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 » A Buenos Aires, j’étais stressé « 

Un jour, le président de River Plate a décrété qu’il valait 50 millions de dollars mais l’action d’Eder Alvarez Balanta a chuté de façon dramatique. Au FC Bâle, il a repris des couleurs. Au Club Bruges, il veut confirmer.

« Il est habile balle au pied et c’est un battant. Il me fait penser à Daniel Passarella « , disait Ramón Díaz au moment d’expliquer pourquoi, lors du derby face au Racing, il avait opté pour le jeune Eder Alvarez Balanta au centre de la défense.

A l’époque, le jeune homme avait 19 ans et ne disposait même pas d’un contrat professionnel car River Plate avait déjà épuisé son quota d’étrangers. Il jouait donc pour des cacahuètes. Ce jour-là, River avait des problèmes en défense et Diaz avait donné sa chance au Colombien.

Ce dernier était particulièrement nerveux. Au point que personne ne pouvait faire chambre avec lui, histoire qu’il ne contamine pas les autres. Finalement, tout s’était bien passé : Balanta avait livré un bon match et River avait gagné 2-0. C’était le début d’une grande carrière.

Ce que personne ne savait à l’époque (le Colombien n’allait l’avouer que plus tard), c’est que, s’il était nerveux, c’était en raison d’une tragédie familiale : la femme de son oncle était décédée juste avant le match. La famille s’était réunie pour l’enterrement à Puerto Tejada, un village des environs de Cali et, le lendemain, il effectuait ses débuts.

Testé dans l’ancien club de Maradona

Balanta a passé sa jeunesse à Bogota, capitale de la Colombie. Dans de bonnes conditions. Son père était économiste, sa mère infirmière. Avec sa soeur aînée et les deux enfants de celle-ci, il a vécu une adolescence sans souci.

Son père jouait aussi au football mais, contrairement au frère de sa mère, il n’a jamais été professionnel. Il était supporter de l’Atlético Nacional, un club de Medellin.

En avril 2013, Gol Caracol lui a a demandé comment il avait atterri à River avant même d’avoir livré le moindre match professionnel en Colombie. Il a répondu qu’il s’était fait remarquer au sein d’une sélection de jeunes joueurs de Bogota. Ce jour-là, Silvano Espíndola effectuait une mission de scouting et il a demandé à Balanta s’il avait envie de faire un test à Buenos Aires.

Son père était contre, son oncle joueur professionnel était pour et voulait bien financer le voyage. Finalement, l’adolescent est parti avec cinq autres Colombiens. Leur première destination fut Argentinos Juniors, l’ex-club de Silvano, qui avait été équipier de DiegoMaradona.

Argentinos n’a pas voulu de lui. Balanta a donc passé un deuxième test, à River Plate, qui l’a engagé pour ses équipes d’âge. C’est là qu’il a effectué ses débuts en équipe première.

PlayStation avec David Trezeguet

Il ne lui a pas été facile de s’adapter en Argentine. La nourriture, la mentalité… Les Argentins sont beaucoup moins ouverts que les Colombiens, expliquait-il à Gol Caracol. Plus tard, lorsqu’il est devenu une star, il a dû s’habituer aux fans qui lui demandaient des photos en rue ou au restaurant.

 » Des femmes de septante ans, des enfants de huit ans, des avocats… Ici, tout le monde connaît tous les joueurs et a un avis « , disait-il en 2013.  » En Colombie, ce n’est pas pareil. Cela me stresse. Finalement, c’est encore sur le terrain que je suis le plus calme.  »

Il trouvait aussi étrange de se retrouver dans le même vestiaire que David Trezeguet, avec qui il n’avait jamais joué que… sur PlayStation, dans l’équipe de France ou avec la Juventus. Maintenant, il jouait avec lui aux jeux vidéo.

Dans la même interview, il avouait être souvent stressé. Même à l’entraînement.  » Je suis un perfectionniste. Quand je suis sur le terrain et que je perds, ça me trotte dans la tête.  » Ses coaches l’alignaient souvent en défense car dans l’entrejeu, sa place favorite, il y avait beaucoup de concurrence.

 » En équipes d’âge, j’étais attaquant de pointe. Après, on a fait de moi un volante de creación (médian offensif) puis, quand nous avons joué sans numéro 10, je suis devenu doble cinco (box-to-box). C’est la place que je préfère. Quand je récupère le ballon, je monte. Et on n’aime pas que les défenseurs fassent cela.  »

A Bâle au lieu de Barcelone

De 2013 à 2015, il n’a fait que progresser. Daniel Passarella, capitaine de l’équipe championne du monde de 1978 puis entraîneur et président de River, n’avait que des éloges pour lui et citait des montants faramineux : 50 millions d’euros, puis 20. La presse le citait à Barcelone, où il devait succéder à Carles Puyol, puis à Naples et à Monaco.

Mais le seul club qui contactait le président Rodolfo D’Onofrio, c’était São Paulo, qui se voyait opposer une fin de non recevoir. En Argentine, Balanta progressait sur le plan physique et le sélectionneur colombien José Pékerman l’emmenait à la Coupe du monde au Brésil.

Mais l’heure du contrecoup arrivait. Il commettait des erreurs et se blessait au genou puis se fracturait le tibia droit après une frappe. Il connaissait également des problèmes musculaires. Il était, dès lors, beaucoup moins régulier. En 2016, après avoir remporté six trophées, il arrivait à la fin d’un cycle à River Plate. Au lieu de se retrouver à Barcelone, il atterrissait au FC Bâle parce que Galatasaray et Malaga avaient refusé de mettre cinq millions pour s’assurer ses services.

Le club suisse, modèle de gestion pour un petit pays, avait toutefois perdu son statut dans l’intervalle. Il n’était pas sûr de disputer chaque année la Ligue des Champions – en raison d’un coefficient trop bas – et devait aller chercher à l’étranger des joueurs à faire progresser. Pour cela, il faisait souvent appel à d’anciens joueurs.

Doble cinco à Bruges

A l’été 2016, les dirigeants du FC Bâle convainquaient ceux de River Plate de leur céder 80 % des droits économiques sur Balanta. En cas de revente, les deux parties seraient gagnantes. Au lieu de 20 millions d’euros, Balanta partait pour 3,1 millions.

En Suisse, le Colombien débutait en défense mais Marcel Koller le faisait avancer d’un cran. Lorsqu’il n’était pas blessé, il jouait en doble cinco. C’est aussi pour ce poste que le Club Bruges l’a transféré à une semaine de la clôture du mercato, parce que Victor Wanyama hésitait.

 » Sa puissance et sa technique vont nous manquer « , dit Koller tandis que, dans le Basler Zeitung, son équipier Fabian Frei affirmait :  » En dehors du terrain, il est très calme, intelligent et réfléchi. Mais sur le terrain, c’est une bête. Mieux vaut l’avoir comme équipier. Dommage qu’il parte.  »

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