Bölöni vs Jacobs

Il ne reste que quatre rounds avant l’ultime coup de gong. En toile de fond de la lutte pour le titre, les deux coaches se livrent un match dans le match. Avec leurs personnalités, leurs atouts et leurs défauts…

Le duel pour le titre entre Anderlecht et le Standard, c’est aussi le mano a mano entre deux des meilleurs techniciens de notre championnat, Ariel Jacobs et Laszlo Bölöni. Deux hommes de la même génération, nés en 1953. Deux intellos de formation universitaire. Deux bêtes de foot qui refusent d’être people.

 » Un sourire, Monsieur Bölöni ! « , lança – taquin – un supporter liégeois qui actionnait son appareil photos après Mouscron-Standard. Jacobs, lors de ses conférences de presse, arbore toujours son masque de marbre… Ces deux poids lourds de leur corporation cachent bien leurs émotions car ils savent que ce n’est pas le plus important.

Voici notre enquête en trois rounds.

1. Leurs vrais caractères Que cache Bölöni derrière une attitude parfois froide et cassante ?

 » Cela peut paraître étonnant mais Bölöni et Jacobs se ressemblent énormément « , signale Jean-François Lecomte, l’entraîneur des gardiens du Standard. Lecomte a travaillé sous les ordres de Jacobs du temps des belles années de La Louvière.  » Certains les trouvent sévères après un match. Ils se contrôlent mais je peux vous assurer qu’ils savent tous les deux rire et déconner gentiment dans la vie au quotidien d’un effectif. Bölöni et Jacobs ont peut-être une carapace extérieure dure mais le contenu est riche et chaleureux. Ils sont respectés. C’est un honneur et un bonheur de travailler avec de telles pointures.  »

Lucien D’Onofrio avait pris le temps de la réflexion avant de désigner le successeur de Michel Preud’homme. Et c’était important, presque vital. On ne pouvait pas confier un tel héritage (la fierté d’avoir décroché le titre après 25 ans d’attente, des jeunes en or, un outil de travail de qualité, etc.) au premier venu. A l’exception d’ Eric Gerets, un coach belge n’aurait-il pas été écrasé par ce poids et les comparaisons avec MPH parti à Gand ?

Bölöni, c’est un coup dans le mille. Il respecte le travail accompli mais ne s’est pas attardé sur ce qui a été vécu au Standard la saison passée. Il avait un regard frais et neutre sur cet acquis.

 » Pour nous, c’est un deuxième père « , dit Christian Benteke.  » Je découvre un métier et son apport est important. Après les entraînements, je travaille mes frappes avec lui, la position de mon corps, de mes bras, etc. Il veut la perfection car le chemin est long pour un jeune comme moi. Je le mesure bien. Le coach nous parle beaucoup. Nous savons tous qu’il a lancé beaucoup de jeunes au cours de sa carrière.  »

Frans Masson, T3 du Standard précise :  » J’aurais aimé le rencontrer 15 ans plus tôt. Ma carrière de directeur de l’école des entraîneurs de l’Union belge aurait été plus riche, ma vision du métier de coach aussi car c’est un top comme on en rencontre peu en Belgique. Bölöni a un immense bagage et on apprend quelque chose tous les jours. Il impose naturellement sa classe et son autorité.  »

Directeur technique du Standard, Dominique D’Onofrio partage le même point de vue :  » L’intelligence du personnage saute aux yeux. Cet homme a un immense vécu et pas seulement comme sportif. Il a réussi de hautes études mêlées à une grande carrière de joueur. Tout en gagnant la Ligue des Champions, il potassait ses cours pour devenir chirurgien-dentiste. Quand on veut, on peut, c’est un peu la devise de sa vie. Il a vécu sous le régime communiste roumain tout en ne renonçant pas à ses idéaux de liberté. Bölöni évoque parfois la façon dont il a découvert le monde occidental à Bruxelles : c’est magnifique. C’est une personnalité très riche qui a un point de vue toujours étayé. Il a été marqué par ce qu’il a vécu au Portugal et surtout au niveau de la formation en France. Quand il s’occupe d’un jeune, c’est pensé, réfléchi. Les plus jeunes ne s’habillent pas chez les professionnels. Ils se changent dans le vestiaire des -21 ans et rejoignent le bloc professionnel à pied. Ce n’est pas loin mais c’est symbolique : ils ont encore du chemin à faire. Je suppose que cela a étonné Benteke après son retour de Genk ou un jeune comme Cyriac qui est déjà une star en Côte d’Ivoire. Mais Bölöni leur rend service. Un vestiaire n’est pas un endroit facile. Ils ne peuvent pas être pollués par des tensions et autres ambitions ou raisonnements comme il y a en a dans tous les vestiaires : ils doivent garder leur fraîcheur.  »

