A double tranchant

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Les syndicats préfèrent la négociation à l’action. Ils rediscuteront avec le gouvernement du plan sur les fins de carrière. Puis ils aviseront. Gare au(x) piège(s)

Pause. Les organisations syndicales jouent la temporisation. Après avoir rassemblé entre 80000 et 100000 manifestants à Bruxelles, qui clamaient leur indignation face au Contrat de solidarité entre les générations finalisé par le gouvernement fédéral, les syndicats devaient passer à la suite. Augmenter davantage encore la pression en lançant un plan d’actions plus dures ? Ou négocier, comme le gouvernement les y invitait ? C’est finalement la piste de la négociation qui l’a emporté, malgré les déclarations contradictoires du Premier ministre Guy Verhofstadt (VLD) et de sa vice- Première ministre Laurette Onkelinx (PS). L’un assure que ce pacte, qui fixe notamment de nouvelles règles pour les fins de carrière, est ficelé, sauf sur quelques virgules ; l’autre se dit prête à (re)discuter de tout, sans tabous. L’avenir dira lequel des deux a dit vrai. Sans garantie, les interlocuteurs sociaux rencontreront tout de même le gouvernement, le 14 novembre prochain, avant d’évaluer la situation le 22. Faute d’obtenir satisfaction, les syndicats reprendront l’initiative, d’une grève générale, de toute évidence.

Cet apaisement, même relatif, tombe à pic. Car le rapport du Conseil central de l’économie sur les marges disponibles pour augmenter les salaires n’a, lui, rien d’apaisant. Cette institution veille sur l’évolution des salaires pratiqués en Belgique pour s’assurer qu’ils ne croissent pas plus vite que ceux qui sont distribués en Allemagne, en France et aux Pays-Bas. Le dernier accord interprofessionnel avait fixé à 4,5 % la croissance possible des salaires belges, indexation comprise, pour les années 2005 et 2006. Or, ils auront progressé de 5,2 % à la fin de l’année prochaine. A qui la faute ? A l’inflation, d’abord. Prévue pour s’élever de 3,3 % en deux ans, elle atteindra 4,3 %. Aux pays voisins, ensuite – principalement l’Allemagne -, qui ont freiné leurs augmentations de salaires. Ce sont donc des facteurs extérieurs qui expliquent le dérapage en Belgique : si l’inflation n’avait pas dépassé les estimations, les salaires n’auraient augmenté que de 4,2 %, soit moins que la marge de 4,5 % autorisée. Mais soit. Les chefs de file patronaux et syndicaux se sont donné six semaines pour trouver la réponse adéquate à la situation. Ensuite, le gouvernement reprendra la main. Les deux camps se neutraliseront sans doute, car les employeurs sont pris en défaut sur le terrain des investissements en formation et en recherche et développement. En outre, le terrain social est miné. Faire  » payer  » des travailleurs qui ont, de fait, respecté la norme est difficilement imaginable. Et remettre en cause l’indexation automatique des salaires passerait pour une déclaration de guerre. Les interlocuteurs sociaux marcheront sur des £ufs. Porteurs du virus de la grippe aviaire…

Laurence van Ruymbeke

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