Bleu AZUR

Petit à petit, le nouvel Aiglon belge fait son nid au stade du Ray.

Jeudi 18 novembre. Dans l’avion qui le ramène à Nice au lendemain de la débâcle des Diables Rouges face à la Serbie & Monténégro, Roberto Bisconti (31 ans) n’a pas vraiment la pêche.

 » Je me demande dans quelle mesure j’ai encore un avenir en sélection « , nous glisse-t-il.  » Non pas que je désire renoncer moi-même. Il m’a fallu patienter jusqu’à l’âge de 30 ans bien sonnés avant de goûter aux joies d’une première sélection contre la France, en février passé. Avec sept matches à peine à mon compteur, il va sans dire que j’aimerais faire durer le plaisir. Mais je ne suis pas dupe : avec un maigre point sur neuf, la Belgique est plutôt mal engagée dans les qualifications pour la phase finale de la Coupe du Monde 2006. J’ai cru comprendre que le coach fédéral, Aimé Anthuenis, entendait poursuivre sa mission. Reste à voir à présent s’il fera toujours confiance aux mêmes hommes ou s’il s’orientera déjà en fonction de l’EURO 2008. Dans ce cas, vu mon ancienneté, je ne serai sans doute plus repêché, au même titre que d’autres anciens probablement. Dommage, car j’ai vraiment pris énormément de plaisir, jusqu’ici, à jouer avec l’équipe nationale. C’est franchement une expérience à nulle autre pareille. J’ai pas mal bourlingué dans ma carrière mais rarement j’ai connu une atmosphère aussi agréable que dans le giron des Diables. Contrairement à ce qui se passe parfois ailleurs, je n’y ai jamais relevé la moindre dissension entre joueurs. Les problèmes, à vrai dire, c’est souvent la presse qui les aura créés à ce niveau. Aujourd’hui encore, à la lecture des journaux, je m’étonne des diverses cotes qui m’ont été attribuées. Dans les quotidiens francophones, j’ai eu droit la plupart du temps à un 6 pour ma prestation tandis que chez les néerlandophones, j’ai été gratifié d’un 4. Voit-on un match de manière différente selon qu’on bosse pour un journal du nord ou du sud du pays ? Cette question, je me la suis déjà posée à plus d’une reprise, surtout dans le cadre de l’équipe nationale. Et j’en conclus que certains plumitifs sont de très mauvaise foi dans ce pays. Il est regrettable que ceux-là ne puissent vivre le groupe des Diables de l’intérieur. Ils verraient alors qu’on s’entend tous comme larrons en foire. Aussi bien sur le terrain qu’en dehors des grounds. Au rami, par exemple, je complète fréquemment une table formée par Bart Goor, Didier Dheedene et Eric Deflandre. Autrement dit deux Flamands et deux Wallons. C’est quand même significatif, non ? Je déplore aussi les clivages, dans les médias du nord et du sud du pays, concernant l’entraîneur. Rarement, en quinze années de professionnalisme, j’ai vu quelqu’un faisant l’unanimité comme lui au sein de l’effectif. Et je ne le confesse nullement parce que c’est Aimé Anthuenis qui, le premier, m’a donné une chance à cet échelon. La seule chose que l’on puisse lui reprocher, c’est de ne pas bénéficier plus généreusement de l’appui de Dame Fortune.

