Apôtre de la formation

Ce titre n’est pas le mien ! L’appellation est contrôlée. C’est tout simplement en ces termes que l’on désigne Philippe Saint-Jean à la Fédération. Il est vrai que c’est sous ce label qu’il a acquis toute sa réputation et s’est fait connaître dans la corporation des entraîneurs. Avec beaucoup de difficultés et d’obstacles d’ailleurs. Lui qui stoppa sa carrière de footballeur à 26 ans, suite à une grave blessure au genou, il lui a fallu attendre la cinquantaine pour goûter enfin aux joies de la reconnaissance et de la notoriété.

Mais que de déceptions et d’ingratitudes entre-temps ! La dernière et la plus cruelle : son départ du Futurosport de Mouscron, temple de la formation qu’il avait vu naître et fait croître. Mais, selon  » ceux qui savent « , ses méthodes n’étaient pas adaptées au professionnalisme de haut niveau. Traduisez : il faisait de l’ombre à certains responsables de l’équipe première ou plutôt, il mettait en lumière certaines de leurs lacunes. On sait combien  » les esprits médiocres condamnent, généralement, ce qui dépasse leur entendement « . (1)

Le Président Jean-PierreDetremmerie, qui avait eu le mérite de lancer ce merveilleux projet, se rangea du côté des envieux au nom sans doute du pragmatisme. Je le crois cependant trop futé pour ne pas se rendre compte aujourd’hui qu’il a choisi le mauvais camp. Comme Saint-Jean n’est pas un homme de conflits, il préféra s’effacer. Depuis, il habite toujours Mouscron mais ne met plus un pied sur le site du Futurosport.

D’une déception naît parfois un projet neuf. Ce fut Tubize, club de D3. Comme ce fut le cas pour son copain Ariel Jacobs avant lui, Philippe brûlait d’envie de prouver qu’un formateur est mieux armé que quiconque pour devenir un excellent entraîneur. Pari gagné : Tubize est déjà au tour final de la D2 ! En deux saisons, Saint-Jean a déjà magistralement dépassé l’objectif du président Raymond Langendries en propulsant son équipe à la porte de l’élite. Car il ne s’en cache pas, Saint-Jean vise la D1.

A l’époque où Enzo Scifo arriva à Charleroi, il aurait aimé être secondé par un homme de terrain de la trempe de Philippe mais Detremmerie refusa. Pensez donc : pas un profil de joueur belge ne lui échappe. Il a connu et visionné tant de gamins pour nos sélections nationales.

Le secret de sa réussite ? Une incroyable persévérance. Une ténacité au-delà de tout. Cela fait maintenant plus de 25 ans qu’il chemine avec la même obstination vers son objectif. Le problème est qu’il ne peut travailler et collaborer qu’avec des dirigeants qui veulent sans cesse progresser. Perfectionniste jusqu’au dernier détail, d’une méticulosité qui frise parfois, selon certains, la maniaquerie, son exigence est inflexible. Je le soupçonne aussi de ne pas assez déléguer. Il veut tout vérifier par lui-même au point d’exploser ses horaires de travail. Levé à 6 h 30, il ne voit généralement son lit qu’après minuit. Chaque journée est organisée avec soin. Dès le matin, il consulte son plan de travail. Rien n’est laissé au hasard. Ni dans sa vie quotidienne ni sur le terrain !

Son goût d’apprendre est gargantuesque et sa curiosité intellectuelle sans cesse en alerte. Il s’intéresse à tout, il découpe, il classe, il range. Et cela va bien au-delà du foot : blagues, citations, paroles de chansons, recettes de cuisine, articles de bricolage ou de décoration. Il est infatigable ! Mieux, il prend des notes partout et tout le temps. Que de renoncements pour cet épicurien qui adore se retrouver avec ses amis autour d’une bonne table, qui sait apprécier la vie, les rencontres, la nature, la musique, la lecture, le soleil ! Superstitieux, il exige toujours le même chauffeur de car pour les déplacements de son équipe et, les jours de matches, il porte de préférence les mêmes habits et ne s’alimente que de poulet. Paroles d’évangile selon Saint-Jean…

(1) La Rochefoucauld.

par André Remy

 » Il ne s’en cache pas, SAINT-JEAN VISE LA D1 « 

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