Calme lac

Champion avec Anderlecht, le Finlandais l’est aussi avec Zurich. Ce soir, il affronte les Diables Rouges avec une Finlande qui n’a jamais été aussi ambitieuse.

Tout est calme au FC Zurich. Joggeurs et promeneurs croisent le chemin des joueurs sans leur prêter attention. Hannu Tihinen affirme pourtant que la ville est dingue de foot :  » Je suis fier de ce titre avec Zurich. Anderlecht doit être champion chaque année. En Suisse, ce rôle est dévolu à Bâle. C’est le ténor. Zurich est l’outsider. J’ai été champion en Belgique et en Norvège mais jamais encore je n’avais vécu ça. Un cortège qui nous a conduits jusqu’au centre de Zurich et à l’hôtel de ville, où on a été acclamés par des milliers de supporters. C’est dingue !  »

Le défenseur arbore une cicatrice de 12 cm au crâne. C’est sa troisième blessure de la saison. Il a déjà été recousu, à peu près au même endroit, et il s’est cassé le nez. Finlandais et défenseur, c’est une accumulation de risques !  » Je suis peut-être trop rapide et les autres arrivent trop tard « , explique-t-il, pince-sans-rire.

Tihinen réside à Küsnacht, au bord du lac de Zurich, entouré de montagnes, à quelques km du stade, qu’il rejoint par… les transports en commun.  » La qualité de vie est très élevée en Suisse « , dit le natif du Pays des Mille Lacs. C’est un refrain : le football n’est qu’une partie de sa vie, importante mais pas cruciale.  » Ne me comprenez pas mal. Je me concentre sur mon sport. J’ai opté pour un pays agréable et un bon club « .

Après quatre ans à Anderlecht, il ne considère pas Zurich comme un pas en arrière. Ce sont deux grands clubs émargeant à de petits championnats. L’Axpo Super League est dominée par quelques ténors.  » Notre formation est très technique. Elle joue au sol, comme Anderlecht « .

Le FCZ a été en tête toute la saison. La défense n’a encaissé que 32 buts en 36 joutes. Tihinen a marqué quatre buts décisifs. Par contre, il a été exclu à deux reprises. A 31 ans, Hannu est un des plus âgés du noyau, dont la moyenne d’âge, contre les Grasshoppers, était de 23 ans. En janvier, le club lui a confié le brassard, jusque-là propriété de Blerim Dzemaili, le Macédonien qui rejoint Bolton.  » Je voulais être un leader et je pense l’avoir été. Je peux l’être dans n’importe quel club. Sauf peut-être le Real « . Comme toujours, Hannu flirte volontiers avec le second degré.

Il résume l’expérience acquise en quatre ans en Belgique :  » J’étais encore jeune à mon arrivée. Je suis devenu un homme à Bruxelles, sur le terrain et dans la vie. Mes deux fils sont nés là. J’ai gagné en vitesse, en technique et sans doute en tactique. Si vous comparez mes matches d’il y a six ans aux actuels, vous constaterez d’énormes progrès « .

Il n’a vu qu’un seul match des Mauves cette saison, à la télévision en Ligue des Champions. S’il éprouve une certaine nostalgie, c’est peut-être à l’égard de la C1 où Zurich a été éliminé par Salzbourg au dernier tour préliminaire.

La défense avec Hodgson

Il avait signé pour trois ans au FC Zurich sans rien demander à Roy Hodgson, le sélectionneur anglais de la Finlande, qui a dirigé l’équipe nationale suisse dans les années 90.

Sous la direction d’Hodgson, l’équipe nationale finlandaise a signé un brillant début de qualifications pour l’EURO. Elle a battu la Pologne 1-3 puis fait match nul 1-1 contre le Portugal, deux participants au Mondial 2006. Ce bon début n’a pas surpris Tihinen :  » Une équipe qui vient d’achever un grand tournoi a du mal à se concentrer d’emblée sur les qualifications. Affronter immédiatement la Pologne et le Portugal nous avantageait « .

Il considère le nul contre le Portugal comme une chance ratée : à l’heure de jeu, le demi-finaliste du Mondial était réduit à dix.  » Nous aurions dû tuer le match. Hélas, seuls les grands pays y parviennent. Quand l’Italie, le Portugal ou la France doivent gagner, ils y parviennent « . Hodgson a mené des entretiens individuels et collectifs, pendant de longues heures, pour convaincre ses footballeurs finlandais de se consacrer avant tout à la défense :  » Il estime que sur la scène internationale, l’essentiel est de préserver ses filets. Marquer un but, voire deux suffit « .

Les chiffres illustrent l’approche d’Hodgson : jusqu’au match contre la Serbie, la Finlande n’a encaissé que trois buts. On peut en déduire que Tihinen et les siens passeront une soirée tranquille face à une Belgique qui marque difficilement… Ceci dit, la Finlande n’a trouvé le chemin des buts qu’à sept reprises.  » Ce n’est pas suffisant « . Jari Litmanen, qui joue à Malmö, en Suède, a marqué trois des sept buts. Or, il a 36 ans. Il n’est pas indispensable, selon Tihinen, contrairement à Mikael Forsell, l’attaquant de Birmingham City, qui a été blessé.

Accident en Azerbaïdjan

Tihinen se souvient du succès 3-4 de la Finlande contre la Belgique en 1999, à Bruges. Ses compatriotes avaient scellé le sort de Georges Leekens. C’est à partir de ce moment que la Finlande a éclos.  » L’équipe n’a guère changé depuis. Nous sommes donc bien rôdés « . Et il n’y aura pas de renouvellement avant l’EURO 2008. La Finlande rêve de disputer, pour la première fois de son histoire, un tour final.  » Nos compatriotes estiment que cette génération doit se qualifier « .

La défaite, inattendue, en Azerbaïdjan, fin mars (1-0) a tempéré l’enthousiasme général. Il a suffi d’un mauvais match pour que la Finlande recule à la quatrième place.  » Avec 14 unités au lieu de 11, nous aurions pu aborder nos matches contre la Serbie et la Belgique plus sereinement. Les conditions étaient épouvantables en Azerbaïdjan. J’espère que vous et le Portugal jouerez sur le même terrain. Ils n’ont cessé de nous tacler, ont gagné du temps et en plus, nous étions dans un jour sans. Nous avons encaissé un but sur corner à la 81′. Typique « .

Tihinen place la Belgique et son pays sur le même pied :  » C’est toujours gai de vous battre… Ce sera un match difficile mais nous y croyons. Nous sommes nombreux à évoluer à l’étranger et à y être titulaires. Je serais maintenant très déçu si nous loupions la qualification « .

L’EURO lui permettrait peut-être de réaliser un ultime transfert lucratif. Tihinen n’y songe pas :  » Dois-je me mettre martel en tête aussi longtemps à l’avance ? Non. Je me concentre sur la semaine prochaine, tout au plus sur la saison suivante, pas au-delà. Ma seule ambition est de pouvoir dire, plus tard, que ma carrière a fait de moi un meilleur footballeur et un meilleur homme. Avoir joué pour Zurich ou le Real ne compte pas. Je viens de Laponie. Quatre mois par an, il gèle à -35°. Alors, je peux être content de la carrière que je réalise « .

par jan hauspie / photo: reuters

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