60 SAISONS DE FOOTBALL EUROPÉEN

Le football continental est né en 1955-1956, avec la première édition de la Coupe d’Europe des Clubs Champions. La CE2, réservée aux vainqueurs de coupes, s’y est ajoutée en 1960, suivie en 71 par la CE3, la Coupe de l’UEFA. Ces trois épreuves ont été ramenées à deux : la Ligue des Champions et l’Europa League. Quelles ont été les dix équipes les plus glorieuses de ces 60 ans de football européen ?

1 Real Madrid / Cristiano Ronaldo est-il meilleur qu’Alfredo Di Stéfano ?

Lors du premier match européen du Real, durant la première édition de la Coupe d’Europe des Clubs Champions, en 1955-1956, le score était encore vierge au repos. Le Real affrontait le Servette Genève, en déplacement. Karl Rappan, l’entraîneur autrichien des Suisses, est considéré comme l’initiateur de ce qu’on allait appeler le catenaccio et il l’a appliqué avec maestria contre les vedettes du Real. Alfredo Di Stéfano n’a pas trouvé la parade au rude jeu helvétique. Il a même gaspillé la meilleure occasion de la première mi-temps. Finalement, les Madrilènes se sont imposés 0-2.

Au repos, les joueurs du Real ont reçu la visite de Juan Carlos de Bourbon, le jeune prince des Asturies, futur roi d’Espagne. Agé de 17 ans, Juan Carlos était d’un naturel plutôt bruyant. Il se faisait remarquer, où qu’il aille. Il s’est tourné vers Di Stéfano, alors âgé de 29 ans, et lui a dit, plutôt maladroitement :  » Tu ne réussis pas grand-chose aujourd’hui, hein ?  » La réponse a giclé :  » Je vais marquer, petit.  » Voilà qui illustre bien le sens de la répartie de l’Argentin. On ne rigolait pas de Di Stéfano. Il faisait et défaisait les carrières. En plus, il jouissait d’une grande célébrité dans le milieu des paris. Même les soirs précédant les joutes européennes, il préférait la compagnie de call-girls de luxe, dans des casinos enfumés, à la tranquillité de sa chambre d’hôtel.

Cristiano Ronaldo, qui a mué son corps en cathédrale, n’est pas près de se comporter comme ça. Pourtant, le Portugais ne peut que rêver des cinq succès d’affilée de Di Stéfano en C1. La Flèche Blonde a inscrit au moins un but dans chacune des finales disputées de 1956 à 1960. Le Real de Di Stéfano a également disputé les finales 1962 et 1964 mais il a été vaincu par Benfica puis par l’Inter. De son côté, Cristiano Ronaldo a déjà participé à trois finales de Ligue des Champions. Il a été défait à deux reprises : avec Manchester United, en 2008, par Chelsea, et en 2009 par Barcelone. Il a quand même remporté l’épreuve l’année dernière sous le maillot du Real, contre l’Atletico. Il a marqué deux buts au total. CR7 a toutefois surpassé l’Argentin au nombre de buts marqués pour le Real. Di Stéfano, qui s’est produit onze saisons dans la capitale ibérique, a inscrit 307 buts en 396 matches, soit 0,78 but par partie. Le Portugais en est à 313 buts en 300 matches, soit une moyenne de 1,04. Et tout ça en l’espace de six saisons…

2 AC Milan / L’actuel AC Milan a-t-il besoin d’un grand défenseur ?

Adil Rami et Daniele Bonera. C’est le duo défensif aligné par l’AC Milan lors de sa dernière joute européenne, le 11 mars 2014, en quarts de finale de la Ligue des Champions contre l’Atletico Madrid. Deux footballeurs méritants, certes. Bonera (34 ans) est en poste à Milan depuis 2006 et il compte 16 sélections nationales. Le Français Rami (29 ans) a joué à Lille puis à Valence et a été convoqué par les Bleus à 26 reprises. Pourtant, le match s’est achevé sur le score de 4-1 en faveur de l’Atletico, futur finaliste.