 » Le coach gère cela de main de maître et s’inscrit parfaitement dans notre philosophie. Il comprend tout très vite. Le Standard a souvent joué avec une équipe dont la moyenne d’âge dépassait tout juste les 20 ans. Dans deux ou trois ans, Benteke sera à son top et sera un des meilleurs attaquants de pointe de D1. On reparlera alors de tout ce qu’il aura appris avec Bölöni. Son vécu de rassembleur lui permet de rester maître du jeu et de ses émotions en toute circonstance. Un homme qui a tout donné pour atteindre ses objectifs ne peut pas être déçu quoi qu’il puisse arriver. « 

Si on peut le trouver cassant ou même un peu hautain pendant les conférences de presse, les joueurs apprécient son calme.  » Une saison, c’est aussi une suite de moments stressants « , avance Marcos.  » La saison passée, le Standard rêvait du titre. C’était une obsession et Preud’homme vivait les événements avec son caractère. Il était très nerveux alors que Bölöni est plus cool. Cela ne l’empêche pas d’être pointilleux et exigeant. C’était nécessaire car, finalement, en plus de son devoir de confirmation, le Standard a élargi son champ tactique tout en continuant à lancer beaucoup de jeunes.  »

Pourquoi Jacobs n’a pas besoin de psy pour son groupe ?

 » Au fil des ans, Ariel Jacobs a incontestablement gagné en assurance « , dit Herman Van Holsbeeck.  » A l’époque où nous militions tous deux au RWDM, en 1999, je me souviens qu’il m’avait demandé un jour s’il était bel et bien fait pour le métier d’entraîneur. Son entrée en matière au plus haut niveau s’était soldée, il est vrai, par un piètre 0 sur 21. Il avait pu mesurer le gouffre qui sépare la théorie de la pratique et il s’était posé légitimement des questions sur ses capacités à passer de l’une à l’autre. Personnellement, j’avais foi en ses compétences. Je savais qu’il était dans le bon. Il lui fallait simplement du temps pour que tout se mette en place. Après coup, il engrangea un premier succès, suivi d’un deuxième, et l’équipe était définitivement lancée. Au même titre que lui, d’ailleurs. Par la suite, il ne m’a en tout cas plus jamais questionné à propos de son statut. Il avait grandi dans son rôle et s’y sentait parfaitement bien. Huit années plus tard, c’est un technicien plus mûr et plus sûr que j’ai retrouvé à Anderlecht. Les tout bons résultats forgés avec La Louvière, entre autres, avaient manifestement dopé sa confiance. A raison car remporter la Coupe avec des moyens limités n’est pas vraiment à la portée du premier venu. Méthode et discours porteur sont absolument requis dans ces conditions. De ce point de vue-là, Jacobs est le top. Intellectuellement, il se situe au-dessus de la mêlée. Et il n’a pas besoin, non plus, d’un psychologue pour le seconder dans ses rapports avec les joueurs…  »

Allusion à peine voilée, évidemment, à Frankie Vercauteren, qui tablait plus souvent qu’à son tour sur Johan Desmadryl pour faire passer un message. L’actuel T1 des Mauves, lui, s’y prend seul. En trois langues de surcroît : français, néerlandais, anglais. Fruits d’un passé de traducteur à l’OTAN. Au besoin, il manie aisément aussi l’allemand et l’espagnol.

 » Il jongle avec les mots dans chaque langue « , affirme Thomas Chatelle.  » Mais il ne s’embarrasse jamais de fioritures, il va à l’essentiel. Sa théorie d’avant match, il l’expose en trois minutes. Et tout est dit à ce moment.  »

 » Ce que j’apprécie chez lui, c’est son honnêteté « , renchérit Jonathan Legear.  » L’année passée, quand mon nom a été cité au Dinamo Moscou alors que je ne faisais pas partie du onze de base ici, il m’a dit franchement qu’il ne pouvait pas m’assurer une place de titulaire, vu qu’en football, ce genre de garantie n’existe pas. J’ai apprécié ce langage. D’autres, pour me retenir, m’auraient vraisemblablement fait miroiter une présence imminente en équipe fanion. Il ne l’a pas fait et c’est tout à son honneur.  »

D’autres détails encore font qu’il a la cote auprès des joueurs. Ses SMS par exemple.  » J’étais en retraite avec la sélection polonaise, au mois de juin passé, quand il m’a envoyé un message de sympathie à l’occasion de mon 28e anniversaire « , souligne Marcin Wasilewski.  » Je n’en revenais absolument pas : il était en vacances à ce moment-là, et il avait malgré tout une petite pensée pour moi. Jamais encore, dans ma carrière, je n’avais eu droit à une attention pareille d’un coach. Et je n’étais pas le seul : Jan Polak, qui était retenu avec la Tchéquie, au même moment, eut droit lui aussi à quelques encouragements. Ce sont là des petites choses qu’on n’oublie pas et qui respirent la grande classe. L’entraîneur, c’est vraiment un gentleman.  »

Trop gentil par moments, peut-être ? Le manager sportif d’Anderlecht ne le contredit pas vraiment.  » En début de saison, il nous a fait remarquer que jouer Bate Borisov avec deux gars de 20 ans en pointe ( Matias Suarez et Kanu) ce n’était pas l’idéal. On en a pris bonne note, sans plus. Un autre aurait sans doute frappé du poing sur la table jusqu’à ce qu’il obtienne le concours d’un chevronné. A choisir, je préfère quand même Jacobs, champion des bonnes manières et des bons sentiments. Pour nous, c’est un ambassadeur de rêve.  »

2. Leurs secrets de coaches L’atout n°1 de Bölöni est-il de brouiller toutes les cartes ?

 » Il est très fort tactiquement et sa lecture du jeu m’impressionne « , explique Dominique D’Onofrio. Ses trouvailles ont cependant été plus éclatantes sur la scène européenne que dans le cadre du championnat. Les Standardmen se souviendront longtemps de la perfection de l’épure tactique de leur équipe contre Liverpool, Everton, etc. Les devoirs des Liégeois ont alors frisé la perfection. En championnat, ils ont longtemps cherché une confirmation, un match repère. Ils l’ont finalement obtenu au Club Bruges où le Standard retrouva sa vitesse de croisière européenne. Au départ, le coach est un adepte du 4-3-3. En été, il étudia son équipe dans son habituel 4-4-2 avant de procéder à des glissements structurels très importants. Le départ de MarouaneFellaini l’obligea à continuer dans cette voie. Il a considérablement élargi le répertoire tactique de notre formation. L’équipe était déjà très forte la saison passée mais elle est désormais imprévisible pour l’adversaire. En coupe d’Europe, elle s’est distinguée par son organisation, sa saine agressivité, son côté décomplexé face à des géants et la vitesse de son redéploiement. C’était le jeu osé d’un coach sans complexe qui se dit que même le Standard peut faire trembler Liverpool. Pour y arriver, il a installé Milan Jovanovic à gauche. Il l’a convaincu et cela lui a permis de placer Axel Witsel dans l’axe (après le départ de Fellaini) et d’utiliser son troisième attaquant, Igor de Camargo. Le 4-4-2 était devenu un 4-2-3-1. Il a utilisé sans cesse ses hommes au bon moment. Il connaissait Wilfried Dalmat et Benjamin Nicaise, deux de nos renforts. Moi, je ne retiens pas un système, 4-2-3-1, 4-3-3 ou 4-4-2, on peut dire ce qu’on veut mais c’est d’abord l’animation qui compte. Si un des deux attaquants ne bouge pas en 4-4-2, il ne sert à rien. Bölöni veut jouer haut et mettre la pression dans le camp adverse.  »

