Chamartin

Pour les Madrilènes, Raul est un symbole qui entretient avec les supporters une relation affective supérieure.

On a l’impression qu’il est au Real depuis toujours. A 25 ans, il vient de franchir le cap des 300 matches en D1, a inscrit près de 150 buts et a déjà gagné trois Coupes d’Europe.

Vous souvenez-vous du début?

Raul: Bien sûr. Parfois, c’est bon de se plonger dans ses souvenirs. Je n’ai pas oublié mes origines et j’aime jeter un coup d’oeil dans le rétroviseur.

Vous y voyez le train qui vous emmenait à la Ciudad Deportiva?

Oui, oui. C’était un long voyage, on s’arrêtait à Atocha et à Chamartin avant d’arriver à destination.

Vous vous ennuyiez?

Non, là n’était pas la question. Mais, lorsque j’ai fait mon apparition en équipe Première, les gens ont commencé à me reconnaître. Lorsque je prenais place dans le train, tout le monde me dévisageait. C’était, en tout cas, l’impression que j’avais. Cela me mettait mal à l’aise, car je suis timide et je préfère passer incognito.

Le timide que vous étiez en a fait du chemin, en huit ans…

On peut le dire, en effet. Lorsque j’effectuais les voyages en train vers la Ciudad Deportiva, je pensais que j’éprouverais de grosses difficultés à atteindre l’équipe Première. Pour tout dire, cette idée ne m’avait même jamais effleuré l’esprit. Mais tout est allé très vite et j’ai revêtu pour la première fois le maillot de l’équipe fanion lors d’un match amical à Oviedo. Je n’ai rien oublié.

Contre quelle équipe avez-vous joué votre seul match en D2?

Contre Palamas. Nous nous sommes inclinés là-bas sur le score de 2-1.

Combien de penalties avez-vous loupé en D1?

Trois. Le calcul est facile: j’en ai tiré neuf et j’en ai réussi six. C’est un mauvais pourcentage de réussite, je dois le reconnaître.

Vous n’avez plus cette confiance?

Si, je l’ai toujours eue. Lorsqu’il m’incombait de botter les penalties, je n’ai jamais senti mes jambes me lâcher au moment de vérité. Mais comme, actuellement, je ne suis plus désigné, je ne prends même plus la peine de m’entraîner à cet exercice. Je sais qu’il y aura tellement de tireurs désignés avant moi que la probabilité que je doive m’élancer est très mince. Alors, pourquoi s’en faire?

Lorsqu’on a toujours le football en tête, n’y a-t-il pas un moment où l’on en a marre?

Non, je ne m’ennuie jamais, pas même à l’entraînement, car j’aime gagner en toutes occasions, y compris dans les petits matches entre copains. Je goûte tous les jours au bonheur que j’ai d’être footballeur, et avant les matches, je pense toujours aux supporters.

Pour ceux de la tribune Chamartin, vous ne devez pas vous en faire. Ils sont à vos côtés, quoi qu’il arrive…

C’est formidable de constater de quelle manière je suis apprécié et respecté.Jamais de crise

Ils disent que vous êtes un gagneur né…

Il y a des joueurs chez qui l’on décèle plus facilement la volonté de gagner que chez d’autres. Michel Salgado est de ceux-là. Cela se voit déjà à l’entraînement: il discute pour un rien; parce qu’on a laissé jouer alors que le ballon était sorti de quelques millimètres, par exemple. Il a horreur de perdre, même lorsqu’il s’agit d’un simple petit jeu. Généralement, les supporters adorent ce type de joueurs.

Jamais de véritable crise pour vous?

Peut-être en 1998, durant cette saison qui s’est terminée par la conquête de la septième Coupe d’Europe des Clubs Champions. J’avais continué à jouer alors que j’étais blessé et j’avais fini par ressentir la fatigue.

Vous avez alors fait connaissance avec les critiques.

Certains affirmèrent alors que mon rendement n’était pas proportionnel à mon salaire. On m’a adressé des insinuations sans fondement. J’avais la conscience tranquille. Je sais que je me suis toujours soigné pour être au meilleur de ma forme.

Dans l’ensemble, vous vous êtes surtout manifesté par une grande régularité.

Je m’y suis efforcé. En football, pour progresser, il faut être constant dans ses prestations. Cela a été mon cas. Mon jeu a évolué au fil des ans. A chaque apparition, je ressens une plus grande sérénité.

Autrefois, vous n’étiez pas serein?

Lors de mes quatre premiers Real-Barça, j’étais très nerveux. Je n’arrêtais pas de me mettre martel en tête. Je faisais et refaisais le match. Le soir, je rentrais à la maison en me disant que je n’avais rien apporté à l’équipe, que j’avais été nul.

