Chaises musicales

Les trois défenseurs centraux ne jouent ensemble qu’exceptionnellement.

La Coupe du Monde lui avait procuré une nouvelle aura. Le Togolais Daré Nibombe avait acquis du galon en Allemagne. Il s’était frotté à Thierry Henry et pour son retour en D1, Mons avait bien besoin d’un international, d’un leader. Un an plus tard, la donne a quelque peu changé. Comme lors de sa première expérience en D1 avant la relégation, l’échalas togolais a retrouvé le banc. Il n’est plus titulaire mais il n’est pas non plus remplaçant. Depuis le début de la saison, Nibombe a été aligné à sept reprises mais derrière ces statistiques plus que convenables, il est clair que le duo privilégié en défense centrale par José Riga reste celui composé par le Brésilien Adriano Duarte et le vétéran italien Roberto Mirri (il n’a que 29 ans mais il s’agit du joueur resté le plus longtemps au stade Tondreau… après Nibombe).

Cette donne n’est pas une nouveauté. Le vent avait tourné depuis le mois de janvier, date d’arrivée d’Adriano à Mons. Pourtant, les blessures et les suspensions avaient permis à chaque joueur d’accumuler du temps de jeu. Aujourd’hui, les choses sont claires : Duarte est quasi inamovible et Mirri a la préférence sur Nibombe. Derrière, c’est le désert. Ivan Milas traîne sa peine. Il n’est là que pour faire nombre. Même en cas de succession de coups durs dans l’axe, Riga préfèrera déplacer le back droit (ou gauche) Frédéric Jay. Et dimanche, contre le Standard, ils jouaient tous les trois, Mirri étant placé sur le flanc gauche derrière.

Une question demeure : les données semblant claires, ne fallait-il pas donner son bon de sortie à Nibombe, en juin dernier ? Les dirigeants n’ont pas voulu en entendre parler et ont assuré au Togolais qu’ils avaient encore bien besoin de lui.

Une certitude : Adriano Duarte

 » Quand je réfléchis à la meilleure composition de la charnière centrale, je recherche le compromis entre taille et vitesse « , explique l’entraîneur.  » Car, pour moi, le concept du gros costaud qui ne s’occupe que du marquage est dépassé. Je dispose de trois éléments qui se tiennent de très près quand ils sont en forme. Je pars quand même du principe qu’Adriano est le défenseur le plus complet et nous est le plus utile par sa vitesse. Il a une bonne lecture du jeu, une bonne technique au niveau des frappes, du contrôle et de la relance. Il sait jouer des deux pieds et son timing aérien est très bon. Sa vitesse de pivotement est très bonne et il anticipe souvent le mouvement de son adversaire en passant devant lui « .

Riga organise donc sa défense autour du Brésilien auquel il reconnaît pourtant encore certains défauts :  » Il n’arrive pas encore à être présent tout le temps, dans la répétition des efforts et il est souvent freiné par des blessures. On donnera deux explications à celles-ci : il est resté un certain temps sans jouer et il prend beaucoup de coups en n’évitant pas les duels. A part cela, on dire pas que son jeu renferme une grosse faiblesse. Il pourrait juste franchir un cap au niveau de la mentalité. On voit qu’il est parfois un peu perturbé par des éléments extérieurs. Une fois qu’il aura acquis une réelle stabilité, cela ira mieux « .

Riga a une vision offensive du football. Un défenseur est dès lors également jugé sur son apport en possession du ballon :  » Duarte a un bon timing défensif et offensif. Son jeu de tête est souvent efficace « .

Preuve de la confiance que Riga lui témoigne : il n’hésite pas à l’utiliser dans l’entrejeu en cas d’absence d’ Hocine Ragued ! Ce ne fut pas tellement convaincant mais en choisissant cette option, le coach a relancé Nibombe qui commençait à trépigner sur le banc. Une bonne gestion de groupe.

L’expérience de Roberto Mirri

Malgré ses nombreuses blessures, l’Italien est toujours revenu dans le parcours. Il a toujours fait partie des plans de Riga qui lui a d’ailleurs confié le rôle de vice-capitaine. Pourtant, Mirri n’a pas encore convaincu cette saison. Il a multiplié les approximations et n’a pas été aussi souverain qu’auparavant.

 » Je ne peux pas me montrer satisfait de mon début de saison « , confesse Mirri,  » Je ne suis pas à mon meilleur niveau. Mais c’est dû à l’équipe. Quand cela tourne, c’est plus facile pour tout le monde. Par contre, quand elle piétine, mon jeu s’en ressent également. On a abordé ce championnat avec trop de confiance. Après, il faut du temps pour reprendre les bonnes habitudes. Heureusement, je sais faire mon autocritique. Je me dis que je dois régler des petits détails, me positionner et me déplacer autrement, rester en mouvement plutôt que figé. Ce qui était naturel la saison passée ne l’est plus. Quand on revient de blessure, ce n’est jamais évident mais je ne peux pas dire que ma mauvaise passe actuelle soit un contrecoup de mes pépins physiques « .

Son entraîneur partage ce constat :  » Ceux qui sont au club depuis un certain temps, ont connu toutes les difficultés. Parfois, cela les atteint plus qu’on ne le pense. Quand il est bien, Mirri dispose d’une très bonne lecture du jeu mais s’il prend le match par le mauvais bout, il sera perturbé pendant 90 minutes « .

Pourtant, Riga en a fait son vice capitaine :  » Par son comportement et sa longévité, il le mérite. C’est un professionnel exemplaire dans l’exercice de son métier. J’aimerais qu’il soit encore plus leader. Il doit croire en lui et savoir qu’il a son mot à dire. Mais cette capacité, tu l’as ou tu ne l’as pas « .

 » J’essaie d’être discret « , s’explique Mirri,  » Je fais respecter les consignes mais jamais je ne crie ni ne revendique. C’est toujours délicat de critiquer ses coéquipiers car on sait qu’on peut aussi commettre des erreurs « .

Mais si Mirri est le défenseur le plus utilisé cette saison, c’est qu’il y a quand même une raison.  » Ses atouts ? Un bon jeu long, un bon timing et de ce fait un bon jeu aérien. Et puis, son parcours italien l’a discipliné « , ajoute Riga. Et par rapport à Adriano ?  » Sa souplesse dans le pivotement est moins bonne. Mais comme le Brésilien, il souffre aussi d’une certaine fragilité. Il devrait se faire davantage respecter sur le terrain, se montrer intransigeant. Je préfèrerais que cela soit l’attaquant adverse qui prenne le coup plutôt que lui « .

Daré Nibombe pense au départ

Depuis le début du championnat, Nibombe apparaît comme une roue de secours. Pourquoi ?  » Il est capable de nous sortir de gros matches mais aussi de passer à travers « , dit Riga,  » Il a un peu le même problème que Mirri : il connaît des petites absences qui risquent de coûter cher. Sa concentration sur 90 minutes pose parfois problème. Son jeu de tête défensif est bon mais pas efficace sur le plan offensif. Malgré sa carcasse, il est foncièrement gentil et j’aimerais parfois qu’il se montre plus déménageur, plus agressif. Il en a les moyens « .

 » Je suis déçu de mon début de saison « , avoue Nibombe.  » J’avais discuté avec l’entraîneur qui m’avait dit que je venais en troisième position en défense centrale. Je savais à quoi m’en tenir et c’est pour cette raison que je voulais partir. Cependant, le président comptait sur moi et puis, je dois être honnête, je n’ai pas vraiment reçu d’offres concrètes. Depuis l’arrivée d’Adriano, la concurrence est plus rude mais c’est le foot « .

A lui maintenant de prendre le taureau par les cornes :  » Si je pouvais, je prendrais le timing d’Adriano et l’organisation défensive de Mirri et j’améliorerais mes points faibles : être concentré tout un match et marquer sur corner à chaque rencontre ( il rit). Je vais essayer mais je ne vous promets rien ( il rit). Et puis, je suis plus rapide que les deux autres, hein ( il rit) « .

La sélection togolaise (voir encadré) peut également jouer en sa défaveur :  » Cela m’apporte de l’expérience mais chaque fois que je me déplace, le coach est inquiet. Je suis tributaire des vols et je rentre souvent en retard. Cela joue contre moi mais une sélection ne se refuse pas ! « .

Propos corroborés par Riga :  » Je l’ai vu donner l’échauffement à l’équipe nationale. Là-bas, il est charismatique, il ne manque pas de personnalité. Mais d’un autre côté, ces déplacements ont déjà provoqué deux fractures de fatigue « .

Le changement de position de Duarte a relancé le Togolais :  » Cela me libère une place… « , affirme Nibombe. Pour combien de temps ?  » J’ai repris du temps de jeu et je pense avoir accompli mon job. Je suis dans la moyenne. Cependant, j’ai l’impression d’être en fin de cycle à Mons. On me connaît un peu trop bien. En juin, j’arrive en fin de contrat et pour moi, comme pour le club, il vaudrait mieux que j’aille voir ailleurs « .

par stéphane vande velde – photos: reporters/ buissin

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire