Ambiance !

Olivier Renard et Björn Vleminckx sont un exemple de l’enthousiasme malinois et de la complicité qui règne aujourd’hui dans ce club. Explications lors d’une discussion de copains…

Malines disputera, samedi, la cinquième finale de Coupe de Belgique de son histoire. Ce club historique, qui fut déclaré en faillite en 2003 mais retrouve vie aujourd’hui, en a gagné une en 1987 mais en a perdu trois en 1967, 1991 et 1992. Olivier Renard et Björn Vleminckx ont chacun disputé une finale avec un autre club : le Standard pour le gardien (défaite 1-0 contre le Club Bruges en 2007) et Beveren pour l’attaquant (défaite 4-2 contre le Club Bruges également en 2004).

 » Un troisième joueur belge de Malines a disputé une finale de Coupe avec un autre club et l’a perdue également « , précise Renard.  » C’est Wouter Vrancken, qui s’est incliné 3-1 contre La Louvière avec Saint-Trond en 2003. Le seul, chez nous, qui connaît le parfum de la victoire dans ce genre d’épreuve est Anton Dunkovic, qui a remporté le trophée en Croatie. Pour tous les autres, ce sera une grande première. « 

Ancien Rouche et… futur Rouche ?

Messieurs, avons-nous en face de nous un ancien et un… futur Standardman ?

Vleminckx : Je ne souhaite pas aborder le thème d’un transfert avant dimanche prochain. Si on a les idées ailleurs, il est impossible de se concentrer sur un objectif. Je n’ai pas encore été contacté personnellement, mais il paraît que mon manager et le club l’ont été.

Renard : Ce que je peux dire, c’est que la mentalité de Björn conviendrait parfaitement au Standard. Les supporters rouches l’adoreraient : des joueurs qui mouillent autant leur maillot que lui, cela ne court pas les rues. Et, connaissant la qualité des centres expédiés par Steven Defour, Axel Witsel et Wilfried Dalmat, je suis certain Björn se régalerait en bord de Meuse. Mais je ne suis pas son manager. Au vu de la saison qu’il a livrée, il est logique que des clubs s’intéressent à lui. Toutefois, pour qu’il aille au Standard, je crois qu’il devrait y avoir des départs du côté de Sclessin. Si c’est pour être 4e ou 5e attaquant, autant aller ailleurs ou rester une saison de plus à Malines.

Ce qui est clair, c’est qu’il existe des atomes crochus entre vous…

Vleminckx : Je peux même dire qu’Olivier est mon meilleur ami dans le vestiaire. On ne rate jamais une occasion de rigoler ensemble. Lors du stage en Turquie, cet hiver, on faisait chambre commune. Des coussins ont parfois volé ! ( Ilrit)

Renard : Il n’y avait rien d’intéressant à la télévision turque, il fallait bien s’occuper… Je peux vous dire que Björn a souffert durant ces batailles de coussins ! ( Ilrit)

Comment est née cette amitié ?

Renard : C’est fréquent qu’une amitié naisse entre un gardien et un attaquant. A l’entraînement, on est souvent face à face. Et on se lance mutuellement des défis. En outre, nos caractères sont fort similaires. On se donne à 100 % sur le terrain, mais après, on va volontiers boire quelques verres avec les supporters. Björn est un garçon très positif, qui tire régulièrement le groupe avec lui, par l’énergie qu’il déploie. Il est plus exubérant que moi. Sa rage de vaincre est plus perceptible, mais c’est logique : en tant que gardien, je ne peux pas me permettre des déboulés de 60 mètres.

Vleminckx : Je râle facilement et je dis toujours les choses en face. Il y a parfois eu des altercations à l’entraînement, mais une fois retourné dans le vestiaire, tout est oublié. Si Olivier est, comme moi, un battant, c’est aussi un garçon charmant toujours prêt à rendre service.

Quelles sont les qualités footballistiques d’Olivier ?

Vleminckx : C’est un gardien complet. Il dirige sa défense, est adroit dans le jeu au pied, et avant sa blessure, il sortait très bien sur les centres aériens. J’ai l’impression qu’il hésite un peu plus à s’y aventurer ces derniers temps, mais cela reviendra.

Et celles de Björn ?

Renard : Il est, avec Igor de Camargo, le joueur qui possède le meilleur jeu de tête du championnat. Son timing et sa détente sont exceptionnels. Par rapport à sa taille, il perd très peu de duels. Pour un gardien, c’est important de savoir vers qui on doit dégager lorsqu’on est sous pression. Björn est toujours un bon placement. Les supporters l’ont élu comme joueur le plus méritant de la saison. Au niveau de la concrétisation, il est très efficace également. Mais, s’il est capable d’inscrire des buts impossibles, il lui arrive aussi de louper des occasions immanquables.

