3 la formation

belgique: Standard, Mouscron, Anderlecht, Genk

La formation est souvent pointée du doigt en Belgique. Pourtant, selon PhilippeSaintJean qui y a quasiment consacré toute sa carrière, il serait injuste de tirer à boulets rouges sur les clubs et la fédération.  » Ils sont tributaires des moyens financiers dont ils disposent, de la volonté politique et du système scolaire.  »

Certains clubs belges prennent conscience de l’importance de la formation. Dans notre pays, l’Académie Robert Louis-Dreyfus est à la pointe. Mais au Standard, un seul professionnel est à temps plein : DominiqueD’Onofrio ; à Lens, 22 le sont.  » Nos entraîneurs ont tous un autre métier mais ils sont tous diplômés « , confirme-t-il.

L’Académie a un coût : le Standard consacre entre 1 et 1,5 million par an à son fonctionnement. 250 jeunes y suivent leur écolage. Des accords ont été trouvés avec cinq établissements scolaires et trois internats. Des bus amènent les gamins de l’école à l’Académie, puis retour. Le programme est lourd, malgré tout : il faut se lever tôt, et parfois se coucher tard car les devoirs doivent être faits après les entraînements.

La construction de l’Académie a coûté 18 millions. 5 millions ont été subsidiés par la Région wallonne, les 13 autres seront remboursés à raison de 180.000 euros tous les trois mois pendant 27 ans. C’est en voie de remboursement depuis deux ans.

Anderlecht a longtemps souffert d’un manque d’infrastructures. Mais la première pierre du nouveau complexe de Neerpede a été posée début octobre.

A Mouscron, le Futurosport avait été créé en 1997 à l’initiative de l’ancien bourgmestre JeanPierreDetremmerie. Là, la volonté politique était présente. Avec une autre philosophie : mêler l’élite au social. Toutes les catégories d’âge dédoublées, avec des jeunes nationaux et provinciaux. Cette saison, on dénombrait entre 450 et 500 jeunes affiliés. 35 entraîneurs diplômés étaient sous contrat. L’encadrement des Nationaux était pris en charge par le club, celui des Provinciaux par la Ville. On commençait aussi très tôt : par des cours de psychomotricité dès l’âge de 4 ans. Des accords avaient été conclus avec trois écoles secondaires et une école primaire, ainsi qu’avec deux internats (un de 60 places et un de 20 places). L’infrastructure était au top : 11 terrains, un semi-synthétique, un terrain couvert…

Du côté flamand, Genk a longtemps été cité en exemple. A l’époque de RonnyVanGeneugden, une philosophie de jeu avait été créée : la même pour toutes les catégories d’âge, qui devait se transmettre jusqu’à l’équipe Première. A l’EURO 2007 des -17 ans, Genk était représenté par neuf joueurs.

Beaucoup de clubs, cependant, négligent la formation. Ils consacrent l’essentiel de leur budget à l’équipe Première. Se disent qu’il est vain d’investir dans des jeunes qu’on viendra leur prendre gratuitement à 15 ou 16 ans. Selon JohanWalem, aujourd’hui coach des Espoirs mauves, la législation n’est pas la seule fautive.  » Si les jeunes – et leurs parents – sont satisfaits de la formation qu’on leur donne, et qu’ils voient que des opportunités se présenteront pour eux en équipe Première, ils n’iront pas nécessairement voir ailleurs.  »

Le rôle du formateur n’est pas valorisé. Même à Anderlecht, les entraîneurs de jeunes – qui ne sont pas pros, rappelons-le – ne perçoivent pas plus de 1.000 euros par mois. Tout cela n’incite pas les anciens professionnels à se reconvertir dans ce rôle, sauf s’ils sont de vrais passionnés.

Un vrai problème d’infrastructure existe également, surtout en Wallonie.

étranger: France, Pays-Bas, Portugal, Suisse, Grand-Duché

Si ThierryHazard a placé son fils Eden à Lille, ce n’est pas parce qu’on lui proposait davantage d’argent mais parce qu’on lui a présenté un véritable projet, footballistique comme scolaire. Le nouveau complexe de Luchin, inauguré en 2007, a coûté 20 millions. Il comprend 26 chambres individuelles.  » On n’a pas voulu faire un hôpital… « , dit JeanMichelVandamme, le responsable du centre de formation.  » Six entraîneurs y travaillent à temps plein… pour trois équipes. C’est de l’élitisme. Ces entraîneurs gagnent entre 2.000 et 6.000 euros par mois. Ce qu’on appelle centre de formation, en France, ne concerne que les 16-20 ans. C’est véritablement l’apprentissage d’un métier, pas du loisir.  »

Le problème du déplacement de l’école au terrain ne se pose pas à Luchin : ce sont les professeurs qui viennent aux jeunes footballeurs. Les salles de classe et de musculation sont au rez-de-chaussée, les chambres à l’étage. Cela peut paraître idyllique, et Luchin est effectivement une réalisation exceptionnelle, mais c’est un univers clos où il faut être fort mentalement pour réussir.

Thorgan, le deuxième fils de la famille Hazard, a été placé à Lens.  » Malgré la descente en Ligue 2 l’an passé, rien n’a changé au niveau de la formation « , constate le papa. En 2009, Lens a même été champion de France en U18 et vice-champion de France en U16, l’équipe de Thorgan.

En France, les clubs de Ligue 1 sont obligés d’avoir un centre de formation. Boulogne, qui vient de monter, en crée un.  » Il y a 40 ans, les Français n’étaient nulle part mais ils ont lancé en 1972 sur Vichy le premier centre de formation à l’essai avec les militaires « , se souvient Saint-Jean.  » Ils ont constaté que cela marchait et ont étendu cela à tout le pays. « 

Aux Pays-Bas, la formation est fort élitiste également. Le centre d’Ajax, longtemps le plus réputé, ne comptait que 60 footballeurs. Répartis en trois équipes, comme à Lille. On n’y entre que lorsqu’on a été sélectionné. Ceux qui viennent uniquement pour faire du sport sont priés d’aller voir ailleurs. Les Néerlandais tirent profit d’un système scolaire plus souple : l’école se termine vers 14 h ou 14 h 30, puis on peut s’entraîner.  » Les Néerlandais ont commencé la formation plus tôt « , se souvient Saint-Jean.  » Ils ont eu deux maîtres en la matière : RinusMichels et FransKorver. Le centre de Zeist, créé par la fédération, est aussi très performant. Il édite des bouquins sur la méthode pour tout le pays. Et puis, tous les terrains sont des billards.  »

Le Portugal n’était nulle part il y a 10 ou 15 ans. Il y avait un gros problème : les équipes avaient un noyau de 30 joueurs mais pas d’équipe Réserve. Depuis qu’elles ont été créées, le niveau des jeunes a augmenté. Le Sporting, qui a sorti CristianoRonaldo et RicardoQuaresma, est à la pointe. Le complexe est une structure en miroir : un terrain pour les pros et le même à côté pour les jeunes, une salle de musculation et la même à côté. Les jeunes voient ce que les pros font et y trouvent une émulation, mais ne passent pas la barrière.

En Suisse et au Luxembourg aussi, on travaille. Dans ces pays, la fédération a lancé des programmes à l’intention des clubs et cela porte ses fruits.  » Jadis, on n’affrontait même pas le Luxembourg en match amical car l’écart était trop conséquent « , se souvient Saint-Jean.  » Aujourd’hui, on affronte le Grand-Duché et on gagne de plus en plus difficilement. « 

par daniel devos

Les jeunes restent s’ils sont satisfaits de la formation et des perspectives vers l’équipe A. (Johan Walem)

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