» Ce Standard reste un point d’interrogation »

Arrivé en poste en janvier, il a réussi son premier objectif (atteindre les play-offs) et débute ce mini-championnat avec encore quelques incertitudes.

On lui a laissé le temps de s’installer, ne le cueillant pas au creux de la mini-polémique de son arrivée. L’heure des play-offs arrivant, il nous semblait important, intéressant et quasiment utile de confronter l’entraîneur du Standard avec les premiers mois de ce qu’on peut appeler le gouvernement Riga II.

Vos temps de passage sont bons mais attendus vu la faible opposition. Est-ce que vous espériez cela ou mieux ?

JoséRiga : Les quatre victoires à domicile, c’est important. C’est le Standard, on sait ce que représente le public. Les opposants étaient tous concernés, avec le danger que cela peut comporter. A l’extérieur, on aurait dû revenir avec plus et à Malines, il s’agissait d’un contexte particulier avec la défection d’Imoh Ezekiel en début de match, ce qui ne nous a jamais permis d’accrocher le fil de la rencontre. Le bilan aurait pu être excellent mais…il est bon.

On a l’impression qu’on ne sait toujours pas où on en est avec ce Standard-là, ni à quoi s’attendre…

Je comprends qu’on ait cette perception-là. C’est un peu à l’image de toute la saison faite de grands creux et de bonnes périodes, pas toujours synonymes de beau jeu mais de résultats. C’est un peu le Standard de cette année. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une équipe nouvelle. On a pu surprendre à certains moments mais ce Standard reste encore un point d’interrogation. La seule certitude, c’est que l’esprit et l’envie sont présents, ce qui constitue déjà une garantie importante dans un sport collectif. La vraie valeur de cette équipe, on va la connaître en play-offs car dans cette compétition courte, on n’a pas le droit à l’erreur.

En étant quatrième, le Standard est finalement à sa place ?

J’aimerais dire non. Mais si je regarde le parcours et la qualité des équipes devant nous, et surtout le fait que ces équipes ont une vraie cohésion de jeu, ce n’est pas loin de la vérité. Mais j’espère forcément me tromper.

 » On ne peut pas juger en 8 semaines un travail de 20 ans  »

Est-ce que le statut d’outsider du Standard vous plait ?

On ne parle de statut idéal qu’après le déroulement des play-offs. Il faut simplement se rappeler d’où vient le Standard. Quand on occupe une position de 12e et même si on finit 4e – et je ne suis pas le résultat unique de cela ; je n’ai pas la prétention de dire que c’est uniquement grâce à moi car d’autres ont également fait le chemin – c’est qu’il y a une raison à cela. Dire qu’on n’est pas favori, cela me paraît normal vu la production de toute la saison.

Il n’y a pas que pour l’équipe que les play-offs serviront de test de passage. Pour vous aussi puisque vous n’avez pas encore rencontré de grandes équipes et qu’on vous ressort tout le temps vos play-offs de 2012.

Je ne le ressens pas comme cela. Pour un coach, le test est permanent. Que tu rates un match dit facile ou ton entrée en play-off ! Il y a tellement d’occasions lors desquelles on peut être jugé ! Je veux juste aller le plus loin possible dans cette compétition. Mais pas en me disant qu’on va vraiment savoir qui est Riga. Je pense que j’ai fait des choses suffisamment significatives avant pour savoir qui est Riga.

Mais vous n’avez jamais pu prouver votre valeur dans une grande équipe sur le long terme…

C’est vrai. Mais les play-offs ne sont pas du long terme. C’est encore du plus court terme…

Si vous vous loupez une deuxième fois dans les play-offs, votre réputation risque d’être faite…

Ma carrière ne se résume pas à ces play-offs. On ne peut pas juger en huit semaines un travail de vingt ans !

Vous êtes-vous rendu compte en acceptant le poste d’entraîneur qu’il s’agissait d’un défi casse-gueule étant donné qu’Ivan Vukomanovic restait sur un bon bilan ?

Bien sûr, je ne suis pas fou. Le constat était là. J’ai été surpris du moment et de la demande et c’est en discutant avec les personnes (NDLR : Bruno Venanzi et Axel Lawarée)que tu réalises le pourquoi. J’étais parfaitement conscient que j’avais plus à perdre qu’à gagner mais certaines personnes ont estimé que je pourrais être l’homme de la situation.

C’était d’autant plus un cadeau empoisonné qu’on vous demandait d’allier résultats et manière…

Je ne pense pas qu’on m’ait demandé du beau jeu. Ils ont demandé plus de régularité et de stabilité dans les prestations de l’équipe et au sein d’un match. Quand tu arrives sur un projet de trois mois, comment veux-tu mettre quelque chose en place ? Il y a des priorités dans la mission qui m’a été donnée. La première, c’est de faire des résultats et de garantir une place dans les play-offs en maintenant un cap.