Que représentent Rami et Bonera par rapport aux duos Paolo Maldini-AlessandroNesta, Franco BaresiAlessandro Costacurta ou Saul MalatrasiRoberto Rosato ? C’est avec eux que l’AC Milan a gagné ses finales européennes. Ce sont des footballeurs célèbres. Il y a la tête impériale de l’énigmatique Baresi, les yeux du divin Maldini, le visage d’ange de Rosato et la redoutable efficacité de l’élégant Nesta.

La plus belle victoire est sans aucun doute celle de 1994 : 4-0 contre le Barça de Johan Cruijff. Fabio Capello entraînait Milan. Il s’arrachait les cheveux car Costacurta et Baresi, deux de ses quatre défenseurs en ligne, avec Mauro Tassotti et Maldini, étaient suspendus. Leurs doublures ? Filippo Galli et Christian Panucci. Dans l’entrejeu défensif, on trouvait aussi Marcel Desailly et Demetrio Albertini. Barcelone, qui alignait des grands noms – AndoniZubizarreta, Pep Guardiola, José Maria Bakero, Guillermo Amor, HristoStoitchkov et Romario, était sûr de la victoire. Avant le match, Cruijff était d’ailleurs plus qu’optimiste :  » Le véritable AC Milan, c’est celui de Sacchi, avec le trio néerlandais GullitRijkaardVan Basten. Capello, lui, appuie son système sur Desailly… Si Milan gagnait ici, ça aurait une influence négative sur l’avenir du football.  » L’influence n’a pas été si mauvaise. A l’issue du match, Marcel Desailly, l’auteur du quatrième but, a déclaré :  » Je pense que Barcelone s’est quelque peu surestimé… « 

3 FC Barcelona / Le Barça doit-il ses succès aux Néerlandais ?

Et en particulier un Néerlandais, celui qui a tenu ces propos :  » Quand on joue la possession du ballon, il n’est pas nécessaire de défendre puisqu’il n’y a qu’un ballon.  » Oui, il s’agit de JohanCruijff. L’Amstellodamois a été nommé entraîneur du club catalan en 1988. Depuis que le Barça applique la philosophie de Cruijff, il a bien comblé son retard sur le Real. Comptez : dix titres avant 1988, treize après. En Coupe d’Europe ? Deux trophées avant l’arrivée de l’Oracle, sept ensuite.

Le style de Cruijff existe toujours : la possession du ballon, la domination, des arrières latéraux qui montent, trois attaquants en 3-4-3 ou 4-3-3. Le Camp Nou a souvent eu recours à des adeptes de Cruijff : Louis van Gaal, Frank Rijkaard, Pep Guardiola, Tito Vilanova et Luis Enrique. Chacun a placé ses accents personnels mais l’idée de base n’a pas changé. L’influence de Cruijff est incontestable. C’est lui qui a offert à Barcelone sa première coupe aux grandes oreilles. En 1992, le Barça a battu la Sampdoria 1-0, aux prolongations. D’ailleurs, c’est un Néerlandais qui a inscrit le but salvateur : Ronald Koeman. Plus tôt, en 1989, Cruijff avait déjà ramené la Coupe des Vainqueurs de Coupes en Catalogne et en 2006, un autre Néerlandais a été l’architecte de la victoire en Ligue des Champions contre Arsenal : Frank Rijkaard. Mark van Bommel et Gio van Bronckhorst étaient aussi sur le terrain. Un autre Néerlandais a été impliqué dans le premier succès européen du Barça : Johan Neeskens a disputé la finale remportée 4-2 contre le Fortuna Düsseldorf.

D’ailleurs, on pourrait composer une équipe formidable avec les Néerlandais alignés par le Barça – en 3-4-3, évidemment :

Ruud Hesp

Michael Reiziger – Ronald Koeman – Frank de Boer

Edgar Davids – Johan Cruijff – Mark van Bommel – Johan Neeskens

Ronald de Boer – Patrick Kluivert – Marc Overmars

Banc : Danny Muller, Richard Witschge, Jordi Cruijff, Philipp Cocu, Winston Bogarde, Boudewijn Zenden, Gio van Bronckhorst, Ibrahim Afellay.