Le 7-1 a été vengé

Comment avez-vous vécu cette saison ?

Renard : J’ai subi quelques désillusions. Pour un gardien, encaisser sept buts comme ce fut mon cas à Anderlecht, ce n’est jamais agréable. En prendre quatre au Standard, ce ne l’est pas davantage. Certains ont affirmé que, vu les liens qui unissent Malines au Standard, on n’allait pas mettre beaucoup de bâtons dans les roues des Rouches. C’est faux : j’avais réellement envie de ramener un ou trois points de Sclessin. Simplement, on s’était qualifié pour la finale de la Coupe le mardi précédent et les festivités avaient été assez… éprouvantes. Pour un club comme Malines, c’est difficile de se remettre en question tous les quatre jours. Cependant, le gros point noir de ma saison, ce fut mon hernie discale à la fin janvier. Au moment où j’ai été opéré, beaucoup de monde m’avait dit que je ne rejouerais plus cette saison. Ma plus belle satisfaction, c’est celle là : être revenu à temps pour la finale de la Coupe.

Vleminckx : Je jette un regard très satisfaisant sur ma saison, sans doute la meilleure de ma carrière. J’ai pratiquement été titulaire à chaque match et j’ai inscrit 18 buts au total : 12 en championnat et six en Coupe. Ajoutez-y sept assists. Je n’espérais pas forcément une telle réussite. J’étais suspendu pour les deux premiers matches et l’arrivée de Giuseppe Rossini m’offrait un concurrent de choix. Le Louviérois a entamé le championnat dans la peau du titulaire, mais à mon retour de suspension, l’équipe ne tournait pas et j’ai reçu ma chance. Je l’ai immédiatement saisie. Les rôles ont été inversés. Nous avons rarement évolué ensemble et lorsque ce fut le cas, cela a fonctionné également. Pour preuve, lors du match de Coupe contre Anderlecht, nous avons marqué tous les deux. Je pense pourtant que nous pourrions être complémentaires : Pino est meilleur dans les 16 mètres, alors que personnellement, cela ne me dérange pas d’occuper un poste plus décentré.

Renard : Si l’arrivée de Rossini a fait douter Björn, je peux vous assurer qu’au sein de l’équipe, personne n’a douté de lui. Dans un club ambitieux, une certaine concurrence est normale.

Que retiendrez-vous de ce parcours en Coupe ?

Renard : Beaucoup de personnes retiendront l’élimination d’Anderlecht, au début janvier. La défaite 7-1 encaissée au Parc Astrid, deux mois plus tôt, nous restait encore sur l’estomac. Si on est toujours très motivé lorsqu’on accueille le Sporting, là, la motivation était encore décuplée. Je me souviendrai d’autant plus de ce match que ce fut mon dernier avant ma blessure au dos.

Vleminckx : On a battu le Sporting de façon méritée, selon moi. En exerçant un pressing haut et un marquage serré tout en pratiquant un très beau football. Ce résultat fut très médiatisé, mais il ne faut pas oublier qu’une finale de Coupe ne tient parfois qu’à un fil. Lors de notre entrée en lice, nous avons failli être sortis par… Veldwezelt ! C’était encore 1-2 à quelques minutes de la fin.

Renard : Et on a gagné 3-2. Je dois être honnête : notre adversaire aurait davantage mérité la qualification. Lorsqu’un club remporte le titre avec un peu de réussite, on affirme parfois qu’il a eu la chance du champion. Contre Veldwezelt, on a eu la chance d’un… vainqueur de Coupe !

Plutôt comme outsider

Auriez-vous préféré rencontrer le Lierse plutôt que Genk en finale ?

Vleminckx : Pas du tout. Les Limbourgeois partiront comme favoris. Si nous avions affronté le Lierse, c’eut été l’inverse. Or, le rôle d’outsider nous convient mieux.

Renard : Pour moi, affronter Genk est d’autant plus spécial que toute ma belle-famille est originaire de cette ville ! Mon beau-frère est d’ailleurs supporter du Racing. Mon épouse et moi résidons à Genk. Notre petite fille a un an, elle commence à peine à parler mais nous l’éduquons en français. Lorsqu’elle sera en âge d’aller à l’école, elle fréquentera un établissement néerlandophone. Nous espérons qu’elle deviendra parfaite bilingue. J’ai une autre bonne raison de gagner la finale : dimanche, je fête mon 30e anniversaire !

Quels seront les atouts de Malines ?

Renard : Le public, l’enthousiasme et l’espoir d’être européen. Pour Genk, ce n’est pas un espoir, c’est une obligation. Cela confèrera aux Limbourgeois une pression supplémentaire.

Vleminckx : On doit jouer notre propre jeu, exploiter nos points forts et ne pas s’adapter à l’adversaire. Malines ne sait pas défendre, donc on est obligé d’attaquer. Malines est une équipe plus technique qu’on le pense. On est capable de faire très bien circuler le ballon. L’enthousiasme est simplement une arme supplémentaire que l’on peut utiliser si l’on ne trouve pas la solution sur un plan footballistique. Dans sa grande majorité, l’équipe est jeune. Les joueurs doivent faire leurs preuves à chaque match, et cela vaut pour moi également. J’ai pour habitude d’affirmer qu’on n’est jamais meilleur que ce que l’on a montré lors du dernier match. L’équipe est aussi très… belge. L’entraîneur préfère faire confiance à 11 jeunes Belges enthousiastes plutôt qu’à des vedettes étrangères.

Beaucoup de francophones aussi dans l’équipe…

Renard : La touche francophone a encore été accentuée par le recrutement effectué cette saison : Rossini, Joachim Mununga, Julius Gorius ou David Grondin.

Vleminckx : Flamands, Wallons : on est tous Belges, que je sache ! Et s’il y a aussi des Français dans le lot, cela ne me dérange pas du tout. Ce qui importe, c’est la manière dont chacun se comporte. Et, de ce point de vue là, il n’y a rien à dire. Personne n’est à côté de ses pompes.

La faillite comme nouveau départ

Le stade Roi Baudouin fait-il rêver ou auriez-vous préféré jouer cette finale ailleurs ?

Renard : En découvrant les photos récentes, je me suis demandé si on allait là-bas pour jouer un match de football ou si on devait emmener des pelles pour construire un château de sable ! Le stade Roi Baudouin reste un beau stade, mais à choisir entre jouer à Sclessin devant 30.000 spectateurs ou au Heysel devant 45.000, j’aurais préféré jouer à Sclessin. A Bruxelles, cette piste gâche l’ambiance.

Vleminckx : D’un autre côté, je comprends qu’on ne puisse pas la supprimer car le Mémorial Van Damme est un événement majeur. Le stade Roi Baudouin reste le plus grand de Belgique. Rien que pour cela, c’est spécial. Il y aura 20.000 supporters malinois et, croyez-moi, l’ambiance sera au rendez-vous.

Posséder un tel public, cela doit être un fameux stimulant pour les joueurs…

Vleminckx : C’est très agréable. Les supporters nous soutiennent en toutes circonstances. Même si l’on est battu, et qu’ils constatent qu’on s’est donné à fond, ils nous applaudissent.

Comment explique-t-on une telle ferveur ?

Vleminckx : Malines est un club de tradition, même si cela n’explique pas tout. C’est un public très jeune, qui s’est renouvelé malgré les difficultés. Les gens qui garnissent aujourd’hui les gradins ne sont plus les mêmes que ceux qui ont vécu l’épopée des années 80. Lorsque le club s’est retrouvé en faillite, les supporters sont intervenus, parfois même financièrement. Je pense que cela a créé des liens. Le football, à Malines, c’est une fête : les gens restent au stade jusqu’à 22 h 30 ou 23 heures, puis les jeunes sortent en boîte… C’est bizarre à dire, mais cette faillite et la chute en D3 ont permis de reculer pour mieux sauter. J’espère que la direction continuera à gérer le club comme elle le fait actuellement. Je peux, alors, prédire un très bel avenir à Malines.

Renard : Malines fait aujourd’hui partie des clubs les mieux gérés du pays. Lorsqu’on s’est brûlé, on évite d’encore jouer avec le feu. A Malines, on essaie de progresser pas à pas. On prend exemple sur Westerlo, Zulte Waregem et des clubs de ce genre. Vous n’entendrez jamais, dans la bouche d’un dirigeant, des déclarations du genre : – Onserachampionentelleoutelleannée ! On se contente de travailler et on verra où cela nous mènera. Pour l’instant, cela va plus vite que prévu : le club s’est extrait de D3 en 2005 et de D2 en 2007. Mais on ne se prend pas la tête.

par daniel devos – photos: reporters/ hamers

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