Basket City

Après une année de galère, le Joueur de l’Année 2001 évolue enfin à Bologne.

Avant de partir pour Liège, rejoindre la délégation des Belgian Lions, TomasVandenSpiegel (24 ans, 2m14) a eu le temps de soigner sa publicité. Il a en effet été élu MVP du derby de Bologne, au cours duquel il a inscrit 15 points. « Ce fut un moment formidable pour moi », avoue-t-il. « Bologne, c’est Basket City en Italie, et pour les supporters de la Fortitudo, battre la Virtus équivaut à remporter le championnat. On a eu droit à un rappel sur le parquet après la fin du match ».

Une récompense pour les efforts consentis afin de revenir dans le parcours après l’année de galère qu’il a vécue. En juin 2001, c’est tout auréolé par son titre de Joueur Belge de l’Année qu’il avait signé pour la Fortitudo Bologne, l’un des plus grands clubs d’Italie… et donc d’Europe. Mais la malchance s’en mêla. Quelques jours avant le début du championnat, il se blessa gravement au genou. Une opération, et une longue convalescence, s’ensuivirent. Lorsqu’il fut rétabli, il avait forcément perdu une partie de sa condition et son club l’obligea à retrouver le rythme ailleurs. C’est ainsi qu’il termina la saison à Ostende, en ajoutant au passage un nouveau titre de champion de Belgique à son palmarès. Et lorsqu’il voulut retourner à Bologne l’été dernier, le club se montra hésitant.

 » Il me restait deux années de contrat, je devais donc retourner d’office au club auquel j’appartenais après ma location à Ostende. Entre-temps, les dirigeants italiens avaient changé leur fusil d’épaule. Ils avaient décidé d’alléger la masse salariale et de reconstruire l’équipe avec des jeunes. Tous les joueurs furent priés de faire quelques concessions financières… certains, plus que d’autres. Je faisais partie de ceux-là. Du coup, j’avais envie de partir. Parce que je n’acceptais pas que mon contrat soit rogné à ce point, mais aussi parce que j’avais surtout besoin de jouer et que j’estimais que je recevrais plus facilement ma chance dans un club moins huppé. Plusieurs formations se sont mises sur les rangs. Cantù, notamment, était fort intéressé. J’ai aussi eu un petit contact avec Charleroi, mais moins concret que l’année précédente. J’ai sollicité un entretien avec le manager de la Fortitudo Bologne, le Croate ZoranSavic. Il m’a assuré que le club comptait absolument sur moi. Je suis donc resté. Mes deux années de contrat ont cependant été transformées en une année plus option pour une année supplémentaire, histoire de voir ce que j’avais réellement dans le ventre ».

Le seul Belge en Euroligue

Voilà donc un joueur belge dans l’un des plus grands clubs européens, d’un niveau comparable à celui du Real Madrid. « Mais je refuse que l’on me compare déjà à EricStruelens« , tempère VdS dont le prénom s’écrit sans h parce que ses parents ont voulu lui donner une connotation espagnole. « Il est resté quatre années dans ce club mythique, alors que pour ma part, je n’en suis encore qu’à mes débuts à Bologne ».

Tomas Van den Spiegel est désormais le seul joueur belge présent en Euroligue, puisque Eric Struelens a quitté le Real Madrid pour Gérone. « Là encore, je n’en tire aucune gloire. Je trouve même cela navrant. L’année dernière, deux clubs belges participaient encore à l’Euroligue. L’ULEB a décidé qu’Ostende et Charleroi devraient désormais se contenter de sa petite soeur, la Coupe ULEB. C’est dommage pour tout le basket belge ».

A Bologne, Tomas Van den Spiegel découvre un autre monde. « On ne peut pas dire que ce monde m’était inconnu, puisque j’avais participé à la Suproligue avec Ostende en son temps et que j’avais déjà évolué à plusieurs reprises dans des salles italiennes, mais je vis désormais tout cela quotidiennement. La pression est intense, il faut absolument gagner un maximum de matches et, si possible, des trophées. Quatre ou cinq journalistes sont présents à chaque entraînement. Et ils sont à l’affût du moindre incident pour le mettre en exergue. La première chose que l’on vous dit en arrivant en Italie, c’est d’éviter de lire la presse, car on risque d’être surpris, voire décontenancés « .

