Broos n’a jamais été mon entraîneur-fétiche!

Avec beaucoup de sous-entendus très explicites, et certaines réflexions au second degré qui le caractérisent, l’enfant du pays retrace son itinéraire.

En 1997, une couverture de Sport/ FootMagazine avait été reprise comme affiche publicitaire pour le Futurosport qui venait d’être inauguré. Elle représentait deux jeunes joueurs, GiovanniSeynhaeve et GonzagueVandooren, qui fêtaient un but contre le Standard. Le premier joue aujourd’hui à Péruwelz, en D3, et est devenu entraîneur de jeunes au Futuro. Le second vient de boucler la boucle et est de retour au Canonnier, qu’il avait quitté en 2000 pour le Lierse, puis pour le Standard et Genk.  » Lorsque je suis parti, je savais qu’un jour, je reviendrais « , affirme-t-il.  » Si ce n’était pas maintenant, c’eût été l’an prochain ou dans deux ans. Les circonstances ont voulu que ce soit maintenant « .

 » Lancé par Broos ? Mouais… « 

En réalité, Vandooren n’est pas un produit du Futurosport, puisque le centre de formation n’existait pas encore lorsqu’il était gamin.  » La formation, à Mouscron, se résumait à ce qu’elle était dans tous les clubs du pays, avec des entraînements en soirée sur des terrains dont l’état variait en fonction des conditions climatiques « .

A l’époque, Gonzague était encore attaquant (axial ou décentré sur la gauche) et c’est dans cette position qu’il inscrivit 12 buts en trois saisons.  » Lorsque j’ai débuté en équipe Première, j’étais encore à l’école « , se souvient-il.  » Je jouais sans pression, je me donnais à fond sans me poser de questions et je regardais ce qui se passait. J’ignorais dans quelle voie je devais m’engager. Soit je continuais mes études, soit je réussissais dans le foot professionnel. On m’a proposé un contrat. J’étais lancé « .

Par HugoBroos.  » Disons plutôt : à l’époque de Hugo Broos « . Un entraîneur qu’il retrouvera plus tard à Genk. Son premier coach dans le milieu professionnel et donc, forcément, le meilleur qu’il a connu.

 » Le meilleur ? Non, certainement pas. Il revendique la paternité du lancement de certains jeunes, mais parfois, il y a été forcé. En tout cas, ce n’est pas un entraîneur qui va faire évoluer les jeunes. A Genk aussi, il a revendiqué la paternité du lancement de certains jeunes. Vous savez, quand on fait jouer SébastienPocognoli, même à 19 ans, on ne prend pas beaucoup de risques : on sait que ce sera bon. Broos a besoin d’une équipe qui tourne, où il ne doit pas trop intervenir et où les joueurs peuvent s’autogérer. Comme c’était le cas à Mouscron à la fin des années 90. Comme c’était peut-être le cas à Anderlecht. Et comme c’était le cas à Genk la saison dernière. Mais au moindre grain de sable, il est perdu. On le voit aujourd’hui : lorsque certaines difficultés surgissent, ce n’est pas lui qui va trouver les mots qu’il faut pour booster le moral des troupes. Or, en principe, c’est dans des situations pareilles qu’on reconnaît les grands entraîneurs « .

Malgré – ou grâce à – Broos, Vandooren fait son trou au Canonnier, mais il quitte le club sur une petite dispute avec la direction. Gonzague se faisait tirer l’oreille pour signer un nouveau contrat et JeanPierreDetremmerie s’était énervé.  » J’estimais simplement mériter mieux que ce qu’on me proposait. On m’a expliqué que j’étais un jeune du club. Ben, oui, j’en étais un, mais je voyais à côté de moi d’autres joueurs venus d’ailleurs, qui ne travaillaient pas autant que moi et à qui on proposait beaucoup plus. J’ai finalement resigné, un peu sous la pression, juste avant de partir « .

