A la recherche d’un second souffle

Les Liégeois ont perdu leur jeu et traversent une période de doute. Après leur défaite à Bruges, leur bilan est d’un point sur 12.

Le week-end ne fut pas bon pour le Standard. Comme le précédent d’ailleurs. Et celui d’avant… A Bruges, le Standard a retrouvé des couleurs mais comme face à Anderlecht, a appris à ses dépens qu’il ne suffit pas de dominer une mi-temps pour remporter un sommet. Depuis quelques semaines, les Rouches doivent composer avec les blessures, la fatigue, un calendrier chargé et un jeu en berne. Pas facile dans ces conditions de se préparer pour la dernière ligne droite. Celle-ci devrait passer par les play-offs mais alors que les Liégeois semblaient s’y diriger d’un pas tranquille, les contre-performances successives ont installé le doute. Les Liégeois n’ont plus que deux points d’avance sur la septième place. Et contrairement à leurs rivaux courtraisiens et limbourgeois, ils se situent dans une phase descendante.

 » Il leur faut réagir immédiatement « , explique l’ancien défenseur du Standard, Etienne Delangre,  » et il aurait d’ailleurs déjà fallu prendre des points à Bruges car tu ne refais pas un écart de 16 points tous les ans dans les play-offs.  »

Le Standard fait des play-offs 1 son (seul ?) objectif de la saison mais les critiques ne s’effaceront pas une fois les Liégeois enfin qualifiés. Seule une place européenne fera de la saison du Standard une réussite. Or, si les play-offs débutaient aujourd’hui, les Rouches auraient à combler un fossé de cinq points avec le Club Bruges et de quatre avec Gand et n’auraient plus qu’à viser la quatrième place, dernier ticket qualificatif pour l’Europe. Pour renouer avec ses ambitions, le Standard devra donc régler quelques problèmes et retrouver sa forme de novembre.

Un retour du jeu direct, dicté par les blessures

Premier point à résoudre : le jeu.  » Il n’est pas loin. Je trouve même qu’à Bruges, on a retrouvé du foot dans le contenu « , a affirmé José Riga. Certes, le Standard a fait bien meilleure impression que face à Cracovie, Zulte Waregem ou Saint-Trond. Mais ce n’est pas encore la fluidité aperçue en novembre, en Europa League notamment.

Le Standard avait débuté sa saison en mode mineur. Pas de fonds de jeu, peu de résultats. Pas grave. La mutation était en route. Il suffisait juste de sauver les meubles de l’inondation et d’attendre que l’eau redescende. Sage politique puisque, mois après mois, les Liégeois ont pris de l’assurance. Ils ont surtout commencé à développer un jeu nouveau, à passes, bien éloigné de l’ère Dominique D’Onofrio, qui préférait un jeu plus direct, basé sur la verticalité et les longs ballons.  » Riga avait une certaine idée de ce qu’il voulait mettre en place : un 4-2-3-1 avec deux contrôleurs devant la défense mais comme son équipe n’était pas assez équilibrée, il a rajouté un attaquant « , explique Marc Degryse.  » Dans son système, le deuxième attaquant, qui pouvait décrocher et fixer le médian défensif adverse, détenait la position-clé. Ce qu’a très bien fait Gohi Bi Cyriac pendant deux mois avant la trêve mais également Mémé Tchitécontre Anderlecht en bloquant Lucas Biglia. Mais pour ce type de jeu, il faut être fort physiquement. Et en possession de balles, il faut avoir des qualités exceptionnelles puisqu’il faut que le ballon circule très vite. Le deuxième attaquant doit être frais et fort. S’il l’est, cela libère les ailiers comme Serge Gakpé, Luis Seijas ou Geoffrey Mujangi Bia. Si le deuxième attaquant n’est pas dans un bon jour, les médians centraux et désaxés doivent alors fermer le jeu et ne peuvent pas apporter autant offensivement.  »

