Bons Belges

L’analyse de Filip Dewuf.

Alors même que les organisateurs annonçaient fièrement la reconduction, pour cinq ans, de leur contrat avec leur sponsor principal, une firme sud-coréenne, un contrat qui serait le plus juteux de l’histoire australienne, les deux principaux représentants du boom asiatique en tennis ont sombré. Paradorn Srichaphan, le wonderboy de l’année dernière, a dû s’avouer vaincu face au héros local, Mark Philippoussis. L’autre joueur asiatique, Hyung-Taik Lee, a reçu une leçon de tennis des oeuvres d’ Andre Agassi. Pourtant, l’habitant de Séoul avait remporté le tournoi préparatoire de Sydney, avec les félicitations du jury et du président de la Corée du Sud.

C’est un petit accroc pour l’Open d’Australie, qui souhaite se profiler comme le tournoi du Grand Chelem d’Asie et du Pacifique. Les droits TV d’Extrême-Orient et les sociétés qui font la file pour s’associer au tournoi australien lui confèrent évidemment des perspectives formidables. L’ATP et la WTA ont d’ailleurs annoncé qu’elles étaient sur la même longueur d’ondes. Dans deux ans, les messieurs se produiront à trois reprises en République Populaire de Chine, à Shanghai, Pékin et Hongkong. L’ATP espère ainsi rendre un second souffle à un circuit qui souffre beaucoup de la récession économique, en pénétrant un énorme marché très prometteur.

Le circuit féminin fera un détour à Shanghai et à Bali. La paradisiaque île indonésienne espère faire oublier l’attentat meurtrier qui l’a ravagée. Les organisateurs auraient déjà contacté Anna Kournikova pour conférer un attrait supplémentaire à leur tournoi, ou, pour le dire autrement, attirer public et sponsors. La demoiselle russe conserve une valeur commerciale inestimable mais ses qualités techniques semblent en régression constante. Justine Henin est bien placée pour le savoir: l’an dernier, elle avait concédé sept jeux au mannequin du tennis. Cette fois, elle ne lui en a laissé qu’un seul. Après son mariage et un entraînement hivernal très poussé, la pupille de Carlos Rodriguez est plus solide sur ses jambes. Son match à suspense contre Davenport, qui est peut-être bien le match du tournoi,l’a démontré.

Justine a été suffisamment forte pour survivre à la première semaine du Grand Chelem mais manifestement pas assez pour écarter Kim Clijsters de la victoire au tournoi de Sydney. La Limbourgeoise est en pleine forme car elle a également profité de l’été australien pour s’entraîner d’arrache-pied. Là où Juju frappe souvent fort pour surprendre son adversaire, Kim parvient à maintenir cette puissance tout en élargissant son jeu. C’est un atout décisif dans les grands matches et son arme fatale face aux soeurs Williams.

Les deux reines du tennis ont atteint péniblement leur vitesse de croisière. Au premier tour, Serena en a été quitte pour une belle peur, et Venus a eu la possibilité de trouver ses marques, dépourvue de concurrence. Il semble que certains athlètes n’éprouvent aucun problème à entamer pareil événement sans le moindre rythme alors que d’autres en paient l’addition cash.

Jennifer Capriati, sacrée deux années de suite en Australie, a été éliminée dès le premier tour. Une opération destinée à faire partir des taches noires dans sa vision a bouleversé sa préparation. Son manque d’entraînement, combiné à une volonté défaillante, a mué Jenny en joueuse de niveau moyen, qui semble condamnée à achever sa carrière dans l’ombre de la famille Williams.

Pas de vacances?

On a remis en question la trop courte période de repos des tennismen. Les participants se sont épanchés dans tous les journaux: ils n’ont plus le temps de prendre des vacances ni de se préparer. La saison a-t-elle été trop longue ou l’Open d’Australie a-t-il commencé trop tôt? On a repassé le programme à la loupe. Wimbledon serait décalé, l’Open australien se jouerait au printemps, etc.