 » Le Lierse, une parenthèse « 

Pour le Lierse, un club en pleine restructuration après le titre de 1997 et entraîné par WalterMeeuws.  » C’est le club qui s’était montré le plus intéressé par mes services, tout simplement. De mon côté, j’estimais que le moment était sans doute venu d’aller voir ailleurs, même si je n’en avais pas spécialement envie. Avec le recul, je ne peux pas considérer que ce fut la meilleure période de ma carrière. J’étais déjà blessé en arrivant : une légère inflammation au genou qui a nécessité une petite opération. Par la suite, j’ai encore été victime d’une entorse et d’autres petits bobos. Au total, je n’ai joué que 17 matches. Ce n’est pas l’équipe dans laquelle je me suis le plus amusé. J’avais connu mieux comme infrastructures et je n’ai pas retrouvé l’ambiance que j’avais connue au Canonnier. A vrai dire, je ne l’ai plus jamais retrouvée au cours de ma carrière. Au Lierse, la mentalité était totalement différente, plus individualiste. Ce n’était pas le meilleur club pour un jeune de 21 ans. Je partais un peu à l’aventure, j’allais habiter tout seul près d’Anvers, mais c’est aussi de cette manière qu’on mûrit. En tout cas, j’ai été très heureux que l’opportunité de partir au Standard se présente à moi « .

 » Je me suis senti bien au Standard « 

A l’époque, on comptait encore en francs belges et la somme de 50 millions (1,25 million d’euros) proposée pour Vandooren avait fait jaser : autant d’argent pour un joueur pareil ?  » J’admets que je n’avais pas prouvé énormément à la chaussée de Lisp, mais je pense avoir démontré au Standard qu’il ne s’était pas trompé en misant sur moi. Sur quatre années en bord de Meuse, j’ai joué trois saisons et demie comme titulaire. C’est à Sclessin que je suis devenu un footballeur adulte : il y avait la pression du public et des résultats, il fallait composer avec les stars qui m’entouraient. Mais comme les supporters rouches apprécient les footballeurs qui mouillent leur maillot, je m’y suis senti bien. La mentalité de l’endroit correspondait à la mienne. Dommage qu’à l’époque, c’était un peu la gare de transit de Sclessin. A chaque mercato, il y avait énormément de passage. Mais l’ambiance, malgré quelques sautes d’humeur, restait dans l’ensemble très bonne « .

C’est aussi au Standard que Vandooren est devenu un arrière gauche.  » Un peu malgré moi. IvicaDragutinovic s’était occasionné une déchirure. Il fallait quelqu’un pour dépanner pendant quelques mois. J’ai débuté contre l’Anderlecht d’ IvicaMornar. Cela s’est très bien passé. Lorsque Drago est revenu, j’ai beaucoup bougé pendant deux ans : devant, derrière, au milieu. Cela ne me dérangeait pas spécialement, mais je devais chaque fois me réadapter et cela m’a peut-être aussi privé d’un beau transfert à l’étranger alors que des clubs étaient intéressés. Leurs émissaires venaient voir un arrière gauche et découvraient un… milieu gauche ou un attaquant. C’est comme cela, je ne vais pas m’appesantir là-dessus mais cela restera un petit regret « .

Le premier entraîneur de Vandooren au Standard fut MichelPreud’homme.  » Puisque vous me demandiez tout à l’heure le meilleur entraîneur que j’ai connu, je vous réponds : c’est lui, et de loin. Il a tout. C’est un homme qui connaît le terrain, qui sait motiver ses troupes jour après jour et pas uniquement le jour d’un match, qui sait rigoler avec les joueurs tout en gardant une certaine distance avec eux. Je pourrai vous dire, dans quelques mois, comment cela se sera passé avec EnzoScifo, mais pour l’instant, au niveau de la qualité des coaches que j’ai côtoyés, il n’y a pas photo « .

Après un an, Preud’homme céda le relais pour trois championnats à DominiqueD’Onofrio.  » Un tout autre style. Il avait tendance à… s’énerver un peu vite. Mais, qu’on l’apprécie ou pas, les résultats plaident pour lui « .

Les cinq derniers mois de Vandooren à Sclessin furent difficiles.  » On avait placé PhilippeLéonard à l’arrière gauche et je me suis retrouvé davantage sur le banc que sur le terrain. J’ai senti, une nouvelle fois, qu’il valait sans doute mieux aller voir ailleurs « .

 » Genk : un bon club, tout simplement « 

En août 2005, Vandooren quitte donc le Standard pour Genk où il retrouve son… entraîneur-fétiche, Broos.  » C’est ce que tout le monde pense. En fait, au moment où j’ai signé à Genk, l’entraîneur était… René Vandereycken ! Mais il n’est resté que trois jours, j’ai à peine eu le temps de le saluer. Ai-je été heureux de retrouver Hugo ? Joker ! Un beau gros joker !  »

De Genk, Gonzague garde le souvenir d’un club ambitieux, doté d’infrastructures de qualité et de supporters chaleureux.  » Un… bon club, tout simplement, où l’on joue bien au football. Mais avec une mentalité différente. Je ne pensais pas que c’était à ce point-là, mais pour avoir vécu des deux côtés de la frontière linguistique, je peux l’affirmer : la Flandre et la Wallonie, c’est différent. Au Standard et à Mouscron, on rigole à l’entraînement. Au Lierse et à Genk, on rigole en dehors du stade, mais pas pendant les heures de travail ! Le boulot, c’est le boulot « .

Si Sclessin était parfois un volcan, à Genk c’était le calme plat.  » Aucune réaction dans le groupe, aucun coup de gueule. Parfois, une bonne tempête peut servir à tout balayer, mais lorsqu’on ne dit rien et qu’on reste avec des ranc£urs sur l’estomac, l’ambiance s’envenime. C’est cela le problème de Genk, davantage que le départ de certains joueurs. Car qui est parti ? KevinVandenbergh qui jouait très peu et Pocognoli dont la perte a effectivement été ressentie, mais ce n’est pas le départ d’un seul joueur qui va modifier l’ambiance. On peut dire qu’en gros, le groupe actuel est le même que celui de la saison dernière. L’an passé, on avait un peu plus de chance, on marquait plus facilement et tout s’enchaînait. La perspective d’une défaite ne nous effleurait même pas l’esprit. On était dans une spirale positive et il suffisait à Broos de laisser tourner. Cette saison, l’un ou l’autre grain de sable s’est glissé dans la mécanique. C’était à l’entraîneur à trouver une solution. L’a-t-il trouvée ? »

 » Revenir chez soi n’a pas de prix « 

Aujourd’hui, Vandooren est de retour chez lui.  » Rien n’a vraiment changé au Canonnier. La salle de presse, la salle des joueurs, les vestiaires, l’entourage : tout est resté en l’état. La surprise désagréable est venue des terrains, que ce soit le terrain principal ou d’entraînement. Jadis, ils étaient en bien meilleur état. Peut-être parce que les employés communaux s’en occupent moins qu’autrefois, mais surtout parce que l’ancien entraîneur des gardiens DidierVandenabeele était jadis aux petits soins pour la pelouse et coule désormais des jours heureux dans le Midi de la France. Tant mieux pour lui. Nous, on doit faire avec. Au niveau des joueurs, je n’ai retrouvé que trois copains d’alors : SteveDugardein, AlexandreTeklak et MathieuAssouEkotto. J’essaierai d’apporter ce que je peux, avec mes qualités, avec le bagage que j’ai acquis au fil de mes expériences précédentes et en sachant que je vis actuellement mes… meilleures années, car je n’ai que 28 ans ! Mais je suis heureux de retrouver mes racines, mes amis. J’aurais pu gagner plus au FC Dender, et même au Brussels, mais Mouscron était ma priorité. Le fait de revenir chez moi n’a pas de prix « .

Pour l’instant, c’est encore un peu difficile. La famille est en plein déménagement.

La Saint-Valentin, Vandooren l’a passée à…300 kilomètres de son épouse, qui réside toujours à Aix-la-Chapelle, dans l’appartement que le couple et leurs deux enfants occupaient lorsque Gonzague jouait à Genk. Gonzague cherche une maison à Mouscron. En attendant, il a trouvé asile chez ses parents, où il a retrouvé la chambre qui était la sienne lorsqu’il était gamin. Avec toujours le même poster au mur : celui de… Gonzague Vandooren !  » Ce n’est pas que je suis fan de moi-même, mais j’aime bien cette photo. Elle a été prise pour une publicité de Canal+. On me voit sur le dos de Teklak et l’image est censée symboliser le fait que, sur la chaîne, on proposait aussi du… western !  »

C’est du Vandooren tout craché, cela : un homme qui fait son boulot sérieusement, mais sans se prendre au sérieux.

par daniel devos- photos: reporters/ gouverneur

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