4 Liverpool / Que se serait-il passé si Liverpool n’avait pas été suspendu pendant six ans ?

 » Je viens si vous me donnez vingt livres (27 euros) de plus par semaine.  » Ce sont les paroles de Kevin Keegan, qui gagnait trente livres par semaine à Scunthorpe, en 1971. Bill Shankly a accepté.  » Joe, le père de Kevin, était un ancien mineur, comme moi. Nous sommes donc rapidement tombés d’accord « , a expliqué le mythique entraîneur des Reds, remplacé en 1974 par Bob Paisley. Keegan est synonyme d’ère en or pour Liverpool : 3 titres, une Cup, une Coupe UEFA et la C1 en 1977. Liverpool s’est imposé 3-1 face au Borussia Mönchengladbach d’Udo Lattek. C’était le match entre le pitbull Berti Vogts, futur sélectionneur de la Mannschaft, et Keegan.  » Je ne me souviens pourtant pas de cette finale « , a déclaré l’attaquant anglais plus tard.  » Par contre, je me rappelle que Vogts s’est dirigé vers ma table, à la réception d’après-match, pour me féliciter. Je n’aurais jamais été capable d’un geste pareil.  »

En été 1977, Keegan signe à Hambourg et Paisley repère son successeur au Celtic : Kenny Dalglish. De 1977 à 1985, celui-ci, sous les ordres de Paisley puis de Joe Fagan, développe un one touch football : un jeu de combinaisons rapides, vers les ailes puis en profondeur, toujours axé vers l’homme démarqué. Liverpool était alors un habitué du tournoi majeur de l’Europe. Les Reds ont enlevé les éditions 1978 (contre le Club Bruges à Wembley), 1981 et 1984. En 1985, Dalglish, alors âgé de 34 ans, emmenait Liverpool en finale de la C1 pour la quatrième fois en huit ans. C’était au Heysel. Avant le début de la partie, des supporters de Liverpool ont chargé la tribune réservée aux fans de la Juventus. Bilan : 39 morts, des centaines de blessés. L’UEFA a exclu les clubs anglais de l’Europe pendant des années et Liverpool a écopé de la plus lourde sanction : six saisons. Les Reds n’ont donc pu participer aux éditions 1986, 1988 et 1990, alors qu’ils étaient champions d’Angleterre, ni à la Coupe UEFA 1987 – ils étaient deuxièmes – ni à la C2 1989, après leur victoire en Coupe d’Angleterre.

5 Bayern Munich / Manuel Neuer est-il une fillette, comparé à Oliver Kahn ?

Oliver Kahn. Surnoms : le Titan, King Kahn, Gengis Kahn. Gardien du Bayern de 1994 à 2008. Lauréat de la Coupe UEFA 1996, de la Ligue des Champions 2001. La terreur des avants et même de ses propres coéquipiers. Il a flanqué une claque à Daniel Van Buyten, il a empoigné Mark van Bommel par la peau du cou, il a donné un méchant coup au dos d’Andreas Herzog pour avoir perdu le ballon dans l’entrejeu et ainsi permis à l’adversaire de se créer une occasion… Ce ne sont là que quelques exemples des tornades essuyées par ses coéquipiers bavarois. Les adversaires d’Oli ont souffert aussi : il a fauché Stéphane Chapuisat, il a failli arracher son nez à Miroslav Klose… Vérifiez sur YouTube, à  » Oliver Kahn’s Top 5 Freakouts  » et vous comprendrez de quoi nous parlons. Sa devise ? Vouloir, c’est gagner.

Après une défaite, Kahn était agressif, inabordable. Il a déjà arraché la porte du vestiaire de ses gonds. Van Buyten a raconté ceci à propos de son ancien collègue :  » Il était toujours concentré et distant. Quand on lui parlait, il était plutôt sympathique et il s’est ouvert au terme de sa carrière mais quand il pétait les plombs en match… Je ne pense pas l’avoir jamais vu rire. Une fois, FranckRibéry et moi lui avons concocté une farce : du toit, Franck lui a versé un seau d’eau sur la tête. Tout seul, il n’aurait jamais osé tant il avait peur de Kahn. Imaginez que celui-ci se mette à flipper… Quand Kahn est entré trempé dans le vestiaire, Frank s’est d’abord planqué derrière moi. Il ne s’est montré qu’en réalisant qu’Oli l’avait plutôt bien pris…  »

Manuel Neuer. Surnom : Manu.

