Au Mambourg… et à côté !

J’ai fait samedi d’une pierre deux coups (nous devrions d’ailleurs dire d’une balle deux buts). Du fin fond de mon trou perdu, je suis parti péleriner à Charleroi, revoir ce que devenait le Mambourg à l’occasion de la visite du Germinal Beerschot. Désireux que j’étais d’y confronter ce que j’éprouverais en match à ce que j’aurais éprouvé l’aprèsmidi à 500 mètres de là, en visitant l’expo One shot (*), soucieuse de montrer aux Carolos comment les artistes contemporains jouent avec le foot. Les films, photos et autres zeuvres valaient bien 2×45 minutes, j’invite d’ailleurs les supporters des Zèbres à pareil déplacement pas lointain, et même ceux du Standard le 25 avril lorsqu’ils viendront matcher Zoé Drion : y’a toujours à prendre en découvrant ceux qui aiment le foot d’une autre façon

Je m’étais baladé seul dans un grand espace clos hélas peu fréquenté, je m’attendais à retrouver foule et promiscuité en arrivant au stade : erreur, l’impression de désert fut supérieure dans un Mambourg dépeuplé ! Ça m’a rappelé un film de l’expo où le réalisateur se faisait filmer seul dans un grand stade tout vide : bougeant mais sans ballon durant plus d’une heure, accoutré en Michel Platini, n°10 dans le dos, le gars refaisait les gestes de son idole durant l’Allemagne-France de Séville 82 ! Le temps des play-offs sera triste au Mambourg : quand on perd, on ne peut plus aimer une D1 à trois compartiments bâtards, où tout le monde joue on ne sait plus quand, contre on ne sait plus qui, pour on ne sait plus quoi…

Le match s’est traîné, ce fut presque distrayant de voir à la 30′ Victor Wanyama se ramasser une semelle de la part du pauvre Habib Habibou exclu pour la cause. Je fatigue avec ces histoires de semelles, very fashion en ce moment : et je dis pauvre parce que la godasse de l’Habibou sanctionné (demeuré debout) n’aurait jamais endolori la victime si celle-ci n’avait pas tenté d’être première sur le ballon en se jetant jambe en avant… A propos de chaussures et de mode, j’ai repensé à celles de l’expo dont photo ci-jointe : un montage de Freddy Contreras, avec onze jolies paires toutes similaires, pendues à onze crochets au dessus d’un banc de vestiaire,… à vous de juger si c’est une pub pour le machisme ou le foot féminin ! Le catalogue de l’expo parlait de liens entre la mode et le sport, j’y ai davantage ressenti des liens entre le foot et l’amour…

C’était la mi-temps, j’ai regardé Carolos et Anversois rentrer aux vestiaires sans avoir rien montré, c’était quand même tous des costauds musclés, les temps avaient changé depuis… George Best, que je venais de quitter ! A l’expo One Shot toujours, six caméras d’un long film tourné en 1970 n’avaient fixé que l’Irlandais de légende durant tout un match : images fascinantes de monotonie, plans démystificateurs des matches magnifiés par les montages traditionnels, et témoignage vertigineux de l’évolution des stars du foot en 40 années : souvent seul sur fond vert uni, Georgie y apparaissait trottinant, marchant ou immobile, rarement avec ballon, sans garde-chiourme collé, sprintant peu et dribblant moins encore,… exact inverse de l’idole virevoltante de mes souvenirs ! Best s’affichait là gringalet, look désuet d’ado chevelu tuberculeux dans petit maillot sans pub moulant petit torse, gambettes comme des allumettes, bas sans jambières hissés péniblement jusqu’à 10cm en dessous du genou, cuisses de mouche. Les gamins d’aujourd’hui auraient peine à croire que ce fut un dieu, et pourtant c’en fut un…

Au Sporting, les joueurs revinrent sur le terrain pour un second time vide de sens, seul le tir victorieux de Daniel Cruz secoua quelque chose. Quant aux visités, ils n’ont pas dû frapper une seule fois au but, au point que je me suis demandé si Tommy Craig ne les avait pas fait visiter l’expo, laquelle aurait pu les rendre timorés. En effet, il y avait là un ballon de foot plus vrai que nature sauf qu’il était en marbre, et juste à proximité un but de foot dont les habituels filets avaient été remplacés par un jeu de vitraux beaux comme dans les églises : un ballon à ne pas frapper, un but dans lequel nul n’aurait osé frapper. Le foot qui pose des questions, c’était au Mambourg autant qu’à l’expo…

(*) au BPS 22 du Boulevard Solvay, jusqu’au 11 juillet : 071/27.29.21, http://bps22.hainaut.be

par bernard jeunejean

Je fatigue avec ces histoires de semelles, very fashion en ce moment

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