« Ce qu’on mérite! »

Pour le demi défensif, le Sporting ne pouvait prétendre à plus cette saison.

Grâce à leur succès, les Trudonnaires ont enlevé aussi les dernières illusions d’Anderlecht dans la course au titre ou à la deuxième place, synonyme de passerelle vers la juteuse Ligue des Champions. A moins d’un miracle, les pensionnaires du Parc Astrid devront se contenter, la saison prochaine de la Coupe de l’UEFA.

Yves Vanderhaeghe: Mathématiquement, tout est encore jouable, évidemment. Et je suis convaincu que Bruges et Genk perdront encore des unités au cours des journées restantes. Mais, au vu de notre propre parcours, il ne faut pas s’attendre, non plus, à ce que nous réalisions le carton plein à l’occasion de ces matches. Car ce n’est pas contre St-Trond seulement que nous avons gaspillé nos chances de disputer la Ligue des Champions. Tout bien considéré, nous n’avons pas loupé le coche à une mais à plusieurs reprises cette saison. Au décompte final, les dix partages que nous avons concédés jusqu’ici pèseront lourd dans la balance. Ils sont le juste reflet de ce qu’aura été notre saison. En toute sincérité, je me demande si on mérite vraiment plus que notre position actuelle. Lorsqu’à dix reprises, on ne réussit pas à éviter le nul, c’est tout de même la preuve qu’on ne survole pas les débats. D’ailleurs, à aucun moment de ce championnat, à l’heure d’aborder tel ou tel opposant, je me suis dit que c’était dans la poche. Contrairement à l’année passée, aucun match n’était gagné d’avance, ce coup-ci. Même contre les sans-grade nous avons peiné. C’est significatif.

Dans quelle mesure le nombre impressionnant de blessés et ses incidences sur la composition de l’équipe auront-ils influé sur la marche du Sporting cette saison?

Il ne faut pas chercher de faux-fuyants: même si nous n’avons pas été épargnés par la malchance d’un bout à l’autre de cette saison et même si l’entraîneur a dû revoir souvent sa copie, la responsabilité de cette compétition en demi-teinte incombe d’après moi aux seuls joueurs. Quand on a le bonheur de jouer au Parc Astrid, parmi l’effectif le mieux fourni de la D1, la composition de l’équipe ou le système de jeu ne peuvent pas servir d’excuse. La vérité, c’est que la plupart des gars ne se sont pas suffisamment remis en question après une campagne 2000-2001 euphorique. Ils ont cru trop vite qu’il suffirait simplement de paraître pour s’imposer. Avec plus de tripes, je suis intimement convaincu qu’il n’y aurait pas eu photo pour le titre. Même si l’absence d’un buteur s’est fait sentir aussi, incontestablement.

Comme un boomerang

Sur un plan purement personnel, n’avez-vous pas perdu beaucoup, mine de rien, suite au départ de Jan Koller?

C’est tout à fait exact. Il était non seulement d’une grande valeur à la conclusion mais, à la récupération aussi, il était toujours d’un précieux secours à l’équipe et, corollairement, à moi-même. Jan était doublement utile: d’une part, il n’avait pas son pareil pour frapper au moment opportun ou simplement pour monopoliser le ballon en attendant du renfort. D’un autre côté, ses grands compas et sa haute stature constituaient autant d’atouts fort précieux en matière de conquête ou de dégagement du cuir sur phases arrêtées. Sans le géant tchèque, il faut bien avouer que nous avons à la fois perdu un réalisateur et un point d’appui devant, ainsi qu’une tour à l’arrière. Puisque personne, dans le groupe actuel, n’avait le même profil que lui, son absence s’est essentiellement traduite, pour moi, par un ballon aboutissant beaucoup plus vite dans les pieds d’un adversaire.

Il n’est pas étonnant, dans ces conditions, que vous ayez été davantage sollicité que l’année passée. En tout début de saison, alors que l’équipe se cherchait, le public ne s’était pourtant pas montré bon prince avec vous?

J’en ai pris pour mon grade plus que tous les autres réunis. Mais je n’en veux pas aux gens: ils paient cher leur place et ont, par là même, le droit de manifester leur satisfaction ou leur mécontentement. Si je l’avais voulu, j’aurais pu me cacher. Mais me débiner, c’est pas vraiment mon tempérament. En dépit des coups de sifflet, j’ai toujours veillé à être disponible pour mes partenaires sur le terrain. C’est vrai que ce ne fut pas toujours drôle. J’ai dû souquer ferme mais je n’ai pas coulé. Et c’est mon mérite. D’accord, j’en ai pris plein la figure à un moment donné. Et cela m’a fait mal. Je n’oublie pas non plus que quand le calme est revenu, ce même public qui m’avait hué a subitement pris fait et cause pour moi.

Pour vous, la délivrance n’est-elle pas passée, en définitive, par la titularisation d’Alin Stoica?

C’est partiellement vrai. Il est clair que la présence d’Alin, en soutien d’attaque, est synonyme d’une meilleure conservation du ballon. Celui-ci ne revient dès lors plus tel un boomerang, comme ce fut fréquemment le cas tout au long du premier tour. L’introduction du meneur de jeu roumain a fait en sorte aussi que Walter Baseggio sache mieux à quoi s’en tenir: il prend à sa charge la partie gauche du terrain tandis que je m’occupe de l’autre flanc pour ma part. Mais trois hommes ne suffisent évidemment pas à faire tourner une équipe. Le plus important, c’est que d’autres nous ont emboîté le pas par moments. Je dis bien « par moments » car il faut souvent que le Sporting soit poussé dans ses derniers retranchements (en étant par exemple mené au score comme ce fut le cas à La Gantoise, Genk ou au RWDM), pour que tout le monde prenne soudain conscience de l’importance de la situation. En d’autres circonstances, il n’en a pas toujours été ainsi et nous avons laissé beaucoup trop d’espaces à l’opposant. Comme à Westerlo, notamment. Cette fois-là, je m’étais époumoné comme jamais auparavant. Avec, heureusement, un succès à la clé.

Pas de quoi paniquer

Dans l’allégresse générale, l’année passée, on aurait aisément pu comprendre que la direction prolonge votre contrat jusqu’en 2005, comme vous-même le souhaitiez. Or, c’est au bout d’une saison moindre que votre désir sera finalement exaucé, puisqu’il est désormais acquis que vous rempilerez jusqu’à cette date. N’est-ce pas une belle revanche pour vous?

Je n’ai jamais douté de cette issue favorable. En principe, elle auraît dû se concrétiser en cours de saison passée. Mais compte tenu de l’activité très intense au niveau des transferts entrants et sortants, le dossier était resté en veilleuse. Je savais qu’il allait être finalisé tôt ou tard. C’est pourquoi je ne me suis jamais formalisé de certaines rumeurs, comme la venue possible d’un Didier Ernst à Anderlecht, par exemple. On m’a d’ailleurs très vite donné des apaisements à ce sujet.

Ce qui est sûr, en revanche, c’est que vous avez perdu à un moment donné votre place en équipe nationale au profit de Timmy Simons. Et que vous n’étiez pas repris dans l’effectif pour le récent Grèce-Belgique?

Ici aussi, il n’y avait pas de quoi paniquer. Dans l’optique de la Coupe du Monde, il me paraît normal que le coach fédéral veuille procéder à l’un ou l’autre essai. Dans pareil cas, il faut bien que quelqu’un s’efface. J’ai été sacrifié au même titre que Glen De Boeck et, dans un premier temps du moins, d’Eric Van Meir. Je crois que, personnellement, j’ai réagi de la meilleure façon qui soit à la décision de Robert Waseige en livrant un match de bonne facture face au Standard, le soir-même où il a décliné sa sélection.

Sans jouer à Patras, vous êtes sorti grand vainqueur de la rencontre car après que Timmy Simons dut céder à son tour sa place, l’absence d’un numéro six se fit cruellement sentir.

C’est ce que j’ai cru comprendre à travers les commentaires car je n’ai pas vu les images de cette rencontre. Si ce match a pu démontrer toute l’importance d’un demi ratisseur dans une rencontre, j’en suis ravi. Le vrai connaisseur le savait depuis longtemps.

Pour justifier ses choix, le sélectionneur a dit que Glen De Boeck, Eric Van Meir et vous-même deviez faire la part des choses. Comment avez-vous interprété ces propos?

Il a probablement voulu dire que nous devions nous ressaisir tous les trois après avoir fait la une pour des raisons autres que nos performances sur le terrain. Glen avait vu son nom mêlé à l’affaire du vote, sur laquelle je ne reviendrai plus, et Eric avait lancé un pavé dans la mare au Standard suite aux problèmes de poids de certains joueurs. Quant à moi, je présume que mon renvoi aux vestiaires par Franky Vercauteren, lors d’une séance d’entraînement, n’aura pas constitué la meilleure publicité non plus.

Que s’était-il passé au juste?

Pas grand-chose. J’étais passablement énervé et j’ai manifesté mon désaccord de façon un peu trop véhémente. Cela m’a valu d’être remballé cinq minutes avant terme. Mais après une douche réparatrice, tout était oublié.

Prime spéciale

Comme l’affaire du vote?

On a tout dit et tout écrit à cet égard. Je ne vois pas la nécessité d’en rajouter une couche. Le passé, c’est le passé. Tout ce qui importe, c’est l’avenir.

A commencer par une visite chez vos anciens coéquipiers de Mouscron le week-end prochain?

Ce déplacement n’est jamais une sinécure mais les statistiques sont favorables à Anderlecht, qui n’a jamais perdu au Canonnier depuis que l’Excelsior évolue en D1. Il faudra quand même se méfier d’une équipe qui s’est complètement ressaisie au deuxième tour comme en témoigne sa série très impressionnante de 33 points sur 42. Je ne suis pas étonné outre mesure par ces chiffres car j’ai toujours cru aux possibilités des Hurlus cette saison. Ce qui m’a par contre étonné, chez eux, c’est leur piètre entrée en matière: zéro sur 15, même si, par la bande, ils ont récupéré trois unités contre Alost. A cette époque de l’année aussi, certains ont cru là-bas, comme chez nous, qu’il ne pourrait rien arriver de fâcheux après une campagne euphorique. La différence, c’est qu’ils sont vite revenus les pieds sur terre.

Un match chez les Frontaliers, c’est particulier pour vous?

Et comment! Même si j’ai vécu des moments inoubliables là-bas (et même s’il n’est pas interdit de penser que j’intégrerai un jour la cellule de l’Ecole des Jeunes de ce club), je suis footballeur anderlechtois pour le moment et je n’aurai nullement besoin d’une motivation supplémentaire face à mes ex-partenaires. Mes coéquipiers non plus puisqu’une prime spéciale a été promise par la direction au cas où nous terminerions malgré tout parmi les deux premiers.

Un certain Bruges-Mouscron figure au programme de la dernière journée, quelques jours à peine avant la finale de la Coupe de Belgique entre ces deux formations. Si Bruges est déjà qualifié pour une coupe d’Europe, Mouscron est assuré d’être européen aussi, … même s’il perd la finale. Que faut-il attendre dans ces conditions?

Même si mon grand copain Koen De Vleeschauwer m’a dit, sur le ton de la plaisanterie, que Bruges gagnerait pour des raisons évidentes contre Mouscron en championnat, je me fais fort que l’Excelsior jouera crânement sa chance jusqu’au bout en coupe. D’ailleurs, compte tenu de l’état de forme de ses joueurs, il a une formidable carte à jouer au stade roi Baudouin, c’est sûr.

Bruno Govers

« Si on avait plus joué avec nos tripes, il n’y aurait pas eu photo pour le titre »

« J’ai toujours su que je rempilerais »

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