Accompagnement mental, transferts et Besixdome

A peine les lampions de la fête éteints, le directeur général des Mauves planche déjà sur l’avenir :  » Le Sporting doit rester l’exemple à suivre à tous niveaux. « 

Herman Van Holsbeeck savoure son 5e titre en l’espace de 9 ans.  » Le premier est toujours le plus beau. Celui-ci aura été le plus stressant « , dit-il. Avec 4 points d’avance sur le Club Bruges au moment d’aborder les play-offs, Anderlecht semblait sur du velours. Mais, comme l’année passée, le Sporting loupa tout à fait son entrée dans cette mini-compétition, avant de se rebiffer et de glaner le 31e sacre de son histoire.

Que retenez-vous de cette saison ?

Herman Van Holsbeeck : Au risque de vous surprendre : l’importance du mental. Pourquoi avons-nous gaspillé des points contre Courtrai et Genk durant les play-offs ? Parce que ces deux formations, qualifiées sur le fil, n’avaient rien à perdre. Pour Anderlecht, avec une avance ramenée de 8 à 4 unités, il suffisait d’une seule contre-performance pour tout remettre en question. Ce qui s’est vérifié d’emblée face à Courtrai. Et, comme par hasard, c’est au moment où nos rivaux ont eu l’occasion de prendre l’ascendant sur nous, que nous avons repris nos distances via des victoires probantes à Bruges et à Genk.

Cette analyse vaut-elle aussi pour la phase classique ?

Oui. Là aussi, l’équipe a répondu présente lors de tous les grands rendez-vous. Avec un total de 28 sur 30 face aux autres représentants du top 6, les chiffres se passent de commentaires. En revanche, avec un peu plus de 60 % devant le reste de l’élite, les joueurs auront été largement en deçà de leur valeur réelle. Ce n’est pas tant leur talent que leurs dispositions psychologiques qu’il faut mettre en cause. Devant les prétendus sans-grade, je constate que pas mal d’éléments n’ont pas répondu à l’attente. Dans ces circonstances-là, ils éprouvent toujours des difficultés à s’arracher face à une opposition qui vend chèrement sa peau. Nous devons y remédier si nous voulons franchir un nouveau palier.

 » Tom Boonen est un exemple à suivre « 

Par quels moyens ?

Via un meilleur conditionnement psychique. Après avoir investi dans une cellule sociale, l’heure est venue de s’atteler à l’accompagnement mental des joueurs. A partir du moment où les implications nationales et internationales s’enchaînent, certains ont tendance à choisir leurs matches. Avec, comme résultat, un déséquilibre au niveau de l’équipe. Et lorsqu’on joue à 7 et non à 11, il est normal de s’exposer à des déconvenues. Cette saison, nos lignes arrière et médiane ont trop souvent été submergées parce que l’attaque ne leur prêtait pas main forte. Si chacun avait toujours rempli sa tâche, le championnat aurait déjà pu être plié à l’heure d’aborder les PO. Au lieu de cela, il aura fallu se battre jusqu’au bout.

Le RSCA avait travaillé autrefois avec le psychologue Johan Desmadryl. Comptez-vous faire à nouveau appel à lui ?

L’idée d’un suivi a germé dans mon esprit mais les contours ne sont pas encore fixés. Je songe davantage à un team qu’à une personne en particulier. Au départ, c’était le seul Bart Smeets, de la cellule sociale, qui s’occupait de seconder les joueurs dans la vie de tous les jours. Chemin faisant, nous lui avons associé d’autres personnes, telles que Jean-François Lenvain, par exemple. Et nous n’avons jamais eu qu’à nous en féliciter. Le jour où Dieumerci Mbokani a eu la douleur de perdre son petit David, il y avait quelqu’un de la maison à ses côtés. Le joueur, qui était livré à lui-même autrefois, nous a su gré de ce soutien. Et il nous a rendu la pareille de la plus belle façon qui soit : par des prestations de très haut vol sur le terrain. Quand je vois la manière dont il s’est impliqué pour faciliter la vie de ses compatriotes, Patou Kabangu et Bedi Mbenza, je me dis qu’on peut atteindre beaucoup en touchant une corde sensible. Et l’un ou l’autre coach mental peut y arriver très certainement aussi. Il faut s’inspirer de l’exemple de Tom Boonen. Beaucoup le disaient blasé et repu. Mais grâce à un suivi mental approprié, il a trusté les grandes victoires dans les classiques durant ce printemps.

N’est-ce pas un peu réducteur de ramener les problèmes de ces derniers mois au seul manque d’entraide de sa division offensive dans les petits matches ?

Ce manque y a quand même contribué.

Est-il normal que quand l’inspiration ou l’envie ne sont pas au rendez-vous chez les attaquants, le reste se trouve passablement démuni ?

Quand l’adversaire est en supériorité numérique les trois quarts du temps, il est logique de souffrir.

 » Quand Anderlecht forme un bloc, il n’a pas de rival en Belgique « 

Des joueurs comme Proto, Wasilewski, Juhasz, Biglia et Suarez, sans compter Deschacht, blessé, évoluent au moins depuis quatre ans ensemble. Ne peut-on pas attendre un fonds de jeu meilleur dans ces conditions ? L’équipe ne repose pas sur des fondamentaux.

Je ne suis pas d’accord. Quand l’équipe est dans un jour favorable, elle joue le plus souvent très bien. Je n’en veux pour preuve que notre 5-0 face au Standard en début de saison, ou notre 0-4 à Genk. C’était du très haut niveau. Le problème, c’est que tout le monde ne se sent pas toujours concerné chez nous. Quand Anderlecht forme un bloc, il n’a pas de rival en Belgique. Mais il y a eu trop souvent des lézardes dans ce bloc face aux sans-grade.

Tout le monde s’accorde à dire aussi que la relance à partir de l’arrière laisse fort à désirer.

Sur ce point, je vous donne raison. Nous avons des qualités défensives évidentes mais la transmission pose parfois problème. Je constate toutefois qu’on avance, à tous points de vue. Un Cheikhou Kouyaté s’enhardit et n’hésite pas à créer le surnombre dans l’entrejeu par moments. Et, sur le flanc gauche, Jordan Lukaku a toutes les qualités d’un grand back en devenir.

Il s’agit là d’un pur produit de votre Ecole des jeunes. Fallait-il vraiment engager Safari dans ces conditions ?

Oui, car le Suédois a l’expérience alors que Jordan n’est qu’au début de son apprentissage. Par contre, on n’aurait jamais dû transférer Diogo. Idem pour Samuel. J’ai retenu la leçon : dorénavant, le troisième choix à un poste spécifique ne sera plus une soi-disant bonne occase mais un gars du cru. Au poste d’arrière latéral gauche, nous sommes donc dans le bon avec Behrang Safari, Deschacht et Lukaku. La saison prochaine, nous visons une situation similaire au n°10 avec Ronald Vargas, Matias Suarez et Dennis Praet. Je n’évoque pas Kanu dans cette énumération car il est susceptible d’évoluer à plus d’une place.

Restera-t-il ?

Tous ceux qui ont joué un rôle dans l’obtention du titre peuvent rester.

Milan Jovanovic aussi ?

Bien sûr. Il a peut-être alterné les bons et les moins bons matches. Mais c’est un leader dans le vestiaire.

 » Le danger, pour nous, c’est la Russie « 

Vous venez d’évoquer Suarez. Sa bonne saison n’est pas passée inaperçue. Pareil pour Mbokani, Biglia ou Juhasz. Ne risquez-vous pas d’être confronté à la même situation qu’en 2001 quand le club avait perdu Jan Köller, Tomasz Radzinski, Bart Goor et Didier Dheedene ?

A l’époque, la direction avait été prise de court suite au bon comportement sur la scène européenne. Cette fois, le contexte est différent. Nous savons depuis des mois que plusieurs de nos cadres suscitent des convoitises. A commencer par Juhasz, à qui nous avons promis un bon de sortie pour services rendus moyennant dédommagement. Pour tous ceux-là, nous avons une solution de rechange. De toute façon, tous ne partiront pas. C’est la crise un peu partout en Europe et un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. Mieux vaut être payé à heure et à temps à Anderlecht plutôt que d’attendre son salaire en Grèce ou en Turquie. Même l’Espagne et l’Italie souffrent. En réalité, le danger vient surtout du nouveau riche qu’est la Russie. Enfin, là aussi tout est en train de se tasser. Après avoir engagé Jonathan Legear, le Terek Grozny était revenu à la charge cet hiver pour Kanu. Mais ses dirigeants ont décroché alors que le prix demandé pour le joueur était largement inférieur à celui réclamé pour Jona.

Certains frémissent malgré tout à l’idée qu’Osama Hawsawi, un stoppeur saoudien, remplace la clé de voûte de votre défense ?

C’était une opportunité. Il fallait agir vite dans ce cas précis bien qu’il y ait d’autres pistes. Chaque chose en son temps. L’année passée, à la même époque, nous n’avions fait que Diogo. Ce n’est qu’en fin de mercato que Jova et Dieu avaient été recrutés. Tout bien considéré, nous sommes en avance par rapport à 2011, dans la mesure où nous allons récupérer Ronald Vargas et Guillermo Molins qui ont été blessés tout au long de la saison.

Anderlecht a prêté une douzaine de joueurs ces derniers mois. Quels sont ceux qui ont encore un avenir au club ?

Il y a lieu de faire une distinction entre des jeunes, comme Ziguy Badibanga voire Nathan Kabasele, et des chevronnés style Thomas Chatelle ou Sacha Iakovenko. Etre prêté une fois, ça va. Deux fois, passe encore. Mais passé ce délai, de deux choses l’une : ou bien on a encore un avenir à Anderlecht, ou bien on n’en a plus. Si dans le cas des deux promesses, on peut toujours aviser, pour les autres, au même titre que Reynaldo, l’aventure est sans doute terminée. Quand on n’a pas réussi à se tirer d’affaire à Oud-Heverlee Louvain ou à Westerlo, on n’a pas sa place non plus au RSCA. Et ce jugement peut être étendu aussi à Ablaye Seck qui n’a pas su s’imposer au Brussels.

 » On peut encore réaliser de bonnes affaires sans dépenser des fortunes « 

Vous avez acquis Mohamed Aoulad au Brussels et même Abdelhakim Bouhna un échelon plus bas à Diegem. Ce n’est pas avec eux que vous disputerez la Ligue des Champions ?

Ce sont des traites sur l’avenir. Il y a du talent en D2, en D3 et en Promotion. A l’image de Nabil Dirar, qui a fait ses classes à Diegem avant de passer à Westerlo puis au Club Bruges et qui joue aujourd’hui à Monaco. Ces joueurs seront casés ailleurs en 2012-2013. Nous verrons bien comment ils évoluent.

En cas de qualification directe pour les poules de la Ligue des Champions, vous êtes assuré de percevoir 15 millions. Cette somme, à majorer des montants reçus en cas de vente de joueurs, vous incitera-t-elle à délier plus généreusement les cordons de la bourse en termes de recrutement ? Voici trois ans, vous aviez refusé d’acheter Bryan Ruiz pour 5 millions à Gand, sous prétexte que vous n’étiez pas assuré de participer à l’épreuve-phare européenne.

Il est exclu que nous déboursions pour un joueur l’équivalent de ce que l’un des nôtres aurait éventuellement rapporté. Si un joueur part pour 8 millions, nous ne consacrerons pas cette somme à l’acquisition d’un seul remplaçant. Cet argent sera réparti sur plus d’une tête.

Mais si vous vendez un Mbark Boussoufa à cette hauteur et que vous consacrez cet argent à l’achat de deux ou trois joueurs, vous n’irez jamais de l’avant !