Au fil du temps, le groupe a exprimé au coach son envie d’en revenir à un 4-4-2 classique dans le cadre du championnat. Jovanovic n’a pas été le seul à prôner cette occupation du terrain en championnat. C’était aussi le cas de Dieumerci Mbokani. Ils voulaient évoluer plus près du gardien adverse. Mbokani se sentait trop seul en pointe et Jova rechignait un peu à se décoller sans cesse à gauche. Bölöni a-t-il surestimé la qualité du championnat belge en étant parfois trop prudent ?

 » Mais pas du tout « , rétorque tour de suite Dominique D’Onofrio.  » La D1 belge n’est pas facile. A domicile, l’efficacité offensive n’a pas toujours été au rendez-vous, comme ce fut le cas contre Charleroi ou Zulte-Waregem. Si vous me parlez d’un 4-2-3-1, je précise qu’il y avait constamment quatre attaquants devant la défense de ces équipes. Une bonne équipe attaque et défend en bloc mais cela ne marche pas à tous les coups. Bölöni ne lâche rien et transmet bien sa rage. A Mons, par exemple, le Standard a émergé sur le fil. Le coach motive bien ses hommes. Le haut niveau, il connaît. « 

Bölöni doit désormais tenir compte d’un facteur très important : la fraîcheur physique. Il a souvent tourné avec le même 11 de base.  » A ce niveau-là, je pense qu’Anderlecht détient un petit plus par rapport à nous « , affirmait-il la semaine passée.  » Les Bruxellois ont rapidement été éliminés en coupe d’Europe. Le Standard a eu des rendez-vous importants et cela a peu plus éprouvé les organismes. En fin de saison, cela pèse dans les jambes et nous en tenons compte. « 

Expert, Bölöni ne parle jamais de ses adversaires et cache souvent ses cartes comme ce fut le cas lors d’une blessure de Steven Defour qui boitait bas quand la presse était dans ses parages, histoire de cacher la possibilité d’un retour à la compétition. Le coaching, c’est aussi brouiller les cartes via les médias et ce n’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces. Nicaise entre souvent au bon moment pour colmater des brèches. Landry Mulemo a finalement bien remplacé Dante. Mehdi Carcela se débrouille sur les ailes. Benteke monte en puissance et remplace calmement Jova ou Mbokani. Mohamed Sarr a longuement fréquenté l’infirmerie durant le deuxième tour : là aussi, ce fut un moment délicat mais Bölöni a gardé son calme et fait confiance à Tomislav Mikulic.  » Le coach reste toujours serein « , estime Dominique D’Onofrio.  » Notre diversité tactique a permis à cette équipe de grandir. Quand je vois Defour et Witsel à l’£uvre, je suis ébahi par la maturité tactique qu’ils ont acquise grâce à Bölöni : cet homme est un fameux stratège.  »

Comment Jacobs a-t-il prouvé qu’il était tactiquement plus fort qu’on le pensait ?