C’est fou le nombre de contretemps qu’il aura connus depuis son entrée en fonction, en 2002. Devant les représentants de l’ex-Yougoslavie, il a dû changer une fois de plus, in extremis, son fusil d’épaule suite aux absences conjuguées d’ Emile et Mbo Mpenza. Est-ce vraiment sa faute si, pour les remplacer, il n’avait d’autre alternative que de lancer dans la bataille Wesley Sonck et Thomas Buffel, qui ne sont pas des titulaires à part entière dans leur club respectif, l’Ajax et Feyenoord ? Non, bien sûr. D’aucuns disent qu’il aurait dû songer plus tôt à Luigi Pieroni. A ceux-là, je répondrai qu’il est plus facile de rentrer, comme lui, lorsque l’adversaire est émoussé plutôt que d’entamer la partie. A ce moment-là, le manque de rythme se fait beaucoup plus sentir. Et, tout bien considéré, c’est lui qui nous aura joué un tour pendable face à Drago et les siens. Car hormis nos attaquants, Philippe Clement et moi n’avions pas toujours fait figure d’incontournables non plus, précédemment, à Bruges et à Nice. Toutes ces absences alignées l’une à côté de l’autre expliquent grandement, selon moi, notre revers devant cet adversaire. Sans oublier que nous aurions pu bénéficier d’un coup de réparation et que, par deux fois, l’armature du but s’est liguée contre nous. Dans ces conditions, je ne vois réellement pas pourquoi il faudrait jeter la pierre au coach. Ce n’est pas lui la cause de nos maux. Au sein du noyau, il ne viendrait à l’idée de personne de pointer un doigt accusateur en sa direction, en tout cas. Pour nous, Aimé Anthuenis peut continuer. Et même s’il ne m’appelle plus, pour les raisons que je viens d’évoquer, je resterai toujours un de ses fidèles défenseurs. A mes yeux, il ne mérite nullement d’être traité comme certains s’y plaisent depuis le début de cette campagne de qualification. C’est profondément injuste « .

Danny Boffin pour Mbo Mpenza

Vendredi 19 novembre. Bis nous accueille dans son domicile situé à Carros, dans l’arrière-pays niçois. Une villa avec vue imprenable sur les Alpes, située à un quart d’heure à peine du centre d’entraînement du club.

