Bluff ajacide

A 18 ans, le défenseur central gaucher a effectué ses débuts en Ligue des Champions à l’Inter Milan.

Jelle Van Damme a été propulsé sous les feux de la rampe au Stadio Giuseppe Meazza en Ligue des Champions, face à l’Inter. Il n’était qu’un petit poucet parmi des myriades de vedettes mais, malgré la courte défaite 0-1 de l’Ajax, le jeune défenseur avait réussi son premier examen en Lombardie.

Vous vous êtes tout à coup retrouvé face à Hernan Crespo et à Christian Vieri!

Jelle Van Damme : C’est fantastique. J’ai perçu les premiers signaux le lundi matin, lors de l’entraînement à Amsterdam. Nous jouions à neuf contre neuf et je faisais partie de l’équipe de base. Au terme de cette rencontre, Ronald Koeman s’est dirigé vers moi: – Jelle, John O’Brien est incertain.Tiens-en compte. Ma première pensée, ce fut: -C’est dingue.

Vous avez téléphoné à la maison pour raconter ce qui vous arrivait.

Oui et mon frère m’a demandé si j’allais bien, si je n’étais pas devenu fou. – Toi sur le banc à l’Inter?… Il ne voulait pas me croire.

Vous n’étiez pas sur le banc mais dans le 11 de base.

Je n’ai pensé qu’à ça pendant deux jours. La sélection a été divulguée le matin de la rencontre. J’ai appris que je jouais et senti la tension monter en moi. Nous sommes allés nous promener après le déjeuner. Ensuite, nous avons eu quatre heures de repos. Normalement, je ne dors pas. Cette fois-ci, j’y suis parvenu. D’un coup, toute la pression s’est envolée. C’est le moment de te montrer, mon gars, ai-je pensé. Heureusement que tout s’est bien passé.

Ronald Koeman a été satisfait de votre prestation.

Après le coup de sifflet final, il m’a serré la main et m’a dit que j’avais bien joué. J’avais besoin de ce geste. Les semaines précédentes, l’entraîneur avait dit à plusieurs reprises que je ne vivais plus le football comme durant mon stage. En fait, c’est parce que je jouais sans confiance. J’avais besoin de ce match pour franchir un certain cap. L’année dernière, j’ai pris confiance en disputant les demi-finales de la Coupe contre le PSV mais la suite s’est moins bien déroulée. J’ai éprouvé trop de respect pour mes coéquipiers. Je me sens à nouveau bien armé. J’ai le sentiment d’avoir le niveau requis.

Malgré tout, lorsque je reviens sur mes débuts en Ligue des Champions, je suis empreint de sentiments mitigés. Je ne suis pas content du résultat mais je suis fou de joie d’avoir participé à ce match. Nous n’étions d’ailleurs pas condamnés à la défaite: nous avons simplement manqué de chance et d’expérience, un atout qu’a l’Inter. »Je suis banal »

Vous restez un inconnu aux yeux du grand public. Qui est Jelle Van Damme ?

Un banal garçon de 18 ans. J’ai commencé à jouer à l’âge de cinq ans, en amateurs, puis j’ai été transféré à Lokeren, où j’ai joué trois saisons, avant de rejoindre le Beerschot. A 16 ans, je suis revenu à Lokeren, où j’ai évolué en catégories d’âge et en équipe fanion. Ensuite, je suis parti au Germinal Beerschot et au début de cette année, j’ai rejoint l’Ajax.

Je viens d’une famille dingue de football. Mes deux cousins jouent en D2. Mes atouts, en football, sont les duels et mon passing. En revanche, je dois améliorer mon jeu du pied droit. Sur le plan humain, il est difficile de cerner mon caractère. Je suis généralement calme mais quand je ne suis pas bien dans ma peau, on le remarque très vite. Dans ces moments-là, je peux être très dur.

Plus jeune, vous étiez un attaquant redoutable.

En effet. A 14 ans, j’évoluais à l’extérieur gauche et j’ai marqué 101 buts pour le Beerschot. Faute de gauchers, on m’a aligné une fois à l’arrière gauche et comme défenseur central gauche. Je n’ai plus changé de place. Mon passé d’attaquant m’est précieux à l’Ajax, où on exige qu’un défenseur possède des qualités offensives.

Tout le monde a été surpris que l’Ajax vous reprenne en début d’année du GBA.

Moi aussi car je n’étais même pas titulaire au GBA. Je savais que l’Ajax me suivait depuis un certain temps mais j’ai été surpris qu’il m’invite à effectuer un stage durant les trois derniers mois de la saison. Cet été, j’ai été repris dans le noyau à titre définitif. Il y a une énorme différence de niveau: la vitesse d’exécution, la pression constante, les entraînements: je dois m’habituer à tout.

Est-ce possible, un petit Belge chez l’arrogant Ajax?

C’est un fameux changement mais je m’en accommode très bien. J’éprouve du respect pour les grands noms avec lesquels je joue tout en voulant forcer le respect des autres à mon égard. Leo Beenhakker, le directeur technique, m’a expliqué que je devais imprimer à mon jeu un peu de bluff ajacide. Je l’ai fait. Pourtant, j’ai éprouvé des difficultés car ma famille m’a manqué. A 18 ans, j’étais habitué à vivre chez ma mère et voilà que je me retrouvais seul dans une grande ville, que je devais me faire à manger et tout régler moi-même. Ce fut très dur. Je pense en effet qu’on retrouve le caractère d’un pays dans sa culture footballistique. Aux Pays-Bas, tout est plus dur et plus agressif qu’en Belgique.

Quelle est la plus belle réaction que vous ayez reçue au terme de ce match contre l’Inter?

Franky Van der Elst m’a envoyé un sms de félicitations. J’ai trouvé ça fantastique car je lui dois beaucoup. C’est lui qui m’a donné ma chance de m’épanouir à Anvers et de devenir un footballeur apparemment assez bon, pour l’Ajax.

Stephan Wageman

« Koeman m’a serré la main et m’a dit que j’avais bien joué »

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