Première mission réussie. Ici, on me demande de faire des play-offs consistants. Après, tu ne peux pas faire une équipe joueuse du jour au lendemain. C’est dans ma nature d’essayer de produire du jeu mais il ne faut pas non plus essayer d’avoir des exigences qui ne cadreraient pas avec le profil du groupe… (Il fait une pause)

Cependant, j’estime que les résultats s’acquièrent par le jeu, pas seulement par l’investissement physique. Aujourd’hui, je suis à la tête d’une équipe souvent chamboulée et trouver de la cohésion tout de suite n’est pas évident. C’est pour cela que je préfère le résultat à la manière même si je sais que pour être consistant sur la durée, il faut la manière aussi.

 » S’il y a un joueur que je ne voulais pas perdre, c’était bien Imoh Ezekiel  »

Pourtant, plus qu’un autre, vous serez jugé sur le jeu. Cela ne risque-t-il pas de vous énerver ?

Non, c’est bien de voir que l’attente au niveau du jeu est importante quand j’arrive quelque part. Cela signifie que j’ai su le faire ailleurs. Mais vous vous trompez en disant que je serai jugé là-dessus. Je le serai sur les performances que j’atteindrai avec l’équipe.

Etait-ce adéquat de demander à Vukomanovic de rester T2 ?

L’idée ne venait pas de moi. De mon côté, rien n’a été préparé.

Mais vous n’avez pas eu la possibilité de dire que ce n’était pas une bonne idée ?

Je ne suis pas comme cela. J’ai souvent débarqué dans mes clubs sans prendre de staff. Moi, je fais confiance aux gens et travaille avec ceux qui sont en place. L’idée de base, c’était celle-là.

Mais si vous aviez été dans sa situation, auriez-vous accepté de redevenir T2 ?

La question ne se pose pas puisque je n’aurais pas été à sa place ; je n’aurais pas commencé la saison comme T2.

Comment avez-vous procédé en arrivant ?

J’ai essayé d’agir de manière intelligente, en ne changeant pas ce qui avait bien fonctionné mais en apportant des ajustements nécessaires pour être compétitif. Dans un premier temps, il fallait surtout établir une forme d’osmose et préparer l’entrée dans les play-offs. Après, parler de ce que j’ai apporté, cela voudrait également dire parler du prédécesseur, ce que je ne peux pas faire. Je ne le connais pas.

Comment avez-vous géré l’accueil relativement froid des supporters et de la presse qui ne comprenaient pas bien le départ de Vukomanovic ?

Tu es coach, on fait appel à toi et on t’explique la situation. A partir du moment où tu dis oui, tu deviens responsable. Forcément, la situation n’était pas facile à gérer mais j’estime l’avoir bien fait. Je me disais que les gens allaient vite comprendre si je travaillais pour le club ou pour moi-même.

Et n’avez-vous pas eu une impression de remake de la fin de saison 2011-2012 avec la blessure d’Ezekiel ?

Le lien est inévitable mais il ne faut pas se focaliser là-dessus car c’est une autre situation et période. Se passer d’un joueur pareil, c’est toujours délicat…surtout à l’entrée des play-offs. Il y a des choses que tu ne peux pas maitriser. S’il y a un joueur que je ne voulais pas perdre parce qu’il a un profil unique, c’était bien lui. J’avais dit la même chose sur Igor De Camargo car nous n’avons qu’un pivot également. Forcément, on devra trouver une parade et elle viendra du collectif. Je ne peux pas pousser quelqu’un à jouer la profondeur s’il n’a pas ça dans son jeu.

 » Pourquoi tant de médians ? Je ne peux pas l’expliquer  »

Un de vos premiers changements a consisté à remettre Julien de Sart dans l’équipe. Pourquoi ?

Julien est un de rares dans l’entrejeu à voir long. Il a une précision dans la passe et fait respirer le jeu. Il a aussi un volume de course et je trouvais que cela pouvait être une bonne complémentarité avec Adrien Trebel.

C’est le secteur de jeu où le choix est le plus compliqué ?

C’est bien d’avoir plusieurs possibilités. Ils sont tous différents et je sens qu’ils deviennent tous compétitifs. Des choix seront posés par rapport à l’opposant, par le fait qu’on joue à domicile ou à l’extérieur. Mais c’est vrai que si on regarde l’équipe en place il y a un an et demi où les choses étaient établies dans ce secteur, ici ce n’est pas le cas. Beaucoup de choses expliquent qu’on n’ait pas encore la formule qui permet de passer à travers tout. Ce n’est pas en soi un problème, il faut simplement que cela devienne une force : jouer sur l’aspect fraîcheur et motivation de tous.

C’est une erreur de recrutement d’avoir fait venir autant de joueurs pour remplacer Vainqueur ?

Je ne peux pas expliquer l’historique puisque je n’étais pas partie prenante. Aujourd’hui, on a des joueurs qui ont des réelles qualités et moi je dois faire des choix parmi ce potentiel. Pourquoi il y a tant de joueurs dans ce secteur ? Je ne peux pas l’expliquer.

Dans ce secteur, Trebel a pris une réelle ampleur…

Il est relativement complet, ce qui lui permet de remplir plusieurs tâches. Il peut jouer dans un 4-4-2 ou un peu plus haut dans un 4-2-3-1 ou dans un 4-4-1-1. Si je l’associe avec Julien de Sart, il doit penser à sa tâche défensive. Moins quand il joue avec Ricardo Faty. Je pense qu’il doit conserver cet aspect dynamo tout en étant encore plus efficace par moments.

En mettant Van Damme sur le banc, avez-vous voulu montrer que personne n’est intouchable ?

Non, on ne donne pas de leçons pour donner des leçons. J’ai vu dans Andrade un joueur de qualité. On a un noyau et, par moments, tout le monde se tient de très près. La prestation d’Andrade contre Mouscron m’a conforté. Mais je ne joue pas avec des démonstrations de force.

Mais c’est le capitaine. C’est toujours risqué de bouger les équilibres de vestiaire…

Non, Jelle sait que je le respecte. Je fais cela parce que je me dis qu’Andrade peut m’apporter certaines choses. Et je suis content de voir que Jelle revient en puissance. Il y a toujours un risque dans un choix mais si ton sentiment du moment te dicte cela, tu le fais.

Pourquoi avoir conforté Thuram dans les buts alors qu’il ne vous avait pas convaincu à Charlton ?

A Charlton, je suis arrivé face à une situation établie. Le gardien anglais, Ben Hamer, restait sur de bonnes prestations et il ne fallait pas casser cette spirale. Il ne fallait pas prendre un risque inutile. Ce n’est pas sur la valeur de Thuram que j’avais pris cette décision. Et je me retrouve dans la même situation au Standard. Avec Thuram dans le rôle inverse. C’est la preuve que je suis cohérent puisque j’ai agi de la même façon qu’à Charlton.

 » Il ne faut pas demander à Bia de tacler trois fois par match  »

La solution devant devrait venir de trois joueurs : Louis, Carcela et Mujangi Bia. Comment expliquer que ces trois joueurs n’aient pas encore tout donné ?

Lors de mon premier passage, je me rappelle que Geoffrey Mujangi Bia avait déjà réussi de gros matches sur la scène européenne, notamment, avant de connaître des blessures. J’ai retrouvé quelqu’un très concentré sur son sujet, très déterminé. J’ai vu son investissement, sa réussite, son implication et il doit être en permanence à la recherche de cela. Il peut être décisif et il l’a déjà été d’ailleurs.

Comment expliquez-vous ce désamour avec le public ?

C’est un style. Il ne faut pas lui demander de tacler trois fois par match. Le public veut qu’il donne le max et j’ai l’impression que c’est ce qu’il fait. C’est un problème qui ne restera pas un problème longtemps.

Le fait qu’il ne dégage aucune émotion peut-il provoquer ce désamour ?

Moi non plus, je ne suis pas extravagant. Il ne faut pas juger les gens là-dessus. Chacun a sa personnalité. Tant que sur le terrain, il est rentable…

Carcela est-il trop inconstant ?

Après toutes ses blessures, il est revenu et a enchaîné beaucoup de matches. Lui aussi est à la recherche de son meilleur niveau. Il doit accrocher le bon rythme. Mais il y travaille tout en restant toujours un joueur imprévisible. Il va finir par récolter ce qu’il mérite.

Louis devait devenir la nouvelle star. Comment expliquez-vous qu’il n’ait pas encore percé ?

Il peut être décisif car il a des qualités naturelles au-dessus de la moyenne mais il faut les intégrer au jeu. C’est un joueur d’instinct et il faut inscrire cette forme de liberté sur le terrain dans une formule collective.

Ce n’est pas assez un joueur de collectif ?

Mais ce n’est pas volontaire. C’est sa nature ! On doit pouvoir garder ce côté imprévisible, insouciant.

Quels sont vos rapports avec Roland Duchâtelet ?

Je peux les qualifier de… rares. On a parlé une ou deux fois au téléphone.

Sans rancune ?

A chaque fois qu’il m’a fait confiance, je crois qu’il a été satisfait. Mes interlocuteurs sont davantage Axel Lawarée et Bruno Venanzi et je pense qu’il leur fait confiance.

On ne pouvait terminer cet entretien sans vous demander vos impressions sur Mons et Visé, deux clubs au bord de la disparition…

Visé, ce n’est pas un problème de gestion présidentielle foireuse. Guy Thiry a dû batailler seul pendant de longues années jusqu’à cette proposition de reprise. C’est malheureux pour lui car c’était un président de qualité. Et comme c’est proche de chez moi, ça me touche. Quant à Mons, c’est dommage qu’ils n’aient pas eu le coup de main au moment où ils le désiraient pour finir le stade.

PAR STÉPHANE VANDE VELDE – PHOTOS: BELGAIMAGE/ JANSENS

 » Vous vous trompez en disant que je serai jugé sur le jeu. Je le serai sur les performances que j’atteindrai avec l’équipe.  »

 » Je ne donne pas de leçons pour le plaisir de donner des leçons. Je ne joue pas avec des démonstrations de force.  »

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