Sur le terrain, il y a le plaisir de se mesurer à chaque match aux meilleurs joueurs du Vieux Continent. « J’ai été fort impressionné par le duo d’intérieurs de Trévise: l’Argentin Nicola et l’Espagnol Garbajosa. Ils jouent en position n°4 et 5, mais ils tirent à trois points. C’est très difficile de défendre contre eux. J’ai aussi été séduit par le pivot de Sienne, l’Italien Chiaccic (2m12). Dans l’ensemble, le basket est très physique en Italie. On peut jouer souvent le un-contre-un et on a moins la possibilité d’aider son partenaire en défense, car généralement il n’y a pas de point faible dans la formation adverse. Comme en NBA, chaque joueur a un rôle spécifique. Je peux me considérer comme un roleplayer. Je dois capter des rebonds et réaliser des block-shots. Que je marque beaucoup ou peu de points n’a guère d’importance. Les entraînements sont assez poussés en période de préparation. Actuellement, on est retombé dans une certaine routine: l’enchaînement des rencontres et les incessants voyages auxquels nous sommes contraints nous empêchent d’encore mettre sur pied de très longues séances ».

Profiter de chaque minute sur le parquet

Le début de saison fut difficile. Mais Tomas, comme son club, commence à revenir dans le coup. « Nous avons commencé le championnat avec une seule victoire en quatre matches », rappelle-t-il. « Cela s’explique en partie par la blessure de VladoScepanovic et les problèmes de visa rencontrés par les joueurs croates. Mais quelques succès, ces dernières semaines, nous ont ramené en troisième position au classement, derrière Trévise et Rome, à égalité de points avec cinq autres formations. Dans le derby de Bologne, j’ai enfin eu le sentiment d’avoir apporté ma pierre à l’édifice. Car, lors des autres rencontres où j’avais livré une bonne prestation, l’équipe s’était à chaque fois inclinée. Jouer à un niveau pareil, c’est à la fois très grisant et très exigeant. Je dois profiter de chaque minute passée sur le terrain, car la concurrence est féroce et le temps de jeu est compté. Lors de certains matches, je joue 20 à 25 minutes. En d’autres occasions, par contre, je n’ai droit qu’à sept minutes… réparties en trois apparitions sur le terrain. A chaque fois que le coach m’accorde sa confiance, je dois donner le maximum pour m’en montrer digne ».

Un coach, MatteoBoniciolli, qui était assis sur un siège éjectable malgré la victoire dans le derby. « Il était critiqué depuis le début de la saison ». Car, on a beau coacher une équipe en reconstruction, des résultats sont exigés.

« Cette saison, nous ne figurons pas réellement au rang de favori pour le titre », affirme VdS. « L’autre équipe de Bologne non plus, d’ailleurs, car elle a perdu plusieurs éléments-clefs de son effectif. Les faveurs des pronostiqueurs vont plutôt à Trévise et à Sienne. Elles sont devenues les places fortes du basket en Italie. De notre côté, nous avons une équipe jeune qui ne demande qu’à grandir. Le talent est là. Il y a le Yougoslave Scepanovic, les Croates Skelin (qui arrive de Novo Mesto) et Kovacic (déjà présent la saison dernière), les Italiens Pozzecco, Basile et Galanda. Nous devons surtout retrouver un groupe soudé, et cela prendra du temps, car seuls trois joueurs sont restés par rapport à la défunte campagne. Quatre, si l’on m’inclut dans le lot, mais peut-on dire que je faisais déjà partie de la Fortitudo l’an passé? ».

A Bologne, Tomas Van den Spiegel doit partager son temps de jeu avec deux autres pivots: Kovacic et Skelin. « Nous sommes donc trois pour une place. Parfois,Kovacic glisse en n°4, ce qui m’offre davantage d’opportunités de m’exprimer. Généralement, Skelin commence comme titulaire avec Galanda au n°4. Kovacic et moi entrons en cours de match. Le premier objectif du club sera de terminer les matches aller du championnat parmi les huit premiers, ce qui serait synonyme de qualification pour la Coupe d’Italie qui, comme en Espagne, se joue dans une même ville au cours d’un long week-end. Ensuite, il faudra essayer d’atteindre le deuxième tour de l’Euroligue et de terminer le championnat à la meilleure place possible, mais sans tirer de plans sur la comète ».

Tomas Van den Spiegel n’en tire pas non plus. « L’incertitude qui a plané sur mon avenir, cet été, fut difficile à vivre », reconnaît-il. « En Belgique, la plupart des équipes avaient déjà repris l’entraînement alors que j’étais toujours sans travail. Je me suis posé beaucoup de questions. Le seul fait de jouer désormais à Bologne est déjà un grand soulagement. Je goûte pleinement aux félicitations et aux encouragements dont je fais l’objet à chaque bonne prestation. J’ai réussi à me faire apprécier dans un grand pays de basket, et c’est déjà un succès en soi ».

Daniel Devos

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