Pendant deux mois, les défenseurs, les médians et les attaquants ont appris à combiner au sol. Mais ce système a du plomb dans l’aile depuis la reprise. Le manque de fraîcheur physique et les absences n’ont plus permis de jouer autant au sol. Cela requiert une certaine technique. Or, avec Seijas, Nacho Gonzalez, Bia et Tchité (voire même Cyriac en fin de premier tour) à l’infirmerie, c’est tout le potentiel technique du Standard qui manquait.  » Dans le secteur créatif, on n’a plus tous ces joueurs et quand je dois faire évoluer Reginal Goreux un cran plus haut, je dois lui laisser le temps de s’habituer à ce poste. D’autant plus qu’il n’a pas le même profil que Bia, par exemple « , avoue d’ailleurs Riga. Autant Bia sait percuter et dribbler, autant Goreux va jouer sur le débordement et le centre.  » Ce qui paraissait évident dans le jeu lorsque tout le monde était présent, devient alors plus difficile « , ajoute Riga.

Contre Zulte Waregem et Saint-Trond, ce fut flagrant. Le Standard manquait d’idées dans l’entrejeu.  » Si on analyse ces matches, je ne peux qu’être d’accord avec vous « , reconnaissait Yoni Buyens.  » Mais cela s’explique par le fait qu’on doit sans cesse changer de joueurs. On manque d’automatismes. A cela s’ajoute la fatigue des dernières semaines.  »

Les blessures ont donc obligé Riga à recomposer son entrejeu mais également à modifier sa philosophie, en jouant sur les qualités de ses hommes : de la vitesse en attaque et de l’abnégation et de l’organisation dans les autres lignes.  » Si ces joueurs ont moins de qualité ou manquent de fraîcheur, Riga met alors l’accent sur l’organisation « , commente Degryse.  » Buyens et William Vainqueur sont d’excellents contrôleurs et l’Islandais Birkir Bjarnasson ou Karim Belhocine en Coupe d’Europe ont su rentrer et s’adapter à cette organisation et cette mentalité. On revoit alors un jeu très Standard, c’est-à-dire très direct. Ça a très bien fonctionné en première mi-temps contre Anderlecht. L’entrejeu jouait la profondeur et il y avait deux attaquants pour gêner les deux défenseurs centraux d’Anderlecht. Mais si Anderlecht a quelque peu été surpris par cette organisation, ce n’était plus le cas de Zulte et Saint-Trond. Et une fois que la paire d’attaque ne pèse plus autant, c’est à l’entrejeu de trouver la solution. Et là, on se rend compte que Buyens et Vainqueur disposent d’abord de qualités défensives. Ils pensent avant tout à défendre avant de donner de bons ballons.  »

Une fatigue physique et mentale

A Bruges, le Standard a disputé son 45e match de la saison ! Le noyau n’a pas été construit pour faire face à cette avalanche de rencontres. Mais les dirigeants du Standard ne peuvent pas, d’un côté, clamer qu’ils veulent essayer de disputer chaque saison l’Europa League et, de l’autre, se plaindre du nombre des rencontres lorsqu’ils sont confrontés à cette compétition européenne. Si l’objectif est de disputer la Coupe d’Europe, il faut se doter d’un noyau assez large pour affronter les échéances. Ce qui n’est pas le cas cette saison.

De plus, à force de dire que le Standard est une des équipes européennes qui doit avoir disputé le plus de rencontres, on en oublierait que le Club Bruges, qui compte 10 points d’avance en championnat, en a disputé 42 (à peine trois de moins) et Anderlecht 40 ! Seul Gand a été épargné par le calendrier.

Pourtant, force est de constater que les Standardmen entament le sprint final sur les rotules. Le calendrier chargé n’en est pas la seule cause. Il y a également le profil des transferts. Ni Vainqueur, ni Gakpé, qui provenaient de Ligue 2 n’avaient l’habitude d’un tel rythme et d’une telle intensité. Même remarque pour Seijas ou Bjarnasson. Voire Bia qui a très peu joué en Angleterre. On savait que le corps de Nacho, fragile, ne supporterait pas de jouer tous les trois jours. Comme on se doutait que la jeunesse triomphante de Michy Batshuayi et de Paul-José Mpoku ne rimerait pas avec constance.

A cette absence de fraîcheur physique, s’ajoute un manque de fraîcheur mentale. Le Standard vient de subir deux gros coups au moral : une défaite à Anderlecht qui au lieu de les ramener à six points les projetait à douze, et surtout le décès inopiné du préparateur physique Guy Namurois.  » On sait que la tête fait avancer les jambes « , explique l’entraîneur adjoint, Bernard Smeets.  » Et que la fraîcheur mentale amène la fraîcheur physique. Plus vite on sera qualifié pour les PO1, plus vite les joueurs retrouveront des jambes.  »

 » On peut même dire que les blessures sont peut-être liées à ce manque de fraîcheur mentale « , corrobore Riga,  » Mais, on n’a pas le choix. Il faut changer la donne et être assez fort pour s’inscrire dans une nouvelle dynamique. « 

Tchité ou Batshuayi ?

La mauvaise passe du Standard a débuté contre Anderlecht. Match qui a coïncidé avec la rentrée dans l’équipe de Tchité, de retour de blessure. Certains n’hésitent pas à faire un lien entre la mauvaise passe actuelle et le changement d’attaquant. D’autant plus que Batshuayi restait sur quatre buts en cinq rencontres. Face à Zulte Waregem et Saint-Trond, Batshuayi est revenu dans l’équipe mais à la place de Cyriac, blessé. Mais, l’Ivoirien est indispensable dans son rôle de relais entre l’entrejeu et l’attaquant. Pour la place de deuxième attaquant, il faut donc choisir entre Tchité et Batshuayi.

Pourtant, dans la tête de Riga, la question ne s’est jamais posée. Certes, Tchité a dû retrouver du rythme après avoir été blessé six semaines et n’est donc pas encore dans sa forme optimale mais Riga fait toujours de lui le choix numéro un. Et comme il a besoin d’un Tchité en forme pour faire basculer les rencontres, il fallait lui donner très vite du temps de jeu.  » Ce ne fut pas facile pour lui de revenir dans une équipe qui a commencé à douter « , le défend Riga.  » Mais ce n’est pas le retour de Mémé qui a amené notre mauvaise passe. Il ne faut pas retourner les choses.  » Sur ce point-là, l’entraîneur liégeois n’a pas tort : la fatigue physique et l’hécatombe dans l’entrejeu ne sont pas une conséquence du retour de Tchité dans l’équipe. Par contre, peut-être fallait-il profiter encore un peu plus (un match ou deux) de l’efficacité extraordinaire de Batshuayi. Riga savait que le réservoir du jeune prodige serait bientôt à sec et a préféré s’en prémunir. Peut-être un peu tôt…

Pourquoi Tchité part-il avec les faveurs du coach ? Parce que son expérience est inestimable. Il sent mieux que quiconque les matches et sait où et comment se placer. Ce qui n’est pas toujours le cas du jeune Batshuayi qui ne parvient pas encore à gérer tous les paramètres d’un match. On l’a vu à Bruges : il fut invisible et a parfois joué un peu trop à la limite (six fois hors-jeu). Alors que la rentrée de Tchité, beaucoup plus mobile (il avait compris qu’il fallait écarteler cette défense), a relancé le Standard.

En attendant, le Standard n’a pas marqué en trois rencontres (Cracovie, Saint-Trond et Bruges) et semble plus que jamais miser sur la solidité défensive. Quand Bruges a ouvert le score, on sentait les Blauw en Zwart soulagés, conscients d’avoir effectué la plus grosse partie du travail.  » Il faut absolument retrouver la fraîcheur devant le but et cette efficacité « , disait d’ailleurs Riga à la sortie du Jan Breydelstadion.

PAR STÉPHANE VANDE VELDE – PHOTOS: IMAGEGLOBE

 » Le Standard a disputé 45 matches. Mais Bruges 42 et pourtant, le Club compte 10 points d’avance sur les Rouches. « 

 » Avec Seijas, Bia et Nacho à l’infirmerie, l’entrejeu du Standard manque de technique « 

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