Champion de cynisme

 » Lorsque je joue mal, je joue quand même bien pour l’équipe « , confesse le souvent insupportable capitaine bavarois et hollandais.

« Le capitaine reste à bord  » titrait joyeusement le site internet du Bayern Munich en mars dernier. Une expression utilisée par les Rekordmeister pour signifier la prolongation de contrat d’un an de son capitaine Mark van Bommel. A l’époque où le navire bavarois faisait route vers le titre et la finale de la Ligue des Champions, le médian batave ne voulait pas sauter par-dessus bord.

Aux commandes de l’entrejeu munichois, le rugueux Néerlandais se sent très bien dans sa peau. Ce que les coryphées du club allemand n’ont pas manqué de remarquer, comme le toujours critique Franz Beckenbauer.  » Il n’a jamais joué aussi bien que maintenant. Il faut prolonger son contrat le plus rapidement possible, et pour deux ans de préférence « , disait le Kaizer en janvier dernier. Et le président Karl-Heinz Rummenigge de rajouter une fois le contrat signé :  » Mark est un élément important, qui nous a apporté de la qualité et de la stabilité ces dernières années, mais plus encore ces derniers mois. Il fait un excellent capitaine et un symbole pour le club.  »

Les rôles s’inversent

Pourtant, voici un peu plus d’un an, van Bommel ne se sentait pas pris au sérieux au Bayern, qui ne lui proposait qu’un an de prolongation de contrat, alors qu’il en souhaitait deux. Il y eut ensuite quelques flirts avec d’autres clubs. Avec le Schalke 04 de Fred Rutten qui, selon van Bommel, développait une idée de jeu assez intéressante. Ou encore avec Hambourg, entraîné par un autre Néerlandais : Martin Jol. Du côté du Bayern, on avait enrôlé le Russe Anatoli Tymoschuk, un médian défensif comme van Bommel, ce qui ne fit que renforcer le doute. Mais en mars 2009, le coach Jürgen Klinsmann décida quand même de donner sa chance au Limbourgeois, qui resta finalement en Bavière.

En 2010, les rôles s’étaient inversés, puisque le Bayern voulait resigner van Bommel pour deux ans, le joueur préférant ironiquement prolonger… d’une seule saison.  » Ainsi, si je ne me sens plus bien après, je peux simplement aller voir ailleurs. Et si le club poursuit son beau développement dans la lignée de cette saison, nous pourrons à nouveau nous mettre à table « , dixit van Bommel. Sous les ordres de Louis van Gaal, le n°6 s’est mué en véritable maître à jouer de son équipe. Son concurrent russe ne joue pratiquement jamais, ce qui a tendance à confirmer les propos teintés d’arrogance de van Bommel lorsque Tymoschuk est arrivé :  » Je n’ai pas peur de lui. Je suis meilleur, de deux classes au moins « , avait-il confié à Bild en février 2009. Nous lui avons demandé s’il se sentait à son meilleur niveau :  » Je n’ai pas l’impression de livrer une saison au-dessus de la moyenne. Je joue de manière très constante et j’atteins un niveau normal dans presque tous les matches. Je ne suis jamais en dessous de la moyenne. Guus Hiddink avait déjà dit cela de moi au PSV : même lorsque je joue mal, je me mets au service de l’équipe et en quelque sorte je joue bien. J’effectue toujours ma part de boulot et je suis le coach sur le terrain. Ce sont là mes qualités. En général, on ne me remarque pas trop. Lorsque l’équipe tourne bien, on remarque davantage ses individualités. Et quand je suis dans un bon jour, je peux apporter ce petit extra à mes partenaires.  »

Le sens des responsabilités

Jan van Halst, analyste entre autres à RTL et à Eredivisie Live n’estime pas non plus que van Bommel ait réalisé sa meilleure saison en 2009-2010.  » En 2004-2005, la saison lors de laquelle le PSV a atteint les demi-finales de la Ligue des Champions, je le trouvais déjà très bon. Il eut le malheur de laisser filer un attaquant milanais dans son dos, ce qui permit à l’AC Milan de marquer et de se qualifier. Il eut droit à une volée de bois vert. A présent cette polémique n’a plus de sens. Il est devenu plus calme et surtout plus responsable. Il ne se rue plus à l’avant sans réfléchir. Il choisit ses moments pour s’infiltrer, par exemple lors de son but contre la Fiorentina.  »

Sören Lerby, ex-Ajax et ex-PSV, à Munich entre 83 et 86, regarde encore régulièrement des matches :  » J’ai pu constater que van Bommel est le véritable maillon entre la défense et l’attaque. Il sait ce qu’on lui demande à sa position. Il ne peut pas perdre le ballon et cela n’arrive d’ailleurs que très rarement. Il a un grand sens des responsabilités.

Le tournant à Turin

Il s’en est pourtant fallu de peu pour que la saison dernière de van Bommel et de ses partenaires munichois soit bien moins fringante. Le début de saison fut difficile et une élimination pendait au nez du Bayern en Ligue des Champions. Juste à temps survint un match remporté de manière convaincante sur le terrain de la Juventus : 1-4.

 » Cette victoire fut le tournant « , confirme van Bommel.  » Nous avons montré que nous savions bien jouer à un moment important. Nous en étions convaincus depuis bien longtemps. Dès les premiers entraînements l’an dernier, le niveau était élevé et il n’a pas cessé de s’améliorer. Nous n’avons jamais eu l’impression que cela allait mal, nous sommes restés calmes. « 

Le duel remporté à Turin fit baisser la pression qui pesait sur les épaules de van Gaal et de ses joueurs. Après le début de saison laborieux, les critiques n’avaient pas manqué. A un moment, le Bayern accusait 8 points de retard sur le leader de Bundesliga. Ce n’est que le 28 février après une victoire 1-0 contre Hambourg que les Bavarois reprirent la tête du classement. Pour la première fois depuis 652 jours, avaient compté les médias outre-Rhin. Un chiffre qui faisait peu de sens, selon van Bommel.  » La pression a été importante et le restera, c’est ainsi. C’est ce qui fait aussi le charme de ce club, la marque des grands. On ne vous accorde presque pas le temps de construire une équipe. Il faut toujours décrocher des résultats. Or, quand il s’agit d’affronter le Bayern, tout le monde ou presque est content avec un partage et joue avec une solide base défensive. Ce n’est pas facile à assumer. Il faut être constamment paré et donner le maximum à chaque match. Le fait de ne pas avoir perdu une seule rencontre de championnat entre le 26 septembre 2009 et le 20 mars 2010 est donc à mes yeux une performance brillante.  »

Lerby sait cela mieux que quiconque :  » A mon époque il n’en allait pas autrement. Les attentes sont immenses, le public exige que nous soyons présents sur tous les fronts. Van Bommel sait très bien assumer une telle pression. Il est parfaitement conscient de ce qu’il est nécessaire de faire pour gagner. Il est clairement le leader du Bayern, cela se voit. Je lui trouve une ressemblance avec Stefan Effenberg. Lui aussi savait ce qui était nécessaire pour remporter des trophées et donnait tout pour atteindre ses objectifs. Le Bayern doit s’estimer heureux de garder un joueur avec tant de connaissance du football un an de plus. En plus, sa condition physique est au top, il ne manque presque aucune rencontre.  »

Van Halst confirme :  » Il est le leader du groupe. Avec le Bayern, il commet moins de vilaines fautes… Et tactiquement, il choisit mieux le moment où il doit monter pour apporter le surnombre. Il n’est plus dans sa phase Nigel de Jong, comme je l’appelle. Bien sûr, il ne rechigne pas à aller au contact mais met souvent l’arbitre dans sa poche.  »

Au printemps, le Bayern a fini par remporter le titre allemand et affirmé qu’il voulait remettre en 2011. En Champions League, van Bommel ne refit pas le coup de la victoire en 2006 avec Barcelone. En finale, les Bavarois ont été battus par l’Inter grâce à l’intelligence tactique de José Mourinho et la maestria de Diego Milito. Et après cette fin de saison chargée, van Bommel s’était envolé avec toute la délégation Orange, emmenée par son… beau-père Bert van Marwijk pour qui sa position comme n°6 en piston devant la défense est inébranlable.

Là aussi, il régula l’entrejeu hollandais aux côtés de Nigel de Jong. Un rôle essentiel aux yeux du coach :  » Lorsque nous avons des footballeurs flamboyants sur le terrain, on a souvent des difficultés. C’est beau à voir, mais des garçons comme de Jong et van Bommel vous apportent plus de sûreté. C’est nécessaire quand on veut gagner. « 

Van Halst renforce encore ces propos :  » De Jong et van Bommel sont deux joueurs parfaits pour soutenir les quatre artistes qui évoluent devant eux. Ils interceptent les ballons qui retombent et empêchent les contre-attaques adverses. Van Bommel est plus que jamais une des plaques tournantes du onze néerlandais et est accepté comme tel par ses coéquipiers, contrairement à l’époque où Marco van Basten était aux commandes…  »

par bas abresch, elf voetbal

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire