Bangkok T.C.

Le Thaïlandais est devenu le symbole de toute une génération de jeunes tennismen asiatiques.

Joueur généreux et terriblement spectaculaire, le Thaïlandais de bientôt 24 ans est passé l’année dernière de la 126e à la 16e place mondiale en remportant notamment ses deux premiers tournois, à Long Island et à Stockholm, et en se payant la tête de quelques-uns des plus grands joueurs du moment tels qu’Agassi, Hewitt, Safin et Ferrero.

Si sa carrière en Grand Chelem tarde encore à démarrer, ce garçon éminemment sympathique possède tous les coups du tennis pour en faire un prochain sociétaire du top 10 mondial, voire mieux. Entraîné par son père Chanachai, un banquier qui n’hésita pas à quitter son bureau pour se consacrer à la carrière de son fils, Paradorn est adulé dans son pays qui lui délivra, récemment, le passeport diplomatique.

Quels sont jusqu’à présent vos meilleurs souvenirs?

Paradorn Srichaphan:Le premier qui me vient à l’esprit est la demi-finale du tournoi de Singapour en 1999. C’était la première fois que j’atteignais un pareil stade. Je me suis qualifié pour la finale où j’ai perdu contre l’Argentin Canas. Je me souviens également d’une victoire face à Grosjean à Sydney.

Et votre deuxième tour cette année à l’Open d’Australie? Vous perdez contre Mark Philippoussis au terme d’un match en cinq sets éblouissant…

C’est vrai. Je mène deux sets à un mais je finis par perdre. L’intensité de cette rencontre devant un stade plein en session nocturne fut énorme. L’ambiance a donné au match des contours de duel du dernier carré et j’en ai apprécié chaque instant. Je savais avant de commencer que le tennis serait d’une grande qualité parce que Mark, lorsqu’il se produit devant son public de Melbourne, vous oblige à sortir le meilleur de vous-même.

La foule ne vous a-t-elle pas joué un vilain tour?

Je ne pense pas, au contraire. J’étais réellement excité de jouer devant tout ce monde que je n’ai pas trouvé leur attitude partiale. Ils nous ont encouragé tous les deux à tour de rôle parce qu’ils appréciaient chaque moment des débats.

Durant cette rencontre, on vous a vu faire le grand écart pour rattraper une balle en coup droit. Bravo pour votre souplesse!

Merci! J’aime me donner à fond, quelle que soit la rencontre que je dispute et le lieu où cela se produit. Je veux toujours pouvoir sortir du court fier de ma performance, que je gagne ou que je perde d’ailleurs. Le tennis reste avant tout pour moi un jeu.Les conseils de Chang

Y a-t-il une défaite qui reste imprimée dans votre mémoire?

Un jour, j’ai perdu un match 6-0, 6-0 sur terre battue à Hambourg contre l’Argentin Calleri. J’étais démoli! Je me souviens que j’étais remplaçant. Le matin du match, quelqu’un s’est retiré du tableau et j’ai été appelé en dernière minute. Je n’étais absolument pas préparé et je me suis échauffé pendant 15 minutes à peine. Sur terre battue, une surface où je ne suis d’ordinaire déjà pas fort à l’aise, cela ne pardonne pas. Le match avait été tellement rapide que j’en riais! Jamais auparavant je n’avais pris une roue de bicyclette! J’aurais au moins dû gagner l’un ou l’autre jeu mais je n’y suis pas arrivé. J’avais beau me battre comme un lion, rien n’y faisait!

Vous avez profité à un moment donné de votre carrière des conseils de Ken Matsuda, l’entraîneur de Michael Chang.

J’étais jeune et tout avis était bon à prendre. Nous frappions la balle ensemble pendant 45 minutes, parfois une heure. Il m’a beaucoup aidé, surtout physiquement en travaillant beaucoup sur la force de mes jambes. Elles sont essentielles pour mon jeu. Je cours beaucoup pendant un match et je me souviens avoir beaucoup travaillé mes temps de réaction. Cela étant, je voyage toujours avec mon père. C’est lui qui s’occupe essentiellement de moi.

Quelle relation entretenez-vous encore avec Michael Chang?

