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Standard: que valent vraiment les nouveaux transferts ?

Stephane Vande Velde

Le Standard n’a pas encore convaincu avec son mercato malgré les qualités évidentes de joueurs comme Louis, Watt, Faty et Jorge Teixeira.

Anéantis par le transfert de leur capitaine historique, Steven Defour, à Anderlecht, les supporters liégeois ont ensuite vu leur équipe sombrer à Mouscron (5-2), perdre contre le Zent (0-1) et partager face à Westerlo (2-2). L’entraîneur israélien, Guy Luzon, réclame à cor et à cri des renforts pour remplacer Kanu, William Vainqueur, Daniel Opare, Michy Batshuayi et Imoh Ezekiel, soit cinq titulaires sur onze de l’équipe de la saison passée.

Roland Duchâtelet fait le mort mais lui en a déjà offert huit avec Ricardo Faty. Est-ce assez et surtout ces transferts auront-ils le même impact que les joueurs partis ? Difficile à dire même si on peut affirmer que le président du Standard n’a pas visé des joueurs très chers. Il a préféré miser sur des éléments abordables (Faty, Jorge Teixeira) ou des jeunes qui disposent d’un potentiel de revente. Que valent les transferts du Standard ? Sport/Foot Magazine s’est penché sur les principaux.

On a découvert Jeff Louis, le transfert le plus rocambolesque, le joueur ayant accepté les conditions avant que Nancy ne se rétracte… pour finalement laisser partir Louis en terre liégeoise. Lorsque nous avons demandé à Louis pourquoi son transfert a mis du temps à se dessiner, il a botté en touche, ne se souvenant même plus du nom de son agent. « Je suis venu visiter le club, le coach m’a convaincu, puis Nancy m’a rappelé et finalement, on m’a dit que je pouvais revenir à Liège. »

Il s’agit du transfert le plus ambitieux du Standard jusqu’à présent. L’ancien médian de Nancy a 22 ans et le Standard a déboursé 2,5 millions pour s’attacher ses services. Même si le volte-face de Nancy a suscité les railleries, le Standard a finalement réussi un bon coup car il était en concurrence avec quelques clubs de Ligue 1 (dont Rennes), le Qatar et le Celtic de Glasgow sur ce dossier.

Louis en rodage

Pour l’instant, le joueur a semblé encore en rodage et en manque de rythme (voire de condition). « Je ne suis pas encore à 100 % », a-t-il reconnu. A revoir donc. D’autant plus que les échos de Lorraine sont largement positifs. La saison passée, Louis a marqué 12 buts et donné 6 assists. « C’est un joueur d’instinct, capable de gestes et de frappes phénoménales », explique Romain Jacot, journaliste à l’Est Républicain. « Il peut avoir des séquences à un très haut niveau et c’est le genre de joueurs capable de gagner un match à lui tout seul. Il a éclaté à Nancy la saison passée, à partir d’octobre lorsque Nancy a changé d’entraîneur, rappelant Pablo Correa (NDLR : entraîneur emblématique de l’ASNL de 2002 à 2011). Je me souviens du premier match de l’ère Correa : Louis avait inscrit deux buts à Clermont. »

A Nancy, Louis évoluait à un poste de 9 et demi, derrière l’attaquant. « Il était courtisé car il a l’habitude d’inscrire des buts marquants, qui font le tour de la toile, et tout le monde savait à Nancy qu’il n’allait pas rester en L2. » Si le Standard l’a obtenu à un bon prix, c’est parce que Louis n’avait plus qu’une année de contrat. « Ce ne sont jamais les transferts qui rapportent le plus aux clubs vendeurs », résume Jacot.

Arrivé en France peu après le tremblement de terre à Haïti d’où il est originaire, Louis a d’abord fait ses gammes au Mans où on se rappelle « son coup de rein terrible, son accélération foudroyante et sa conduite de balle étonnante ». C’est là que Jacques Hébert, journaliste à Ouest France l’a côtoyé. « Il a d’abord débuté en CFA et, à 17 ans et demi, il a intégré le groupe pro. Mais, selon moi, l’entraîneur de l’époque, Arnaud Cormier, a trop tardé avant de le lancer. Le Mans était encore en Ligue 2 et jouait la montée. Quand il fut lancé, il a directement eu un impact mais malgré une bonne fin de championnat, Le Mans a échoué à la 4e place (NDLR : seuls les trois premiers montent). Pour moi, s’il s’entoure bien, il a le potentiel pour rejoindre un club du top-10 européen. C’est un très, très beau joueur. »

Teixeira, une bonne pioche Et voilà après Adrien Trebel (et avant Faty) le deuxième joueur issu du championnat de France. « Le marché est très intéressant pour le Standard dans le cas d’une revente. Louis sera plus exposé au Standard – surtout si le club dispute la Ligue des Champions – qu’en Ligue 2 », explique un agent français.

