Adieu l’Albert

S’il veut perfectionner son football, le médian pense qu’il doit quitter le stade Charles Tondreau.

A Mons, dirigeants et joueurs ne sont plus sur la même longueur d’ondes. Pour Dominique Leone, le président, et Alain Lommers, le directeur général, la politique en vue de la saison prochaine est claire : on garde la douzaine de titulaires qui ont donné satisfaction, on leur adjoint sept à huit nouvelles têtes et on va pêcher chez les jeunes deux ou trois promesses pour faire nombre. Des départs ? Pas question !  » Des éléments clefs comme MomoDahmane, FrédéricHerpoel, BenjaminNicaise, HocineRagued,… sont toujours sous contrat « , martèle Lommers. Pourtant, dans les faits, les piliers ne sont plus satisfaits de leur situation. Dahmane cherche à l’étranger la crédibilité qu’il a perdue en Belgique. Herpoel ne veut plus connaître le stress de la lutte pour le maintien. Et le joueur le plus emblématique de Mons, Alessandro Cordaro souhaite trouver un cadre plus épanouissant.

 » Je cherche un club qui colle à mes ambitions personnelles  » (Cordaro)

Cordaro a encore la tête à Mons mais les idées ailleurs.  » Je connais toutes les toiles d’araignée du stade Tondreau « , explique-t-il.  » Les années passées à l’Avenue du Tir ont constitué un excellent apprentissage. Marc Grosjean m’a intégré dans le noyau A. Jos Daerden m’a offert mes premières titularisations. Sergio Brio a perfectionné ma technique en m’obligeant à travailler une demi-heure après chaque entraînement. Et avec José Riga, j’ai connu le meilleur moment de ma carrière avec la remontée en D1. Maintenant, il est temps pour moi de viser plus haut. Je cherche un club qui colle un peu plus à mes ambitions personnelles « .

Des ambitions qu’il ne peut plus assouvir à Mons. Cela fait maintenant deux ans que les Dragons doivent se battre corps et âme pour survivre. Cette lutte acharnée mine le jeu montois : dur, rigoureux, viril, nerveux, âpre, avec le stress propre à tous les clubs forcés de faire la guerre pour ne pas mourir. Cette saison, Mons est la formation qui a reçu le plus de cartons jaunes. Si elle est louée pour ses qualités techniques, l’équipe est souvent obligée de jouer à l’emporte-pièce. Au centre de cet affrontement, Cordaro est bridé. Le Belgo-Italien ne peut pas laisser éclater son talent. La lutte use aussi les esprits. Sur les terrains, où il faut chaque week-end puiser dans ses réserves pour grappiller patiemment les unités du sauvetage, et dans les coulisses, où dorment des conflits toujours prompts à éclater. Les dirigeants sont constamment obligés de désamorcer l’une ou l’autre crisette (la saga des gardiens, le départ de Jean-Paul Colonval, l’affaire MichaëlWiggers, le retour controversé de Dahmane, Genk qui réclame la rétrogradation du club…). Un nuage de doutes et de discorde ne plane jamais loin du stade Charles Tondreau.

Aujourd’hui, l’avenir incertain pèse sur les consciences.  » Avant de prendre ma décision, je veux savoir quel joueur restera ou partira. Mais nous recevons peu d’informations de la part de la direction. Et la saison prochaine risque d’être à nouveau difficile si deux clubs supplémentaires font la culbute en D2 « .

Un élément pourrait quand même l’inciter à prolonger son bail.  » Je peux encore progresser avec Albert Cartier. Le coach m’apporte les qualités propres à la formation française. Son arrivée a fait souffler un vent frais. Si, demain, la direction me contacte et me dit : -Ecoute, nous allons créer un projet sportif à Mons, j’y réfléchirai « .

Mais son plan de carrière est tracé : partir pour un club du top belge ou chercher son bonheur à l’étranger. Puis, viser le Calcio, le championnat dont il rêve secrètement.

 » Son petit gabarit n’est pas un handicap  » (Riga)

Cordaro a été cité dans des clubs où le départ de joueurs créatifs se profile : la Gantoise ( BryanRuiz), GBA ( DanielCruz, HernanLosada), Charleroi ( TimSmolders). On parle aussi de lui à Bruges et des formations étrangères comme Valenciennes ou Utrecht lui font les yeux doux. Après six ans de bons et loyaux services et à 22 ans, peut-il encore progresser dans le championnat belge ?

Pour JoséRiga, qui l’a dirigé pendant deux ans et demi, oui. Mais à certaines conditions.  » Sandro a besoin de franchir un cap en Belgique. Vu ses qualités, notamment sa technique en mouvement, il doit trouver une équipe en rapport avec son style : c’est-à-dire une formation qui base son jeu sur une certaine forme d’animation dans laquelle il pourrait se fondre et se rendre utile. Son petit gabarit n’est pas un handicap. Dans plusieurs championnats européens, de petits joueurs très véloces comme Patrice Evra à Manchester United ou Daniel Alves à Séville sont mêmes alignés à des postes d’arrières latéraux. On privilégie leur vivacité à leur qualité de duel. Cordaro a beaucoup d’atouts : technique, vitesse d’exécution, gros volume de jeu, un bon repositionnement défensif et offensif, de la polyvalence et du tempérament. Mais une équipe ne peut aligner qu’un ou deux éléments de ce type. Comme Mbark Boussoufa à l’époque de Gand, par exemple. Genk ou un passage dans le championnat hollandais l’aideraient à grandir. Le jeu des Limbourgeois est constitué d’une prise de risques et d’une circulation de balle rapide à la hollandaise. Genk aime afficher un visage offensif. Dans cette équipe, les déplacements du ballon sont importants. Anderlecht pratique aussi de la sorte. Mais je pense que le noyau du Sporting est déjà assez étoffé  »

Riga conclut son analyse par un petit conseil.  » Qu’il réfléchisse et choisisse un club où il y a de la concurrence mais aussi une véritable perspective de temps de jeu. Sandro est à un âge important. Il doit être désiré par son entraîneur. Sinon, un départ ne le fera pas évoluer « .

Trop généreux et pas assez concret

Cordaro est conscient de ses manquements :  » Mon jeu de tête n’est pas suffisamment performant et je dois encore devenir plus adroit à la finition. Cette saison, j’ai délivré deux assists et marqué deux buts. Ce n’est pas assez. Je dois apporter huit buts à mon équipe et adresser dix passes décisives par saison « .

Riga et Cordaro avaient confectionné un programme afin de conférer plus de puissance au pocket-player.  » Toute proportion gardée, Cordaro est comme LionelMessi « , explique l’ex-entraîneur des Dragons.  » Ce sont deux joueurs qui ont besoin d’une assise et d’une stabilité extrême. Sandro sait qu’il doit se montrer plus concret dans le dernier geste. Mais apporter sa touche individuelle quand la débauche d’efforts collectifs est si importante n’est pas toujours aisé. Il est parfois trop généreux dans son apport et il manque de ressources pour conclure « .

simon barzyczak – photos: belga

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