 » Tactiquement, Jacobs est plus fort que je ne le pensais « , remarque Philippe Collin. Un bien beau compliment, assurément, dans le chef du secrétaire général du RSCA, admiratif de ceux qui, en fins stratèges, plient une partie grâce à une judicieuse disposition de départ ou à des changements pertinents. Et contrairement à Vercauteren, régulièrement vilipendé par le n°2 du club pour ses errances, en Ligue des Champions surtout, l’actuel T1 est de ceux-là. Plusieurs exemples l’attestent, dont le dernier en date au Parc Astrid. Dans l’optique du sommet contre le Club Bruges, on se souviendra que le coach du Sporting avait positionné Jelle Van Damme, un cran plus haut que d’habitude pour endiguer les assauts de son vis-à-vis d’un soir, Nabil Dirar. Idem à droite pour Guillaume Gillet, opposé sur sa portion de terrain à Koen Daerden. Bloqués sur les ailes, les Bleu et Noir l’étaient tout autant dans l’axe central de la ligne médiane, où les routiniers Polak et LucasBiglia ne firent qu’une bouchée de Vadis Odjidja et Marc-André Kruska. A l’aller déjà, le technicien bruxellois s’était montré plus inspiré que son homologue, JackyMathijssen, en remodelant son entrejeu après la pause, avec Legear à gauche et Gillet sur l’autre flanc. Mbark Boussoufa, décalé à gauche au départ, fut alors repositionné au centre. Avec succès, puisque le lutin marocain inscrivit le but égalisateur durant cette période.

Au Standard, en tout début de saison, le même joueur avait par ailleurs fait l’objet d’une première astuce de la part de son coach. Ce jour-là, le Diegemois avait décidé de se priver d’une pointe, en se bornant au seul Bous dans un rôle en décrochage. Comme les hommes de couloir des Rouches, Dante et Marcos, étaient contrés par les ailiers anderlechtois Legear et Stanislav Vlcek, Momo Sarr et Oguchi Onyewu durent s’occuper de la relance. Avec, pour conséquence, un nombre incalculable de balles perdues. Au final, les gars de Bölöni l’avaient emporté sur le fil, malgré tout, suite à un coup de patte de Jovanovic. Au retour, Jacobs allait toutefois savourer sa revanche avec une victoire par 4 à 2, après avoir pourtant été mené 1-2. Une victoire qui s’inscrit somme toute dans la logique cette saison. Car face au top-5 belge, le T1 du Sporting présente de loin les meilleures statistiques de sa corporation : il a gagné à domicile contre le Standard, le Club Bruges, Genk et Westerlo. Et il a compensé son draw face à La Gantoise (2-2) par une victoire chez les Buffalos (1-2). Dans le cadre de ce match-là, aussi, Jacobs innova en faisant glisser Gillet à droite. Un véritable coup dans le mille puisque le Liégeois fut impliqué dans les deux buts des siens. Difficile de faire mieux. Le 4-2-3-1, qui venait de relayer le 4-3-3, avait prouvé toute son utilité.

 » Après la défaite contre le Cercle, nous étions d’avis, l’entraîneur et moi, que notre 4-3-3 était devenu trop prévisible « , raconte Van Holsbeeck.  » C’est lui qui a alors plaidé en faveur de la nouvelle approche, qui a immédiatement porté ses fruits à Gand. J’en déduis une grande réceptivité de la part des joueurs, qui s’est vérifiée aussi lors du changement de conception face au Club Bruges. Jacobs a donc accompli un excellent travail en profondeur, sans compter que ses changements ont régulièrement été marqués du sceau du succès. Pour moi, un grand entraîneur est celui qui voit juste et qui opère des modifications judicieuses dans 95 % des cas. J’en conclus donc, au vu de la trame des matches, que Jacobs est un grand entraîneur. Il suscite d’ailleurs un profond respect auprès du noyau, vu la pertinence de ses options. Il aurait même pu prétendre à plus, lors des sommets, car la victoire des Rouches à Sclessin n’a tenu qu’à un cheveu. Quant au nul concédé face à La Gantoise au Parc Astrid, n’oublions quand même pas que Legear a eu le 3-0 au bout du pied avant de s’emmêler malencontreusement les pinceaux. A plusieurs reprises aussi, l’équipe a été menée cette saison. La plupart du temps, elle a redressé la barre grâce à une intervention du coach et de sa lecture parfaite du jeu. Comme à Courtrai entre autres où, à la pause, il a sacrifié au back droit Nemanja Rnic, impliqué sur le but d’ouverture, au profit de Gillet, tout en faisant monter Hernan Losada au jeu. Du coup, de 1-0, le score est passé à 1-3.  »

3. Où se situe leur avenir ? Bölöni sait parfaitement que son travail n’est pas fini au Standard

 » Je vais réfléchir « , affirma Bölöni quand on lui demanda, après Mouscron-Standard, si sa réponse serait la même que celle d’Eric Gerets si on lui proposait de coacher les Diables Rouges. Il arrive au terme de son contrat d’un an au Standard. Il aurait des contacts en France et a été cité comme éventuel coach de l’équipe nationale de Roumanie. La situation est désastreuse dans ce pays : les grands scandales se succèdent, la corruption est effrayante, des présidents de clubs et des arbitres sont emprisonnés. Bölöni n’aurait rien à gagner en signant à Bucarest.

Le Standard lui va comme un gant. Il y a quelques mois, Bölöni déclara à Sport/Foot Magazine :  » Je peux être plus qu’un simple entraîneur pour le Standard. Si ce club le veut, je peux aussi être un conseiller très précieux. Je sais quand et comment on peut intégrer un jeune, si on peut vendre ou pas un élément important, etc.  » Bölöni et la direction du Standard sont sur la même longueur d’onde et le coach déclara récemment :  » Je ne trahirai jamais Lucien D’Onofrio.  » Il tiendra le Standard au courant de ses contacts. C’est quand même assez significatif même si ce n’est pas encore une garantie pour l’avenir. Bölöni mesure parfaitement que son travail ne sera pas fini au terme de la saison. Il meurt visiblement d’envie d’aller plus loin avec les jeunes.

Le Standard mesure probablement qu’il est l’homme de la situation. Les petites mains du Standard apprécient sa force de travail. A gauche et à droite, des collaborateurs du club nous ont dit :  » Il n’y a jamais eu un coach aussi travailleur que lui au Standard. A 20 h, en plein hiver, Bölöni remet une couche avec des jeunes qui doivent améliorer un centre ou une reprise de volée. Et quand quelqu’un rechigne, il ajoute 30 centres à leur programme. « 

La direction du Standard sait tout cela. Elle ne tardera d’ailleurs pas à entamer les discussions pour une éventuelle prolongation de contrat. Chacun devra abattre ses cartes. Le coach désire-t-il un contrat de plusieurs saisons ? Tout l’indique. Le Standard a-t-il envie de se lier longtemps avec le même homme ? Ce n’est plus dans les habitudes de la maison. Les coaches qui n’ont qu’un contrat d’un an sont souvent plus ardents au travail. Les bruits qui arrivent d’Angleterre sont alarmants : le championnat le plus riche au monde est frappé par la crise financière et de nombreux clubs y font de la corde raide. Personne ne peut prévoir l’avenir et le Standard ne renoncera pas à son orthodoxie budgétaire…

Y a-t-il donc un terrain d’entente entre le Standard (qui n’a pas envie de revivre l’épisode MPH) et Bölöni ? La presse en doute parfois.  » Le Standard a toujours eu la même approche avec ses coaches « , conclut Dominique D’Onofrio.  » La saison passée, nous voulions garder Preud’homme mais c’est lui qui a choisi de partir. Cette fois aussi le Standard espère prolonger son aventure avec Bölöni. La preuve : nous devrions entamer les négociations avant la fin de la saison, peut-être avant que le titre ne soit attribué, fin avril, début mai.  »

Affaire à suivre de près car la direction du Standard espère vivre un été tranquille. Il y a un an, la presse tenta durant des semaines de savoir si MPH allait rester ou pas. Le jeu du chat et de la souris entre Preud’homme et le Standard, donc leur mésentente, jeta un léger voile de tristesse sur les lendemains du titre. Lucien D’Onofrio a-t-il envie de revivre le même scénario ? Pas sûr car il a d’autres chats à fouetter comme la réalisation de son dernier grand souhait : la construction d’un nouveau stade. A sa façon, Bölöni est aussi un maçon.