Je ne suis pas aussi catégorique. OK, ceux qui nous ont boostés ces dernières années étaient des garçons relativement onéreux comme Biglia, Nicolas Frutos, Boussoufa ou Mbokani. Mais nous avons également fait de bonnes acquisitions avec des éléments qui coûtaient moins. Comme Ahmed Hassan, venu gratuitement de Besiktas, ou Suarez. Il n’est pas toujours nécessaire de dépenser beaucoup pour réaliser une toute bonne affaire. Molins, par exemple, a été acquis pour une bouchée de pain. Et je mets ma main au feu qu’il cassera la baraque la saison prochaine.

N’est-ce pas un camouflet pour vous que vos voisins du Brussels aient conclu un accord de coopération avec le Standard ?

Je pensais que les malentendus du passé avaient été aplanis suite au transfert chez nous de Dalibor Veselinovic. Nous avions tout de même injecté 250.000 euros dans la trésorerie molenbeekoise, sans compter que nous avions mis des joueurs à leur disposition comme Sébastien Siani, Bruno Barras et Seck. Sous prétexte que nous avons fait signer Aoulad sans la bénédiction de Johan Vermeersch, nous sommes à nouveau en froid. Qu’y pouvons-nous si le président de ce club ne tient pas ses engagements et que ses joueurs viennent sonner à notre porte ? Il a raté l’occasion de faire un bon partenariat avec nous, point final.

 » Le futur Besixdome ? Pas avant 2013 ou 2014 « 

Les jeunes du Tout-Puissant Mazembé sont en stage actuellement à Neerpede. Où en sont vos accords avec ce club ?

Nous avons priorité pour engager ceux qui nous intéressent, à condition qu’ils aient servi dûment leur club au préalable. Le TPM s’est structuré au niveau des jeunes et possède à présent sa Katumbi Académie, du nom de son président, Moïse Katumbi. Dirigée par Régis Laguesse, l’ex-bras droit de Jean-Marc Guillou, l’idée est d’imiter l’exemple de ce qu’ils avaient réalisé autrefois à Abidjan : faire mûrir des jeunes, puis les intégrer en équipe-fanion de l’ASEC avant d’accorder un transfert aux meilleurs à destination de l’Europe. Autrefois, c’était Beveren le point de chute. Ici, c’est nous qui avons en premier lieu le droit de regard.

Patou Kabangu et Bedi Mbenza, qui étaient à l’essai pendant 6 mois, seront-ils prolongés ?

Le premier a eu l’occasion de faire ses preuves. L’autre est en train de prouver son utilité aussi. On tranchera après les play-offs.

Vous avez parlé de crise dans le monde du football. Pourquoi ne vous tournez-vous pas vers des pays fragilisés, comme l’Egypte par exemple, en réactivant le dossier de Mahmoud Shikabala ?

Il y a de bons joueurs dans ce pays comme son coéquipier au Zamalek, Ahmed Gaafar. Mais les Egyptiens ne sont pas de bons produits d’exportation. Si le Sporting a eu de la chance avec Hassan, il a dû déchanter jadis avec Tarek El Saïd. Ce n’est pas évident.

Où en est le futur Besixdome ?

( étonné). A défaut d’avoir obtenu un permis de bâtir, c’est effectivement un nom qui a été avancé. Nous allons effectuer une série de transformations à partir du 14 mai. Toutefois, l’ajout d’un anneau au stade ne se fera pas avant 2013 ou 2014.

Dernière question, à la place d’Ariel Jacobs, qu’auriez-vous fait : rempiler ou stopper ?

Il est difficile de se mettre dans la peau d’un d’autre. Franchement, je ne sais pas.

PAR BRUNO GOVERS – PHOTO: IMAGEGLOBE

 » Dorénavant, le 3e choix à un poste spécifique sera toujours un jeune du cru. « 

 » Pour Sacha Iakovenko et Reynaldo, l’aventure est terminée chez nous. « 

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