» Certains dirigeants du Standard ont été petits « 

Membre des laissés-pour-compte de Sclessin, l’attaquant camerounais revient sur une année et demi en rouche où il est passé par tous les états d’âme.

A quoi ça tient ? Sans une parade exceptionnelle de Thibaut Courtois à cinq minutes de la  » finale des play-offs « , Aloys Nong rentrait dans la légende du Standard comme le buteur décisif du 11e titre du club principautaire. Un réflexe détonnant sur une frappe à l’entrée du rectangle refermera le livre d’histoire. Six mois plus tard, l’ex-joueur malinois est relégué aux oubliettes. Plus une minute de jeu depuis début octobre et un petit but pour près de 300 minutes. Les quatre réalisations et trois penalties provoqués qui faisait de lui l’homme en forme du sprint final de la saison dernière sont déjà loin.

Vendredi passé, quand nous rencontrons le joueur camerounais en plein c£ur de la Cité ardente, on a en face de nous quelqu’un rempli d’amertume et d’interrogations sur ses derniers mois en rouche.

DD et Sergio

31 juillet 2010, le Standard te décroche de Malines pour plus d’un million d’euros. Mais tu n’exploseras qu’en fin de championnat. Comment expliques-tu ce retard à l’allumage ?

Nong : A Malines, j’avais pour habitude d’évoluer à la pointe de l’attaque avec David Destorme dans mon dos. Au Standard, j’ai dû apprendre à jouer derrière Mémé Tchité et je dois admettre que j’ai mis pas mal de temps à assimiler ce rôle. Je ne crois pas non plus que j’ai bénéficié de beaucoup de crédit. Si je ne marquais pas après un ou deux matches, je me retrouvais sur le banc alors que pour prester, un attaquant à besoin de se sentir soutenu par ses équipiers et par son staff. Tout en restant modeste, je crois avoir démontré ma valeur sur la fin et contribué au superbe parcours durant les play-offs. Même si le public du Standard n’a jamais vu le Nong de Malines.

Est-ce qu’aujourd’hui tu repenses encore à cet arrêt de Courtois ?

Il faut être honnête, Genk méritait largement d’être champion. C’est l’équipe qui avait été la plus régulière. On avait été les meilleurs en play-offs mais les Limbourgeois se sont montrés plus performants sur l’ensemble de la saison. Les priver du titre aurait été un coup de poignard. Quant à cet arrêt de Courtois, oui j’y repense. J’ai regardé les images plusieurs fois et je crois qu’avec un gardien normal, le ballon se serait logé au fond des filets. Je pense aussi que mon statut au Standard aurait été tout autre… Et est-ce que je ne méritais pas plus de crédit après ce que j’avais montré en fin de championnat ?

Tu as reçu des explications par rapport au fait que tu sois réserviste lors du match à Genk et en finale de Coupe alors que tu étais en pleine bourre ?

Sergio Conceiçao est venu me trouver après la victoire en Coupe. Il n’est pas du genre lèche-botte et quand il me dit que j’ai les qualités pour jouer au Standard, je le crois. Mais il m’a aussi expliqué qu’il fallait faire jouer certaines personnes, sans rentrer davantage dans les détails.

Quel était l’état de tes relations avec Dominique D’Onofrio ?

Il était un papa pour les joueurs, il nous faisait la bise, donnait des surnoms type  » fifille  » à ses gars. La relation que j’ai eue avec lui était d’abord sportive, puisque c’est lui qui voulait m’attirer au club, qui croyait en moi. Il pouvait compter à ses côtés sur Sergio avec qui tu pouvais te bagarrer mais qui, par son discours, son expérience, te galvanisait ou te rassurait sur ta situation. Et il sentait les coups. Avant le match à Anderlecht où je marque deux fois, il m’avait pris à l’écart et m’avait dit d’oublier pour une fois mon travail défensif et de jouer au ballon. Il était convaincu que j’allais marquer.

Tu comprenais les critiques adressées à DD ?

Je suis ni un pro, ni un anti-Dominique, mais je trouve que les critiques envers lui ont parfois été trop dures. Pendant les play-offs, on a été très bon et finalement qu’est-ce qui compte ? Il n’y a pas longtemps, j’ai pris un avion pour le Cameroun dans lequel se trouvait Dieumerci Mbokani. Il me disait qu’à Anderlecht aussi on se préparait pour le sprint final. Tout le monde a ciblé ses objectifs. L’important, c’est de se placer dans le top 3, ne pas être largué. Finir premier de la phase régulière puis s’effondrer, cela ne rapporte rien.

Riga

Cette saison, ton statut s’est encore détérioré puisque tu es définitivement sorti de l’équipe dès octobre.

La mentalité de certaines personnes de la nouvelle direction m’a fortement déçu. Avec la précédente direction, on ne te disait rien, on ne créait pas de faux espoirs, mais tu restais concentré car tu savais que tu allais recevoir une chance. La façon dont j’ai été écarté du groupe cette saison, ça m’a fait rigoler… Il y a certaines choses que je garde pour moi, même si je trouve le comportement de certains dirigeants très petit. C’est à Anderlecht, quand je me suis retrouvé 19e homme, que j’ai compris que pour moi c’était terminé au Standard.

