Ce qui ne va plus

Aucune unité, ni sur le terrain ni dans la coulisse et demain, c’est l’importantissime joute au Rapid Vienne !

Nous n’oserions pas miser une thune sur les chances de qualification du RSCA au Rapid Vienne, demain. Pour ce faire, la répétition générale face au Sporting Charleroi s’est révélée un bide de dimension. Après une deuxième mi-temps porteuse d’espoirs, une semaine plus tôt, au Racing Genk, les Mauves sont à nouveau retombés dans leurs travers devant les Zèbres.

Pas de finition, un football à l’emporte-pièce et, plus grave encore, une absence totale de détermination et d’esprit de groupe. On en a eu un aperçu cinglant à la fin du match, d’ailleurs, quand Daniel Zitka, pro jusqu’au bout des ongles, dut faire des pieds et des mains pour obliger ses partenaires à saluer le public, comme ils le font d’habitude. Un message qui n’a pas été reçu cinq sur cinq par tous, et plus particulièrement Ahmed Hassan qui s’est fait longuement prier avant de revenir furtivement sur le terrain. L’Egyptien allait, au demeurant, encore se singulariser par la suite en négligeant le boycott des journalistes qui avait été décidé plus tôt dans la semaine par les joueurs. Il n’était pas au courant… Ce manque de communication est un véritable fléau au Parc Astrid, mais ce n’est pas le seul dysfonctionnement.

Une communication hoquetante

La communication pose toujours autant problème au sein du club. Non seulement sur le terrain, où les joueurs ne sont que trop rarement sur la même longueur d’ondes, mais aussi ailleurs. Lors de sa courte période anderlechtoise, au début de ce millénaire, l’ancien secrétaire général de l’Union Belge Alain Courtois s’était d’ailleurs ému de cette réalité. A ses yeux, il importait au plus vite de dégager un budget afin de nommer un responsable à ce poste. A l’époque, toutefois, il s’était heurté à une fin de non-recevoir de la part de la direction et du président Roger Vanden Stock lui-même, qui avait le sentiment que les 75.000 euros annuels requis pour cette fonction pouvaient être plus intelligemment dépensés. Eu égard à l’absence de cette voix unique, il est quand même frappant de constater à quel point, dans les hautes sphères du club, on s’emmêle fréquemment les pinceaux. Et l’homme fort du RSCA l’a d’ailleurs vérifié à ses dépens naguère.

Après le match à Genk, indigné par la teneur des articles faisant état du renvoi imminent du coach, il n’avait pas hésité à fustiger la presse, observant que cette option n’avait jamais été envisagée. Selon ses dires, la veille du déplacement au Limbourg, l’ensemble des joueurs avait d’ailleurs été avisé de la volonté du club de poursuivre sa route avec l’entraîneur en place. Le hic, c’est qu’au terme du match au Racing, Olivier Deschacht avait tenu un tout autre langage, en laissant entendre que le noyau désirait tout de même savoir à quoi s’en tenir avec exactitude concernant la position de son mentor. Des paroles qui allaient évidemment à l’encontre des propos de RVDS. Qui, soucieux de se rattraper, ne trouva rien de mieux à dire que le français d’ Oli n’était pas au point. De quoi provoquer un nouveau tollé chez le joueur mais aussi auprès de ses partenaires, qui n’avaient manifestement pas saisi le message non plus.

Comme si cette commotion-là n’avait pas encore suffi, les plumitifs auront eu droit à une nouvelle couche le lendemain. Ce coup-ci, c’est Nicolas Frutos qui se fit le porte-parole de tous en affirmant que jusqu’au match retour au Rapid Vienne, ses coéquipiers et lui-même allaient observer un silenziostampa. L’embarras n’en fut que plus grand, dans la foulée, lorsqu’il apparut que Serhat Akin et Jonathan Legear avaient été convoqués tous deux à un point presse ce jour-là. Fallait-il supprimer cette entrevue, négociée la veille, ou au contraire la maintenir en dépit des dispositions prises par le groupe ? Au bout de palabres entre le manager, Herman Van Holsbeeck, et le responsable de la presse, Pierre Desmet, l’arrangement fut maintenu. Mais une fois de plus, tout ce remue-ménage fit désordre. Le capharnaüm se poursuivit encore en milieu de semaine avec un huis clos des séances de préparation, exception faite de dix minutes le premier jour, histoire de mettre chacun au parfum. Supprimer les indésirables autour du terrain et resserrer les rangs en interne, telle était la volonté. Contre Charleroi, vu la réaction d’Hassan, il est apparu clairement que tout restait à faire en matière de communication.

Une incompréhension latente à la direction

Ces dernières années, le RSCA est devenu tant et plus une affaire de famille. D’un côté, il y a là le clan Vanden Stock, représenté par le chairman du club lui-même et par ses filles, Julie et Claire, qui ont pris la relève de leur mère, Kiki, à la tête du fanshop. Les deux gendres sont impliqués aussi, au quotidien, au sein de l’entité. Stéphane Boillat est en charge de la sécurité et de l’infrastructure du stade ConstantVandenStock et Didier Desmet (le fils de Pierre, le responsable presse) est ICT Manager ( Information and Communication Technology) au sein du département communication et presse.

D’autre part, il y a la branche formée par la famille Collin, avec Philippe (le cousin de RVDS) au poste de secrétaire général du club et son beau-fils, Jacques Lichtenstein, qui exerce le métier d’agent de joueurs. D’une branche à l’autre, tout ce beau monde n’est évidemment pas logé à la même enseigne au plan financier. En sa qualité d’agent, le dernier nommé fait, bien sûr, figure de privilégié dans cet aréopage. Mais ses compétences – réelles – ne sont pourtant utilisées qu’au compte-gouttes. Parce qu’il est le beau-fils de son beau-père ?

Hormis l’un ou l’autre transferts sortants, comme Tristan Peersman – bon débarras – ou Vincent Kompany – excellente affaire – l’homme, à l’analyse, n’a guère été sollicité en matière d’importations. La filière sud-américaine n’est pas de son ressort, l’africaine non plus et, en Europe, les zones d’investigation sont réparties entre les différents membres de la cellule scouting. Dans ces conditions, on n’a fait appel à lui que de manière très sporadique ces dernières années. Lorsqu’il n’y avait plus moyen de faire autrement… Mais grâce à son intervention, deux situations ont quand même été débloquées dans un passé récent.

Il y a d’abord eu la venue d’ Ahmed Hassan, pour laquelle il a intercédé et, récemment, le dossier concernant Jan Polak. Malgré une cour assidue de la part du club bruxellois, on se souviendra que l’international tchèque s’était longtemps fait désirer. Après des tentatives de racolage infructueuses de Daniel Zitka et même Jan Koller, c’est Lichtenstein qui est arrivé à finaliser le dossier. Et ce, grâce à ses bons contacts avec l’entraîneur du FC Nürnberg, Hans Meyer, qui était en charge autrefois au FC Twente, au moment où deux Anderlechtois – Chris De Witte et Kurt Van de Paar– furent transférés là-bas. A l’époque, Lichtenstein était parvenu à convaincre le mentor allemand du bien-fondé de ces acquisitions. Ce coup-ci, avec d’autres arguments, il est arrivé à ses fins également en soutenant que le joueur avait davantage d’avenir au Parc Astrid que dans le sud de l’Allemagne. Ce qui s’est d’ailleurs vérifié sur le terrain puisqu’à l’heure des ultimes négociations, Polak n’était plus que réserviste dans son club. Une situation de nature à lever les derniers doutes sur un passage en Belgique. Même si le médian n’a pas encore fait l’unanimité autour de ses prestations au RSCA, le travail effectué dans la coulisse par le manager lui a valu une reconsidération.

Au point que son beau-père songe à lui pour reprendre le flambeau de Serge Trimpont en Côte d’Ivoire . Ce dernier, qui faisait office d’intermédiaire entre le Sporting et sa filiale à Abidjan, le FC Bibo, a effectivement stoppé ses activités. Du coup, il y a une place à prendre là-bas et Collin ne serait pas réfractaire à ce qu’elle revienne à son gendre. L’AmSud pour lui, l’Afrique pour son beauf, ce serait bien évidemment une manière de peser de tout son poids sur la politique sportive des Mauves. Ce qui n’est pas du goût de tout le monde…

Un encadrement inadéquat

Il y a, assurément, quelque chose de paradoxal au stade Vanden Stock. Autant, en effet, on y redouble d’efforts pour faire converger les jeunes talents étrangers là-bas, autant on y fait preuve de désinvolture après coup. Il y a 20 ans, Anderlecht s’était intéressé pour la première fois au blé en herbe africain. Et, en particulier, aux coming men nigérians qui commençaient à faire fureur à l’époque. Un premier gros coup fut ainsi réalisé, en 1987, avec l’acquisition de Philip Osundu, sacré meilleur joueur du Championnat du Monde des moins de 17 ans au Canada cette année-là. L’attaquant eut toutefois tôt fait de se perdre dans les brumes de l’oubli au Sporting. A l’époque, cet échec avait été imputé à l’inexistence d’une véritable structure d’accueil. Un problème auquel la direction se jura de remédier.

Deux années plus tard, à la faveur de la même compétition, ce furent trois Ghanéens que les Mauves avaient dans le viseur : Isaac Asare, Yaw Preko et Nii Lamptey Odartey. Du trio, c’est l’embrigadement de ce dernier qui s’avéra le plus compliqué. Le garçon, âgé de 15 ans à peine, fut l’objet de bon nombre de sollicitations. Pour dribbler tout le monde, le club, par l’entremise de son manager de l’époque, Michel Verschueren, avait eu une idée géniale : envoyer Stephen Keshi sur place afin de le ramener. Kesh n’était évidemment pas n’importe qui. Capitaine des Super Eagles nigérians, et stopper de classe au Parc Astrid, il était la référence à son poste en Afrique, au même titre qu’un Roger Milla l’était à l’attaque. Le grand Stephen profita alors d’un de ses retours au pays pour passer la frontière ghanéenne et ramener le joueur dans ses bagages. Auparavant, il avait pris soin de lui concocter un passeport où le jeune homme répondait au nom de Keshi Junior. Un gars de 27 ans voyageant avec un fiston de 15, il fallait tout de même le faire. Au Parc Astrid, dans la foulée, tout le monde cria victoire suite à ce magnifique pied de nez adressé à la concurrence.

Le plus heureux de tous n’était d’ailleurs autre que l’entraîneur, Aad de Mos, à qui il tardait de lancer dans la bataille cet énorme talent. Mais Lamptey, à l’instar d’Osundu avant lui, courut davantage la prétentaine que le ballon, faute d’encadrement adéquat. Et son aventure ne fut, elle aussi, que de courte durée. Par la suite, Anderlecht voulut rectifier le tir avec James Obiorah. Sans succès. De fait, le seul qui répondit vraiment à l’attente fut le jeune Célestine Babayaro que le manager André Denul barricada un jour dans sa chambre d’hôtel afin qu’il ne puisse pas prendre langue avec d’autres personnes. Ce fut un coup dans le mille, favorisé sans doute par les circonstances. Privé de back gauche digne de ce nom, Johan Boskamp n’hésita pas à l’honorer de sa confiance, alors qu’il n’avait que 17 ans à peine.

Un coach qui détruit des espoirs

Le rôle de l’entraîneur est, évidemment, souvent crucial dans l’épanouissement d’un joueur. Et, dans ce cadre-là, Vercauteren n’a pas marqué que des bons points. Au départ, son feeling lui avait valu pas mal de partisans dans la maison. D’emblée, il s’était effectivement montré réticent quant à l’avenir de garçons comme Lukas Zelenka ou encore Yasin Karaca, pour ne citer qu’eux, et il avait vu juste. Depuis lors, toutefois, certains départs, à son instigation, sont restés en travers de la gorge. Il y a d’abord eu le cas Walter Baseggio, suivi d’ Anthony Vanden Borre et, récemment, celui de Dieumerci Mbokani, dont on dit que c’est un des clous de son cercueil de coach. Dans les hautes sphères du club, on enrage aujourd’hui de s’être séparé du joueur qui, pour toutes sortes de raisons, ne faisait pas partie des priorités de coaching. Sa réussite au Standard fait d’autant plus mal que les Mauves n’avaient pas lésiné sur les moyens, une fois encore, pour attirer celui qui est considéré comme le meilleur jeune Congolais du moment.

Appartenant à la fois au président du Tout-Puissant Mazembe de Lubumbashi ainsi qu’à un industriel de la capitale, Kinshasa, Mbokani était en réalité promis au Racing de Strasbourg. Grâce à l’intervention du leader de la cellule scouting du RSCA, Werner Deraeve, cet accord fut annihilé in extremis. Pour éviter toute mauvaise surprise, celui-ci préféra revenir en Belgique, au départ de Lubumbashi, via l’Afrique du Sud, afin d’éviter une escale à Kinshasa, où certains auraient pu s’opposer à la nouvelle destination du joueur. Une somme d’efforts qui appelle bien entendu des questions quand on voit ce qu’il est advenu du joueur.

Au Sporting, aujourd’hui, d’aucuns manient les calculettes et se rendent compte que s’ils ont gagné de l’argent grâce au coach en place, ils en ont perdu pas mal aussi. Non seulement en matière de transferts mais aussi sur le terrain où certains ne lui ont pas pardonné son coaching plus qu’approximatif d’il y a un an contre Lille et, surtout, l’AEK Athènes à domicile. Et ça, c’était à une époque où les Mauves étaient bel et bien qualifiés pour la phase de poules de la Champions League…

par bruno govers- photos: reporters- buissin

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