« Anderlecht n’a pas tout perdu »

Le médian mauve suspendu à Gand analyse la situation de son club.

Pour protéger sa deuxième place, qualificative en vue de la Ligue des Champions, Anderlecht n’avait d’autre ressource que de l’emporter à Gand, vu les succès obtenus la veille par deux de ses rivaux directs, le Lierse et Lokeren. Le Sporting est finalement bel et bien parvenu à ses desseins chez les Buffalos, mais non sans mal. Car jusqu’au deuxième but libérateur, signé par Ivica Mornar, sa production fut des plus indigentes, même si défensivement il n’offrit guère d’occasions à son opposant du jour.

S’ils ne produisent pas un football d’un autre tonneau dans les semaines à venir, les Mauves risquent d’avoir fort à faire pour maintenir derrière eux leurs poursuivants immédiats qui, à l’image des Waeslandiens, souverains samedi passé au Tivoli, pratiquent actuellement un jeu autrement plus sémillant que celui des Bruxellois. Ce qui constitue quand même un comble quand, comme le RSCA, on était donné favori de la compétition conjointement avec le Club Brugeois en début de campagne. Comment expliquer le retard insurmontable concédé par les joueurs d’Hugo Broos face aux troupes de Trond Sollied? C’est la première question que nous avons posée à Yves Vanderhaeghe, qui purgeait une journée de suspension à Gentbrugge, et qui fut remplacé pour la circonstance par Besnik Hasi.

Yves Vanderhaeghe: Par rapport à nous, le Club présente l’énorme avantage, depuis deux ans, de jouer avec un système et un onze de base quasi immuables. Chez nous, pendant cette même période, la stratégie et les hommes appelés à l’appliquer ont souvent changé. Indépendamment des modifications enregistrées dans les secteurs défensif et offensif, je signalerai que dans ma propre zone, le milieu du jeu, j’ai évolué aux côtés d’une kyrielle de joueurs cette saison: Martin Kolar, Walter Baseggio, Gilles De Bilde, Michal Zewlakow, Besnik Hasi, Mark Hendrikx et Goran Lovré. C’est énorme. Dans ces conditions, il n’est pas anormal que les automatismes soient moins rodés, au Sporting, qu’à Bruges.

Au même titre que Walter Baseggio, vous faites figure d’incontournable dans la ligne médiane anderlechtoise. D’une saison à l’autre, l’attitude du public a toutefois changé à votre égard: sifflé l’année passée, vous ne faites plus office de cible à présent. Comment l’expliquez-vous?

Lorsque les résultats ne répondent pas tout à fait à l’attente, comme ce fut le cas en 2001-2002 déjà à Anderlecht, il n’est pas rare que les supporters cherchent un bouc émissaire. S’ils se sont acharnés sur moi, c’est probablement en raison du fait que dans cette période difficile, je ne me suis jamais caché sur le terrain, même si mes initiatives n’étaient pas toujours heureuses. J’aurais sans doute évité les coups de sifflet en étant moins disponible pour mes partenaires au moment où ils cherchaient une solution pour se débarrasser du ballon. Mais je n’ai pas l’habitude de me dissimuler. Dès lors, j’ai trinqué, c’est vrai. A la Coupe du Monde, dans un contexte foncièrement différent, j’ai heureusement pu me racheter, au point d’être crédité d’un tout bon parcours, au même titre que Marc Wilmots. Manifestement, des yeux se sont ouverts à ce moment. Bon nombre de suiveurs se sont aperçus que je ne détonnais nullement au plus haut niveau et, depuis ce moment, je constate que je jouis d’une tout autre considération. Je trouve simplement dommage que d’autres aient été pris en grippe par les inconditionnels du Sporting entre-temps. Besnik Hasi et Mark Hendrikx ne méritent pas d’être traités de la sorte. D’autant qu’ils n’ont jamais démérité. D’ailleurs, si nous avons pu inscrire un deuxième but à Bordeaux, c’est grâce à une action conjointe de ces deux garçons.Plus populaire qu’avant

La nouvelle considération dont vous jouissez s’est notamment traduite par un nouveau contrat de deux saisons. A son échéance, vous aurez 36 ans. Compte tenu de votre ardeur au travail, d’aucuns doutent que vous serez toujours d’attaque à ce moment-là?

Je suis moins sceptique. Je mesure sans doute mieux que quiconque le bonheur d’être professionnel à Anderlecht de surcroît. Il ne faut pas oublier que j’ai dû attendre mes 30 ans avant de savourer ce bonheur. Aussi, j’entends vraiment faire durer ce plaisir le plus longtemps possible. Et, pour ce faire, j’observe une hygiène de vie très stricte, en me ménageant pas mal de plages de repos. Je me fais la réflexion aussi que le jour où les tâches seront bien cernées par tout un chacun, je ne devrai peut-être plus lésiner sur la dépense physique comme ces derniers mois. En réalité, si j’ai peut-être davantage pu me mettre en valeur avec les Diables Rouges qu’avec le Sporting, c’est parce qu’en équipe nationale, tout le monde est parfaitement conscient des implications défensive et offensive de sa mission. Bart Goor à gauche et Gaëtan Englebert à droite ont beau plonger plus souvent qu’à leur tour vers l’avant, ils sont toujours les premiers aussi à se soucier de la récupération du ballon. A Anderlecht, cette autodiscipline-là est moins évidente. Attention, ceci n’est nullement un reproche mais un simple constat. En cas de perte de balle, un nombre trop restreint de joueurs sont impliqués dans sa reconquête. Du coup, on s’expose inévitablement à certaines déconvenues. Comme il en est allé récemment sur notre terrain contre Westerlo, par exemple. Mais la bonne volonté me semble évidente chez tout le monde et nous finirons bien par nous tirer d’affaire un jour.

Le RSCA est passé d’un 4-4-2 en début de campagne à un 4-3-3 en cours de route. En occupant la pointe inférieure du triangle, dans l’entrejeu, la débauche d’efforts n’est-elle pas beaucoup plus importante, pour vous, que dans l’autre système?

Si chacun assure équitablement sa part de travail, un système avec trois éléments dans l’entrejeu, avec mission défensive stricte pour l’un d’entre eux, n’est pas plus difficile qu’un schéma à quatre. Bruges en constitue la parfaite illustration avec Timmy Simons. Mais il peut évidemment compter sur un Gaëtan Englebert au four et au moulin à ses côtés. De ce côté-là, toutefois, il y a eu du changement à Anderlecht avec l’adjonction de Goran Lovré dans l’entrejeu. Franky Vercauteren a raison de le comparer à Lorenzo Staelens, car au même titre que Lorre, le jeune Serbe a cette faculté de se multiplier à gauche et à droite, devant et derrière, avec ses grands compas. Il est d’un apport non négligeable pour l’équipe, même s’il lui reste pas mal de choses à apprendre. Comme à choisir le moment propice pour monter. Car s’il le fait en même temps que Walter Baseggio -ce qui s’est vérifié contre Westerlo -, on s’expose bien sûr à des contres meurtriers.

Goran Lovré n’est pas le seul jeunot à avoir été lancé dans la bataille cette saison. Olivier Deschacht aussi a déjà eu droit à davantage de temps de jeu que la saison passée. Que vous inspire-t-il?

En le voyant à l’oeuvre, je fais la réflexion qu’Anderlecht n’a peut-être pas tout perdu cette saison. Certes la victoire finale en Coupe de Belgique et peut-être en championnat est fichue et la tâche contre le Panathinaïkos sera ardue mais le Sporting aura quand même eu la satisfaction de voir ces deux promesses se révéler. Et ce n’est pas fini car, personnellement, je crois autant en l’étoile d’autres jeunots comme Junior ou Lamine Traoré, par exemple.

Bruno Govers

« J’ai déjà évolué au côté de sept autres joueurs dans la ligne médiane. C’est énorme »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire