Aucun raté

Depuis qu’il est pro, le distributeur de Charleroi a participé à tous les playoffs. Si son pied tient le coup, ceux-ci seront ses quinzièmes.

Originaire de Grivegnée, JacquesStas a débuté dans le basket professionnel en D1 à Braine lors de la saison 88-89. Les playoffs, il connaît par coeur. En 15 années, il n’en a loupé aucun. « Même pas pour blessure », précise-t-il. « C’est ce qui me permet de croire que mes problèmes d’aponévrose plantaire, qui m’ont tenu éloigné des parquets depuis février, seront résolus pour les demi-finales de samedi ».

Récit de quelques moments poignants.

Braine 1988-1992

JacquesStas: « Mes premiers playoffs furent parmi les plus mémorables de l’histoire du basket belge. Au terme de la saison 88-89, les Castors avaient terminé pour la première fois en tête de la saison régulière et bénéficiaient donc de l’avantage du terrain. Adversaire en finale: l’ogre malinois. C’était 1-1 après deux manches, chaque équipe l’ayant emporté à domicile. Nous avons perdu la troisième à Braine, mais avons gagné la quatrième à Malines. La cinquième manche fut dantesque. Les débats étaient acharnés, le score fut serré de bout en bout. En deuxième mi-temps, BillVarner, vedette de Malines, a dû quitter le terrain sur blessure et nous avons pris quelques points d’avance. Les supporters commençaient déjà à fêter le premier titre du club. Les fautes pleuvaient. TonyMarion et DwightJones durent quitter le terrain pour cinq pénalités. A 30 secondes de la fin, on a sifflé une faute offensive à KerryTrotter (également sa cinquième) et nous nous sommes retrouvés sur le terrain avec un cinq à 100% belge composé de MarcDeheneffe, BernardTirtiaux, ChristianDupont, ThierryTordeur et moi-même. TomDavis a donné un point d’avance à Malines. Nous avons amorcé la dernière attaque. Le système de jeu qui avait été préconisé lors du temps mort n’a pas pu être appliqué, et à quelques secondes de la fin, je me suis retrouvé, moi le gamin de 19 ans, avec le ballon entre les mains. J’ai entendu qu’on me criait: – Pénètre, pénètre! J’ai donc pénétré, et sous l’anneau, je me suis fait contrer par EricStruelens, néophyte parmi l’élite lui aussi. Fautivement, il l’a lui-même reconnu, mais l’arbitre n’a pas sifflé et nous avons été battus 89-90. Le président AndréRenauld, qui avait promis de nous couvrir d’or en cas de titre, était catastrophé. La fête a quand même eu lieu, comme c’était de tradition à la salle Gaston Reiff, mais forcément, le champagne avait un goût amer. Personnellement, je me suis aisément remis de cette mésaventure. J’étais encore tout jeune, je découvrais les playoffs et je ne me rendais pas encore bien compte des enjeux. Par la suite, j’ai encore disputé trois autres playoffs avec Braine. Mais le titre est toujours revenu à Malines… qui m’a engagé en 1992″.

Malines 1992-1995

« J’étais flatté d’avoir été approché par le club qui dominait le basket belge. Je me suis facilement adapté. Pour un Liégeois, ce n’était pourtant pas évident, mais cette mentalité professionnelle m’a plu. En quittant Braine, j’avais pourtant un pincement au coeur. Et lorsque j’ai découvert la composition de la nouvelle équipe des Castors, j’ai craint que j’avais quitté le club au moment où celui-ci allait remporter son premier titre. La plupart des joueurs belges étaient partis, mais une flopée d’Américains, naturalisés ou non, avaient été engagés: le petit distributeur-scoreur TonyWhite, les pivots DanHartshorne et DeanMarquardt, et j’en passe. C’était une équipe de vedettes, mais lorsqu’elle avait décidé de jouer collectivement, elle pouvait causer des problèmes à n’importe qui. Avec Malines, nous l’avons affrontée en demi-finales des playoffs. Nous avons gagné d’un point à la salle Gaston Reiff… avec beaucoup de chance. Sans cela, je ne sais pas ce qui aurait pu se passerdans la troisième manche. La finale contre Ostende fut plus aisée et j’ai pu fêter mon premier titre. J’ai encore réalisé le doublé la saison suivante.

A Malines, j’ai eu la chance de côtoyer de grands joueurs comme RikSamaey et Eric Struelens. J’ai beaucoup appris à leur contact (notamment à organiser le jeu et à donner la passe au bon moment) et le fait que je n’étais pas un joueur-clef de l’équipe m’a permis de jouer relax. Paradoxalement, alors que le titre était quasiment une obligation chaque année, c’est peut-être à Malines que j’ai ressenti le moins de pression. L’amalgame entre jeunes et anciens était extraordinaire. Le respect était mutuel. Au sein de l’équipe, la confiance était telle qu’on abordait les rencontres avec une sérénité extrême. Il n’y avait aucune pression externe. Nous n’avions des contacts qu’avec une seule personne: le coach LucienVanKersschaever, qui prenait toute la pression sur lui. Malgré des apparences peut-être trompeuses, je n’ai jamais connu la lassitude de la victoire avec Malines. On gagnait tout mais on avait toujours autant envie de remettre le couvert l’année suivante. C’était encore vrai en 94-95, la saison qui a marqué la fin de ce club mythique. Les problèmes financiers ont surgi. On a terminé la saison avec un seul Américain. Mais la soif de victoires était toujours présente. A l’approche des playoffs, quelques jeunes joueurs, dont je faisais partie, avaient proposé de renoncer à la prime de champion pour pouvoir engager un deuxième étranger. Un titre supplémentaire était plus important à nos yeux qu’un peu d’argent. Cette proposition a été refusée. On a perdu la demi-finale des playoffs à Charleroi, et on n’a donc eu ni le titre… ni la prime de champion.

L’année suivante, Malines est devenu Anvers. Cela ne me concernait pas, je n’avais pas envie de déménager dans la Métropole. J’ai été très heureux de pouvoir retourner à Braine ».

Braine 1995-1996

 » AndréSmets et BernardDubois, qui coachaient en duo, m’avaient offert une grande liberté offensive. Tout en distribuant le jeu, j’ai beaucoup marqué et j’ai été élu Joueur de l’Année pour la première fois. Malheureusement, avec l’équipe, je n’ai rien gagné cette saison-là. C’est la seule année durant laquelle je n’ai pas atteint au moins les demi-finales des playoffs et c’est aussi la seule durant laquelle je n’ai pas participé à une compétition européenne.

A l’époque, les playoffs réunissaient six équipes. Les deux premiers étaient dispensés du premier tour. Braine avait terminé troisième et affrontait en quarts de finale le sixième classé, Alost, où évoluait un jeune gamin nommé TomasVandenSpiegel. Ce n’est pas tant lui, mais un certain RonVercruyssen qui nous a posé des problèmes. Avec ses 2m11, il a mis notre Américain MarcusCampbell sous l’éteignoir, et malgré l’avantage du terrain, nous avons été éliminés par Alost en trois manches. Quelques mois plus tard, j’allais retrouver Ron Vercruyssen comme équipier à Charleroi, où il avait été engagé pour remplacer Struelens ».

Charleroi 1996-2003

« J’ai opté pour Charleroi afin de pouvoir participer à l’Euroligue. Ma première saison fut difficile. Après avoir pu jouer selon mon inspiration à Braine, j’ai dû redevenir un simple rouage d’une machine complexe. Des atomes crochus existaient déjà entre de nombreux joueurs du club et j’avais l’impression d’être un peu exclu. J’étais la doublure de DavidDesy et j’avais le sentiment de ne pas être considéré à ma juste valeur. Heureusement, cela a bien changé depuis lors. J’ai ajouté trois nouveaux titres aux deux qui figuraient déjà à mon palmarès depuis ma période malinoise. Le dernier, en 1999, fut certainement le plus beau: nous sommes allés le chercher à Anvers après une saison très mouvementée, marquée par les blessures à répétition. Sur un plan personnel, ce fut aussi une année faste. Outre le championnat, j’ai remporté la Coupe de Belgique et mon deuxième titre de Joueur de l’Année. Malheureusement, la fête a viré au drame. Le lendemain, David Desy a été victime de ce fameux accident de voiture dont il ne s’est jamais totalement remis. Depuis lors, Charleroi n’a plus jamais été champion.

Ce qui a changé par rapport à mes débuts, c’est que l’arrêt Bosman a provoqué énormément de mutations. On ne trouve plus, dans les clubs, un groupe de joueurs soudés qui ont passé plusieurs années ensemble et qui font bloc. C’est un facteur qui peut jouer un rôle. En fin de saison, le joueur qui sait qu’il devra quitter le club (il l’apprend souvent dès le mois de mars) est moins motivé. Il a toujours intérêt à bien jouer, ne serait-ce que pour sa publicité personnelle, mais il baissera plus facilement les bras que s’il était encore lié par un long bail. Les playoffs demeurent cependant une compétition spéciale, très agréable à jouer.

Cette saison, je trouve qu’il y a moins d’effervescence pour les playoffs. Les gens ne s’y retrouvent plus dans cette formule à rallonge faite d’un premier tour, d’un deuxième tour et enfin de la phase décisive. Simplifions, il y a urgence. S’il faut augmenter le nombre de matches, pourquoi ne pas faire jouer directement le premier contre le huitième et imaginer des quarts de finale en trois manches, des demi-finales en cinq manches et une finale en sept manches? »

Daniel Devos

« Simplifions la formule du championnat: il y a urgence! »

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