notre force : les joueurs qui sont restés ont retrouvé une motivation supplémentaire pour améliorer leur niveau. Nous devons être honnêtes : l’année passée l’équipe a véritablement pris eau de toutes parts. Pour moi aussi, ce nouvel élan est réel, cela donne une véritable envie d’y aller à fond. Je suis persuadé que nous avons eu besoin de ceci pour nous rendre plus forts. Si l’on reste trop longuement dans la routine d’un même club, tout devient banal. Maintenant, voir d’autres joueurs entrer dans le vestiaire, cela donne envie de se retrousser les manches. Je ne considère pas cela comme une réaction hostile, mais comme un réflexe positif « .

Les Africains ont un autre passé, d’autres intérêts aussi :  » Mais nous n’allons certainement pas constituer des clans. On rit ensemble. J’ai l’impression que les nouveaux comprennent déjà quel genre de club est St-Trond. L’ambiance dans le vestiaire, les blagues sont certainement encore de la partie. Dans ce domaine, je pense que la tradition trudonnaire sera maintenue. Une fois on rit avec un black, l’autre fois c’est le black qui rit de toi : cela doit pouvoir se faire, mais avec respect.  »

Les contacts avec la presse se déroulent désormais via un attaché du club qui est aussi le secrétaire personnel de Wilmots au Sénat. Au sujet des entretiens téléphoniques avec les médias, là aussi ce sera davantage contrôlé. Mais de la théorie à la pratique… On entend des : -Saint-Trond n’est pas Arsenal.

Marc Wilmots est-il donc un homme à la poigne de fer ?  » Non, je ne trouve pas « , dit Thomas Caers.  » Il sera dur par moments, mais il devra panser les plaies à d’autres. Je pense que tout le monde aime son côté positif. Il a beaucoup d’aura et il vaut mieux l’avoir à la bonne. Il est très ouvert, le contact passe bien et il déborde de qualités humaines « .

Sous la coupe de Willy, deux entraînements ont été fixés au mardi. Les joueurs obtiennent déjà un avant-goût de ce qui les attend : le matin commence avec une heure d’entraînement physique, suivi d’un entraînement de terrain d’environ deux heures. L’après-midi, la session commence seulement à quatre heures. Les autres jours le groupe s’entraîne une fois, mais pendant une session plus longue.

 » Wilmots tient aussi compte des signaux donnés par le groupe « , poursuit Caers.  » Il écoute et parvient à expliquer la construction du jeu de manière très progressive et très détaillée. Je me sens terriblement bien dans cette vision car cela correspond à ma formation de licencié en éducation physique. Tout le monde a un cardiomètre, connaît maintenant sa limite en aérobie et anaérobie et y travaille. Je me sens en très bonne condition tout en étant encore bien frais. Ceux qui s’occupent de condition physique savent que les cardiomètres sont devenus indispensables. Pourtant, en football, tous les clubs ne semblent apparemment pas encore convaincus. En course, personne ne parcourra la même distance ou ne courra sur le même tempo. Tout a été orienté vers l’individu. Tout le monde se sent bien, plus fort, plus frais et est prêt à soigner son jeu « .

Comment joueront les Canaris ?

Dans quelle formation tactique Wilmots entamera-t-il le championnat ? C’est encore une question ouverte.  » Je n’ai pas de système « , dit-il à ce sujet.  » Cela dépendra des joueurs qui sont frais le vendredi. Mes joueurs doivent pouvoir jouer à diverses positions « .

Lors de la période de préparation, il a aligné son équipe en 4-3-3, 4-4-2 et 3-5-2.  » On débutera en tout cas avec quatre défenseurs « , affirme Caers.  » Wilmots lui-même me l’a déjà dit : à l’avenir peut-être à trois défenseurs. Mais je ne pense pas que nous soyons prêts. Je suppose que nous évoluerons surtout en 4-3-3, parce que nous disposons de beaucoup d’attaquants véloces. Par contre, si Mamoun ne peut pas être aligné sur le flanc gauche, il nous manque déjà un joueur à l’extérieur et nous devons passer par la force des choses à un 4-4-2. Comme contre Bordeaux, à ce moment-là il n’a pas joué après qu’il a affiché quelques fois une certaine nonchalance. Dans de telles situations, Wilmots intervient rapidement « .

Le centre de la défense est le plus fort avec Mathieu Beda, Kalisa qui revient de blessure et Hayen, ainsi que deux jeunes Belges qui viennent seulement de percer : Christofer Baratto et, dans une moindre mesure, Egon Wisniowski. Devant eux, Abdoulaye Diawara et Laurent Delorge forment un duo complémentaire et en soutien d’attaque, Tamas Hajnal complète l’entrejeu

Caers :  » Avec quatre hommes derrière et Diawara et Delorge comme pare-chocs, nous sommes parés pour le repli défensif. Si devant nous parvenons à créer le danger avec notre force de frappe africaine, cela peut être très surprenant. Tandis que si nous évoluons selon un canevas fixe, la surprise ne sera plus de mise après un quart de saison. La saison passée, nous avons été tactiquement beaucoup plus univoques : le ballon devait obligatoirement transiter par ce joueur, puis par tel autre, etc. Maintenant, l’accent est mis sur le passing et sur le fait de créer beaucoup de mouvement, les solutions venant alors d’elles-mêmes. La tactique est beaucoup moins rigide, ce qui risque aussi de surprendre nos adversaires en championnat. Je n’aimerais pas me retrouver en tant qu’arrière droit face à Mamoun lorsqu’il part comme une flèche « .

Pas assez explosifs

 » A part Samuel Ipoua, un costaud centre-avant camerounais, nous avons encore un déficit à combler en ce qui concerne la taille et la force « , confirme Caers.  » C’est aussi ressorti des tests : la condition est excellente pour tous, mais en ce qui concerne l’explosivité, la force et la vitesse nous obtenons un niveau moyen. Nous devons trouver un avant de pointe qui puisse forcer quelque chose, à qui l’on peut confier un ballon quand ça chauffe ou quand nous perdons le fil de notre jeu. C’est absolument nécessaire dans une équipe comme la nôtre, avec tant de jeunes « .

Le nouveau St-Trond devra tirer profit de sa circulation de balle. Caers :  » Garder le cuir dans l’équipe, le faire circuler rapidement, donner des passes précises et tranchantes, tels doivent être nos atouts qui nous permettront de compenser notre manque de puissance et de taille. Pour cette raison, nous voulons évoluer à un rythme élevé. Jouer haut en défense, jusqu’à dix mètres derrière le milieu de terrain, et presser devant. Nous avons pour cela les qualités nécessaires. Je peux rattraper un homme, Kalisa, Hayen et Beda aussi. Sans oublier que Belic est un gardien qui ose jouer loin de son but « .

On est loin du schéma de l’an dernier, donc ? Caers :  » Oui, la saison passée, nous avons spéculé trop facilement sur l’espace créé derrière la défense de l’opposant. Pendant un temps, ce fut terriblement fructueux avec DannyBoffin et DésiréMbonabucya. Nous n’avons pas été une équipe qui faisait le jeu, ce que nous sommes maintenant, avec un jeu plus soigné, des ballons au ras du sol, etc. Nous y travaillons à l’entraînement jusqu’aux plus petits détails, jusqu’à en être dégoûtés ! Dès que nous avons conquis le ballon, nous voulons le faire circuler rapidement pour percer le onze adverse. Il y a des qualités individuelles, certainement, mais la compréhension tactique, la force pure et la discipline sont aussi nécessaires. Je pense que nous allons aussi subir quelques belles dégelées. Nous devons en tenir compte « .

MATHIEU BEDA, Français, 23 ans, défenseur central

Peut aussi jouer devant la défense et comme arrière gauche. A part les six derniers mois, a peu joué à Bordeaux. Possède une bonne passe en profondeur, une bonne technique et un bon jeu de tête. Déjà beaucoup de maturité.

SANDER DEBROUX, 21 ans, arrière droit

Effectue le grand saut de la D3 (Oud-Heverlee) à la D1. Fougueux et dur mais techniquement doué. A brider pour qu’il n’obtienne pas directement une réputation fâcheuse. Successeur de Peter Voets, selon le site du club.

ABDOULAYE DIAWARA, Malien, 21 ans, milieu défensif.

Vient du noyau A du PSG mais n’y a pas joué. Techniquement avancé, grande capacité de course. Evolue sobrement et fait penser à Marco Né (Beveren).

TAMAS HAJNAL, Hongrois, 23 ans, meneur de jeu.

Petit mais bien baraqué, il vient des Amateurs de Schalke 04. A 18 ans, il joua huit fois en Bundesliga, sous Huub Stevens. Fort balle au pied, bon passing, bonne vision du jeu. Améliore les autres mais ne s’engage pas dans les duels.

SAMUEL IPOUA, Camerounais, 31 ans, centre avant

A participé à la Coupe du Monde 98. A joué en France, Autriche et au cours des quatre dernières saisons en 2e Bundesliga avec peu de succès. Athlétique et très fort de la tête. Un vrai targetman.

PAPY KIMOTO, Congolais, 28 ans, extérieur droit.

Ex-Lokeren et Standard. International. Assez rapide, bouge bien, travaille dur. C’est le seul nouvel arrivé qui possède l’expérience de la D1 belge. Après Dusan Belic et Thomas Caers, c’est le joueur le plus âgé du noyau.

GUY MAMOUN, Camerounais, 20 ans, extérieur gauche.

A failli se qualifier avec le Cameroun pour les JO. Dribble court, bonne accélération et bons centres tranchants. Très doué techniquement mais pas finisseur. Travail tactique à améliorer.

LANDRY MULEMO, 17 ans, arrière gauche.

International belge en équipe d’âges, loué au Standard comme alternative à Thomas Caers. Très jeune, très rapide, très fort, techniquement assez doué. Est encore à l’école.

MARLIN PIANA, Congolais, 22 ans, avant-centre.

International qui a joué en Roumanie et en France. Pas super doué techniquement mais solide. Choisit souvent d’aller seul vers le but mais doit encore convaincre en tant que finisseur.

STIVEN RIVIC, Croate, 18 ans, attaquant

Loué à la demande de Schalke 04 qui aurait dû le laisser jouer dans son noyau Amateurs. Doit encore grandir. Grande inconnue pour Marc Wilmots :  » Je fais confiance à Schalke, il sera peut-être la surprise de l’équipe « .

par Jan Hauspie

 » Même pour ceux qui sont restés, c’est UN NOUVEAU CLUB  »

 » Nous travaillons NOTRE CIRCULATION DE BALLE jusqu’à en être dégoûtés  »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire