Lucide et modeste: ce sont les mots qui s’imposent pour définir le caractère du jeune médian Rouche (20 ans).

En introduisant des garçons tels que Mustapha Oussalah et Jinks Dimvula dans le grand bain, Dominique D’Onofrio a opéré adroitement une cure de jouvence revigorante. « Nous recevons une chance inespérée de nous montrer », constate Dimvula. « Logique que nous mettions les bouchées doubles puisque c’est important pour notre avenir ».

Dimvula, c’est le droitier qui a été aligné jusqu’ici en position d’arrière d’aile ou de médian. Pourtant, malgré de réelles aptitudes à arpenter le couloir, il observe : « Je suis avant tout un élément axial. Jusqu’en Réserve, j’ai toujours évolué comme milieu défensif. Raison pour laquelle j’éprouve parfois du mal à aller au bout de mes actions. J’ai le réflexe de lever la tête et de regarder autour de moi en cherchant d’abord à ne pas perdre le ballon. Mais je me rends parfaitement compte que pour revendiquer ce rôle en équipe Première, il faut impérativement s’appuyer sur une bonne dose d’expérience que je n’ai pas ».

. Lors d’un entretien, le mot « calme » revient sans cesse. A l’aise sur la pelouse, où sa facilité technique charme, où son intelligence de jeu transparaît, Jinks l’est beaucoup moins en interview. On le sent tenu par un devoir de réserve. Généré peut-être par un environnement positif: « Ma mère ne me laisserait jamais attraper la grosse tête. D’ailleurs, il n’y a pas de quoi planer ».

Walasiak et Turaci pour exemples

Faut dire que la vie ne lui a pas réservé que sa plus belle partition. A cinq mois seulement, son père s’en allait pour un monde que l’on dit meilleur. Laissant à son épouse le soin d’élever trois enfants. Jinks et ses deux soeurs. Il en faut, dans de telles conditions, de la détermination et de l’organisation afin de pourvoir aux besoins d’une famille.

« Je dois tout à ma mère. C’est pour elle que je veux réussir mais aussi pour toutes ces personnes qui m’ont pris par la main lorsque j’ai commencé à Tilleur », dit-il. « Forcément, maman n’était pas en mesure de consacrer tout son temps à m’accompagner aux entraînements et aux matches. Ce sont des voisins qui se sont occupés de cela des années durant. Il s’agissait des parents de mes équipiers. Après les rencontres, je voyais les autres discuter avec leur père. Se faire enguirlander ou recevoir des conseils. Forcément, j’aurais voulu qu’il en soit de même pour moi. Au lieu de cela, j’étais seul. Quelque part, ce n’est peut-être pas plus mal. Ainsi, je me suis forgé un caractère ».

Il en est allé de même au quotidien. Le quartier situé près de la gare de Tilleur n’a rien de comparable aux communes bourgeoises garnissant le sommet des collines mosanes. Le respect ne s’accorde pas. Il se gagne. Jinks a décroché aisément un diplôme d’humanités sportives à l’IPES Jemeppe. Quelque part, c’est donc l’esprit tranquille, « calme » pour reprendre son expression favorite, qu’il se lance dans la périlleuse aventure du professionnalisme. L’avènement de Jonathan Walasiak et l’arrivée de PapyKimoto ne sont pas de nature à l’empêcher de dormir. Sagement, il dit: « Je n’ai tracé aucun plan de carrière. Disons juste que j’aimerais figurer parmi les 15 ». En se persuadant qu’à force de travail, il ne peut qu’arriver quelque chose de bien. A cet égard, deux exemples lui plaisent, lui servent de référence. Dimvula cite les noms de Walasiak et de Turaci.

« Jonathan n’avait pas terminé le championnat précédent dans l’euphorie. Il ignorait réellement de quoi le suivant serait fait. Dès les matches amicaux, Robert Waseige lui a témoigné sa confiance. Il a bien joué, très bien même puisqu’il a marqué des buts. Wallyse trouvait lancé. D’accord, il a connu plusieurs blessures mais ce n’est pas sa faute. Par contre, il s’est imposé en titulaire indiscutable, postulant même pour une sélection chez les Diables Rouges. C’est formidable! Quant à Onder, sa trajectoire est différente. Aurait-il percé directement à Sclessin? Je l’ignore, mais je ne crois pas. Par contre, à La Louvière, il a pris du galon. Lors de son retour, nous retrouvions un élément plus accompli et sûr de lui. Il existe donc plusieurs moyens d’atteindre son idéal ».

Prise de conscience au Parc Astrid

Cet idéal a la forme d’une reconnaissance en rouge et blanc aux yeux de Jinks Dimvula. Curieux quand même! A son âge, il n’a jamais vu les Rouches remporter le moindre titre. A peine se souvient-il d’un succès en Coupe de Belgique. Ce qui ne l’empêche pas de proclamer haut et fort que le Standard est un grand club. « Il y a le stade, l’infrastructure, l’histoire, que nous racontent les plus anciens, et surtout, le public. Son engouement est incroyable et sa fidélité est à toute épreuve. Cette ferveur dure malgré des résultats souvent décevants ».

Cela doit être effectivement ça, l’explication. Demain, peut-être reviendra-t-il à Jinks Dimvula et à ses frères de promotion de redorer un blason terni par ces redoutables intempéries persistantes depuis des lustres. Lourde responsabilité que celle-là!

« Nous n’en sommes pas encore là », tempère-t-il. « Je ne tiens même pas à y songer. Dans l’immédiat, je me concentre sur les rencontres qui viennent. Gérer le stress d’avant-match constitue déjà un bel exercice. Dès lors, ne me demandez pas de me prendre la tête à propos des années qui viennent. Chaque chose en son temps. Tout a déjà tellement changé dans ma vie. Vous vous rendez compte, je suis devenu un sportif professionnel. J’ai vraiment compris en pénétrant sur la pelouse du Parc Astrid car il n’est pas donné à tout le monde de se produire dans le stade d’Anderlecht. Parfois, en rue, des gens me reconnaissent alors que j’étais un parfait inconnu il y a quelques semaines « .

Désormais, le pari réside aussi dans la protection à offrir à cette nouvelle génération fraîchement éclose. Et éviter qu’un vestiaire ne comptant pas parmi les plus sympathiques du royaume ne pollue des gamins qui paraissent conserver les pieds sur terre.

« Les disputes et les rivalités liées à la formation de clans ne me concernent pas », affirme Jinks. « Les jeunes ne se trouvent pas impliqués dans ce genre de choses. Nous vivons un peu à l’écart, tentant simplement de trouver notre place dans le vestiaire ».

Daniel Renard

 » Gérer le stress d’avant-match constitue déjà un bel exercice »

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