Bernard Jeunejean

Virton rêve d’élite!

Aimer le foot, c’est à la fois être fier des Diables, de Bruges ou d’Anderlecht parce qu’on est Belges, fier du Standard ou de Charleroi parce qu’on est Wallons, …et fier en ce moment de Virton si l’on habite la province de Luxembourg.

Le jour où nos provinces disparaîtront, ce sera un peu le foot de proximité qui trépassera. Car aimer le foot, c’est à la fois être fier des Diables, de Bruges ou d’Anderlecht parce qu’on est Belges, fier du Standard ou de Charleroi parce qu’on est Wallons, …et fier en ce moment de Virton si l’on habite la province de Luxembourg : un club de la Belle province qui peut caresser des rêves d’élite belge via des capitaux grand-ducaux, ça tient du miracle ! Un miracle que toute la province espère comme on espère écrire une page d’Histoire, et même si les lendemains déchantaient ensuite pour cause de folies financières : mais qu’importe, tout le foot est bâti sur pareils châteaux de cartes…

Virton, jusqu’ici, c’était l’heureux indice attestant que le Poucet sur crampons des provinces wallonnes, c’était Namur et pas Luxembourg… On a les querelles de clochers qu’on peut : coincée en D2 ACFF, la capitale de la Wallonie n’est pas celle du football wallon, elle a deux ardeurs de retard ! Et elle pourrait en avoir trois si Virton émergeait de sa division : embryon de réponse ce vendredi soir face à OHL, pour décider de la première période de cette D1B bizarre !

Trois précisions sont bonnes à prendre par qui l’ignorerait : Virton, c’est la Gaume. La Gaume, c’est la partie francophone de la Lorraine belge. Virton n’est donc pas l’Ardenne, qu’on se le dise car les lapsus lassent ! Et contrairement à Renaud Emond, Thomas Meunier n’est pas Gaumais : c’est un voisin, Ardennais de Sainte-Ode passé par Virton, comme y passent aujourd’hui des tas de gars de bien plus loin. De nouveau, faut s’y faire, c’est le coup du flacon et de l’ivresse, et l’ancrage local en foot pro, c’est plutôt peau de balle obligatoire : le noyau virtonais est une armada de Français teintée de quelques Grand-Ducaux …et de trois Belges méritant citation !

Il y a Manuel Angiulli, formé à Liège et Visé, titulaire en défense centrale. Il y a Guillaume François né plus au nord de la province, bien connu à Charleroi et qui revient de blessure, mais aura fort à faire pour déloger du back droit Edisson Jordanov. Il y a enfin le capitaine Anthony Moris, notamment passé par le Standard, Arlonais d’origine et donc Lorrain sans être Gaumais, …car le Pays d’Arlon est la partie historiquement germanophone de la Lorraine belge : encore un lapsus dribblé par cette précision, ne me remerciez pas ! Moris est Belge …mais aussi Grand-Ducal depuis 2014, opportunément naturalisé grâce aux gênes d’un papy ! Ça lui permet de défendre la cage de l’équipe nationale, y’a pas de petits profits, ni de petits plaisirs !

Points forts virtonais ? Moris. Jerry Prempeh impressionnant derrière. Selvio Cruz, scoreur régulier bien que défensif. Clément Couturier, infiltreur joli et battant quand même. Mais surtout, surtout, Raphaël Lecomte, qui crèvera immanquablement l’écran si vous regardez le match sur Proximus TV ! Sorte d’ersatz d’Andrea Pirlo, ce Guingampais roule sa bosse depuis 2009 en D1 et surtout D2 belge (Visé, Westerlo, Roulers…). Quoique prestant très bas dans le jeu, se gardant bien de se retrouver jamais devant le ballon, il parvient à tirer à lui la couverture, brillant davantage que son quatuor offensif !

Il donne toutes les balles arrêtées. Il demande (exige ? ) tous les ballons dans les pieds, les reçoit tous, redonne en n’en perdant aucun. Il suit le ballon du regard en permanence, sans jamais de coup d’oeil dans le dos pour s’assurer que tout baigne derrière lui, …étonnant pour un médian si bas ! En perte de balle, il se bat comme un chien pour arracher le ballon …à l’adversaire qu’il lui plaît d’aller tout à coup taquiner : car pas question de lui imposer un opposant direct !

Homme libre devant la défense à un degré caricatural, il ne va qu’où il a envie, à l’instinct, peu soucieux du positionnement adverse, …mais ses neuf potes font aveu d’allégeance, et ça marche ! Plutôt que la discipline, il a la triple conviction qu’il doit courir, bosser, et qu’il est le patron parce qu’il a technique et vista. Raphaël Lecomte, passeur sûr qui n’en fait qu’à sa tête. Sorte d’individualiste au service de l’équipe. Paradoxe ambulant.

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