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Café et croissants

En 1980-1981, l’Italie rouvre ses frontières footballistiques, après quinze ans: chaque club de Serie A peut engager un footballeur étranger. Un an plus tard, le premier Belge arrive dans la Botte: René Vandereycken. Il n’avait pas l’intention d’émigrer en Italie, pourtant, confie-t-il à notre magazine, qui titre: « Un joueur froid sous le soleil italien. »

En 1981, après sept ans au Club Bruges, Vandereycken trouve un accord avec le FC Cologne. « Le contrat est toujours à la maison », explique-t-il au reporter belge. Mais le Club estime que les Allemands proposent trop peu d’argent. En vacances en Floride, Vandereycken, très déçu, rencontre par hasard son coéquipier Jan Ceulemans. Celui-ci lui apprend que le Club voit d’un bon oeil une autre offre étrangère. À son retour, le médian prend l’avion, en compagnie de Ceulemans, pour Milan. Jan va discuter avec l’AC Milan, sans avoir vraiment envie d’y être transféré. Quand on lui demande quel salaire il veut, il cite un montant absurde, selon ses normes, mais à sa grande surprise, les Italiens sont d’accord et Ceulemans supplie la délégation du Club de le ramener en Belgique.

Il en va tout autrement pour Vandereycken, alors âgé de 28 ans. Il tombe immédiatement d’accord avec le Genoa, le plus ancien club d’Italie, fondé le 7 septembre 1893, qui a également été le tout premier champion du pays. Vandereycken en devient le premier étranger professionnel. Le Genoa compte une coupe et neuf titres à son palmarès, mais ces prix sont tous antérieurs à la Seconde Guerre mondial. À l’époque, le club gênois vient de remonter en Serie A, grâce à sa troisième place à l’échelon inférieur.

Le directeur sportif Giorgio Vitali vient de Naples. Un an plus tôt, alors qu’il cherchait un joueur pour organiser sa défense, Ruud Krol avait sa préférence, suivi par Vandereycken. Krol deviendra d’ailleurs un monument à Naples. À Gênes, Vitali pense immédiatement à Vandereycken, mais celui-ci est alors au Japon avec l’équipe nationale. Il approche Arie Haan, qui affirme pouvoir se libérer du Standard, mais pour l’entraîneur des Liégeois, Raymond Goethals, le départ du Néerlandais est exclu. C’est ainsi que Vandereycken revient en pole position. Il est un peu plus cher que Haan, mais aussi un peu plus jeune. Le Genoa aurait versé l’équivalent d’un million d’euros à Bruges et offert un salaire annuel de 250.000 euros à Vandereycken.

Au début, celui-ci n’apprécie pas la ville portuaire, qu’il trouve sale et bruyante. Sa seconde impression est meilleure. Le club lui offre un excellent suivi et veille à ce que sa famille se sente bien. L’entraîneur, Luigi Simoni, est ravi de son nouveau patron: « René est un footballeur particulièrement attentif. Il analyse rapidement toutes les situations. Il n’y a pas de joueurs comme lui en Italie. Je veux qu’il devienne le patron de mon équipe, l’homme qui me relaie sur le terrain. Il a envie d’apprendre, il est discipliné et s’intéresse vivement à la tactique. » Le médecin de club le qualifie de « garçon qui est dur envers lui-même comme à l’égard des autres ». Il a toutefois un problème: il n’aime pas trop le soleil alors qu’il fait toujours beau à Gênes. Il doit aussi changer ses habitudes alimentaires. Le matin, il prend du lait froid avec du pain et du fromage, les autres se servent de café et de croissants. Il aime la bière, les autres boivent du vin.

Vandereycken est excellent durant sa première année, même si le club n’assure son maintien qu’à cinq minutes du terme du dernier match. L’année suivante, le Genoa peut embaucher un second étranger, mais il n’obtient pas les services de Jan Ceulemans ni d’ Erwin Vandenbergh, auxquels pensait le club transalpin, mais du médian néerlandais Jan Peters.

Après deux matches cette saison, Vandereycken doit être opéré du genou, suite à une blessure encourue en équipe nationale. Il jouera encore un match, l’avant-dernier, durant lequel le Genoa assure une fois de plus son maintien. Ensuite, Vandereycken reviendra en Belgique, à Anderlecht, mais les deux années passées en Italie restent très importantes pour lui. Le Genoa reste son club. Il continue à parler couramment l’italien et, désormais, il est incollable sur les vins italiens.

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