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Ali Express

Longtemps freiné par les blessures, Ali Gholizadeh semble enfin avoir réussi son décollage sur les flancs du Pays Noir. Chronique d’une explosion à retardement.

Son pied gauche semble ne jamais vouloir arrêter de caresser le ballon. Comme tous les techniciens, Ali Gholizadeh peine à se séparer de la sphère une fois qu’elle a atteint ses pieds. Et comme la plupart des gauchers, il la cajole rarement du pied droit. Comment surprendre son vis-à-vis quand on n’a qu’un pied ? L’Iranien répond de l’extérieur, surface dont il aime abuser et qui lui ouvre la voie vers des angles impossibles.

L’ exter est sans aucun doute l’une des signatures de l’ailier venu de Saipa, en début de saison dernière. Pour son deuxième match sous les couleurs zébrées, un déplacement estival à Eupen, Gholizadeh l’avait mis en lumière une première fois, déposant ainsi depuis la droite un caviar sur le front de son compatriote Kaveh Rezaei. De quoi faire taire rapidement les premiers échos d’une adaptation compliquée par une méconnaissance totale du français et un anglais beaucoup trop sommaire. Une situation linguistique qui avait donné lieu à quelques situations loufoques, entre explications données par Rezaei à l’entraînement pour traduire chaque exercice, et présence presque indispensable de Mehdi Bayat en match amical, entre deux avions, pour traduire les consignes alors dispensées par Felice Mazzù.

Au bout de l’été, le départ pour Bruges de Rezaei avait été un frein important à l’adaptation de Gholizadeh. Il y avait bien Omid Noorafkan, mais le temps de jeu minuscule du grand espoir du football iranien n’en faisait pas un allié aussi précieux que l’ancien buteur des Zèbres. Livré à lui-même, puisque sa femme ne l’avait pas encore rejoint en Belgique, Gholizadeh retrouve le banc, le temps de se familiariser aux langues du vestiaire et aux consignes tactiques de son coach. En Pro League, celui qui campait devant en attendant de lancer les contre-attaques lors de son passage à Saipa doit apprendre à défendre et à courir.

LES YEUX EN IRAN

Rien de tel que l’air du pays pour retrouver ses sensations. Repris par Carlos Queiroz lors de la trêve internationale de novembre, Gholizadeh dépose une frappe croisée dans le filet latéral du gardien du Venezuela, s’offrant un but et de la confiance pour son retour dans le Pays Noir. Aligné par Felice Mazzù face à Lokeren quelques jours plus tard, il marque son premier but zébré sur la pelouse de Daknam. Pied gauche et petit filet, forcément.

Le décollage de la fusée iranienne semble enfin finalisé. Oubliés, les cafouillages de l’adaptation, incarnés par cette demande du numéro 11 à son arrivée, sacrilège en terre hennuyère depuis le départ de Dante Brogno. L’ailier semble paré à traumatiser les défenses avec ses coups de rein et ses coups de génie, quand la malchance décide de frapper à sa porte. Une première blessure face à Anderlecht, au bout de l’année 2018, puis une pubalgie comme cadeau de printemps. L’opération s’avère inévitable, et Ali perd encore du temps. Heureusement, l’Iranien a eu le temps d’étaler ses qualités malgré un temps de jeu réduit, et Mehdi Bayat refuse de surcharger ses postes offensifs pour boucher l’horizon du talent majeur de la filière iranienne, qu’il compte bien activer de plus en plus régulièrement.

 » Charleroi avait été un précurseur sur le marché français, avec ce qu’on appelait à l’époque la French Connection « , rappelle à la DH l’administrateur-délégué des Zèbres.  » Par la suite, la concurrence s’est tournée vers ce marché. Il est donc indispensable de trouver des nouvelles destinations sur lesquelles nous pourrions travailler.  » Entre ses origines et le scouting assidu pratiqué par… son père, grand amateur de football qui réside une partie de l’année en Iran, l’homme fort du club carolo a toutes les cartes en mains pour se positionner sur un marché qu’il juge très prometteur.

200 JOURS PLUS TARD

Celui que Mehdi Bayat présente comme  » un transfert  » pour la deuxième année consécutive, puisqu’il n’a pas eu l’occasion de devenir un titulaire incontestable à cause des blessures lors de sa première saison zébrée, revient progressivement dans le parcours. Karim Belhocine ménage ses ardeurs pour éviter une rechute après une longue indisponibilité, et fait croître l’appétit de celui qui semble rapidement destiné à relayer Mamadou Fall sur le flanc droit du secteur offensif carolo.

Le 25 septembre, près de 200 jours après sa dernière sortie officielle, Gholizadeh claque un but et une passe décisive sur la pelouse de Rupel Boom, en Coupe de Belgique. Il doit encore patienter jusqu’en octobre pour vivre sa première titularisation en championnat, sur le terrain du Cercle. Bilan : deux passes décisives pour celui qui s’est toujours considéré comme un passeur avant d’être un buteur.  » Mon objectif, c’est d’arriver à dix passes décisives le plus rapidement possible « , expliquait-il déjà la saison dernière. Contrarié par les blessures, il est bien engagé dans sa deuxième tentative, avec cinq assists distillés en 1.250 minutes de jeu cette saison.

Plus souvent enclin à plonger dans la profondeur, là où il se contentait souvent de recevoir le ballon dans les pieds pour percuter la défense adverse, Gholizadeh a varié son football pour multiplier ses opportunités de créer le danger. Son repositionnement sur le côté gauche, conséquence indirecte de la blessure de Cristophe Diandy qui a fait reculer Ryota Morioka et recentré Massimo Bruno, a peut-être freiné son rythme statistique, mais permet à Charleroi de continuer à combiner à gauche pour sprinter à droite, liant les profils techniques de Gholizadeh et Bruno dans une zone où les courses de Nurio assurent la dose de profondeur. Ali a trouvé son rythme de croisière. Reste à éviter de nouvelles avaries.

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