» Avec Kessler, c’était – Marche ou crève… « 

Pierre Bilic

né en 1941, heylens fut un excellent back droit (67x diable rouge, équipe d’europe 65, mondial 70 au mexique, 7 titres et 3 coupes de belgique avec anderlecht). coacha une douzaine de clubs (passa 5 ans au losc et fut coach belge 1984 à seraing)

 » Ariel Jacobs a des soucis mais c’est de la petite kriek à côté des orages que GeorgeKessler a dû affronter en 1971-72. Il y a 40 ans, Anderlecht décida d’abandonner le style de jeu cher à Pierre Sinibaldi. C’était une révolution culturelle car nous ne jurions que par un jeu très technique. Je suppose que Kessler savait ce qu’il faisait quand il nous imposa une série de 12 sprints de 100 m (avec une minute de récupération entre chaque déboulé) en guise de premier entraînement. J’ai vite ressenti un point de contracture à la cuisse. Avec Kessler, c’était – Marche ou crève… Ce coach formé à la célèbre haute-école de sport allemand à Cologne (Deutsche Sporthochschule Köln) a eu du mal à imposer ses idées à l’effectif d’Anderlecht.

Pour nous, cette espèce d’officier de para-commandos né en 1932 n’avait pas sa place sur un terrain de football. Je me souviens d’un retour houleux après une lourde défaite au Standard (4-0) ; la révolte grondait dans le fond de notre autocar. Moi, j’avais l’habitude de prendre place plus à l’avant. Mais j’avais compris : il y avait du complot dans l’air. Les grands leaders de l’équipe souhaitaient le départ de Kessler et je comprenais leur attitude. Jan Mulder menait la fronde car il ne supportait absolument pas sa façon de travailler. Paul Van Himst partageait le point de vue de l’attaquant hollandais.

En défense, c’était aussi la révolution car Kessler envisageait une relève de la garde en remplaçant Jean Plaskie et JulienKialunda par Gilbert Van Binst et Hugo Broos. Il y avait un clivage entre les jeunes et les anciens. Les nouveaux étaient bien décidés à saisir la perche que Kessler leur tendait. Les anciens entendaient protéger leurs acquis. Le grand chef blanc fut aussi chargé d’intégrer un artiste venu du Club Bruges qui allait entrer dans l’histoire : Rob Rensenbrink. Jan Verheyen fut donc transformé de meneur de jeu en médian défensif. Puis, petit à petit, la mécanique s’est mise en place. Largué à 7 points du Club Bruges, Anderlecht termina le championnat au sprint : premier à égalité avec le Club, 45 points, mais une victoire de plus pour nous. Tout se joua le dernier jour : Bruges fit match nul (1-1) au Racing White alors que nous battions Saint-Trond.

Un peu plus tard, Anderlecht réalisait le doublé en battant le Standard en finale de la Coupe (1-0). Je me souviens d’avoir porté Kessler en triomphe. Et Mulder, qui allait être transféré à l’Ajax Amsterdam, fut un des premiers à m’aider. Même si Kessler fut démis la saison suivante, il avait mené sa mission de modernisation à bien : qui aurait pu prévoir cela en début de sai-son ? »

PIERRE BILIC

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