C’est la zone

Le championnat NBA redémarre avec de nouvelles règles, de jeunes têtes, les mêmes favoris.

Le basketball américain cultive le paradoxe entre contenant et contenu. Au niveau du marketing et de l’image, il est créativité, mouvement, souplesse et adaptabilité. Un emballage qui plaît à toutes les générations et surtout les jeunes.

Sur le plan de la substance par contre, le sport est très nettement conservateur. Ainsi, la dernière modification importante au niveau du règlement date d’il y a plus de 20 ans. C’est lors de la saison 79-80 que fut instauré le tir à trois points.

Si en 61, les responsables avaient banni la défense en zone, quarante ans après, la voici remise à l’honneur. Pour Stu Jackson, le vice-président des opérations, la défense individuelle a essentiellement produit un basket d’isolement avec très peu de mouvements de ballon et de contre-attaques rapides. Si nul ne peut prédire comment les 29 équipes de la NBA vont exploiter cette nouvelle règle (il existe plusieurs variantes de la défense en zone), on peut affirmer sans risque d’erreur que les meilleurs marqueurs et spécialement ceux de grande taille, seront plus précieux que jamais.

L’idée de la défense en zone est de concentrer un maximum de pression défensive là où on en a le plus besoin, souvent près de l’anneau. Or, quand un défenseur occupe une partie du terrain, cela signifie qu’un attaquant adverse jouit d’un peu plus d’espace libre autre part. Ce dont raffolent les tireurs à distance.

Pour les marqueurs-vedettes tels Shaquille O’Neal, Kobe Bryant, Allen Iverson et Vince Carter, qui pénètrent beaucoup dans les raquettes, les avis sont partagés. D’aucuns pensent que leur moyenne de points ne sera pas affectée par la nouvelle règle. D’autres, par contre, estiment que leur tâche sera plus ardue puisqu’ils pourront être surveillés par deux, voire trois joueurs même lorsqu’ils ne sont pas en possession du ballon.

Ils pourront être victimes de systèmes défensifs sophistiqués comme le box-and-one, une combinaison entre la zone et l’individuelle. Dans les deux cas de figure, les nouveaux paramètres vont vraiment permettre de juger du talent réel et de l’intelligence de jeu des superstars.

3 AUTRES CHANGEMENTS

1. le « hand check  » (où la main sert à situer l’adversaire et, le cas échéant, à le garder à distance) est toléré dans la mesure où il n’est pas systématique et où il n’entrave pas l’action offensive;

2. chaque défenseur en-deçà de la zone des trois doit obligatoirement participer à une action défensive dans les trois secondes. Pas question de rester planté en embuscade,

3. enfin, l’équipe qui récupère le ballon dans sa moitié de terrain n’a plus que 8 secondes au lieu de 10 pour l’amener au-delà de la ligne centrale.

Ces modifications sont destinées à accélérer le rythme du jeu et à limiter les interruptions. Elles favorisent les joueurs vifs et athlétiques de même que les bons passeurs. Pour Ed Rush, le directeur des arbitres, elles ne devraient pas être trop difficiles à faire respecter: « Deux d’entre elles sont quantifiables puisqu’elles sont dictées par le chronomètre. La nouvelle version du hand check quant à elle laisse plus de place à l’interprétation personnelle mais il s’agit d’un ajustement assez facile pour les officiels ».

DE GRANDS JEUNES

Il y a quelques années, le Draft (engagement par tirage au sort) de la NBA était rempli de jeunes talents ayant fait leurs griffes quelques années dans les championnats universitaires. Des garçons de plus de 20 ans, prêts à l’intégration dans une équipe professionnelle. De nos jours, il est truffé de teenagers issus des séries des High Schools qui, à de rares exceptions près, doivent attendre quelques années avant d’être pleinement opérationnels. Leur taille et leur corpulence en font des hommes avant l’heure, mais leur manque d’expérience, leur retard tactique et technique en font des stagiaires plus que des titulaires.

C’est le cas notamment des deux premiers choix: Kwame Brown (Washington Wizards-2,10 m- 108 kg) et Tyson Chandler (Los Angeles Clippers-2,15 m-106 kg) ainsi que Eddy Curry (Chicago Bulls-2,10-130 kg) et DeSagana Diop (Cleveland Cavaliers-2,13 m-136 kg).

Un exemple de cette trop grande fraîcheur des recrues est que de tous les rookies engagés cette année dans le meilleur championnat du monde, cinq seulement devraient figurer d’emblée dans l’équipe de base: Shane Battier (Memphis Grizzlies), Rodney White (Detroit Pistons), Eddie Griffin (Houston Rockets), Jason Richardson (Golden State Warriors) et Joe Johnson (Boston Celtics).

RECORD D’ETRANGERS

La saison dernière a connu un nombre-record de joueurs étrangers (45) issus de 28 pays différents. Cette année, l’internationalisation de la NBA continue son petit bonhomme de chemin puisque ce sont pas moins de 6 étrangers qui figurèrent dans les 28 joueurs sélectionnés lors du premier tour du Draft: l’Espagnol Pau Gasol (choix n°3 par Atlanta Hawks puis cédé ensuite aux Memphis Grizzlies), le Sénégalais DeSagana Diop (n°8-Cleveland Cavaliers), le Yougoslave Vladimir Radmanovic (Seattle SuperSonics), l’Espagnol Raul Lopez

(n°24-Utah Jazz), le Haïtien Samuel Dalembert (n°26-Philadelphia 76ers) et enfin le Français Tony Parker provenant du Paris Basket Racing. Dernier sélectionné du groupe, il a été choisi par les San Antonio Spurs. Cinq autres étrangers furent choisis au cours du second round.

Pau Gasol (2,13m-102 kg) est le premier non-Américain à figurer aussi dignement dans un draft. Pourtant, il ne figure pas dans le cinq de base des Grizzlies de Vancouver immigrés dans le Tennessee. Ce qui en dit long sur le niveau qualitatif du championnat américain.

UN DRAFT CONTRE-NATURE

Le draft 2001 a été exceptionnel en ce sens que les équipes qui avaient le besoin le plus pressant de renforts immédiats ne les ont pas obtenus car elles ont préféré miser sur le moyen terme en signant des très jeunes joueurs au grand potentiel.

Malgré leur choix ordinal moins favorable, les meilleures équipes ont ainsi hérité de basketteurs plus matures susceptibles d’être rapidement incorporés dans l’équipe. En totale contradiction avec sa vocation fondamentale, le Draft, durant cette intersaison, affaiblit les mauvaises équipes et renforcé les bonnes!

C’est évidemment regrettable pour l’équilibre du championnat et pour le changement aux avants-postes du classement.

ON REPREND LES MEMES

Cette saison plus encore que les précédentes, il ne faut pas être devin pour dégager le grand favori: les Los Angeles Lakers devraient facilement voguer vers un troisième titre consécutif. La manière dont ils ont dominé les playoffs (15 victoires pour une seule défaite, soit un record en NBA) ne laisse planer aucun doute sur leur force.

Même si certains essaient de leur chercher des puces? La blessure de Derek Fisher, par exemple. Après la conquête du titre et une saison exemplaire, le point guard est à nouveau victime d’une fracture du pied. Ou encore le départ de Horace Grant pour Orlando. Ou les querelles intestines entre Shaquille O’Neal et Kobe Bryant.

Arguments réels mais facilement rejetables.

Fisher est bien revenu après pareille blessure la saison dernière. Samaki Walker (acquis des San Antonio Spurs) peut à terme faire oublier Grant. Quant à la rivalité O’Neal-Bryant, c’est un faux problème. Les deux hommes sont suffisamment malins pour réaliser que leur collaboration renverse les montagnes.

Et puis les Lakers peuvent toujours compter sur leur entraîneur-magicien Phil Jackson qui comptabilise huit titres (6 avec Chicago et 2 avec Los Angeles).

Derrière L.A, on retrouve les mêmes outsiders que l’année dernière: San Antonio, Philadelphie, Milwaukee, Dallas (qui pourrait être la révélation), Sacramento, Miami, Orlando, Utah et Charlotte.

PRONOSTICS

Atlantic: Philadelphia 76ers, Central: Milwaukee Bucks, Midwest: San Antonio Spurs, Pacific: Los Angeles Lakers.

Champion de la Western Conference: L.A., champion de l’Eastern Conference: Milwaukee.

Champion national: Los Angeles Lakers.

Dans le fond du panier, on retrouve Chicago, précédé de Golden State, Memphis, Cleveland, New Jersey, Washington et Detroit.

TRANSFERTS

On épingle la santé retrouvée de Grant Hill. Si sa cheville tient le coup, le sociétaire des Orlando Magic devrait finalement devoir donner pleine mesure de son immense talent. On mentionnera aussi quelques mutations: Dan Majerle (de Miami à Phoenix), Muggsy Bogues (de New York à Dallas), Patrick Ewing (de Seattle à Orlando), Horace Grant (de Los Angeles à Orlando), Shareef Abdul-Rahim (de Vancouver à Atlanta), Elton Brand (de Chicago à L.A. Clippers), Charles Oakley (de Toronto à Chicago), Tyrone Hill (de Philadelphie à Cleveland), Hakeem Olajuwon (de Houston à Toronto) et Danny Manning (de Utah à Dallas).

Bernard Geenen, à Chicago

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