Brys the Nice

L’Excel sera la première équipe à reprendre le collier, lundi prochain. Avec un Anversois aux commandes.

Depuis dix jours, le nouvel entraîneur de l’Excelsior Mouscron, l’Anversois Marc Brys, est à pied d’£uvre au Canonnier où il prend progressivement ses repères. Les vacances, ce sera pour une autre année.  » Je m’accorderai tout au plus trois jours de congé cette semaine avec mon épouse, mais ce n’est pas grave : la motivation que représente pour moi ce nouveau challenge prend le pas sur le besoin de souffler « .

La reprise des entraînements est déjà fixée à ce lundi 18 juin. Fidèle à une habitude ancrée depuis quelques années, les Hurlus seront les premiers à reprendre le collier. Mais avec une interruption d’une semaine, début juillet, histoire de permettre aux joueurs qui ont des enfants de bénéficier de quelques jours de détente en famille. Cette formule est nouvelle pour Brys. Il a été placé devant le fait accompli, puisque le programme avait déjà été établi avant sa nomination.  » Je ne compte pas le modifier, car les joueurs ont reçu leur programme avant leur départ en vacances. Lorsque j’ai pris connaissance des dates, j’étais sceptique : c’est la première fois que je suis confronté à une interruption dans la préparation. Mais, après réflexion, je me suis dit que ce n’était peut-être pas mauvais. Je pourrai travailler l’endurance pendant les 15 premiers jours, et après cette charge de travail importante, les joueurs pourront un peu souffler. Ils seront frais pour commencer le stage à Spa. Le fait de recommencer plus tôt permet aussi de réduire la période d’inactivité entre la fin du championnat précédent et la reprise des entraînements : les joueurs auront donc moins perdu de leur condition physique « .

Brys s’est aussi mis à la recherche de l’un ou l’autre élément susceptible de renforcer le noyau. En priorité, un back droit et un flanc gauche : les positions qui avaient donné le plus de soucis à ses prédécesseurs, cette saison. On parle également d’un certain AlexisAllaert, un jeune attaquant français de 20 ans actif à Cuiseaux-Louhans (National) la saison dernière.  » Je ne connais pas ce joueur personnellement. C’est Gil Vandenbrouck qui s’occupe du dossier. Il représente peut-être une option pour l’avenir, mais le secteur offensif n’est pas celui qui cause le plus de soucis. Avec AdnanCustovic, DembaBa et BertinTomou, sans oublier MickaëlNiçoise et AliouneKebe, l’Excel possède peut-être la meilleure ligne d’attaque du championnat de Belgique. J’espère qu’on pourra tous les conserver. Adi a marqué un but décisif avec la Bosnie, contre la Turquie. Et Demba a également scoré avec le Sénégal. C’est révélateur de leurs capacités « .

Adepte du dialogue

A quoi les joueurs peuvent-ils s’attendre lundi prochain ? Entameront-ils directement un travail de forçat ?  » Non, ils ne doivent pas se faire de mouron à cet égard. Au cours des trois premiers jours, on procédera à des tests d’endurance et d’explosivité. En fonction des résultats, on adaptera la préparation. On a le temps, le championnat recommence seulement le premier week-end d’août. C’est à ce moment-là qu’il faudra être prêt. L’objectif n’est pas de tuer les joueurs pendant les 15 premiers jours d’entraînement. Au début, la charge de travail sera surtout importante en quantité. Par la suite, on insistera surtout sur la qualité et l’intensité « .

Il n’empêche que c’est durant la période de préparation que l’on jette les bases pour la saison à venir :  » C’est exact. Les exemples sont légion de joueurs qui ont loupé cette préparation, pour cause de blessure ou autre, et qui ont rencontré de gros problèmes durant la saison à venir. Mais j’ai constaté que l’Excel avait terminé la défunte saison en boulet de canon. Les joueurs étaient encore très frais et très vifs. C’est le signe qu’ils avaient été préparés de façon très professionnelle « .

Les matches amicaux n’offriront pas de grosses affiches, mais Brys ne s’en formalise pas :  » Il faut y aller progressivement. On commence par des petites équipes, on a un match contre le Cercle Bruges qui est de notre niveau, et on termine par un match de gala contre Parme. Ce programme me satisfait « .

Brys est très enthousiaste à l’idée de relever le défi qui lui est proposé :  » Sous beaucoup d’aspects, c’est un challenge pour moi. A commencer par la langue. Je considère qu’il est très important pour moi de me perfectionner en français et je vais m’y atteler. Pas seulement pour la communication avec la presse, mais aussi et surtout pour le dialogue avec les joueurs. J’ai l’habitude de beaucoup parler avec eux et il est essentiel que je puisse introduire certaines nuances dans mes discours, afin qu’ils comprennent exactement ce que j’attends d’eux. Je demanderai d’ailleurs à mes joueurs qu’ils fassent preuve d’un peu de patience à mon égard : qu’ils m’excusent si, au début, je ne trouve pas directement les mots qui conviennent. En cas de problème, Vandenbrouck pourra toujours officier comme intermédiaire « .

Attitude positive

Brys veut se montrer ouvert :  » Actuellement, je ne connais encore les joueurs mouscronnois que comme adversaires. Mes impressions sont donc basées sur quelques images furtives saisies en cours de match. J’ai hâte de faire la connaissance de mon groupe de manière plus approfondie. L’une de mes principales préoccupations est de donner confiance. Car, si un joueur n’est pas en confiance, il rate tous ses gestes. Mais, si je donne confiance aux joueurs, j’attends aussi d’eux qu’ils me rendent quelque chose en retour. Pas nécessairement en termes de résultats, simplement un signal : qu’ils montrent, par leur motivation à l’entraînement et leur détermination en match, qu’ils ont envie de collaborer. Je ne reprocherai jamais à un défenseur de louper une intervention ou à un attaquant de manquer une occasion. Mais ils doivent se donner à fond. A la limite, je dirai même qu’il est important de commettre des erreurs. Car c’est en retenant les leçons de ses erreurs que l’on apprend. Le fait qu’on loupe un geste démontre aussi qu’on a osé prendre ses responsabilités. Et cela aussi, c’est important « .

Pour mieux se fondre dans son nouvel environnement, Brys compte également sur ses adjoints :  » Je suis un homme ouvert. Les conversations que j’ai eues avec Gil Vandenbrouck, avec le préparateur physique Bernard Decabooter et avec d’autres personnes de l’Excel ont été très instructives. Je ne prétends pas avoir la science infuse, ces gens-là peuvent m’être utiles. J’ai ma manière de travailler, mais je suis prêt à accepter d’autres idées « .

Autre challenge : le déracinement.  » A Mouscron, je vais être plongé dans une autre culture. Jusqu’à présent, j’avais essentiellement travaillé dans la région anversoise. Ce qui me frappe au premier abord, c’est que les Mouscronnois sont des gens chaleureux qui adoptent une attitude positive. Cela me change du négativisme qui, parfois, régnait dans les couloirs du Kiel. Et cela me plaît beaucoup, car cela correspond à mon caractère : je suis moi-même d’un tempérament positif. L’Excelsior reste un club très humain et très familial, et ce sont des données auxquelles j’accorde beaucoup d’importance « .

Etre bon dans tous les domaines

Bien que Brys soit un Anversois pure souche, on a effectivement l’impression qu’il pourrait se fondre assez rapidement dans le moule mouscronnois. Avec le président Philippe Dufermont, le courant est d’ailleurs directement passé :  » On a échangé nos points de vue et on s’est d’emblée trouvé sur la même longueur d’ondes. Il m’a demandé ce que je pensais de l’Excelsior, quel était mon objectif, ce que j’avais envie de réaliser avec ce club. Visiblement, ma vision correspondait à la sienne « .

Brys a envie de progresser comme entraîneur et il estime que l’Excel peut le lui permettre :  » Je ne suis entraîneur professionnel que depuis quatre ans. J’en suis à un stade de ma carrière où l’aspect financier n’est pas le plus important. Je dois surtout chercher à m’améliorer, à bâtir ma réputation. J’ai encore besoin de me faire un nom, de me faire connaître en dehors d’Anvers. Pour cela, le plus important est d’obtenir des résultats. Je suis confiant : j’ai obtenu des résultats partout où je suis passé. Déjà à Berchem, club avec lequel j’ai été champion de D3. Au terme de ma première saison au Germinal Beerschot, j’ai terminé 7e avec une équipe qui possédait moins de qualités que l’équipe actuelle et un budget relativement modeste. J’ai aussi remporté la Coupe de Belgique en 2005, en battant Bruges en finale. Ce jour-là, alors qu’on était en fin de saison, les joueurs étaient encore très frais, tant mentalement que physiquement. C’est le signe qu’on avait bien travaillé « .

Pourtant, lorsqu’on lui demande sa plus grande fierté, Brys n’évoque pas directement ce succès en Coupe :  » Je suis aussi très fier d’avoir permis à des joueurs comme Carl Hoefkens, Wim De Decker et François Sterchele d’être devenus internationaux « .

Comment caractériser Brys comme entraîneur ?  » Je n’ai pas eu de modèle particulier. J’ai essayé de prendre le meilleur de chacun. Certains entraîneurs, comme Eric Gerets ou Georges Leekens, sont passés maîtres dans l’art de motiver leurs troupes. Emilio Ferrera est surtout connu pour être un excellent technicien. J’essaie d’être bon dans tous les domaines. La perfection n’est pas de ce monde, mais on peut essayer de s’en rapprocher. Actuellement, je manque peut-être encore d’expérience au plus haut niveau. Je ne peux l’acquérir qu’avec le temps. L’important, à mes yeux, est de ne jamais perdre son enthousiasme. Je vois parfois des entraîneurs plus âgés qui n’ont plus le même feu sacré qu’à leurs débuts. Actuellement, c’est loin d’être mon cas : ma motivation est intacte « .

Un grand travailleur

Au niveau du style de jeu, Brys évoluait en 3-5-2 avec le Germinal Beerschot :  » Je trouve que ce système offre de nombreux avantages. Il y a trois médians centraux, ce qui permet une bonne récupération du ballon et une bonne relance vers les attaquants. Le fait que ceux-ci soient au nombre de deux leur permet de ne pas être livrés à eux-mêmes. Chaque système a sa faiblesse, et dans un 3-5-2, les joueurs de flanc ont le rôle le plus ingrat : ils doivent parcourir un nombre invraisemblable de kilomètres. Cela ne signifie pas que j’appliquerai ce système à Mouscron. Je pars du principe qu’il faut adapter le système aux joueurs, et pas l’inverse. C’est le rêve de tout entraîneur de produire un football champagne, agrémenté de nombreux buts, mais il faut tenir compte des éléments que l’on a à sa disposition « .

Si Brys vient à peine d’obtenir la licence Pro, il est entraîneur depuis qu’il a 22 ans :  » A cette époque, j’entraînais déjà les jeunes de Wilrijk tout en continuant ma modeste carrière de joueur. C’est à ce moment-là que j’ai contracté le virus. Lorsque j’ai pris en charge une équipe de D1, compte tenu du peu de références que j’avais comme footballeur, j’ai dû gagner le respect de mes joueurs. Cela m’a, peut-être, obligé à travailler davantage que les autres. A réfléchir plus, également. A regarder beaucoup de matches, à les analyser. Je considère que cela a plutôt été un avantage « .

Brys a la réputation d’être un grand travailleur :  » Je demande beaucoup d’heures aux joueurs. Plus, sans doute, que d’autres entraîneurs. Mais, avant tout, je veux prôner le respect mutuel. Je ne veux pas être victime d’une réputation. Si le groupe a besoin de travailler, il travaillera et s’il a besoin de souffler, il soufflera. Il est nécessaire de bien sentir son groupe, de savoir ce dont il a besoin. Il ne faut jamais pousser le bouchon trop loin, ni faire travailler les joueurs jusqu’à ce qu’ils s’effondrent d’épuisement. Je ne me répands jamais en propos négatifs vis-à-vis de mes joueurs dans la presse. Si j’ai une remarque à formuler, je le ferai en face. J’aime la discipline, mais c’est logique : dans la vie en communauté, il y a toujours des règles à respecter « .

Respect et tolérance

Au Germinal Beerschot, les joueurs devaient passer beaucoup de temps ensemble :  » Qu’on me comprenne bien : je n’ai jamais demandé aux joueurs de faire acte de présence au stade de 8 à 17 h. Lorsque le travail est terminé, ils peuvent rentrer chez eux. Mais il est exact que, souvent, je dispense deux entraînements par jour. Entre les deux, je trouve logique que les joueurs prennent leur repas en commun. C’est important, aussi, de participer aux activités organisées par la Ville ou les supporters. Un club, c’est un ensemble. On a besoin de tout le monde « .

Passer beaucoup de temps ensemble, c’est aussi une manière de façonner le groupe. C’est du team building à la manière de Brys. Pas besoin d’aller nécessairement faire de l’escalade ou du mountain bike.  » On peut faire du team building à chaque instant de la journée « , estime-t-il.  » Une simple conversation peut avoir des effets très positifs. Lorsqu’un joueur sénégalais et un joueur flandrien discutent ensemble, ils apprennent à se connaître et à se respecter. Dans le meilleur des cas, à s’apprécier. Tout le monde a des qualités et des défauts. Il faut l’accepter, se montrer tolérant en regard des différences et des défauts de ses partenaires. L’important est que le groupe en ressorte gagnant. Chacun doit comprendre qu’en football, on a besoin des autres pour réussir. Lorsque le groupe est fort, les individualités ressortent plus facilement. C’est ce qui s’est passé avec Hoefkens, De Decker et même Sterchele « .

par daniel devos – photo: reporters/beddegenoodts

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