© BELGAIMAGE

Zinho Vanheusden, futur patron de la défense nationale?

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Il est parti en Italie comme on va à l’université des défenseurs. Des bancs de Serie A à la pelouse de Sclessin, Zinho Vanheusden a appris le métier avec une maturité hors du commun. Le futur patron de la défense nationale, c’est lui.

Un coup de tête imparable dans la surface adverse. Seul, au deuxième poteau. Puis un autre, dans son rectangle, entre deux maillots mauves pour éviter une égalisation de la Fiorentina au bout des arrêts de jeu. L’Inter s’impose 1-2, et remporte le championnat Primavera, compétition réservée aux U19 des clubs italiens. I

Intraitable derrière et dangereux devant (un but en quarts, un autre en finale), Zinho Vanheusden est élu meilleur joueur de la phase finale. Déjà, il faut réfléchir à l’avenir. Car le système italien a ceci de particulier qu’une fois fêtés leur 19e anniversaire, les joueurs deviennent des adultes. Finie la Primavera, et pas d’équipe B pour accumuler du temps de jeu. Le carrousel des prêts commence.

Zinho a beau être précoce, il n’échappe pas à la règle. Les clubs de la Botte se bousculent au portillon pour obtenir le prêt de celui qui, en fin de saison 2016-2017, a fêté ses premières sélections dans le noyau A de l’Inter. La récompense est offerte par Stefano Vecchi, l’exigeant coach de la Primavera, promu à la tête de l’équipe fanion des Nerazzurri pour clore la saison.

Convoqué en compagnie d’ Andrew Gravillon, son partenaire français en charnière centrale, Vanheusden suit ses premiers matches de Serie A depuis le banc de touche. Mais les illusions sont rares.

L’Inter n’est pas réputée pour offrir une place de choix à ses jeunes talents. En 2012, avant de devenir la Youth League, la Ligue des Champions des jeunes se nomme NextGen Series. La première édition se conclut en bleu et noir, grâce aux buts de Samuele Longo et aux exploits de Lorenzo Crisetig.

Mais aucun des deux hommes ne recevra vraiment sa chance au stade Giuseppe Meazza. Pas plus que Federico Bonazzoli, meilleur joueur du tournoi de Viareggio en 2015, vendu à la Sampdoria, ou que Nicolo Zaniolo, jeune prodige italien utilisé comme monnaie d’échange avec la Roma dans le transfert de Radja Nainggolan.

Depuis l’éclosion de la génération de Giuseppe Bergomi au début des années 80, les jeunes promesses locales n’ont plus vraiment la cote chez les Nerazzurri.

L’AVENIR EN BLEU ET NOIR

L’histoire de Zinho Vanheusden semble pourtant prendre une tournure différente. Dès son arrivée, obtenue malgré la concurrence de clubs comme le PSG, Liverpool ou le Bayern, l’Inter tient en très haute estime le défenseur belge. Le chef du scouting de l’Inter, Pierluigi Casiraghi, suit Zinho à la trace, et son nom s’affiche souvent sur le téléphone de Johan Vanheusden, le paternel de la perle limbourgeoise.

Avec Roberto Samaden, responsable de l’école des jeunes nerazzurri, Casiraghi convainc les Vanheusden d’opter pour un avenir en bleu et noir. Le père, défenseur du Beerschot et de Seraing dans les années nonante, en plein âge d’or du Calcio, est forcément fasciné par l’art de la défense à l’italienne, même s’il nomme sa progéniture à la brésilienne.

En 1994, lors de la finale du Mondial américain, la présence d’une charnière formée par Franco Baresi et Paolo Maldini chez les Azzurri n’empêche pas les yeux de Johan de se focaliser sur un milieu de terrain brésilien. Un certain Zinho.

Grand fan du Standard, où il emmène Zinho en tribunes dès ses quatre ans avant de l’amener à se vêtir de rouge liégeois après sa neuvième bougie, Johan Vanheusden n’hésite pourtant pas quand l’Inter frappe à la porte. Quoi de mieux que l’Italie pour apprendre à défendre ?

Le père rend souvent visite à son fils à Milan, où Zinho vit dans une sorte d’auberge espagnole destinée aux jeunes talents étrangers du Biscione, posée à cinq minutes du centre d’entraînement. Chaque semaine, Johan est en tribunes pour admirer les progrès de son rejeton, endurci et amélioré par l’exigence de Vecchi.

Zinho Vanheusden devient l’un des porte-étendards de cette nouvelle Inter, qui promet – par l’intermédiaire de Samaden – d’accorder une place plus importante à ses jeunes prodiges. Le Belge Xian Emmers, ou le talentueux buteur italien Andrea Pinamonti (grand ami de Zinho) reçoivent leur chance lors des séances d’entraînement du noyau pro, mais c’est bien Vanheusden qui a les honneurs de la conférence de presse après le titre de la Primavera, en compagnie de Vecchi et de Samaden.

En plus d’être un futur champion, c’est un chouette gars, une personne très mature pour son âge.  » Luciano Spalletti

C’est lui, aussi, qui prend part à toute la préparation de la saison suivante sous les ordres de Luciano Spalletti. Si un prêt était initialement envisagé, l’Inter souhaite ensuite garder son Belge. Privés d’un recrutement faramineux par les contraintes du Fair-Play financier, et limités en défenseurs centraux par le départ pour Valence de Jeison Murillo, les Nerazzurri installent Vanheusden dans la hiérarchie de l’équipe première. En quatrième position, dans le sillage d’ Andrea Ranocchia, doublure officielle de Miranda et de Milan Skriniar.

Apprentissage sous le maillot de l'Inter.
Apprentissage sous le maillot de l’Inter.© BELGAIMAGE

L’UNIVERSITÉ NERAZZURRA

Si Zinho évolue toujours avec les U19, notamment en Youth League, il est partie prenante des exercices pointilleux de Giovanni Martusciello. Ancien coach de l’Empoli, où il a également été l’adjoint de Maurizio Sarri ou de Marco Giampaolo (Sampdoria), l’adjoint de Spalletti s’occupe exclusivement de l’animation défensive, avec des séances spécifiques où la ligne de quatre défenseurs apprend à se déplacer en harmonie ou à gérer des situations récurrentes (les ballons aériens, les décrochages de l’attaquant, etc.).

Martusciello tombe rapidement sous le charme de Zinho, et ne manque jamais de confier à l’ensemble du staff son admiration pour le sens de l’anticipation et la maturité du jeu de sa pépite belge. La folle ascension prend fin en septembre 2017, quand les ligaments du genou gauche de Zinho lâchent en plein match de Youth League, face au Dynamo Kiev.

De Pinamonti à Spalletti, tout le club affiche son soutien au joueur, comme s’il fallait une nouvelle preuve de ce qu’il représente au sein du club.  » En plus d’être un futur champion, c’est un chouette gars, une personne très mature pour son âge « , a servi Spalletti en conférence de presse.

Posé et conscient de la hauteur du défi italien, Zinho Vanheusden s’est finalement rétabli par l’intermédiaire d’un prêt au Standard. S’il étudie soigneusement tous les mouvements de Sergio Ramos, il n’ignore rien de la trajectoire de Leonardo Bonucci, formé à l’Inter avant d’exploser lors d’un prêt à Bari, pour finalement devenir une star mondiale du football défensif à la Juventus.

Son tremplin à lui passerait par Sclessin,  » son  » Standard, où il a pu revenir grâce aux bons rapports entre Olivier Renard et Walter Sabatini, alors directeur sportif de l’Inter. Un prêt consenti non sans avoir signé, au préalable, un nouveau contrat de cinq ans avec les Nerazzurri, qui ne veulent pas entendre parler d’option d’achat.

ZINHO LE ROUCHE

Le 30 janvier dernier, le Standard annonce donc qu’un accord a été trouvé pour le prêt de Zinho à Sclessin jusqu’à la fin de la saison, avec une option pour une saison supplémentaire. Éblouissant pour sa première à domicile, quand il remplace Christian Luyindama pour un match de play-offs face à Gand, il ne retrouvera plus le terrain jusqu’à la fin de saison, barré par la solide charnière formée par le Congolais et Konstantinos Laifis.

Mécontent du manque de confiance de Ricardo Sa Pinto malgré cette prestation aboutie face aux Buffalos, Vanheusden envisage d’aller voir ailleurs. Son temps de jeu pourrait bien se trouver à la Côte, où Gert Verheyen a été choisi pour emmener la nouvelle saison. Le coach des Côtiers ne cache pas son admiration pour Zinho, qu’il a connu en tant que sélectionneur des U19 et qu’il promet au plus grand avenir dans chaque conversation où son talent est évoqué.

Finalement, Vanheusden reste pourtant à Liège, notamment grâce à la figure de Michel Preud’homme, en qui il voit un meilleur maestro que Sa Pinto pour parfaire sa post-formation. Insuffisant, cependant, pour calmer son mécontentement quant au temps de jeu offert cette saison malgré la présence de l’Europe dans le calendrier. Avec quatre matches complets au compteur, agrémentés de quatre apparitions dans les arrêts de jeu pour fermer la boutique liégeoise, Zinho conserve un goût de trop peu.

Il faut dire que le Limbourgeois sait ce qu’il veut. Réservé au sein du vestiaire liégeois, où il passe l’essentiel de son temps avec les plus jeunes, il est vu par les anciens comme un joueur ambitieux et déterminé, au potentiel hors du commun. Presque trop fort, déjà, pour un club auquel il n’appartiendra sans doute plus jamais.

 » Tactiquement, il a sept ans de plus que son âge « , raconte-t-on dans le vestiaire, où la science du jeu défensif affichée par Vanheusden impressionne. Son placement exceptionnel lui permet même de masquer une pointe de vitesse parfois déficiente, seul point plus faible d’un profil qui devrait l’emmener très haut dans la hiérarchie des défenseurs européens.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire