Ça flingue de tous côtés

Arsenal, club historique anglais, produit actuellement le plus beau jeu d’Europe.

Arsenal est un seigneur. Un noble de la Premier League. Par son histoire, le club fait partie de l’aristocratie anglaise : 13 titres de champion (seuls Manchester United et Liverpool ont fait mieux), 10 Cups (2e derrière MU), 3 doubles (Championnat et Cup la même année). Mais par sa faculté à innover et à s’adapter aux m£urs du temps, Arsenal a évité de devenir un Lord décrépi comme Aston Villa, Nottingham Forrest, Everton ou Newcastle.

Si Arsenal ne dispose pas de la puissance financière des autres membres du Big Four (Manchester United, Liverpool et Chelsea), elle n’a pas grand-chose à envier à ses voisins. Depuis la fondation de la Premier League en 1992, Arsenal est le premier club à avoir brisé l’hégémonie d’United sur la durée. Avant Chelsea, aidé par la machine de guerre financière de Roman Abramovitch.

Et pourtant, les Gunners ont longtemps été limités dans leurs moyens. Il a fallu les trésors d’imagination d’ Arsène Wenger pour concurrencer la puissance mancunienne. Le Français a d’abord relancé des joueurs au talent limité (la défense Tony Adams-Martin Keown-Nigel Winterburn-Lee Dixon est devenue une forteresse imprenable), le tout agrémenté de techniciens achetés à prix raisonnable (comme Thierry Henry, Patrick Vieira ou Dennis Bergkamp acquis à l’Inter Milan pour 10 millions d’euros).

La mondialisation du championnat anglais ne faisait qu’élargir le fossé financier entre United, Liverpool, Chelsea et Arsenal. Pour combattre cette donne, Arsenal subit donc sa deuxième révolution wengerienne. En misant sur la construction du stade, les dirigeants poussèrent le Français à entamer une politique axée sur les jeunes talents du monde entier. Aujourd’hui, le club a déménagé dans l’ Emirates Stadium, le deuxième plus grand stade d’un club anglais derrière Old Trafford. Cela lui permettra de générer beaucoup plus d’argent ; même si cette manne financière ne sera entièrement disponible pour le projet sportif qu’après le remboursement complet de l’arène.

Si en Angleterre, la pression repose un peu plus sur les épaules de Wenger qui n’a plus empoché un trophée depuis la Cup en 2005, il convient de reconnaître qu’il arrive à rester plus ou moins au niveau des autres prétendants avec une équipe peu expérimentée. Un peu comme une formation qui tiendrait la dragée haute à son adversaire à 10 contre 11. Aucune équipe européenne ne peut se targuer de développer un tel jeu et d’obtenir de tels résultats (finaliste de la Ligue des Champions en 2006, demi-finaliste en 2009) alors qu’elle se voit amputée chaque saison de ses meilleurs éléments. En 2005, le capitaine, Vieira filait à la Juventus. En 2007, Henry, le meilleur buteur du club avec 226 buts devant le prolifique Ian Wright, partait à Barcelone. Cela n’avait pourtant pas empêché les baby kids de Wenger de lutter jusqu’au bout pour le titre. En 2008, c’est le Biélorusse Alexander Hleb et le Français Mathieu Flamini, deux des artisans de la bonne campagne d’Arsenal, qui quittaient le navire. Et cette saison, Arsenal dut débuter le championnat, privé de Kolo Touréet d’ Emmanuel Adebayor, deux généraux.

 » Seul le jeu sauve Arsenal « 

 » Chaque année, on se demande comment Arsenal va rivaliser avec les autres « , explique Geoff Sweet, journaliste au Sun.  » Seul le jeu les sauve. C’est l’équipe qui axe le plus son football sur le jeu. Un peu comme Manchester United. Mais contrairement aux Red Devils, Arsenal ne sait rien faire d’autre. Elle ne sait pas faire le gros dos quand il le faut ; elle ne sait pas défendre et jouer la contre-attaque. Pour les Gunners, c’est contre-nature. Wenger insiste pour que son équipe fournisse du jeu mais il enrage quand elle fait preuve de naïveté. Tout le monde a en mémoire le 4-4 de Tottenham la saison passée. Arsenal écrasait cette rencontre et pourtant, au moment de se replier et de vivre sur sa confortable avance (3-1 et 4-2), elle a plié. Cette saison, cette équipe aura plus d’expérience mais on a déjà vu des relents de fébrilité. Notamment contre Manchester United. Les champions en titre faisaient peine à voir. Ils ont couru après le ballon pendant une heure, ils ont plié face au pressing constant des Londoniens mais il a suffi de deux ouvertures pour que les hommes d’ Alex Ferguson s’engouffrent dedans. Après, ils ont fermé la porte et Arsenal s’est écroulé. Pourtant, les Gunners dominaient leur adversaire. C’était beau à voir  »

Arsenal a changé de visage. Dans la mythologie, le club londonien était synonyme d’ennui. Ne parlait-on pas de Boring Arsenal (Arsenal ennuyeux) et de score Arsenal (pour des victoires 1-0) lors des succès glanés fin des années 80 et début des années 90 sous la houlette de Georges Graham ? Même Nick Hornby, écrivain et fan absolu d’Arsenal, en fit un livre ( Fever Pitch, carton jaune en français). Wenger est arrivé et le football est devenu plus technique : Arsenal rime avec beau football.

 » Lorsqu’on parle des accréditations de la semaine, on se réjouit d’aller à Arsenal. On sait qu’on va y voir du beau football et on raille le collègue qui doit se farcir Chelsea « , nous expliquait Philippe Auclair, correspondant de France Football pour l’Angleterre.

De la jeunesse et des buts

Enfin, Arsenal est fidèle à son histoire, celle des Gunners, les canonniers du blason du club, fondé en 1886 par les ouvriers du Woolwich Arsenal, entrepôt d’armement. Or, quoi de plus normal donc pour cette formation que de faire parler la poudre ! En ce début de saison, elle n’est pas mouillée. Premier match : six buts à Everton, cette équipe réputée injouable. Deuxième match au Celtic, forteresse dite inexpugnable : 0-2. Une affaire rondement menée. Deuxième journée de championnat : quatre buts contre Portsmouth. Et au cas où les Ecossais n’avaient pas encore compris, on en a remis trois au retour. Adebayor est parti. Il suffit simplement que chacun s’y mette. Cela donne 15 buts et neuf buteurs différents. Presque une équipe entière après seulement quatre journées.

 » C’est la force actuelle d’Arsenal « , explique Geoff Sweet.  » Cela flingue de tous côtés. Tout le monde s’y met. Sur phases arrêtées, sur tir lointain, sur infiltrations, sur combinaisons, sur centres des flancs. En quatre matches, ils ont sorti toutes les combinaisons possibles pour inscrire un but. « 

 » A mon époque, l’équipe avait plus d’expérience, il y avait plus de lien entre les lignes « , affirme l’ancien défenseur Tony Adams.  » Mais nous n’avons jamais pratiqué un si beau football. Cette génération sait tout faire. Elle doit juste apprendre à gérer certaines situations et à mieux défendre. Surtout en championnat anglais car en Ligue des Champions, elle s’applique et calcule davantage.  »

Depuis le début de saison, Wenger applique ses principes.  » Je n’envisage qu’une chose. Finir au top du classement « , prédisait-il en début de saison. Pourtant, avec une pauvre saison de transferts, personne ne misait une livre sur cette équipe. Or, force est de constater que le club londonien pratique le plus beau football depuis l’ouverture du championnat.

 » Ce club possède indéniablement une variété incroyable de mouvements offensifs « , écrivit même le journaliste de la BBC, Jacqui Oatley.  » Niklas Bendtner, Robin van Persie sont particulièrement remuants et complémentaires. Cesc Fabregas et Andrei Arshavin (même si le Russe sera absent à Sclessin) apportent la créativité. Alexander Song, Denilson et surtout Abou Diaby font parler la puissance. Quant aux latéraux français, Bakary Sagna et Gaël Clichy, leurs débordements incessants sont redoutables à contrer.  »

Arsenal n’a finalement qu’un problème : la jeunesse. Depuis leur dernier trophée en 2005, l’équipe n’a cessé de baisser en moyenne d’âge.  » Oui, mais si vous prenez une équipe qui a 28 ou 29 ans de moyenne d’âge, vous savez que vous ne pouvez la faire progresser que de 5 %. Moi, je sais que je peux faire progresser ma formation de 30 % « , se défend Wenger.  » Est-ce que je vais y arriver. C’est l’éternelle question. « 

Wenger peut compter sur 40 millions d’euros puisque Vermaelen a coûté 12 millions et que les ventes de Touré et Adebayor en ont rapporté 52. Mais le manager français ne veut pas les dépenser tant qu’il n’a pas trouvé meilleur que ce qu’il a en magasin.  » J’avais les moyens d’acheter Xavi Alonso. Cela aurait rééquilibré l’équipe mais en agissant de la sorte, je brûlais Song, qui grandit chaque année. Je me trahissais moi-même et toute ma politique « , a confié Wenger à un ami proche.

A »rsenal possède une variété incroyable de coups offensifs. (un journaliste de la BBC) »

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