6 Ajax / Y a-t-il encore de bons Surinamiens ?

Quelque 350.000 Surinamiens vivent aux Pays-Bas. Après la Deuxième Guerre, beaucoup d’habitants de la colonie ont émigré. La colonie du nord de l’Amérique du Sud a acquis son indépendance en 1975 mais beaucoup de Surinamiens sont venus étudier aux Pays-Bas et y sont restés, y ayant des perspectives de carrière. Environ 68.000 d’entre eux résident à Amsterdam, plus particulièrement dans le Bijlmer. L’Ajax, le club local, en a tiré profit.

Plus de 40 joueurs d’origine surinamienne ont évolué en équipe-fanion. Frank Rijkaard a été le premier en 1979. Le médian avait alors 17 ans. L’Ajax a atteint un pic en 1995 : six joueurs surinamiens ont contribué à la victoire de l’Ajax 1-0 contre Milan en Ligue des Champions : Rijkaard, Michael Reiziger, EdgarDavids, Clarence Seedorf, Winston Bogarde et Patrick Kluivert. Seedorf avait 19 ans quand il a remporté sa première coupe aux grandes oreilles. Il allait en ajouter trois à son palmarès : en 1998 au Real Madrid, en 2003 et en 2007 avec Milan.

L’époque des grands Surinamiens semble révolue. Nigel de Jong a été le dernier à faire parler de lui. Il ne possède pas le flair ni la souplesse d’un Kluivert ou d’un Seedorf. Il évoque plutôt une tondeuse à gazon ! L’Ajax contemporain compte beaucoup sur Ricardo Kishna, un avant de vingt ans qui se compare lui-même à Robin van Persie. Bluff hollandais ou réalisme néerlandais ? L’avenir nous le dira.

7 Inter / José Mourinho est-il une copie d’Helenio Herrera ?

 » Pourquoi je ne travaille que pour des grands clubs ? C’est simple : les autres n’ont pas les moyens de me payer.  »

 » Beaucoup de gens croient que je sais tout. C’est faux. Par exemple, je ne sais pas l’effet que produit l’échec.  »

 » On joue mieux à dix qu’à onze.  »

Vous pensez que c’est un florilège des perles de José Mourinho ? Vous vous trompez. L’auteur de ces propos, c’est Helenio Herrera, qu’on appelait le Magicien ou HH. L’entraîneur argentin, décédé à 87 ans, en 1997, a été le premier à appliquer le catenaccio à un grand club. Il a conquis la C1 en 1964 et en 1965 au détriment du Real (3-1) d’Alfredo Di Stéfano puis du Benfica (1-0) d’Eusebio. L’Inter a aligné quasiment la même équipe dans les deux finales. Sa muraille défensive était constituée du quatuor – Giacinto Facchetti, Gianfranco Bedin, Aristide Guarneri et Tarcisio Burgnich – précédant le libéro Armando Picchi, chargé de dégager les ballons qui seraient passés entre les mailles du filet. Dans l’entrejeu, l’Espagnol Luis Suarez et le légendaire Sandro Mazzola étaient chargés des actions offensives. Peu avant son décès, Herrera a déclaré que son style de jeu n’était pas aussi défensif qu’on le prétendait.  » D’accord, Picchi jouait au libéro mais j’avais aussi Facchetti, le premier arrière latéral à marquer autant qu’un attaquant.  » Avec dix buts durant l’exercice 1965-1966, l’arrière gauche a, de fait, longtemps été le défenseur le plus fécond de Serie A. Marco Materazzi a battu son record en 2000-2001.

En 2010, le même Materazzi a assisté du banc à la victoire de l’Inter de Mourinho sur le Barça, en demi-finales de la Ligue des Champions. A domicile, les Italiens s’étaient imposés 3-1. On s’attendait à ce qu’au Camp Nou, le Barça fasse plier les hommes du Special One, d’autant que Thiago Motta avait été exclu à la 28′. Mais l’Inter a formé un double rideau défensif et a limité les dégâts. Le Barça s’est imposé 1-0. En finale, l’Inter a procédé de même pour vaincre le Bayern de Louis van Gaal : une défense solide et des percées ultra-rapides de Samuel Eto’o et de Diego Milito. Un chiffre en dit long : la possession du ballon : 32 % pour l’Inter. Mourinho s’est ensuite couronné Père Darth de la galaxie du football. Massimo Moratti, alors président du club transalpin, avait connu Herrera dans sa jeunesse. Il a comparé Mourinho à l’ancien maître :  » Ils ont le même caractère : ils bossent beaucoup, sont super pro, courageux et charismatiques.  » Oui. Et parfois, leur football est imbuvable.

8 Juventus / Si Mozart avait joué au football, aurait-il ressemblé à Roberto Baggio ?

La question : Turin a vu défiler pas mal de compositeurs de football. Dans la phalange actuelle, la touche de balle d’Andrea Pirlo fait penser à un concert de musique classique. Dans le passé, de nombreux artistes à la touche de balle raffinée ont porté le maillot des Bianconeri. On pense à Michel Platini, Zinédine Zidane, Gianluca Vialli et Alessandro Del Piero. Mais Roberto Baggio, surnommé Il Divin Codino (la divine queue de cheval) est sans doute le plus impressionnant. Il faut le reconnaître : jamais footballeur n’a porté queue de cheval plus élégamment. Emmanuel Petit, Paul Gascoigne et Zlatan Ibrahimovic ont bien essayé, en vain.

Baggio était un buteur mais aussi un spécialiste des coups francs, un joueur doté d’une fabuleuse vista. Il préférait que les buts ne soient pas trop faciles à inscrire.  » Je n’en retire alors aucune satisfaction.  » Il a atteint son apogée à la Juventus en 1993 – par la suite, il a notamment joué pour l’AC Milan et l’Inter- en remportant la Coupe UEFA face au Borussia Dortmund. Ce match vient d’être rejoué en aller-retour. En marquant deux buts en Allemagne (3-1), Baggio a rendu le retour (gagné 3-0) superflu.

Avec 205 goals, Baggio est le septième meilleur réalisateur de tous les temps en Serie A. Seuls Del Piero, Pirlo et Sinisa Mihajlovic ont marqué plus de buts que lui sur coup franc. Comme il a entretenu de mauvaises relations avec la plupart de ses entraîneurs, il a passé plus de temps sur le banc qu’il ne l’aurait souhaité. Marcello Lippi et Arrigo Sacchi ne l’appréciaient vraiment pas. Baggio n’a jamais su pourquoi. Plus tard, il a déclaré :  » Peut-être étaient-ils simplement jaloux. Tout le monde me portait aux nues, même les supporters de l’adversaire. Volais-je trop souvent le show, à leur détriment ? Le football contemporain est de plus en plus dominé par les entraîneurs et leurs traits narcissiques.  » Cette caractéristique était étrangère à Baggio, qui s’est très tôt converti au bouddhisme. C’était une façon pour lui de se libérer du stress induit par les performances et les ordres d’entraîneurs dominateurs. L’année dernière, par ailleurs, il a ouvert à Milan le plus grand temple bouddhiste d’Europe. Même après sa carrière, Roberto Baggio continue à toucher les coeurs.

