Allez les FILLES !

Pour la première fois, un club belge participe à l’Euroligue féminine. Namur (anciennement BC Saint-Servais), 12 fois champion de Belgique depuis 1991, connaît d’ailleurs un certain succès dans cette compétition : trois victoires en quatre matches (contre Vojvodina Novi Sad, Tarbes et Parme) pour une seule défaite à Gdynia avant d’accueillir demain (au Spiroudôme de Charleroi) l’équipe russe de Samara où évolue AnnWauters.

 » Cette saison, l’équipe a été formée dans la perspective de l’Euroligue « , souligne le président JeanFrançoisPrior.  » C’est le fruit d’un travail de longue haleine, qui avait été entamé par mon prédécesseur Pierre Olivier : d’abord, construire une équipe capable de briller dans le championnat de Belgique ; puis, capable de faire bonne figure en Coupe FIBA ; et aujourd’hui, capable de tenir son rang en Euroligue « .

Pour ce faire, le club a réuni un budget de 750.000 euros, soit presque autant que des clubs masculins de bas de classement.  » 90 % de ce budget est assuré par le sponsoring, je n’ai aucune honte à l’avouer. Cette proportion de 75 à 90 % est une réalité dans tous les clubs professionnels du pays, y compris à Anderlecht. Pourquoi investir autant dans un sport aussi peu médiatisé ? Précisément, pour promouvoir cette discipline qui occupe le premier rang mondial au niveau féminin. Au niveau de l’Euroligue, chaque match est un véritable spectacle. C’est une fierté pour le sport féminin belge de pouvoir compter une équipe de basket parmi les 20 meilleures d’Europe « .

Le choix des joueuses étrangères a été mûrement réfléchi.  » J’ai pris mon temps, j’ai consulté énormément de personnes et je me suis résolu à attendre la fin de la saison de WNBA, pour effectuer le bon choix. Je crois qu’avec RebekkahBrunson et NakiaSanford, on a visé juste. Il nous fallait des joueuses ayant une bonne mentalité et capables de capter beaucoup de rebonds, ce qui est leur cas « .

Dexia Namur est fier de pouvoir présenter dans son effectif cinq joueuses belges, contre trois seulement la saison dernière. Toutes ne sont pas titulaires, mais ont leur rôle à jouer.  » J’essaie de leur offrir un maximum de temps de jeu dans le championnat de Belgique « , explique le coach BennyMertens, par ailleurs également coach national.  » En Euroligue, elles passent moins de temps sur le terrain, mais elles apportent un plus lorsqu’elles montent au jeu et c’est important. Je me réjouis de la mentalité : jamais de rouspétances en regagnant le banc. Aussi longtemps que chacun gardera cet esprit-là, on sera très fort « .

Basketteuse, une profession

L’une de ces joueuses est SophieCharlier, 22 ans. Verviétoise, elle avait déjà évolué au club de 2000 à 2002 (à l’époque du coach français Marc Silvert) et évoluait ces deux dernières saisons à Deerlijk, un club qui a mis la clef sous le paillasson en raison de problèmes financiers mais qui fut l’an passé vice-champion de Belgique (battu après prolongation) et finaliste malheureux de la Coupe de Belgique. Les deux fois contre… Namur, évidemment.

 » Frustrant ? Certes « , reconnaît Sophie Charlier.  » En fait, lorsqu’on affronte Dexia Namur en tant qu’adversaire, on sait d’avance qu’on n’a rien à perdre. Donc, on joue complètement libéré et parfois, la motivation et la volonté permettent de compenser le déficit de talent. A plusieurs reprises, la saison dernière, le coup est passé très près. Notamment lors de la dernière manche de la finale des playoffs, où avec Deerlijk, on aurait pu gagner dans le temps réglementaire si on avait converti le dernier lancer franc. En prolongation, on était physiquement au bout du rouleau…  »

