André-Pierre Gignac

L’analyse du jeu très particulier du Toulousain, meilleur buteur de L1 la saison passée et adversaire du Club Bruges demain soir.

Positif

– Le centre-avant de Toulouse est le type même de l’attaquant déménageur ( 1m86 pour 84kg ) qui ne refuse jamais d’aller au combat et qui, 90 minutes durant, se démène sur tout le front de l’attaque pour faire bouger la défense adverse. Constamment en mouvement, il est chaque semaine un véritable poison pour toutes les équipes du championnat européen le plus défensif. La saison dernière, il a décroché le titre de meilleur buteur avec 24 buts en évoluant la plupart du temps seul en pointe.

– Le volume de jeu du Toulousain est réellement impressionnant. Il est capable de se lancer dans de longues courses pour se créer de l’espace mais également pour faciliter les plongées de ses partenaires de la deuxième ligne. Ses appels dans la profondeur sont tranchants et il affectionne recevoir les ballons dans sa foulée plutôt que dans les pieds à l’arrêt. Son jeu en mouvement est de très haut niveau. Sa vitesse de course faite de puissance, avec ou sans ballon, est réellement impressionnante.

– Le jeu de tête fait partie de ses grandes qualités. Aussi bien à l’arrêt qu’en mouvement, il s’appuie sur une excellente détente et sur un très bon timing, ce qui lui donne une grande efficacité dans les 16 mètres. Au deuxième piquet, il parvient à rester suspendu dans les airs pour rabattre le ballon avec beaucoup de force. Sa taille est un atout et il s’exprime très bien comme pivot où ses déviations dans les airs sont très précises pour les appels de balle de ses partenaires.

– Sa frappe de balle est très puissante, grâce à sa musculature plutôt qu’à sa technique naturelle, et son pied droit est nettement plus performant que le gauche. Il fait preuve de beaucoup de culot dans ses tirs au but et n’a pas peur de tenter sa chance de loin, et souvent avec de la réussite. Il est plus efficace en tirant en force que quand il essaye d’enrouler ses frappes.

– André-Pierre a un mental de très haut niveau, ce qui va lui permettre, après sa saison de très haute conjoncture l’année dernière, de rebondir alors qu’il est moins en réussite depuis le début du championnat. Il remet constamment l’ouvrage sur le métier et des entames de matches hésitantes ne le font pas douter : il parvient généralement à tourner les événements en sa faveur.

– La marge de progression du nouvel international français est encore très importante car il aura seulement 24 ans en décembre. Il a une énorme envie de franchir un palier et un transfert vers Lyon en juillet entrait parfaitement dans son plan de carrière. Le veto de son président l’a chagriné dans un premier temps mais l’homme fort toulousain lui a fait comprendre que l’année de la Coupe du Monde (si la France se qualifie ) peut rapporter pour lui comme pour le club un transfert bien plus lucratif. Ce qu’il a parfaitement compris.

– Le sens du but est très développé chez l’ancien joueur de Lorient. Il est à l’affût dans le rectangle et suit systématiquement chaque frappe d’un de ses partenaires. Il a réussi la saison dernière quelques buts après de longs raids où, dans une position très excentrée, il a réussi, parfois chanceusement, à trouver l’ouverture dans un trou de souris. En tout cas, il fait preuve d’énormément d’audace en tentant sa chance dans des angles dits impossibles.

Négatif

– Techniquement, André-Pierre manque clairement de finesse dans son jeu et ses dribbles sont davantage réalisés en force que grâce à des trouvailles techniques. Il élimine souvent son adversaire en bénéficiant d’un contre heureux, et cette manière de procéder risque de ne plus être efficace lorsqu’il aura moins de réussite dans ses duels. Ses dribbles, ses feintes, ses contrôles de balle et ses crochets sont très basiques et ne doivent certainement pas être pris en exemple.

– Le meilleur buteur du championnat 2008-2009 est à l’aube de la saison la plus importante de sa carrière. Va-t-il rééditer sa formidable campagne ? L’année de la confirmation est la plus difficile et l’effet de surprise ne va plus jouer par rapport aux adversaires. Son mental est excellent mais sera-ce suffisant si la confiance s’étiole à cause d’une pénurie de buts ?

– Le nouveau Bleu manque clairement de polyvalence et la saison dernière, il a presque toujours évolué en position axiale et seul en pointe. On pourra vraiment le juger lorsqu’il évoluera dans une équipe où la concurrence offensive est plus importante ou dans un système avec deux attaquants centraux. Il faudra alors trouver le joueur complémentaire au jeu très particulier de Gignac.

Son travail défensif est réduit à sa plus simple expression mais c’est probablement une consigne de son coach qui souhaite qu’il garde de la fraîcheur pour ses chevauchées fantastiques. Son gabarit et son jeu de tête peuvent être des atouts sur coups de pied arrêtés défensifs mais l’entraîneur le laisse seul devant sur ce type de phases pour profiter de sa capacité à garder un ballon sur un long dégagement de la défense.

Le pied gauche est un de ses points faibles et il se repositionne presque toujours sur son droit avant de frapper au but. Il a certes marqué deux buts de son deuxième pied la saison passée mais aussi bien dans les contrôles que dans les enchaînements, il manque clairement de maîtrise avec sa patte gauche.

– La gestion des combinaisons dans les petits espaces est également un point qu’il doit améliorer. Il est capable de jouer dos au but en déviation mais cela manque clairement de fluidité dans les mouvements car il utilise plus son gabarit et ses bras que ses qualités techniques et son élégance.

-N’ayant pas fréquenté une des grandes écoles de jeunes en France, son manque de formation saute véritablement aux yeux.

Né en 1963, Etienne Delangre joua comme défenseur au Standard de 1981 à 1992 (267m en D1 et 6b, champion en 82 et 83). Ex-chargé de cours à l’Ecole du Heysel, il coacha de la P1 à la D1 (Charleroi).

Par Étienne Delangre

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