Beau en rouge

Les débuts furent difficiles. Mais, progressivement, l’ancienne idole du public anderlechtois a trouvé ses marques au Canonnier.

Le transfert de Walter Baseggio fut l’un des plus médiatisés du mercato hivernal. L’accouchement fut pourtant difficile : outre l’aspect financier, il y avait les sentiments. Walt semblait s’accrocher aux six mois de contrat qui lui restait chez ce Sporting où il a passé toute sa carrière, sauf deux demi-saisons à Trévise (en Série A et B). Courtisé par Enzo Scifo, il s’est finalement résolu à couper le cordon ombilical et, après un temps d’adaptation, a apporté beaucoup à sa nouvelle équipe. Même s’il a besoin d’un élément plus défensif à ses côtés pour atteindre son plein rendement.

Walt, on a l’impression qu’aujourd’hui, vous avez enfin  » tourné le bouton  » et parvenez à vous concentrer sur Mouscron sans avoir Anderlecht à l’esprit.

WalterBaseggio : Cela n’a pas été tout seul, c’est exact, mais c’est logique : lorsqu’on a passé autant de temps dans un club, on ne peut pas tout effacer du jour au lendemain. J’ai débarqué dans un club où je devais encore tout découvrir. Mon premier match contre Westerlo n’a pas été mauvais. Ce sont souvent les deuxième et troisième matches qui sont les plus difficiles, et cela s’est vérifié. Je devais retrouver le rythme, car même si les entraînements à Anderlecht étaient soutenus, ils ne pouvaient pas remplacer les matches de compétition. Depuis quelques semaines, je me sens très bien à Mouscron. J’ai trouvé mes marques, grâce au soutien de tout le monde. Je sais comment me comporter vis-à-vis de mes nouveaux équipiers, et eux savent ce qu’ils sont en droit d’attendre de moi.

Votre deuxième match avec Mouscron à Anderlecht fut l’un de vos moins bons. L’émotion était-elle trop forte ?

Ce fut effectivement très spécial. Retrouver mes anciens partenaires et, surtout, ces supporters qui m’avaient adulé pendant autant d’années, m’a procuré des frissons. Même si je portais un autre maillot, ils m’ont applaudi. Je ne pouvais leur dire que – Merci !

Au point qu’au coup de sifflet final, vous avez failli faire la fête avec vos anciens partenaires devant le kop anderlechtois…

( ilrit) Que voulez-vous ? Ces gens resteront toujours dans mon c£ur.

Marquer, deux ans plus tard

Au début, cela n’a pas dû être évident : Mouscron a commencé l’année 2008 par 1 sur 18…

Je me souviens qu’à un moment donné, l’écart avec le premier relégable s’était réduit à cinq points. C’était un moment difficile, mais l’important était de rester calme. Plus on stressait, moins on avait de chances de s’en sortir.

Vous êtes-vous posé des questions ?

Surtout lors du match à Mons. Je venais de signer, mais je n’étais pas encore qualifié. J’ai donc assisté au match depuis la tribune. L’équipe semblait amorphe, mentalement à bout. Là, je me suis effectivement demandé où j’avais mis les pieds. Mais cela n’a pas duré longtemps. Chacun a pris conscience de la situation. On a su réagir, tous ensemble. Je crois, aussi, que les nouveaux venus ont beaucoup apporté.

Certains nouveaux venus…

Oui, peut-être. Mais les trois ou quatre qui ont joué régulièrement ont changé la donne. Mouscron était une équipe où il y avait des petits problèmes, que l’on avait du mal à déceler. Ils étaient, je pense, essentiellement d’ordre mental. On encaissait facilement et on avait du mal à marquer. Il fallait sortir de cette spirale négative.

Le déclic, pour vous, s’est-il produit lors du match contre Charleroi, lorsque vous avez inscrit votre premier but ?

Cela faisait plus de deux ans que je n’avais plus inscrit un but en championnat de Belgique. Marquer contre Charleroi m’a donc libéré. Deux autres buts ont suivi : à Genk et contre Roulers. Mais je ne suis qu’un pion. Si on s’en est sorti, c’est le mérite de tout le monde. Ce qui est bizarre, c’est qu’on a pris des points contre les équipes à priori les plus difficiles : on a battu Bruges, Charleroi, le Cercle, le Germinal Beerschot…

Indirectement, cela signifie que vous avez gaspillé contre les petits.

Effectivement. On a peut-être tendance à tomber dans une certaine facilité face à des équipes qu’on considère à notre portée. Ce sont des détails qu’il faudra régler.

Vous pouvez être rangé parmi les satisfactions…

J’ai su me remettre en question. Il fut un temps, à Anderlecht, où je me suis un peu laissé aller. Lorsque j’ai signé pour Mouscron, certains pensaient que cela allait être la galère pour moi. Il en fut autrement.

Par contre, c’est un peu la galère pour votre ami Alin Stoica ?

Je ne suis pas dans sa peau, je ne peux pas décrire ce qu’il ressent. C’est dommage, car son talent est énorme. Je ne m’explique pas ce qui lui est arrivé. A mes yeux, il est toujours le même garçon que j’ai connu à Anderlecht. Très gentil. Mais bon, cela n’a pas marché pour lui.

Besoin de rigoler

Et Enzo ?

Je l’avais connu comme joueur, je l’ai retrouvé comme entraîneur. Il n’a pas beaucoup changé.

Les rapports hiérarchiques ont peut-être changé : il est désormais au-dessus de vous…

Vous savez, il a toujours été au-dessus de moi. En matière de classe intrinsèque, je ne lui arrive pas à la cheville. Avec la carrière qu’il a réalisée, on ne peut pas lui reprocher de ne pas connaître le football.

Où le classez-vous, parmi tous les entraîneurs que vous avez connus ?

Johan Boskamp et Jean Dockx garderont toujours une place à part. Ce sont les entraîneurs de mes débuts. Boskamp me disait toujours : – Kalm, kalm ! Je l’ai retrouvé lorsqu’il est venu au Canonnier avec le FC Dender. Lorsqu’on s’est croisé, il s’en est souvenu et m’a ressorti : – Kalm, kalm ! Je ne travaille avec Enzo que depuis trois mois, c’est un peu tôt pour le juger comme entraîneur. Mais il a toutes les qualités pour réussir. Son grand avantage, c’est qu’il était encore joueur au début du XXIe siècle. C’est une grande différence avec les entraîneurs qui ont réalisé leur carrière dans les années 70 ou 80, car le football a beaucoup évolué.

Vos tests physiques sont meilleurs que lorsque vous êtes arrivé en janvier…

J’ai retrouvé le rythme, alors qu’à Anderlecht, je devais me contenter des entraînements. Mentalement aussi, c’est différent. Lorsqu’on sait qu’on a peu de chances de jouer, on ne s’entraîne pas nécessairement de la même manière.

Les entraînements sont-ils différents ?

Oui, mais c’est normal : chaque entraîneur a ses méthodes. A Anderlecht, le niveau des entraînements était très relevé, vu la qualité des joueurs, mais à Mouscron, on s’entraîne sérieusement également. L’important, c’est qu’il y ait une bonne ambiance. C’était l’un de mes soucis, à chaque début de saison à Anderlecht : j’espérais trouver un groupe où l’on pourrait rigoler. Et j’ai rarement été déçu. A priori, je ne devrais pas l’être non plus à Mouscron l’an prochain.

Un climat positif

Qu’avez-vous trouvé de bien à Mouscron ?

D’abord, les gens. J’ai été très bien accueilli, tant par le staff que par le groupe des joueurs ou les supporters. Cela correspond tout à fait à ma philosophie. J’aime les ambiances familiales, j’aime rigoler. Ce climat positif dans lequel j’ai évolue désormais m’a fait du bien, mentalement. J’ai aussi trouvé une équipe qui recèle un potentiel certain. On a livré de bons matches, en particulier contre les grands : contre Bruges, notamment. A Genk et au Standard, aussi : des matches qu’on aurait pu – que dis-je, qu’on aurait dû – gagner. Malheureusement, dans les deux cas, on a encaissé un but sur phase arrêtée, en toute fin de match. Cela a souvent été notre péché mignon.

Depuis que vous jouez à Mouscron, vous avez dû vous habituer à la défaite…

Oui, mais le contexte est différent. A Anderlecht, il fallait être champion chaque année. Là-bas, c’était la crise après une défaite et un match nul. Je me souviens d’une période où, sous Arie Haan, on avait fait 2 sur 18. Là, c’étai une vraie crise.

En comparaison, Mouscron doit vous paraître très calme. Trop calme ?

Peut-être, oui. Si cela ne tenait qu’à moi, un peu d’agitation supplémentaire ne me dérangerait pas. Mais je m’y fais.

Vous jouez devant 5.000 personnes alors que vous étiez habitué à 25.000…

C’est différent, bien sûr. Mais c’est un petit stade, on n’a jamais l’impression qu’il est vide. Les gens sont proches du terrain et les supporters encouragent de la voix.

Le rouge vous va ?

Certains disent oui, certains disent non. Les supporters anderlechtois trouvent que mon maillot actuel ressemble trop à celui du Standard, mais ils sont heureux pour moi.

Vous ne regrettez donc pas votre choix ?

Pas du tout.

par daniel devos – photos: belga

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