Si, avec Deerlijk, Sophie Charlier s’entraînait déjà deux fois par jour, elle combinait le basket avec des études de néerlandais à Courtrai. Depuis cette saison, elle est professionnelle à temps plein.  » C’est un rêve « , admet-elle.  » Une fille peut-elle vivre du basket en Belgique ? Vivre, oui. S’enrichir et mettre de l’argent de côté pour ses vieux jours, non. Le professionnalisme n’est encore envisageable qu’à Namur. Il faudrait que d’autres clubs belges emboîtent le pas, afin d’avoir un peu plus de concurrence dans le championnat, mais on est un petit pays. Par rapport à mon séjour précédent, Namur a encore progressé au niveau des structures et du sponsoring. Lorsque j’ai signé mon contrat, on m’a dit : – Voicilesclefsdetonappartementetcellesdetavoiture ! Et tout est aussi parfaitement en règle au niveau administratif : précompte professionnel, sécurité sociale, etc. Cela irrite parfois le président de constater que d’autres clubs essaient de trouver des combines afin de concurrencer Namur à moindres frais. Le professionnalisme, dans le basket féminin belge, c’est récent et cela interpelle. Souvent, dans les administrations, lorsqu’on me demande ma profession et que je réponds : – Basketteuse. On me rétorque : – Mademoiselle, jevousaidemandévotreprofession, pasvotrehobby « .

Avec ou contre Ann Wauters, c’est spécial

 » Beaucoup de gens considèrent encore le basket comme un sport exclusivement masculin. En basket féminin, il ne faut pas s’attendre à des dunks ravageurs, mais à un jeu plus posé, plus fin. Les gens qui assistent à un match sont souvent séduits et reviennent. Le plus difficile est de les convaincre de venir une première fois. Il faudrait que la RTBF se décide à retransmettre un match d’Euroligue en direct, comme elle le fait pour Charleroi en Coupe ULEB. A l’étranger, c’est courant. A Valenciennes, le basket féminin est une institution. Dans les pays de l’Est, c’est ancré dans les m£urs. Le déplacement en Roumanie, avec l’équipe nationale en septembre, m’a marquée. C’est l’un des pays les plus pauvres que j’ai visités, mais la ferveur populaire était impressionnante. On a lancé des pétards et des fumigènes dans la salle. Le match a commencé alors qu’une fumée bleue traînait encore dans l’atmosphère. Les 3.000 personnes présentes ont entonné en ch£ur l’hymne national roumain. Je ne comprenais rien aux paroles, mais j’avais envie de chanter avec eux. J’attends toujours un tel élan patriotique lorsqu’on joue la Brabançonne « .

L’équipe nationale, nous y voilà :  » En 2003, pour l’EURO en Grèce, on avait bénéficié de plus de subsides que les garçons. La préparation fut impeccable et cela a porté ses fruits avec une sixième place dont l’équipe nationale masculine ne peut que rêver. On avait, bien sûr, bénéficié de la présence d’ AnnWauters. Elle nous avait rejoint en dernière minute, sans avoir fait la préparation car elle était engagée en WNBA, mais elle nous a été d’un précieux apport. Personnellement, je ne suis pas jalouse de sa notoriété, ni de son salaire. Elle le mérite. Sans elle, et sans KathyWambé, l’équipe nationale n’a pas été en mesure de se qualifier pour l’EURO 2005, lors des éliminatoires de septembre. Il nous reste une toute petite chance, lors du repêchage. Si Ann est présente, tout sera possible. De toute façon, si elle veut un jour participer aux Jeux Olympiques, elle devra le faire avec la Belgique « .

Ann Wauters, les Namuroises la retrouveront demain, sous le maillot de Samara.  » Jouer avec elle en équipe nationale, c’était déjà très spécial. La retrouver comme adversaire procurera encore une toute autre sensation. On remplira les 6.700 places du Spiroudôme sans le moindre problème !  » ( ellerit).

Daniel Devos

 » Les gens qui assistent à un match reviennent : le plus difficile est de les convaincre de VENIR UNE PREMIèRE FOIS « 

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