Car, il faut bien l’avouer : le Standard s’est focalisé sur le marché français durant l’été. Il a essuyé les refus d’Andy Delort (Tours), Yannis Salibur (Clermont) et Cédric Bakambu (Sochaux), et a finalisé Trebel, Louis et dans une moindre mesure, le jeune Sylvio Ouassiero (Auxerre). Au point de marcher sur les plates-bandes de clubs comme Charleroi ou Zulte Waregem présents sur ce marché depuis plusieurs années. « On se rend de plus en plus compte qu’on a les mêmes réseaux que Roland Duchâtelet. Le Standard lorgne tout joueur intéressant, quitte, après, à l’envoyer à Ujpest ou Charlton », résume l’administrateur délégué de Charleroi, Mehdi Bayat.

Mais si le Standard fonce sur le marché hexagonal, il ne délaisse pas les autres marchés. Ainsi, sur les sept transferts déjà enregistrés, deux viennent du réseau déployé à l’Est par Roderick Duchâtelet (Darwin Andrade et Martin Milec), un du scouting de Jean-François de Sart (Jorge Teixeira), et le dernier du championnat de Belgique (Tony Watt). Partent-ils tous sur la même ligne ? Non. Certains rentrent dans la catégorie des joueurs confirmés, censés pallier les départs des piliers. Les autres viennent pour renforcer le noyau en profondeur, ou comme paris sur l’avenir.

Le Portugais Jorge Teixeira (27 ans) fait assurément partie de la première catégorie. Le Standard était tombé sous le charme lorsque les Rouches de José Riga avaient rencontré le FC Zürich lors du tour préliminaire de Ligue des Champions en 2011. Depuis lors, ils avaient toujours gardé un oeil sur le défenseur central et ont profité de l’occasion (qu’il soit libre de contrat) pour s’attacher ses services. « C’est une bonne pioche », explique Thomas Schifferle, journaliste au Tagesanzeiger. « C’est un défenseur constant qui était devenu l’un des meilleurs du championnat suisse. La saison passée fut loin d’être sa meilleure car il a été arrêté par des blessures (NDLR : il a tout même disputé 25 matches de championnat) mais le FC Zürich perd assurément un de ses tauliers. Cependant, pour lui, je crois qu’il était temps de relever un autre défi. Etait-il capable d’aller dans un championnat plus relevé ? Je ne sais pas mais il connaît ses qualités et ses défauts et il a préféré choisir un club dans lequel il pourrait jouer. »

De l’argent dans les caisses L’ancien attaché de presse du FC Zürich, Giovanni Marti, aujourd’hui à la FIFA, croit par contre qu’il aurait pu viser plus haut. « Il a été prêté six mois à Sienne en 2012-2013 et n’a pas déçu. C’est la preuve qu’il aurait pu goûter à un championnat plus relevé. Le choix du Standard m’a quelque peu surpris mais l’attrait de la Coupe d’Europe a sans doute joué. C’est un défenseur sérieux, solide, qui se loupe rarement. Il se fixe toujours des objectifs afin de faire partie des meilleurs de l’équipe. Avec lui, le terme équipe prend tout son sens car il a le sens du sacrifice et qu’il fait tout pour elle. Si vous me dites que c’est le genre de joueur que le public liégeois apprécie, alors il deviendra vite un chouchou. Il apporte également un plus offensivement car avec Zürich, il marquait beaucoup sur phases arrêtées, grâce à l’un de ses principaux atouts : son jeu de tête. Vous l’aurez compris : il rentre davantage dans le registre physique et solide que technique. Il joue beaucoup avec son corps. »

Outre Tony Watt, Jorge Teixeira, Ricardo Faty et Louis sont donc les deux principaux transferts du Standard. Les quatre autres (Trebel, Milec, Andrade et Ouassiero) rentrent davantage dans la catégorie des joueurs venus pour donner de la profondeur au banc. Est-ce suffisant pour remplacer les cinq titulaires partis ? Sans doute pas. Trebel n’était pas titulaire à Nantes et n’a disputé que 314 minutes la saison passée. Andrade n’a pas disputé une minute en championnat de Hongrie. Quant à Milec, il était bien titulaire à Maribor mais il s’agit du championnat slovène. Ce n’est que dans quelques mois qu’on pourra dire s’il s’agit d’une bonne pioche. Mais peut-on décemment bâtir une équipe ambitieuse autour de ce genre de joueurs ? Non. D’autant plus que ce n’est pas l’argent qui manque. Le Standard a engrangé 22 millions des ventes de Batshuayi, Vainqueur et Ezekiel. Il n’en a dépensé qu’environ 5,5. Considérant que l’argent des transferts sert également à combler le déficit d’exploitation situé entre 9 et 10 millions, il reste encore un peu moins de 7 millions d’euros ! C’est pour cette raison que Luzon réclame davantage d’arrivées et que l’on s’attend à du mouvement dans les derniers jours du mercato. A moins que Duchâtelet décide de miser uniquement sur la carte des jeunes issus de l’Académie. Une manière de rentabiliser à outrance l’outil avec un investissement minimum.

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