Bilans wallons

Pierre Bilic

Mons, Liège, Virton et Visé se débrouillent avec des fortunes diverses.

Eliminé en Coupe de Belgique par Tubize, Mons ne vit plus que pour le championnat. La cité du Doudou entretient plus que jamais l’espoir de jouer, le plus rapidement possible même, au sein de la D1. La montée en puissance des Dragons est régulière depuis que leur équipe est dirigée par Thierry Pister. L’ancien médian défensif de Gand, du Standard et de Lausanne, entre autres, travaille au Stade Tondreau depuis trois ans et demi. Bilan: tour final en D3, montée un an plus tard, tour final en D2 la saison passée, en lutte cette saison avec tous les principaux adversaires de l’ogre malinois.

Pister (Mons) veut moins de compliments et plus de points

« Le Malines de Barry Hulshoff n’est pas hors de portée », dit Pister. « Il a démarré en force, avec son bagage de D1, mais j’ai noté un fléchissement ces dernières semaines. Les autres équipes de D2 ne se montrent plus aussi naïves face à un adversaire rusé et qui attend patiemment l’erreur de son oppossant avant de frapper. La course à la première place n’a pas encore désigné son vainqueur, même si Malines s’est forgé une belle avance. Mons veut monter en D1 cette saison. Si cela ne se fait pas via la première place à la fin du championnat, nous y arriverons grâce au tour final. Pour participer à cet événement, Mons doit remporter une tranche ou terminer parmi les cinq premiers au classement final. »

Il y a peu, le nom de Daniel Leclercq a circulé chez les Montois. Thierry Pister ne s’est pas inquiété: « Mons existe et ce club entretient de solides ambitions. Il est devenu une réalité intéressante de la D2 et tout le monde devine désormais des potentialités en devenir. L’AEC ne se situe plus très loin de l’élite. Nous avons parcouru pas mal de chemin. Il y a 30 coaches tous les quinze jours dans notre stade. Ils seraient moins nombreux si nous ne jouions pas bien. Je n’oublierai jamais que Mons m’a fait confiance au début de ma carrière d’entraîneur. Les résultats sont probants, la courbe n’a jamais été descendante mais il nous reste des étapes à franchir. »

Cette saison, Pister a d’abord cherché à bonifier son bloc offensif. Quelques finisseurs en vue de la série avec, notamment, De Vreese et Herman, venus de Turnhout. Il y a cependant des hésitations dans ce secteur: « Nous en avons parlé après l’élimination contre Tubize. En général, Mons joue bien, se forge pas mal d’occasions, mais nous ne tuons pas assez souvent le match. A gauche et à droite, on m’a certifié que peu d’équipes étaient aussi présentes dans le rectangle adverse. Cela me rassure et m’énerve à la fois: je préfèrerais récolter moins de compliments mais plus de points. Mons ne cherchera pas à renforcer sa division offensive. Le talent et toutes les alternatives ou solutions sont là. J’ai aussi La Placa, Pereira et Londo: c’est largement suffisant. Il faudrait simplement un déclic pour que ce problème de réalisme offensif soit réglé. »

Moury (Liège) apprécie toujours le beau jeu à la Grosjean

Si Mons rêve à haute voix de la D1, Liège a des objectifs un peu plus prudents. Il y a quelques mois, les locataires du Pairay nourrissaient de gros soucis. Aujourd’hui, un des atouts des Liégeois réside dans leur jeunesse. Peu de clubs se soucient d’eux à ce point. La saison passée, il y avait surtout des soucis administratifs, une trésorerie déficiente et pas mal de tensions au moment d’obtenir la licence de D2. Enfin, mal embarqué durant des mois, Liège évita la relégation de toute justesse. Marc Grosjean est à la base de ce renouveau. Les jeunes, ça le connaît: il en a lancé pas mal à Namur et à La Louvière. Les Coalisés liégeois s’adaptent petit à petit à l’air du temps: leurs terrains d’entraînement sont en bien meilleur état que naguère, ils disposent d’une salle de joueurs afin de prendre des repas de concert, etc.

« Je ne dirai pas que tout est parfait mais la progression est visible », lance Rudy Moury. « J’avais déjà travaillé avec Marc au Tivoli. Je sais que la notion de plaisir est très importante pour lui. Un groupe doit se sentir à l’aise pour progresser. Et l’outil s’améliore. Après une saison difficile, l’ambition est de vivre un championnat serein, sans la peur au ventre. J’espère que Liège atteindra la trêve avec un capital de 28 points. Ce sera la preuve que la jeunesse tient la distance. Cette équipe peut obtenir la septième ou la huitième place ».

Liège a trouvé un terrain d’entente avec le PSG, qui injecte déjà un peu d’argent dans la trésorerie du club. Roger Henrotay est à la base de cet accord qui permettra aux Parisiens de faire patienter des jeunes en les plaçant au Pairay.

Moury: « C’est bien, mais je ne devine pas de frénésie ou d’impatience. Il y avait 4.000 spectateurs au Pairay contre Malines. Le public revient petit à petit car il voit que l’expérience en vaut la peine. Les fans de ce club sont des mordus. Ils sentent que le pays de Liège a une nouvelle équipe intéressante. La qualité de notre jeu y est également pour quelque chose. L’argent, c’est souvent le nerf de la guerre, mais tout passe d’abord par la qualité du jeu. A Liège, on ne joue pas n’importe comment. Pour moi, c’est très important. Une équipe uniquement athlétique peut réaliser un bon championnat. Mais pour garder un niveau, il convient de développer une philosophie offensive. Cela peut toutefois compliquer la donne. La saison passée, les adversaires venaient à la Boverie pour se payer les trois points. Récemment, une bonne série face à Mons, Geel et Visé a mis notre équipe sur les rails. Liège fait peur désormais et nous devons souvent jouer devant des murs. Il s’agit alors d’être patient et de veiller afin de ne pas être surpris par un contre.

Je dois beaucoup intervenir auprès de la jeune garde liégeoise pour lui rappeler les vertus d’un bon collectif. Tarek Kharif assume aussi un rôle en vue auprès des gamins: l’ancien joueur de Gand survole la D2. Beaucoup de clubs de D1 ne disposent pas d’un élément de cette qualité.

Je m’amuse beaucoup car il y a osmose dans le vestiaire. Ce plaisir est important pour moi. J’ai 34 ans et je veux d’abord être heureux sur un terrain. Liège est dans le bon mais nous vivons d’abord une saison de stabilisation. Après, on verra si la progression peut être accentuée et carrément devenir de l’ambition. La D1, pourquoi pas? J’imagine bien ce que cela signifierait pour ce club. Mais il faut y aller à petits pas, en progressant tous les jours: Grosjean n’avait pas procédé autrement au Tivoli et les Loups se sont retrouvés en D1. Or, personne n’y croyait il y a quatre ans. »

Allard (Virton) est un peu déçu par son public

En fin de saison passée, toute la province de Luxembourg s’était enthousiasmée quand l’Excelsior de Virton s’empara du titre en D3. Jamais un club de cette région n’avait eu le bonheur de militer en D2. L’élite n’y est évidemment pas du tout à l’ordre du jour. Virton doit d’abord se fondre dans son nouvel univers. La montée fit d’autant plus de bruit que les Gaumais furent bloqués, dans un premier temps, par un avis négatif de la commission des licences. Le président du club, José Allard, se fit un devoir de secouer vigoureusement le cocotier afin d’obtenir le précieux sésame. Depuis lors, les Gaumais tiennent honorablement leur place dans leur série.

« Nous avions évidemment des craintes », affirme Allard. « Il y a toujours un écart entre deux divisions. Sur le plan de la qualité du jeu, l’équipe de Michel Le Flochmoan tient la route. Son volume de production de spectacle est intéressant. Vu sous cet aspect-là, Virton a sa place en D2. C’est une satisfaction. Par contre, j’estime que ce constat ne se reflète pas au classement général. Virton aurait pu compter cinq ou six points de plus. C’est le prix de l’apprentissage. La plus grande inquiétude avant nos débuts en D2 résidait finalement dans la réponse du public. La possibilité de passer à côté de la licence avait mobilisé toutes les imaginations. C’était impressionnant mais je m’attendais à une plus grande mobilisation au niveau des abonnements. C’est une déception car j’en attendais mille, mais nous n’en avons finalement vendu qu’un peu plus de 450. Malgré cela, il y a du monde au stade. Nous recevons en moyenne près de 2.500 amateurs de football, dont 2.000 entrées payantes. Le record a même été battu avec la visite de Malines. Il émergea après le repos (0-3) mais les chiffres étaient forcés. Virton n’avait pas à rougir de cette défaite face à un adversaire connaissant toutes les ficelles du métier. Le réalisme l’emporta sur le manque de vécu de notre groupe.

Le budget pour cette saison devrait tourner autour des 25 millions. Même si tout dépendra des résultats, et que ce sera difficile, j’espère que nous le bouclerons. Nous subissons de plein fouet la concurrence de Sedan, qui reçoit les ténors de la D1 française.

Par contre, côté belge, il faut remonter loin afin de trouver des clubs susceptibles d’attirer les amateurs de ballon rond. Une grande partie de la Wallonie est bel et bien un désert footballistique. C’est dommage mais c’est ainsi. Nos déplacements ne sont pas plus longs qu’en D3. La presse régionale nous suit car elle ne peut pas passer à côté de l’Excel: elle n’a pas grand-chose d’autre à se mettre sous la dent.

Heureusement, les autorités communales ont répondu à notre appel. Elles ont réalisé 95% de tous les travaux visant à conformer le stade aux impératifs de la D2. De ce côté-là, on n’a pas à se plaindre et les plans sont prêts pour d’autres travaux de modernisation, de sécurité, de réaménagement des terrains d’entraînement, etc. En approchant de la mi-parcours, j’ai la certitude que Virton est bien à sa place en D2. »

Pierre Bilic

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