ABATTAGES RITUELS

Les Liégeois sont le punching-ball de la D1. Egorgés une semaine, asphyxiés la suivante, assommés le week-end d’après. Analyse.

Coué s’invite à Sclessin. Ça va d’aller. Quatre défaites consécutives (dont 7-1 à Bruges et 4-1 à Gand), l’avant-dernière place après huit journées (de loin le plus mauvais bilan des dix dernières années, voir encadré), la deuxième plus mauvaise défense de D1, le premier limogeage d’entraîneur de la saison… mais ça va d’aller. Au programme du week-end prochain, un choc face à Louvain, co-avant-dernier du classement. Mais donc, ça va d’aller parce que  » c’est à la fin du championnat qu’il faut être premier, pas maintenant « , comme l’a dit joliment Sambou Yatabaré après la défaite à Gand.

L’état d’esprit était zen et étonnant, dimanche en fin d’après-midi. Il y a d’abord eu cette image forte : Yannick Ferrera et les joueurs se sont rassemblés en cercle, sur la pelouse où ils venaient d’être laminés. Positive attitude. Ils sont ensuite allés vers le coin du stade où étaient massés leurs supporters. Au lieu des sifflets, ils ont eu droit à des applaudissements. Comme si ces fans étaient convaincus d’une chose : le groupe actuel donne tout ce qu’il peut.

Et c’est vrai. En tout cas, c’était vrai dans ce match. D’où le discours du nouvel entraîneur :  » On va peut-être me prendre pour un fou, après une défaite 4-1, après quatre défaites consécutives, mais je suis fier de mes joueurs. Si on garde cette mentalité, ça va vite aller mieux. Aujourd’hui, je ne me sens pas mal.  »

Tout n’est pas à jeter dans ce Standard, habitué cette saison aux  » défaites encourageantes « . Lessivé à Gand en partie à cause d’un arbitrage catastrophique. Mais pas que ! Un but gantois n’aurait pas dû être validé et l’exclusion de Damien Dussaut ne se justifiait pas mais le champion a maîtrisé calmement son sujet pendant tout le match. Même quand c’était 0-1. Un 0-1 signé Anthony Knockaert sur un flash, au terme d’un sprint de 53 mètres. Un flash… Depuis le début de la saison, le Standard doit se contenter de quelques flashes ponctuels. Trop peu.

UN MERCATO BON MARCHÉ

L’équipe actuelle vaut-elle les play-offs 1 ? Selon Slavo Muslin, ce n’était pas sûr. Il a vidé son casier en disant ironiquement que  » le seul problème, c’était apparemment moi « , mais le Standard n’a toujours pas recommencé à gagner depuis son C4. Le premier bilan passe par une analyse du mercato. Il a été bon marché, c’est peu de le dire. Le Standard a dégagé des moyens pour transférer Ivan Santini (1,8 million) et Mohamed Yattara (2,2 millions). Une enveloppe a aussi été consacrée à Benjamin Tetteh (1 million) et RenaudEmond (800.000). Pour le reste, la nouvelle direction a fait des paris, a pris des risques, a misé sur des joueurs gratuits et sur un grand nombre de locations (Ahmed El Messaoudi, Faysel Kasmi, Christian Brüls, Matthieu Dossevi, Sambou Yatabaré).

La quantité a primé avec l’arrivée de plus d’une équipe complète. Il y a même des noms parmi ces transferts. Renaud Emond et Ivan Santini ont prouvé qu’ils pouvaient faire mal en championnat de Belgique. Il est encore trop tôt pour juger le premier tandis que le second est en pleine crise de confiance. Le match à Gand a été révélateur pour lui. Yannick Ferrera a commencé avec une paire d’attaquants, Anthony Knockaert et Renaud Emond. Deux avants sont entrés en cours de match (Mohamed Yattara et Ryan Mmaee), Santini est resté sur le banc. CQFD, il est devenu le cinquième attaquant du noyau.

On peut aussi considérer Yattara comme un nom puisqu’il vient de Ligue 1, et même d’un grand club comme Lyon. Mais on est déjà nettement plus sceptique quand on regarde son temps de jeu la saison dernière : toutes compétitions confondues, il n’a pas joué l’équivalent de sept matches complets. Knockaert était en Angleterre et il a parfois montré de très bonnes choses depuis qu’il est au Standard, mais il y a des matches où il est passé à travers et ça peut aussi s’expliquer par son temps de jeu rikiki en 2014-20145 : à peine cinq matches complets et il n’a plus joué de rencontre officielle à partir de janvier (seulement des apparitions en U21 de Leicester). Pendant ce temps-là, Ostende transférait Gohi Bi Cyriac et JosephAkpala, et Anderlecht misait sur Stefano Okaka et Imoh Ezekiel.

TROP DE PROFILS À RISQUES

Christian Brüls a épaté dès ses débuts en rouche mais tiendra-t-il sur la durée ? Lui aussi sort d’une saison grise avec Rennes (à peine huit matches entiers en totalisant Ligue 1, Coupe de France et Coupe de la Ligue). Ahmed El Messaoudi et Faysel Kasmi étaient titulaires la saison dernière mais c’était au Lierse, qui a basculé en D2. Et ils n’ont toujours rien montré avec le Standard. Il faut attendre pour juger Matthieu Dossevi et Sambou Yatabaré qui, eux, jouaient régulièrement avec l’Olympiacos. Il y a encore Benjamin Tetteh. Un autre pari sur un joueur provenant de D2 ghanéenne. Et puis, il y a Rochinha. En provenance de Benfica mais il faut nuancer. Durant la première moitié de la saison dernière, il y jouait avec l’équipe Réserve. En janvier, il a été prêté à Bolton où il a disputé l’équivalent de trois matches en une demi-saison.

Cela fait beaucoup de profils à risques. Trop de joueurs trop tendres pour redresser une équipe malade. Aux joueurs en méforme et/ou en manque de confiance, on doit ajouter les indisponibles à des postes clés (Alexander Scholz, Jorge Teixeira). Et donc, le Standard s’est présenté à Gand avec trois gamins en défense. Damien Dussaut, Dino Arslanagic et Corentin Fiore ont fait comme tout le monde : ils ont tout donné. Mais ce n’est pas avec une majorité d’ados qu’on transforme une passoire en forteresse. L’équipe avait, à Gand, la circonstance atténuante d’avoir dû jouer à dix puis à neuf. Mais il y a tellement d’autres matches où la défense a pris l’eau. Et devant ? Ce n’est pas mieux. Il n’y a que trois équipes qui ont marqué moins de buts que le Standard depuis l’ouverture de la saison. Tout s’explique.

PAR PIERRE DANVOYE – PHOTOS BELGAIMAGE

Le crédit n’est pas éternel. Pour les supporters, Bruno Venanzi ne sera un bon président que si le Standard commence à gagner.

Ce n’est pas avec une majorité d’ados qu’on transforme une passoire en forteresse.

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