Amuseur public

Le médian argentin débarque au Sporting précédé d’une flatteuse réputation. Répondra-t-il à l’attente ?

Anderlecht a recruté jeune, cette année. Avec ses 26 ans, Hernan Losada fait figure de doyens des nouvelles recrues. Comparé à Cheikou Kouyate (19 ans), Kanu (19 ans), Matías Suarez (20 ans), Arnold Kruiswijk (23 ans) et Nemanja Rnic (23 ans), il possède déjà pas mal d’expérience, dont deux ans en Belgique sous les couleurs du Germinal Beerschot. C’est là qu’on a appris à le connaître, et au vu de ce qu’il a montré au Kiel, il est logique que les supporters anderlechtois attendent beaucoup de lui.

Lorsque vous jouiez au Germinal Beerschot, tout le monde affirmait que vous étiez un joueur pour Anderlecht. Aujourd’hui, la prédiction s’est réalisée. Qu’est-ce que cela représente, pour vous ?

Hernan Losada : C’est à la fois une grande fierté et une responsabilité accrue. C’est aussi une récompense pour tous les efforts que j’ai consentis. Durant deux années passées au Germinal Beerschot, j’ai lutté sans cesse. La découverte d’un nouveau pays, l’apprentissage d’une nouvelle langue (le néerlandais en l’occurrence à l’époque, aujourd’hui je prends des cours de français) : tout n’a pas été facile. Je me suis accroché, y compris comme lorsqu’on m’a demandé d’évoluer à une position qui n’était pas la mienne.

Que voulez-vous dire ?

J’ai joué sur le flanc droit à un moment donné, vous ne vous en souvenez pas ? Cela ne m’a pas fait plaisir, mais je n’avais pas le choix. C’était le flanc droit ou le banc. J’ai opté pour le flanc droit. Cela m’a demandé beaucoup d’efforts, mais ma persévérance a été récompensée. Ce que j’ai démontré dans un rôle inhabituel m’a permis d’occuper, après un certain temps, une place plus en rapport avec mes capacités. Avec le succès que vous savez. En débarquant en Belgique, je me suis fixé un objectif : celui de rester en Europe. Il faut se souvenir qu’au début, je n’avais été engagé que pour une période d’un an, sous forme de prêt avec option. Nous étions cinq Argentins dans le cas, il y avait donc un doute à notre sujet. Le fait que l’option ait été levée était déjà un premier succès pour moi. Je pouvais rester, au même titre que Gustavo Colman, désormais parti en Turquie. Savoir que le club avait confiance en moi m’a boosté. Je suis reconnaissant envers le Germinal Beerschot, et en particulier envers son président Jos Verhaeghe, d’être venu me chercher en Argentine. J’ai pu y démontrer mes qualités footballistiques et humaines. Ensuite, ma réussite fut surtout une question de travail.

 » Anderlecht est le club idéal pour moi « 

Anderlecht était-il réellement le club dont vous rêviez, ou étiez-vous davantage focalisé sur un transfert en Espagne ou en Italie, comme la plupart des joueurs argentins ?

Les pays méditerranéens font rêver les joueurs argentins, c’est vrai. Mais, honnêtement : au fond de mon c£ur, j’aspirais à poursuivre ma carrière en Belgique, tout en effectuant une progression. Dans cette optique, Anderlecht était le club idéal.

Comment vous voyez-vous fonctionner dans ce club ?

C’est plutôt une question pour l’entraîneur. Le déroulement des matches lui donnera des indications sur la meilleure manière d’assembler les pièces du puzzle. Pour l’instant, j’essaie de donner le meilleur de moi-même et de profiter de chaque minute passée sur le terrain.

Et si vous pouviez choisir votre place de prédilection ?

Je me sens à l’aise à droite comme à gauche, et lorsque l’équipe n’est pas en possession du ballon, je ne rechigne pas à aider aux tâches de récupération, mais il est clair que je préfère une position axiale dans l’entrejeu, pas trop loin du rectangle adverse, avec un rôle plutôt offensif.

Un n°10 typique, quoi ?

Oui et non. Le numéro 10 au sens où on l’a longtemps entendu est une race en voie de disparition. Ce poste a été sacrifié sur l’autel de la tactique préconisée par beaucoup d’entraîneurs. Je constate cette évolution un peu partout, pas uniquement en Belgique. Mais cela ne me dérange pas : je m’adapte, c’est d’ailleurs la seule façon de survivre. A Anderlecht, j’ai déjà évolué en retrait des deux attaquants – c’était le cas contre Roda JC mercredi passé – et dans une position légèrement excentrée, sur la gauche ou sur la droite. Pas de problème : l’essentiel est que je sois sur le terrain.

Vos débuts sous le maillot bruxellois ont été un peu hésitants, mais on constate que vous progressez au fil des semaines…

J’ai souffert lors des premières semaines, je le reconnais. Ce n’était toutefois pas spécialement lié à une quelconque difficulté d’adaptation. Il ne faut pas oublier que j’avais été blessé lors des deux derniers mois de la saison dernière. Cette inactivité forcée, ajoutée aux vacances, m’a fait perdre le rythme. Il est logique, dès lors, que mon retour en forme prenne un peu de temps. Durant la période de préparation, j’étais un peu émoussé. Cela n’a rien d’anormal, puisqu’on y travaille habituellement l’aspect physique. Au niveau de l’adaptation, je n’ai rencontré aucune difficulté au Parc Astrid. Et, ces dernières semaines, je commence à retrouver la confiance en même temps que le rythme. Les derniers matches amicaux ont démontré mes progrès.

Au Germinal Beerschot aussi, vos premiers pas avaient été hésitants. Vous jouiez peu durant vos premiers mois en Belgique.

Effectivement, mais là encore, cela n’avait rien à voir avec l’adaptation. C’était un choix de l’entraîneur Marc Brys, tout simplement. Lorsqu’il m’a donné l’occasion de démontrer mes capacités, je pense l’avoir saisie.

 » Je ne ressens pas de pression particulière « 

En quoi Anderlecht diffère-t-il du Germinal Beerschot ?

C’est difficile de mentionner certains points précis. Chaque club possède ses particularités : l’organisation interne est différente, les méthodes de travail sont différentes…

Le teambuilding, tel qu’effectué à Marche-les-Dames et à Durbuy, c’était nouveau pour vous ?

Pas du tout. Marc Brys était également un adepte de ce type de préparation. J’avais effectué deux teambuildings sous sa direction.

La concurrence est rude à Anderlecht, dans tous les secteurs de jeu ?

Le noyau est effectivement plus étoffé. Mais la concurrence ne m’effraie pas. En Argentine, j’en ai vu d’autres. Vous n’imaginez pas la concurrence qui règne là-bas, en particulier parmi les jeunes qui débarquent des quatre coins du pays pour se forger une place au soleil dans l’un des grands clubs de la capitale. Il y a beaucoup d’appelés et très peu d’élus. Anderlecht est une nouvelle étape dans ma carrière et je ne ressens aucune pression. Ou alors, c’est de la pression positive. En aucune manière, de la pression négative.

Accepteriez-vous, le cas échéant, de prendre place sur le banc ?

Ce n’est évidemment pas mon objectif, mais si l’entraîneur le décide, il faudra bien que je l’accepte.

Le public anderlechtois apprécie les joueurs techniques, qui offrent du spectacle. Vous devriez le régaler.

Je l’espère, c’est mon ambition. A mon arrivée, j’ai en tout cas été très bien accueilli. Je sais que l’attente est grande à mon sujet. Pourvu que je sois à la hauteur.

Ahmed Hassan est parti, vous avez tout pour lui succéder dans le c£ur des supporters.

Cela ne m’ennuie pas que l’on me compare à l’Egyptien. C’est un excellent joueur, qui a réalisé de grandes choses à Anderlecht et je serais très fier si je pouvais devenir aussi populaire que lui. J’évolue à la même position que lui, mais nous sommes deux joueurs différents : il avait ses qualités, j’ai les miennes. Comme j’ai également joué au Beerschot et à Anderlecht, on a fait le même rapprochement avec Juan Lozano. C’est de bonne guerre. Mais chaque joueur est différent.

 » Etre entouré d’Argentins, c’est surtout important pour Suarez « 

Connaissiez-vous déjà certains de vos nouveaux équipiers ?

Je connaissais déjà les joueurs argentins pour les avoir côtoyés, comme équipiers ou adversaires, dans mon pays. J’ai joué à l’Independiente, comme Nicolas Frutos et Lucas Biglia. Je n’ai pas beaucoup joué avec Lucas là-bas, car il est arrivé au moment où je partais. J’ai un peu plus joué avec Nico, mais pas énormément non plus. Matías Suarez, je le connaissais seulement via la télévision, pas personnellement : il est plus jeune que moi et sa carrière n’avait pas encore véritablement débuté lorsque j’ai quitté l’Argentine. Extérieurement, il a l’air un peu timide : chacun a sa personnalité. Mais sur le terrain, je peux vous assurer qu’il n’est pas timide du tout. Si cela peut être un avantage pour moi d’être entouré par plusieurs compatriotes, ça l’est encore davantage pour Matías.

Vous restez tout de même naturellement avec vos compatriotes.

Je joue en Belgique depuis deux ans et ma période d’adaptation est déjà derrière moi. Les autres joueurs d’Ander-lecht, je les connaissais pour les avoir affrontés. Tout se passe très bien, pas de problèmes : c’est un chouette groupe, où chacun travaille bien dans le but de gagner sa place, c’est logique. Je compte mettre tous les atouts dans mon jeu. Je suis en plein déménagement, je vais bientôt emménager dans mon nouvel appartement bruxellois, pas très loin du stade. Anvers n’est pas très éloigné de la capitale, et en cette période de vacances les déplacements ne sont pas très fastidieux, mais lorsque tout le monde aura repris le travail, les bouchons seront plus nombreux sur la route. Pour mieux récupérer, pour mieux me concentrer sur mon travail, il est préférable que je m’installe tout près du stade.

Considérez-vous Anderlecht comme un aboutissement ou comme un tremplin vers de plus hautes destinées ?

Chacun aspire à aller le plus haut possible. Mais je viens de débarquer, chaque chose en son temps. Si je m’illustre sous le maillot mauve, il est possible que d’autres propositions me parviennent. On en parlera en temps voulu. J’ai signé un contrat de quatre ans. Si je vais au bout de celui-ci, j’aurai 30 ans. Evidemment, on sait ce que la durée d’un contrat signifie dans le football moderne : au Germinal Beerschot, j’avais aussi signé un contrat de quatre ans. Douze mois plus tard, j’étais parti.

Ce soir, vous entrez en lice au deuxième tour préliminaire de la Ligue des Champions…

Ce sera une première pour moi en Europe, mais j’avais déjà participé à des compétitions internationales en Argentine, comme la Copa Libertadores ou la Copa Sudamericana. Je sais que la Ligue des Champions est l’un des objectifs d’Anderlecht et que ce premier match contre BATE Borisov revêt donc une énorme importance.

Parle-t-on davantage de vous en Argentine depuis que vous jouez à Anderlecht ?

La presse de mon pays essaie de donner des nouvelles de tous les joueurs argentins évoluant à l’étranger. Pour tout dire, comme la saison n’a pas encore véritablement commencé, c’est très calme actuellement, tant sur le plan national qu’international. On parlera surtout beaucoup de moi si je dispute la Ligue des Champions. Je sais ce qu’il me reste à faire.

par daniel devos

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