Un tel chamboulement est difficilement réalisable. L’Open d’Australie se déroule pendant les vacances estivales de l’Hémisphère Sud et les organisateurs ne ménagent pas leurs efforts pour appâter les spectateurs en mettant sur pied toutes sortes d’animations extrasportives. Déplacer le tournoi en février ne ferait certainement pas de bien à l’assistance. Et qu’adviendrait-il des tournois de préparation? Devraient-ils suivre le mouvement? Quelles organisations prendraient les places ainsi libérées, sachant que les vedettes sont opposées aux matches qui ont lieu durant les premières semaines de l’année?

En fait, ce sont les étoiles qui insistent pour obtenir une plus longue trêve, car ce sont elles qui ont le programme le plus exigeant, chaque saison, même s’il faut nuancer leurs réclamations. Serena Williams et Jennifer Capriati, soi-disant victimes d’une hibernation difficile, ont participé, en compagnie de quelques autres, à la lucrative Collins Cup de Dublin, début décembre. La semaine suivante, Seles et Kournikova ont reçu des honoraires royaux pour quelques exhibitions. éa ne les empêche pas de se plaindre que la saison est trop longue.

On ne peut toutefois passer sous silence le grand nombre de blessés, surtout côté masculin. Johansson, Haas, Clement, Rusedski et Henman sont touchés, ce qui a plus ou moins décapité le tournoi avant même son début. Les joueurs exigent sans cesse plus de leur physique, pas seulement à cause d’un nombre excessif de tournois, mais aussi en sollicitant exagérément des parties fragilisées de leur corps. Gagner de l’argent et prendre des points est devenu si essentiel qu’on passe outre des petites blessures et qu’on reprend trop vite le collier après une revalidation. Philippoussis a déjà subi trois opérations au genou. Il en doit au moins une à une tentative de retour trop rapide.

Marat Safin et Xavier Malisse ont été contraints à l’abandon à cause de leurs manquements. Le Russe peut invoquer des circonstances atténuantes: il a eu trop peu de temps.

Le coeur d’X-man

Il est plus difficile d’accepter les excuses de X-man, qui a imputé ses maux à un programme trop chargé. Le Courtraisien a en effet disputé son dernier match de l’année fin octobre. Selon ses propres dires, il a travaillé sa condition très dur pendant l’hiver. Les sept matches, dont trois doubles mixtes, qu’il a disputés dans les tournois préliminaires auraient normalement dû lui assurer la base nécessaire pour se distinguer à l’Open d’Australie. Il semble que la pression croissante, qui l’oblige à être prêt dès le début de la saison, ait fragilisé son corps. Il a d’ailleurs à nouveau souffert de tachycardie.

Les autres représentants masculins de la Belgique ont été confrontés à des problèmes d’une autre nature. Quoi qu’il en soit, avec sept participants au début, dont six ont atteint le tour suivant, la Belgique a obtenu un joli succès collectif, même si Kristof Vliegen n’a pas répondu présent. Agé de 20 ans, il est entré dans le circuit par la grande porte et il semble vouloir poser la latte plus haut, volontairement. Il a passé le cap des années folles et, bien entouré, il poursuit son bonhomme de chemin. Dans les prochains mois, il sera l’homme à suivre de près.

Christophe Rochus veut oublier une année 2002 particulièrement sombre. Il ne se débrouille pas mal du tout. Son frère cadet reste à un cheveu de l’exploit mais cette fois, un manque de conviction au début de son match et un abattage trop important en fin de rencontre ont coûté la victoire à Olivier face à l’excellent Tchèque Novak. Sa prestation est quand même de bon augure pour les tournois suivants. Dick Norman a affronté l’Espagnol Moya avec trop de respect et trop peu de confiance en ses moyens. Maintenant qu’il a franchi un cap psychologique important en entrant dans le top 100, il devrait se débarrasser de ses doutes et témoigner moins de respect envers les grands noms.

Filip Dewulf

« Henin est plus solide sur ses jambes »

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