5 QUESTIONS QU’ON N’OSAIT PAS POSER À Marcel Javaux

Le patron de l’arbitrage à la FIFA dit qu’il y a eu près de 200 mauvaises décisions à la Coupe du Monde : comment est-ce possible ?

Pour moi, des quatre ou cinq derniers tournois, celui-ci a été un des meilleurs, si pas le meilleur. Evidemment, il y a eu des décisions controversées. A juste titre. Mais il faut relativiser tous ces calculs et ces bilans. Un tournoi de 64 matches, ça représente combien de coups de sifflet ? Alors, même si 200 décisions ne sont pas les bonnes, ça reste un pourcentage infime. Qu’on arrête d’être négatif pour le principe. Je constate que la préparation physique et psychologique est de plus en plus poussée et que ça porte ses fruits. La caméra sur la ligne de but et la bombe de mousse à raser sur les coups francs, ce sont aussi de belles avancées. Donc, c’est un tournoi réussi.

Dans tous les championnats, les consignes sont de plus en plus claires en matière de cartes jaunes et rouges mais à la Coupe du Monde, on a été plus tolérant que jamais. Pourquoi ?

Les arbitres ont été plus tolérants qu’en championnat de Belgique, c’est sûr. Et tu vas voir, on va faire marche arrière ici ! On va sortir moins facilement des cartes. Je trouve aussi que les arbitres du Mondial, dans l’ensemble, ont été trop laxistes. L’exemple le plus frappant est celui du Colombien qui a blessé Neymar alors qu’il aurait déjà dû être exclu plus tôt. Maintenant, j’ai vu très peu de très sales fautes. Il y a eu celle de Blaise Matuidi, mais pour le reste ? Il y a 20 ans, le joueur qui filait vers le but se faisait quand même couper en deux et l’arbitre sortait rarement une carte jaune. On ne voit plus ça aujourd’hui.

Faut-il généraliser le spray sur les coups francs, ou c’est simplement de la frime ? On a aussi entendu qu’à cause de ce spray, certains arbitres avaient oublié de faire respecter les 9m15 entre le ballon et le mur.

J’y suis tout à fait favorable. La FIFA n’a pas fait n’importe quoi, elle ne teste évidemment pas un système pareil dans une Coupe du Monde. Le spray a été essayé au dernier Mondial U20 et il est déjà généralisé dans certains championnats en Amérique du Sud. Mon petit doigt me dit qu’il pourrait être utilisé en championnat de Belgique dès cette année. Tout est clair : si un joueur franchit la ligne, il prend une carte. Et on n’a pas dû en sortir une seule au Brésil, c’est la preuve de son efficacité. Pour ce qui est de la distance entre le ballon et le mur… C’est une vaste couillonnade. On ne va quand même pas pinailler pour quelques centimètres : 8m95 ou 9m18, où est le problème ?

Les arbitres belges sont fort critiqués chez nous mais on a l’impression qu’il y en a l’un ou l’autre qui aurait eu sa place au Brésil.

Bien sûr. Un gars comme Sébastien Delferière a les qualités pour aller à une Coupe du Monde. Mais pour ça, il faut qu’il soit défendu, soutenu, proposé, porté, poussé vers l’avant ! L’arbitre japonais qui était au Brésil, s’il n’avait pas été japonais, il n’y serait pas resté aussi longtemps. Il a la chance d’avoir un membre de sa fédération à la commission des arbitres de la FIFA. Ça compte énormément. Dans cette commission, il y a par exemple un Ougandais, mais pas de Belge. Plus personne ne défend les intérêts de nos arbitres à l’UEFA et à la FIFA. Quand tu arrives sur les dernières marches de la pyramide, si tu es soutenu, celui qui y est déjà s’écarte pour te faire une petite place. Si tu n’es pas soutenu, on te donne un coup d’épaule et tu retombes en bas. Pour avoir un arbitre belge à un Championnat d’Europe ou une Coupe du Monde sans qu’on soit représentés dans les commissions, il faudra peut-être qu’il ait un physique de James Bond et les qualités de Pierluigi Collina.

Quand Sébastien Delferière a obtenu ses premiers gros matches en Belgique, on l’a soupçonné d’être pistonné par son père, David, vice-président de l’Union Belge. On se rend compte entre-temps qu’il est sans doute notre meilleur arbitre et que s’il y en a un qui va prochainement à un grand tournoi, ce sera lui : une plume au chapeau de la Commission Centrale des Arbitres ?

Une plume au chapeau de Sébastien Delferière, surtout. Soyons honnêtes : tout le monde a eu des doutes quand il a été promu par la CCA. Mais il a tellement progressé et montré depuis deux ans qu’il n’y a plus rien à redire. L’EURO 2016 est envisageable pour lui. Dans l’immédiat, il doit confirmer en Europa League et s’affirmer en Ligue des Champions. Et le fait que l’équipe nationale refasse parler d’elle ne peut pas être une mauvaise chose pour nos meilleurs arbitres, parce que ça compte aussi.

PAR PIERRE DANVOYE

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire