Auf Wiedersehen Gauthier !

G authier Remacle jouera donc, la saison prochaine, en D2 allemande à Oberhausen, un club situé à une bonne dizaine de kilomètres de Schalke. Quand j’ai lu cette info, je n’ai pu m’empêcher de penser : -Mais que diable va-t-il faire dans cette galère ? Je savais que depuis son arrivée au Sporting de Charleroi, Gauthier avait quelque peu gambergé. Il avait perdu ses repères et devait changer d’air. Mais de là, à se retrouver en seconde division allemande !

Le foot belge est-il donc si pauvre pour ne plus pouvoir garantir un contrat honorable à un joueur de 26 ans qui n’avait donné aucun signe de déclin irrémédiable ? Et qui de surcroît possédait un tranfert libre ! Seule La Louvière s’est manifestée… mais un poil trop tard ! C’était signé avec Oberhausen.

Dommage, je suis convaincu que, sous la direction de son ancien entraîneur des Espoirs, Gauthier aurait retrouvé son ardeur d’avance de vrai Bastognard. Car s’il est parti pour la D2 allemande, c’est pas pour le fric ! Le contrat est honorable certes, mais n’a rien de mirobolant. En tout cas, pas beaucoup plus avantageux que ce que pouvait lui offrir notre compétition. Simplement Gauthier a jugé urgent de sauver sa carrière et de la relancer sans délai ! Son père a joué les managers en envoyant des VHS accompagnées du profil footballistique de son fils à des clubs de D2 anglais, allemands, français…

La réaction d’Oberhausen fut immédiate et comme Gauthier est convaincu de posséder toutes les qualités requises pour réussir dans le foot germanique, il y a immédiatement signé un contrat de trois ans.

Cette péripétie d’intersaison m’interpelle à double titre. D’abord, comment un joueur de la trempe de Gauthier n’a-t-il pas atteint son plein épanouissement ? Ensuite pourquoi a-t-il dû recourir à l’exil momentané pour se trouver du boulot ? Car Gauthier était, il faut se le rappeler, un des joueurs de sa génération qui avait tout ce qu’il fallait pour réussir une carrière honorable : intelligent, ouvert, soucieux d’apprendre, athlétique et courageux. Pas un talent exceptionnel mais un joueur de bon niveau, dixit Philippe St Jean, sans doute le meilleur arrière droit de sa génération.

Capable aussi de jouer les ratisseurs de milieu de terrain avec à la clé un merveilleux engagement offensif. A 19 ans, n’avait-il pas réussi à convaincre l’implacable de Mos, puis à mériter la confiance de Jos Daerden et surtout celles de Peruzovic et Ivic ? Des bons papiers tout cela ! Trois saisons au Standard. Plus de 60 titularisations. International Espoir. Et pourtant, il va, à l’instar de beaucoup d’autres jeunes prometteurs plafonner pour commencer une descente aux enfers à Charleroi !

Probablement pourra-t-on trouver des raisons à cette stagnation dans un caractère un peu velléitaire et une sensibilité trop fragile. Son look recherché d’adolescent prolongé pourrait en attester s’il n’était dangereux, voire malvenu, de juger les gens sur l’extérieur. Certains entraîneurs ne se sont pas privés d’en tirer des conclusions aussi hâtives qu’imbéciles et malveillantes sur la personnalité de Gauthier. Ne lui parlez donc plus jamais de son look ni surtout de sa vie privée et affective. Zone sensible donc interdite parce que probablement douloureuse et pas cicatrisée ! Gauthier reconnaît bien volontiers avoir commis quelques conneries de jeunesse.

Dépourvu de toute formation en profondeur, à l’instar d’autres joueurs, il n’était pas suffisamment sécurisé techniquement ni aguerri moralement pour accéder au statut de joueur adulte à part entière. Hélas la plupart de nos entraîneurs de clubs sont avant tout des entraîneurs sélectionneurs peu aptes à assurer une post-formation dont auraient le plus grand besoin ces jeunes talents éternels.

Beaucoup d’autres, comme lui, ont dû aller chercher à l’étranger la confiance qu’on leur refusait ici en Belgique. Bien sûr l’appât du gain a orienté parfois la décision de certains. Mais, dans la majorité des cas, on a le sentiment que nos dirigeants et entraîneurs sont démunis devant les lacunes de jeunes joueurs pourtant prometteurs. Ils ne semblent pas capables en tout cas de les amener à maturité.

Ce qui est sûr, c’est que Gauthier, comme d’autres, a été victime de cette carence. Il veut sa revanche. Il sait que la souffrance bien assumée peut être source de renouveau.

parAndré Remy

Nos dirigeants et entraîneurs sont démunis devant les lacunes de jeunes joueurs pourtant prometteurs

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