Comptez-vous encore viser le titre de meilleur buteur du championnat?

Chaque saison, j’inscris entre 15 et 20 buts, mais malgré cela je donne toujours la priorité au collectif. Je préfère marquer moins et être champion d’Espagne, que l’inverse.

Au niveau international, les récompenses individuelles vous ont toujours échappé jusqu’ici…

Là, par contre, cela me hante l’esprit. J’espère décrocher un trophée important d’ici à la fin de ma carrière. Le palmarès des grands referendums est très impressionnant, plein de grands joueurs. J’aimerais aussi avoir mon nom gravé au bas de cette liste. J’ignore si je devrai encore attendre longtemps pour obtenir une distinction individuelle au niveau international, mais je sais que plus le Real Madrid imprimera sa griffe sur la Ligue des Champions, plus j’ai de chances d’être honoré. Encore une fois, le succès individuel passera par celui de mon club.Del Bosque, le meilleur pour nous

Vicente Del Bosque a déjà été récompensé par des titres de ce genre…

J’en suis très content pour lui. Aujourd’hui, on commence à reconnaître son talent d’entraîneur. Il est de plus en plus valorisé. J’espère qu’il restera le plus longtemps possible, car il est l’entraîneur idéal pour le Real Madrid.

Son rôle est-il surtout celui d’un conciliateur?

C’est un entraîneur qui a su conférer une grande sérénité à un groupe comme celui-ci, qui est composé de vedettes et n’est pas forcément facile à gérer.

Depuis quand le connaissez-vous?

J’ai fait sa connaissance à 15 ans. Avec sa corpulence et son visage sévère, il imposait le respect aux jeunes. Il était le coordinateur du centre de formation. Il passait, observait, discutait avec l’entraîneur. Il m’a toujours fasciné.

Louis van Gaal a brûlé en enfer…

Je demeure persuadé que Louis van Gaal est un bon entraîneur. Le problème est qu’avec lui, Barcelone n’a pas su trouver son style de jeu, il y a eu trop de changements. Barcelone vit une saison difficile, mais cela arrive. Le Barça fera toujours partie des grands.

La saison calamiteuse de Barcelone profite-t-elle au Real Madrid?

Plus le Barça végète dans les profondeurs, mieux le Real Madrid se porte, c’est clair. Mais je ne demande pas que le Barça soit aussi bas qu’actuellement, car la rivalité ancestrale entre les deux équipes perd un peu de son charme.

Barcelone mise tout sur la Ligue des Champions, désormais…

C’est l’un des derniers objectifs qu’il reste au club catalan, mais c’est dangereux, car si l’équipe a fait très bonne figure dans les poules, la formule change à partir des quarts de finale: c’est l’élimination directe. Cela signifie que l’on peut perdre, sur un match, tout le bénéfice des efforts consentis précédemment.

Que pensez-vous du parcours réalisé par la Real Sociedad?

C’est une équipe qui a surpris beaucoup de monde au cours des premières semaines de compétition, mais aujourd’hui, l’effet de surprise est passé. Chacun sait que c’est une bonne équipe. Elle possède des joueurs expérimentés et a l’art d’engranger des points en jouant mal.

Pensez-vous qu’un club modeste soit encore capable de décrocher le titre, de nos jours?

Pour l’instant, lorsque je vois la Real Sociedad à l’oeuvre, je me sens obligé de répondre par l’affirmative. Mais le championnat est encore long. A défaut de remporter le titre, je vois le club basque parfaitement capable de terminer à une place qualificative pour la Ligue des Champions.

On prétend que le Real Madrid bénéficie toujours des faveurs du corps arbitral…

C’est faux. Les quatre premiers penalties que l’on a sifflés contre nous cette saison n’en étaient pas. Les arbitres ont une tâche difficile. Certains jours, ils commettent des erreurs, mais l’erreur est humaine.

A ce jour, vous n’avez encore jamais été exclu. Pas même par erreur…

J’essaye toujours de me contrôler, de rester maître de mes nerfs, même si parfois des pulsions me poussent à réagir, comme tout le monde. Je joue toujours mes matches en étant très concentré, et je fais encore plus attention lorsque je viens d’écoper d’un carton jaune. Je n’ai pas le droit de laisser mes compagnons en infériorité numérique à cause d’une bêtise.

Jamais un défenseur n’est donc parvenu à vous faire perdre le contrôle de vos nerfs?

Non, jamais. Moi-même, je joue toujours le jeu correctement, et je crois que les défenseurs le remarquent. On ne gagne rien en essayant de tricher ou en répliquant par un coup de coude. Je préfère rester concentré, à l’affût d’une erreur d’un défenseur.

J.C. Casas, ESM

« Non, les arbitres ne nous avantagent pas »

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