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Kim Gevaert évalue les chances belges à Barcelone

Retraitée des pistes mais toujours passionnée, l’ex-sprinteuse passe en revue les chances des Belges et explique l’éclosion de tant de jeunes.

Rayonnante au quatrième mois de sa deuxième grossesse, Kim Gevaert n’a rien perdu de la complicité qui l’unit à Tia Hellebaut, dont elle met à profit la conférence de presse pour satisfaire des demandes d’interviews qui affluent encore. Actuellement trop prise par ses maternités, Kim ne travaille pas à temps plein mais son agenda est bien rempli.

Elle ne connaît pas le trou noir tant redouté par maints sportifs de haut niveau au terme de leur carrière. Elle travaille à mi-temps pour SOS Villages d’Enfants, dont elle est en outre ambassadrice. Elle collabore également, ponctuellement, au Mémorial Ivo Van Damme et elle effectue des piges pour la VRT: « Jusqu’à mes 30 ans, j’ai vécu en fonction du seul sport. J’y ai assouvi mes ambitions et je n’éprouve plus le besoin de faire mes preuves. Je veux m’occuper de mes enfants et profiter de la chaleur de la vie familiale. »

Kim Gevaert assistera aux championnats d’Europe d’athlétisme à Barcelone et aura à coeur de suivre les résultats de sa copine Tia: « Son excellent début lui a donné des ailes dans son come-back et elle est capable de signer un excellent résultat. Une médaille? En hauteur encore plus que dans d’autres disciplines, tout dépend des circonstances. »

L’exception-Hellebaut est repartie…

Lorsqu’elle a annoncé son retour à la compétition, le 16 février dernier, Tia (32 ans), maman depuis juin 2009, n’imaginait pas être performante cette année déjà, pas plus qu’elle n’avait coché Barcelone dans son agenda. Non, elle se préparait pour 2011 et pour les Jeux de Londres en 2012. Puis, à Madrid, en franchissant 1,95m, elle a décroché son billet pour le Championnat d’Europe et elle relève le défi. « Quand j’ai vu la barre à 1,93m, j’ai pensé que c’était haut », explique Hellebaut. « Pourtant, j’ai passé 1,95m ».

A Heusden, elle a même raté de peu 1,97m. Wim Vandeven, son entraîneur et compagnon, est également surpris par la rapidité du retour de Tia au plus haut niveau, même si la reprise des entraînements s’est déroulée sans un pli. « Après son accouchement par césarienne, nous avons dû porter une attention spéciale à ses abdominaux mais ce n’est plus un problème depuis longtemps déjà », précise-t-il. « Dès le premier jour d’entraînement, c’était comme si elle n’avait jamais arrêté. Nous avons évidemment dû retravailler certains aspects physiques. Elle a retrouvé d’emblée son ambition et sa concentration. Tia a besoin de défis. Elle a arrêté parce qu’elle avait atteint le summum, l’or olympique. Le retour de Kim Clijsters, avec laquelle elle a longuement discuté de la combinaison sport-maternité, l’a inspirée. Le second volet de sa carrière sportive constitue précisément un défi. »

La petite Lotte accompagne ses parents à Barcelone, avec la nanny qui la garde pendant les entraînements de Tia. « Je vois même plus ma fille que les parents qui ont un travail normal et font un huit-cinq ».

En Catalogne, Tia retrouve le même plateau de participantes qu’avant sa grossesse: même si quelques jeunes pointent, les meilleures spécialistes de la hauteur sont des femmes mûres. La technique ne s’acquiert pas en deux coups de cuiller à pot et l’expérience est encore plus cruciale que dans d’autres disciplines. Malgré sa forme, Tia ne veut se fixer aucun objectif chiffré. « Je veux sauter le plus haut possible ». C’est frustrant pour nous mais elle ne se laissera pas circonvenir.

Les coureurs de 400

Les prétendants à une médaille restent globalement les mêmes : les jumeaux Borlée, le 4x400m masculin et le 4x100m féminin. Jonathan (22 ans) vient de battre le record de Belgique à Paris, en bouclant le tour de piste en 44.77 (avant de battre une nouvelle fois ce record à Barcelone, ce mercredi, en 44.71), tandis qu’en demi-finales du championnat de Belgique, Kevin a réalisé le sixième chrono européen, en 45.22.

« Jonathan s’est distingué mais il ne faut pas oublier Kevin, qui a signé un excellent chrono, seul en tête », analyse Gevaert. « Les jumeaux sont davantage sous pression qu’avant mais je ne pense pas que cela leur pose un problème réel. Il suffit de se rappeler la maestria de Jonathan à Paris. Jacques, leur père et leur entraîneur, est aussi un bon coach mental. La Belgique a une chance réelle de médaille sur le tour de piste car peu d’Européens ont réalisé d’aussi bons chronos cette saison. »

Les performances des frères Borlée peuvent offrir une autre médaille à la Belgique en relais 4x400m, d’autant que plusieurs athlètes ont réalisé les minima. Arnaud Destatte (22 ans) a raflé la dernière place libre en 400m individuel et il entre en lice pour le relais, de même qu’Antoine Gillet (22 ans), Arnaud Ghislain (21 ans) et Cédric Van Branteghem (31 ans), le capitaine de la délégation belge. Victime d’une fracture de stress fin avril, il n’a plus couru en compétition et renonce au tour de piste individuel mais il se tient à la disposition du relais.

« Il peut s’entraîner mais sans s’adonner à la compétition car la charge serait excessive. Il va bien actuellement et il est honnête: s’il ne se sent pas bien au moment des relais, il le dira. Jacques Borlée a l’embarras du choix dans la composition du relais mais il prend toujours les bonnes décisions de toute façon. »

Le sprint féminin

Côté féminin, le relais 4x100m devra briller sans Kim Gevaert, prompte à minimiser son impact lors des JO de Pékin. « La différence entre mon chrono et celui de mes coéquipières était inférieure à une demi-seconde et bien d’autres éléments entrent en compte dans un relais: l’engagement de chacun, la qualité des passages de témoin… Il s’agit avant tout d’être prête au moment de la course. Evidemment, Hanna Mariën (28 ans), Elodie Ouedraogo (29 ans), Anne Zagré (20 ans) et Olivia Borlée (24 ans) ont souffert de blessures au cours de l’année écoulée et elles doivent tout reprendre mais la qualité est là comme, surtout, l’enthousiasme et la volonté de réaliser un exploit. »

Olivia s’est également qualifiée pour le 200m mais celle qui semblait destinée à prendre le relais de Kim Gevaert plafonne quelque peu. « Elle signe de bons chronos depuis quatre ans et elle est tout à fait capable d’éclater lors de grands rendez-vous, si son corps la suit. Elle souffre du même problème que moi au tendon d’Achille. J’ai vécu mon pire moment en 2008. C’est une blessure complexe et très douloureuse. Un tendon est peu irrigué et les médicaments ont peu d’effets, hormis les antidouleurs, qui sont presque indispensables. Il faut avoir subi une blessure à un tendon pour comprendre à quel point cela peut faire mal. La structure du tendon se modifie, le mal devient chronique, etc. Olivia sait ce que j’ai entrepris pour gérer cette blessure et elle suit un traitement mais trouver la bonne méthode, en fonction de l’endroit exact de la blessure, n’est pas évident. Il faut évidemment adapter son entraînement. Puis d’un coup, le déclic se fait. Peut-elle briguer davantage que la finale? Oui, si elle est vraiment en super forme. »

Espérer le déclic

En triple saut, Svetlana Bolshakova (26 ans) peut espérer figurer parmi le top 5. L’épouse de Stijn Stroobants, un spécialiste du saut en hauteur qui n’a pas réussi à se qualifier pour Barcelone, a récolté plusieurs médailles internationales sous le maillot russe en Juniores et en Espoirs. Agée de 26 ans, elle saute régulièrement au-delà de 14m20 cette saison.

« Beaucoup d’athlètes ont un énorme potentiel, dans cette délégation, mais encore faut-il qu’il s’exprime au bon moment. Tout se joue en une fraction de seconde, surtout dans les disciplines techniques et le sprint. Prenez Eline Berings (24 ans), qui court le 100m haies. Elle n’a pas encore atteint le sommet de ses aptitudes, sans qu’il y ait de véritable raison. Elle n’est pas encore à 100%, notamment techniquement. Par ailleurs, Anne Zagré, qui participe à la même épreuve, est jeune, elle a été blessée et je pense que ces championnats constituent une expérience précieuse. Elodie Ouedraogo, elle, peut viser la finale sur les haies basses. »

Pascale Piérard

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