As-tu demandé des explications à José Riga ?

A quoi cela aurait-il servi ? Il n’y avait aucune logique dès le moment où l’on te dit qu’on compte sur toi avant de te mettre en tribune quelque temps plus tard. Si je dois trouver une réponse à tout ça, je dirais que l’actuelle direction veut copier ce que Lucien D’Onofrio a fait avec les Witsel, Fellaini, Carcela et donc donner la priorité aux jeunes pour en tirer profit. Apparemment, à 28 ans, je suis déjà un vieux.

Quel est ton avis sur Riga comme coach ?

Il a amené sa touche, le ballon circule mieux, il y a de la variété dans le jeu. Mais pour moi, c’est davantage la personnalité, le charisme, d’un coach qui est important. Et sur ce point, je ne peux pas être satisfait. Je n’ai jamais eu d’explication valable sur ma mise à l’écart. Il m’aurait dit :- Aloys, t’es mauvais. J’aurais accepté. Mais ça n’a jamais été le cas. Aujourd’hui encore, je ne comprends pas. Depuis le match à Anderlecht, j’ai décidé de ne pas me prendre la tête. Surtout qu’à partir du match au Beerschot, on m’avait dans le viseur. Ce soir-là, je rate le 1-2 en me présentant seul devant le gardien dans les dernières minutes. C’est cette phase qui m’a condamné. Berrier a connu le même sort en ratant son penalty face au Cercle.

On ne condamne pas quelqu’un sur une action..

Pendant plusieurs semaines, certains dirigeants ont évoqué les deux points perdus au Beerschot n’oubliant pas de rappeler mon occasion loupée. Ce n’était pas anodin.

Amertume

Tu as le sentiment que la direction influençait certains choix de Riga ?

Tout ce que je peux dire c’est que quand il est arrivé, il m’a regardé dans les yeux et m’a dit :- Aloys, je compte sur toi. Il me donnait l’impression d’être honnête sur le coup. Par après, je n’ai jamais été vers lui pour lui demander des explications, je continuais à bosser tout en sachant que je ne recevrais plus de chance.

Tu avais déjà fait part de ton mécontentement dans la presse avant le match face à Helsinborg.

Oui, sauf que mes propos avaient été déformés. Le titre paru dans la presse était  » Si je ne joue pas ce soir, je pars  » alors que j’avais dit  » Si je ne joue pas ce soir, j’aurai compris « . Le journaliste avait d’ailleurs reconnu auprès de Pierre François que le titre avait été retouché par son rédacteur en chef. Par respect pour les supporters, je n’aurais pas pu dire pareille chose.

Comment analyses-tu ta situation ?

La saison dernière était déjà difficile pour moi mais j’ai toujours bossé en espérant recevoir ma chance. Je n’ai jamais eu facile durant ma carrière ; ce n’est donc pas aujourd’hui que je vais baisser les bras. Quand tu as connu le Brussels, le reste te semble bien plus simple ( il rit). Je suis très content de voir que l’intérêt pour ma personne est resté conséquent en Belgique et ailleurs. Je ne cache pas que j’aimerais aller voir à l’étranger. Pour que je reste en Belgique, il me faut un club avec un projet intéressant surtout après avoir connu le top avec le Standard. Et le club qui va m’accueillir va trouver un joueur qui a faim de ballon depuis un an et demi, même si tout ne fut pas noir.

On perçoit tout de même de l’amertume dans ton discours !

Oui, parce que je n’ai jamais pu montrer le vrai Nong de Malines mis à part le court épisode des play-offs. Je le répète, je n’ai pas eu le même soutien moral que d’autres. Mémé, par exemple, qui est mon ami, qui est un super joueur, a pu rester dans l’équipe malgré le fait qu’il ne trouvait pas le chemin des filets en début de saison. Et je pense qu’il mérite ce statut d’intouchable pour tout ce qu’il a donné au Standard. Moi, j’aurais aimé être davantage considéré. Avoir la confiance de son coach, ça change beaucoup de choses pour un attaquant.

Tu n’as jamais douté de tes qualités ?

Jamais, même pas au Brussels. J’ai fait le bilan après un moment et je me suis dit que je devais descendre d’un cran car je n’étais pas préparé à la D1. Dès que je me suis retrouvé à Courtrai en D2, ça a directement fonctionné. Tout ce que je veux aujourd’hui, c’est travailler avec des gens  » vrais « . Je sais que le foot, c’est un business, mais il y a des limites. Je suis quelqu’un de sensible et ce qui m’est arrivé m’a marqué même si je sais qu’il y a des choses bien plus graves dans la vie.

PAR THOMAS BRICMONT – PHOTOS : IMAGEGLOBE

 » Est-ce que je ne méritais pas plus de crédit après ce que j’avais montré en fin de championnat ? « 

 » Si je dois trouver une réponse à ma mise à l’écart, je dirais que l’actuelle direction veut copier ce que Lucien D’Onofrio a fait avec les Witsel, Fellaini, Carcela. « 

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