Nous nous parlons à chaque fois que nous nous rencontrons. Il est toujours de bon conseil, encore maintenant alors qu’il est en train de disputer sa dernière saison sur le circuit. Pour mon service, il m’a par exemple conseillé de ne pas frapper aussi fort sur chacune de mes premières balles et de moins les lifter. J’apprécie son soutien parce qu’il s’intéresse vraiment à ce que je fais. Quand vous passez professionnel et que vous avez la chance d’être conseillé par le joueur que vous admiriez lorsque vous étiez plus jeune, on éprouve une sensation incroyable.

Vos premières réelles performances remontent à l’Open d’Australie il y a quelques années: vous étiez l’un des joueurs les plus spectaculaires parce que votre style généreux vous faisait monter fréquemment au filet. Et tant pis si l’adversaire réussissait souvent à vous passer, vous reveniez irrémédiablement en première ligne. Mais vous avez mûri…

Je l’espère! Même si mon style de jeu me portera toujours vers l’avant, parce que c’est comme ça que je me sens bien sur un court, je crois être devenu un joueur plus intelligent. J’aime jouer de manière agressive du fond du court mais dès qu’une occasion se présente, je tente de la saisir. Mon seul problème vient du fait que je n’arrive pas encore à garder le même niveau pendant une rencontre, voire pendant plusieurs semaines. C’est pourquoi je peux disputer un superbe match, puis passer à côté de mon sujet le lendemain ou une semaine plus tard. C’est sur cela que je travaille le plus en ce moment.

Vous habitez Bangkok. Pas facile pour quelqu’un qui voyage autant que vous, non?

Quand je dois me rendre aux Etats-Unis, le vol est extrêmement long et fatiguant. Mais c’est encore moins évident pour mon père qui a aujourd’hui 60 ans! Depuis un ou deux ans, je sens qu’il commence à être très fatigué. C’est pourquoi de temps en temps, je voyage avec mes frères.Engouement thaï

A propos de la Thaïlande, comment s’y porte le tennis?

L’engouement que je suscite est phénoménal. Depuis que j’ai commencé à réaliser de bons résultats, beaucoup de juniors ont pris la raquette et de nombreux sponsors se sont mis à investir dans le tennis. Le niveau de jeu s’améliore semaine après semaine, les Thaïlandais n’hésitent plus à venir me voir, surtout en Australie vu la proximité, et certains de mes matches sont parfois retransmis en direct, même lorsqu’ils ont lieu à l’autre bout de la planète.

Pourquoi, après vos victoires, vous voit-on toujours toucher le sol en guise de remerciement?

Dans la culture thaï, cela revient à dire « bonjour », « désolé » ou « merci ». C’est ma manière à moi de remercier tout le monde. Quand je m’abaisse encore davantage, sans toutefois baiser le sol, mais en le touchant avec la tête, cela veut dire que j’apprécie vraiment les instants j’ai passés sur le court.

Avez-vous pratiqué d’autres sports étant plus jeune?

Je connais les fondamentaux du kickboxing, cela aide ma réactivité sur le terrain. J’ai également commencé le cable-ski, une variante du ski nautique en Thaïlande: il faut des muscles. Je le pratique avec des amis, à la plage ou sur un lac. Cela me distrait énormément.

Comment gérez-vous votre incroyable popularité?

La popularité tient à la fréquence des matches: on ne s’arrête jamais et vous apparaissez semaine après semaine, dans les journaux et à la télévision. Personnellement, j’aime l’attention et la presse le sait.

L’Open d’Australie est devenu le « Grand Chelem de l’Asie-Pacifique » et le sponsor est Kia, le constructeur automobile coréen. Qu’en pensez-vous?

Rassembler l’ensemble du tennis asiatique est une excellente chose et je tiens à remercier Tennis Australia, la fédération australienne, pour cela. Elle donne régulièrement des wild-cards pour le tableau final aux joueurs asiatiques!

Et l’ATP va organiser un tournoi masculin dans votre pays…

Et en plus, il va avoir lieu à Bangkok, dans ma ville. C’est l’ensemble du tennis thaï et asiatique qui va pouvoir en profiter.Inutile de préciser que j’ai bien sûr inscrit ce tournoi à mon programme.

Alexis Romain

Adepte de kickboxing et de cable-ski

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