9 Manchester United / Est-il possible d’enlever une Coupe d’Europe sans dents ?

Oui, c’est faisable ! Posez la question à Nobby Stiles, the Toothless Tiger. Rien en lui ne donnait l’impression qu’il était footballeur. Il était petit (1m68), il a rapidement perdu ses cheveux, ce qui l’a incité à ramener le reste de ses cheveux sur la partie chauve, et il souffrait d’une grave myopie. Il portait des verres de contact en match et d’épais verres de lunettes en dehors du terrain. Mais le pire aspect physique de Stiles, c’est qu’il lui manquait plusieurs dents dans la mâchoire supérieure, suite à un accident survenu au début de sa carrière, en cours de match. Il enlevait sa prothèse pour jouer, ce qui lui conférait une allure épouvantable…

Sa bouche édentée ne l’empêchait pas de tacler énergiquement.  » On ne peut pas jouer quand on n’a pas le ballon. Mon job consistait à m’emparer du ballon pour le céder le plus vite possible à Bobby Charlton « , a-t-il expliqué plus tard. Son agressivité lui a valu énormément de critiques. La plupart des commentateurs ne l’aimaient pas, le considérant comme une tache sur le Beautiful Game.  » Les critiques ne me touchaient pas. Je sais que ça fait cliché mais je ne vivais que match par match. Même quand nous nous sommes qualifiés pour les demi-finales de la Coupe d’Europe, je n’ai pas pensé : – Aïe, il y a bientôt le Mondial, il vaut mieux se ménager.  »

Son fanatisme avait séduit l’entraîneur écossais Matt Busby. Il a été précieux dans la finale de C1 1968, face à Benfica. Un certain Eusebio jouait alors pour les Portugais. Manchester United, qui s’appuyait sur la classe de Charlton et de George Best, était trop fort : il a gagné 4-1. Les Red Devils tenaient leur premier trophée continental. Il était chargé d’émotions : dix ans plus tôt, en 1958, huit joueurs de l’équipe, les fameux Busby babes, étaient décédés dans l’accident de l’avion de United, à Munich. Deux des survivants étaient sur le terrain le 29 mai 1968 : Charlton et Bill Foulkes. Busby avait survécu au crash aussi. Charlton n’a pas participé à la fête qui a suivi la victoire. Epuisé, il se sentait mal :  » Le chemin de la finale a été très long et puis, dix ans après Munich, j’étais très ému… « 

10 FC Porto / Pourquoi le FC Porto est-il repris dans la liste et pas Benfica ?

La réponse est simple : Benfica est le loser d’Europe, par définition. Le recordman des titres portugais (34) a disputé dix finales européennes mais n’en a gagné que deux. Les premières, en 1961 et en 1962. En 1961, Eusebio, qui n’avait encore que 19 ans, jouait quelque part à Maputo, au Mozambique. En 1962, il était de la partie, dans l’affiche légendaire contre le Real d’Alfredo Di Stéfano, Ferenc Puskas et Paco Gento. La Panthère Noire a plié le match en faveur des Portugais, en marquant deux buts (5-3). Ce fut la dernière prouesse du club sur la scène européenne. Est-ce à cause de la malédiction de Bela Guttmann ? L’entraîneur hongrois a demandé une augmentation, après ses deux victoires. Ne l’obtenant pas, il a décrété :  » Sans moi, Benfica ne gagnera plus de finale européenne pendant cent ans.  »

Il en va tout autrement de Porto. Les Dragons ont disputé cinq finales européennes, ils en ont gagné quatre. La finale de Coupe UEFA 2003 contre le Celtic a été particulièrement dense. José Mourinho a enlevé son premier trophée européen, grâce à une victoire 2-3. Les Ecossais alignaient des footballeurs intéressants, comme Henrik Larsson. Avec 40 buts, l’avant suédois est d’ailleurs toujours le meilleur avant de Coupe UEFA/Europa League. Il est suivi par Radamel Falcao et Klaas-Jan Huntelaar, avec trente buts. Le défenseur belge Joos Valgaeren (ex-Malines et Club Bruges) a également participé à cette finale. Le Celtic a plié face à l’armada ibérique, qui pouvait notamment compter sur Deco, Maniche, Jorge Costa et Ricardo Carvalho. Au terme de la partie, Mourinho n’a pas vraiment fait preuve de modestie :  » Nous avons donné un bel exemple au monde et à tous les amateurs de football. En plus, nous entrons dans l’histoire, puisque nous sommes le premier club portugais à remporter la Coupe UEFA.  » Benfica aurait pu gagner cette épreuve en 1983 mais en finale, il avait buté sur… Anderlecht.

PAR STEVE VAN HERPE

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