 » C’est la toute première que j’ai visitée et ce fut immédiatement le coup de foudre « , précise-t-il.  » Philippe Léonard, ex-joueur de l’OGC, m’avait dit que je serais bien ici et j’avoue qu’il ne s’est pas trompé. Même si Nice, a priori, ne faisait pas figure de priorité pour moi. En réalité, Trabzonspor a longtemps tenu la corde. Si les Turcs s’étaient qualifiés pour disputer les préliminaires de la Ligue des Champions, tout porte à croire que j’aurais abouti sur les bords de la Mer Noire. Mais puisque cette perspective est tombée à l’eau, j’ai préféré privilégier un endroit où mes trois enfants Julian, Andrea et Hugo, âgés de 11, 9 et 4 ans, pouvaient poursuivre leur scolarité en français. Dans cette optique, le sud de la France constituait évidemment un point de chute idéal. Cette destination ne se serait toutefois jamais dessinée si le Standard, qui gardera à tout jamais une place à part dans mon c£ur, s’était montré bon prince avec moi. J’avais accepté de jouer pour une aumône là-bas û 4.000 euros bruts par mois û lors de mon retour à Sclessin, en début de campagne passée. Luciano D’Onofrio m’avait juré que les données chiffrées de mon contrat seraient reconsidérées à mi-saison, en fonction de l’avenir. Après la trêve hivernale, toutefois, j’avais compris. Non seulement, je pouvais faire mon deuil d’une réévaluation mais, en outre, le club ne s’éveillait manifestement pas, non plus, aux plus hautes ambitions. Lors d’un repas de fin d’année, la direction avait demandé à un comité restreint de joueurs, dont je faisais partie, quelles améliorations devaient être apportées à l’équipe afin de concurrencer Anderlecht jusqu’au bout. Avec huit points de retard sur les Bruxellois lors de l’interruption, nous étions tous d’avis qu’avec un tout bon joueur en sus, nous pouvions arriver à nos fins. Et, entre nous, chacun s’accordait à dire que cet élément-là devait être Mbo Mpenza. Finalement, pour une simple clause d’indemnité de départ, que les responsables du club ne voulaient pas reprendre dans le bail du Mouscronnois, le transfert ne s’est pas réalisé. Au grand dam du principal intéressé, qui avait visiblement à c£ur de rejouer avec son frère, et d’Emile lui-même, furieux que l’affaire ait capoté faute d’une ligne ajoutée dans un accord. Du coup, la décision du cadet était prise : il ne ferait plus de vieux os à Sclessin. Moi-même, quand j’ai vu qu’en guise de solution de remplacement à Mbo, les dirigeants avaient engagé Danny Boffin, je me suis dit qu’on m’avait suffisamment berné. Dans ces conditions-là, il était tout simplement exclu que j’accomplisse une année de plus en bord de Meuse. Et d’autres en avaient gros sur la patate aussi. On ne s’étonnera pas, dès lors, que tout s’est déglingué par la suite. Pour se sauver la face, les têtes pensantes du club, relayées par l’entraîneur, ont voulu faire porter le chapeau à l’un ou l’autre joueurs, comme Moreira ou moi-même. Nous étions soi-disant des pommes pourries qui devaient être ôtées du panier. S’il en était réellement ainsi, pourrait-on m’expliquer pourquoi, durant cette période-là précisément, j’ai été appelé pour la première fois en équipe nationale ? Et pour quelle raison j’ai continué à jouir de la confiance d’Aimé Anthuenis jusqu’en fin de saison ? Si j’avais été minable à ce point, jamais il ne m’aurait repris, non ? Pour moi, les seuls responsables de la chute aux enfers du club, lors du deuxième tour de la compétition, ce sont les décideurs, tout simplement. Chaque année, c’est la même rengaine avec eux : au lieu de poursuivre la construction de l’équipe, ils préfèrent repartir sur de nouvelles base. On y repart de zéro, chaque été, avec comme seul souci de faire rouler les joueurs et, surtout, l’argent. C’est navrant dans la mesure où il suffirait de peu de choses pour que les Rouches retrouvent leur lustre d’antan. Si le club avait daigné conserver tous ceux qui ont contribué à son bon fonctionnement ces dernières années, de Daniel Van Buyten à Emile Mpenza en passant par Ole-Martin Aarst, il mènerait actuellement la vie dure au Club Bruges et à Anderlecht au sommet de la hiérarchie. Aujourd’hui, ses gros bonnets se félicitent d’avoir embrigadé des gars comme Sergio Conceiçao ou Milan Rapaic. Et c’est vrai qu’ils méritent un coup de chapeau pour ces acquisitions. Mais à quoi bon les faire venir si c’est pour se séparer d’eux dans quelques mois, comme cela s’est vérifié pour tous les autres ? A Sclessin, l’histoire est un éternel recommencement. A cette nuance près qu’on n’en voit jamais la fin. Il manque toujours le dénouement. La cerise sur le gâteau, quoi. C’est triste pour les supporters « .

7 matches, 5 cartons

Centre d’entraînement de l’OGC Nice, 17 heures. Dans l’optique du déplacement du lendemain, à Caen, la défense niçoise répète ses gammes face à l’attaque. Avec Bis comme cerbère dans la ligne médiane.

 » Après une entrée en matière faramineuse, ponctuée notamment par un succès historique, sur la marque de 3-4 à Monaco, l’équipe est hélas un peu rentrée dans le rang ces dernières semaines « , observe-t-il.  » Nous avons même eu la fâcheuse tendance à abandonner plusieurs unités précieuses face à des équipes en très mauvaise posture. Tout a débuté par un revers à Strasbourg, en ballottage défavorable à ce moment, suivi d’un partage vierge contre Istres, qui fermait la marche lors de sa visite chez nous lors de la 12e journée. Une semaine plus tard, Saint-Etienne, autre mal loti, s’imposait 2-1 devant nous avant que mes coéquipiers et moi-même ne concédions un nouveau nul û 1-1 û face à Lens. Dès lors, il était impératif de revoir notre copie en fonction des prochaines échéances. Cette très mauvaise passe contre des sans-grade prouve, si besoin en était encore, combien le championnat de France est imprévisible. Hormis Lyon et, dans une moindre mesure déjà, Monaco, tout le monde peut battre tout le monde dans l’Hexagone. Le plus souvent, après une bataille acharnée, la victoire revient au plus chanceux. Jusqu’à présent, je n’ai pas trop à me plaindre, à l’exception de l’arbitrage. En l’espace de sept rencontres, j’ai effectivement déjà été averti à cinq reprises. C’est énorme mais à mon corps défendant je préciserai que par rapport à la Belgique voire l’Ecosse, les directeurs de jeu sifflent ici au moindre contact. Aussi l’entraîneur, Gernot Rohr, a-t-il déjà dû faire l’impasse sur moi à une reprise et, à d’autres occasions, il a préféré me retirer de la pelouse par prudence. Depuis mon arrivée, début septembre, j’ai souvent alterné avec Serge Dié au sein de la ligne médiane. Au côté de Florent Balmont, c’est nous qui sommes censés monter bonne garde devant une défense solide, articulée autour de l’ancien Sangermanois José Cobos, doyen des joueurs de l’élite française avec ses 36 ans. Pour orienter la man£uvre, le club table sur deux meneurs de jeu excentrés : Marama Vahirua et Sébastien Roudet. Aux avant-postes, Victor Agali et cette vieille connaissance qu’est Edgaras Jankauskas sont appelés à alimenter le marquoir. Le Nigérian, surtout, s’est déjà bien intégré puisqu’il fait partie des meilleurs artificiers de Ligue 1. Le Lituanien, lui, a la poisse d’être blessé pour l’instant mais quand il est en pleine possession de ses moyens, c’est un déménageur. Il le faut pour s’imposer en attaque ici. Par rapport à la Belgique, j’ai découvert un football plus rapide. Plus physique aussi. Au départ, malgré ma préparation au Standard, j’étais trop limité à ce point de vue et j’ai dû compenser mon retard. Dans notre championnat, un bon joueur peut se contenter d’être à 75 % de ses moyens, il finira malgré tout par émerger. Ici, ce n’est pas du tout le cas. Si on n’est pas au maximum, c’est peine perdue. Dans ce cas, on n’a pas voix au chapitre. J’imagine qu’aux Pays-Bas, il n’en va pas autrement et voilà qui explique peut-être pourquoi les Diables Rouges éprouvent tant de difficultés à se montrer sous leur meilleur jour ces derniers mois. Etre à la fois international incontournable mais réserviste à l’étranger, cela situe aussi le niveau de la compétition belge. Par rapport à mes débuts, au début des années 90, je suis d’avis que le niveau a régressé de 50 % au moins. C’est assez significatif. Mon ambition ? Avoir rang de valeur sûre à l’OGC Nice jusqu’à l’échéance de mon contrat, en 2006. Par la suite, tout dépendra : ou bien je rempilerai, avec l’espoir d’être le premier Belge à jouer dans l’enceinte flambant neuve que la municipalité compte édifier sur les hauteurs de Saint-Isidore, en lieu et place du stade du Ray actuel, ou bien je tenterai une dernière aventure à l’étranger. Je ne cache pas que la Grande-Bretagne m’a marqué et je ne serais nullement opposé à y retourner. De préférence en Angleterre. Peut-être pas au plus haut niveau, mais dans son antichambre, pourquoi pas ? Des stades pleins, un jeu engagé, une nation tout entière qui vit par et pour le football. Que souhaiter de plus pour être heureux ? »

Samedi 20 novembre. A l’occasion de leur visite au stade Malherbe, les Aiglons prennent un bon point face à Grégory Dufer et ses partenaires grâce à un nul vierge. Roberto Bisconti dispute l’intégralité de la rencontre et est crédité d’une toute bonne prestation dans l’Equipe. Qui plus est, sans le moindre carton. En France aussi, le métier rentre lentement mais sûrement pour Bis

Bruno Govers,

 » Si j’avais été MINABLE, je ne serais PAS DEVENU DIABLE  »

 » Au Standard, IL MANQUE TOUJOURS LA CERISE SUR LE GATEAU  »

 » LE FOOTBALL BRITANNIQUE m’a toujours marqué  »

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