Anderlecht devrait voir en Jacobs le directeur technique qui lui manque

Au moment de son intronisation comme T1, le 13 novembre 2007, Jacobs avait fait fort en déclarant :  » Beaucoup jubileraient probablement à ma place. Moi pas.  » C’est qu’il n’avait jamais demandé à devenir entraîneur principal. Son truc, c’était le rôle de T2. Cette perspective-là seule l’avait amené, quelques mois plus tôt, à quitter Mouscron. Rien d’autre. La défenestration de Vercauteren allait cependant en décider autrement en le projetant, malgré lui, en pleine lumière. Non sans succès, car sur l’ensemble de l’année 2008, aucun entraîneur n’a glané plus de points que lui. Sans oublier une coupe nationale, qui se dérobait à Anderlecht depuis 1994. Pourtant, invité par la direction à esquisser le Sporting du futur après la qualification européenne contre Bordeaux, Jacobs réserva pour lui le poste d’adjoint, une fois encore. Comme meneur d’hommes, il sentait davantage un technicien néerlandais type Sef Vergoossen ou Louis van Gaal. Le président Roger Vanden Stock ne voulut toutefois rien entendre, sous prétexte qu’aucun entraîneur ne souhaiterait travailler avec un second affichant de tels résultats. A défaut de voir le Sporting jeter son dévolu sur un nom, Jacobs proposa dès lors lui-même de poursuivre sa mission à la tête de la Première. Avec des fortunes diverses, puisque les Mauves furent éliminés par BATE Borisov en coupe d’Europe et par le FC Malines en Coupe de Belgique. Reste, bien sûr, le championnat. Mais après ?

T1 toujours comme le veut son contrat, qui court jusqu’au 30 juin 2010 ? Malgré la double élimination en coupes, beaucoup abondent dans ce sens dans les hautes sphères du club, en tout cas.  » S’il n’y tient pas plus que ça, on le convaincra « , dit Collin.

Reste que la troisième campagne est très souvent celle de tous les tourments pour un entraîneur, à Anderlecht. Hugo Broos et Vercauteren l’ont d’ailleurs vérifié à leurs dépens. Avec perte et fracas même dans le cas de ce dernier, puisqu’une reconversion comme directeur technique du club lui était pour ainsi dire promise avant que les pontes du club ne fassent soudain volte-face. Pas sûr du tout que Jacobs voudra s’inspirer de cet exemple, lui qui espère s’inscrire dans la durée au sein de la maison mauve. Et résisterait-il encore, dans toutes les acceptions du terme, à une saison aussi éprouvante ?

Après la victoire par 3 buts à 2 en finale de la Coupe face à La Gantoise, il s’était déjà écrié foutu métier, après coup, conscient qu’une balle sur le poteau du Buffalo Khalilou Fadiga, à 1-2, aurait fort bien pu tout anéantir. Cette année aussi, il a dû composer avec les vicissitudes du métier. Et le stress, surtout. Son ton est parfois devenu très ironique et même sarcastique. Comme à la fin de l’ère Vercauteren… Aussi, histoire d’éviter tout fâcheux remake, pourquoi le RSCA ne l’aiguillerait-il pas vers le poste de DT ? Tout grand club qui se respecte en possède un. Jacobs l’a d’ailleurs occupé, dans le passé, à Genk. Et depuis qu’il est parti, comme par hasard, le Racing a perdu de sa superbe. Cette désignation comblerait un vide au RSCA, où il manque à coup sûr une ligne claire en matière d’allées et venues.

Comment expliquer sinon qu’on y ait l’embarras du choix pour certains postes (Legear, Chatelle, Sacha Iakovenko et Matias Suarez sont par exemple tous susceptibles d’évoluer comme flancs offensifs, à droite ou à gauche), alors que règne la misère pour d’autres. Comme au back droit notamment où il n’y a pas de solution de rechange valable pour Wasilewski ? Jacobs lui-même s’en était d’ailleurs ému en tout début de saison :  » J’ai demandé une version améliorée de Wasyl. En échange, j’ai obtenu son clone avec Rnic « , avait-il dit en substance. En matière de stratégie hors du terrain, c’est sûr que le Sporting marquerait des points précieux avec lui. Si d’aventure on lui demande de dresser un nouvel organigramme, sa voie paraît toute trouvée.

par pierre bilic et bruno govers

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