Beau et con à la fois

Au pif, je dirais un but sur quatre ou cinq : en tout cas, bon nombre de frappes trompent les gardiens en étant déviées de leur trajectoire initiale par un défenseur. C’est un bête but ! râle alors le perdant, s’estimant victime de malchance. Le perdant a tort, c’est un but  » coupable quelque part « , comme tous les buts : culpabilité ici par impuissance ou candeur tactique ! Fallait pas planter dans son rectangle au lieu d’aller assiéger celui d’en face ! Et si l’on n’était pas assez fortiche pour assiéger, fallait coller l’attaquant au lieu de lui laisser l’espace de frappe, se ruer sur lui au lieu de temporiser : car pour la plupart, les frappes déviées le sont quand le ballon a déjà quitté de 3m ou davantage le pied du frappeur, quand le gardien a déjà réagi et choisi son côté…

Et puis, il y a le beau but, la frappe qui fait bingo tout droit dans un coin, personne n’ayant effleuré le cuir, même pas le pauvre gardien : comme cette volée de Tom De Sutter en finale de la Coupe ! C’est l’exact opposé quant à la pureté, c’est pourtant tout aussi bête d’avoir à ce point délaissé Tom… d’où mon titre même si Jacques Brel n’était pas footeux ! Mais comme l’a expliqué Olivier Deschacht : Personne ne devait marquer De Sutter à la culotte, nous défendions en zone… Mouais. Dans ce cas, faudrait mieux choisir les zones occupées ! De Sutter a fait feu en zone libre, à la guerre comme à la guerre…

On ne me l’ôtera pas de l’idée : quand un mec est dangereux en zone dangereuse, y’a rien de mieux que le marquage/culotte, faut que je vous narre une anecdote récente avec Gouvy, mon club ! Nous luttons pour le maintien en P1 luxembourgeoise, nous recevons Messancy un peu mieux classé. Jo ouvre tôt le score, Gilles double l’écart avant la pause. Match sérieux, rigueur plaisante, je ne pousse mon ouf que quand Will plante le troisième à cinq minutes du terme.

A Messancy, l’attaquant de pointe s’appelait Daniel Gomez, 36 ans, ex-pro : il est jadis venu de Metz à Virton pour y empiler les buts, être meilleur buteur de notre D2 nationale, puis tenter sa chance à Aix-la-Chapelle en D2 allemande, à Cottbus, à Maastricht… Chouette carrière de petit pro qu’il achève en roue libre quelques échelons plus bas, un peu empâté, beaucoup dégarni, et toujours sacrément poison si on le laisse jouer.

Pierre ne l’a pas laissé, il a collé/culotte du mieux qu’il a pu et il a pu pas mal.

Là-dessus, le Gomez peste le lundi dans « L’avenir du Luxembourg » : Gouvy n’a pas été meilleur que nous, mais plus réaliste. Une équipe qui joue avec un vrai libero, je n’ai plus vu ça depuis vingt ans ! Alors là, s’il a voulu me fourguer un grand coup de vieux en lâchant ça, c’est râpé, j’ai bu du petit lait ! Oui, je suis de la vieille garde et ça me plaît ! Oui, mes défenseurs doivent tâcher d’être des sangsues vampirisant leur attaquant, défense de les laisser flirter avec ce que les modernes appellent intervalles : et tous les attaquants avec qui j’ai causé détestent ça bien plus qu’être pris en zone !

Non, ma défense n’est pas à plat car mes défenseurs ont droit à l’erreur, plane ainsi le risque latent de défaite à…plate couture. Mon vrai libero couvre donc profond dès qu’il faut et vide à grands coups de botte s’il le faut : mieux vaut gagner en étant réaliste que perdre en étant techniquement prétentieux ! Et ça a bien fait râler le vieux Gomez de voir surgir un deuxième chien les rares fois où le premier n’avait pas pu mordre (le ballon)…

Quand je dis vieux Gomez, c’est très relatif, on n’est pas vieux à 36 balais, j’en sais quelque chose avec mes balais en plus. Mais Gomez, comme beaucoup, est atteint du syndrome du gars-qui-a-joué-plus-haut-et-qui-redescend. D’une part, l’envie n’est plus là d’être au top physique restant possible, ce qu’on peut comprendre après les sacrifices des années-pro. D’autre part, on croit que la supériorité technique suffira à des échelons bien inférieurs…mais l’on se retrouve, quant à la condition physique, moins fortiche que des amateurs pas forcément moins vieux : et le talent est bouffé par la gnaque ! Daniel, réentraîne-toi comme jadis et l’an prochain, libero ou pas chez nous, tu nous planteras des buts.?

Mieux vaut gagner en étant réaliste que perdre en étant techniquement prétentieux !

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire