© BELGAIMAGE

Standard : Bope bon oeil

Avant qu’il ne réapparaisse sur les terrains contre Anderlecht, Merveille Bope Bokadi avait connu seize mois d’absence. Retour sur la longue période de calvaire du Congolais, qui s’impose aujourd’hui dans la défense rouche.

Petite surprise du chef. Lors du Clasico du 3 février dernier, dans la foulée du départ de Christian Luyindama, le duo MPH-Ferrera sort le nom d’un revenant de son chapeau : Merveille Bope Bokadi. Le Congolais, habitué à évoluer au milieu, livre une prestation de patron un cran en dessous et s’impose comme une alternative plus que crédible au coeur de la dernière ligne rouche, après une convalescence longue de seize mois.

On avait tous mal pour lui.  » Sébastien Pocognoli

 » Il vous a surpris vous, pas nous « , sourit aujourd’hui Paul-José Mpoku.  » Merveille et Christian ont deux styles différents, mais de notre côté, il n’y avait pas de doute : il allait réussir en défense centrale.  »

Sébastien Pocognoli, le capitaine du Standard, opéré de la hanche fin décembre, juge l’homme avec plus de recul, depuis les tribunes.  » Polo m’avait dit qu’il avait l’habitude de jouer à ce poste avec le Congo et qu’il le faisait bien. Merveille m’a impressionné par ses qualités physiques, ses passes et son sens du placement.  » Bref, une bonne pioche à coût zéro.

Genou en compote

Autre Clasico, autre ambiance. Au Parc Astrid, cette fois, le 1 octobre 2017. D’un côté, les Mauves de l’intérimaire Nicolás Frutos ; de l’autre, les Rouges du bouillant Ricardo Sa Pinto. Sur le terrain, le spectacle n’est pas à la hauteur de l’affiche.

Henry Onyekuru, flèche nigériane, clôt les débats en faveur des locaux. 1-0, à la 89e minute. À ce moment-là, Bope Bokadi est déjà loin du rectangle vert. Dès la 28e, il se blesse au genou, seul, voulant justement arracher le ballon à ce diable d’Onyekuru.

Diagnostic : rupture du ligament croisé antérieur, intervention chirurgicale obligatoire, plus de six mois d’absence. Minimum. Un classique, mais toujours difficile à avaler, surtout quand on sort de huit titularisations en neuf matches, après un prêt de six mois converti en contrat courant jusqu’en 2020, l’été précédent.

 » Il était en plein boom. En tant que milieu défensif, c’était la révélation du début de saison. Il alliait déjà très bien technique et physique « , souligne Poco, plein d’empathie. En conférence de presse, Sa Pinto demande du soutien pour ce  » grand professionnel « , qui  » va passer beaucoup de temps loin des terrains.  »

 » Il fait partie de notre famille « , avance-t-il. Le technicien portugais vise juste. Neuf mois plus tard, Merveille refoule les prés, le temps d’un amical contre Sprimont, en juin 2018. La fin du calvaire ? Pas encore.

 » Il a enchaîné les rechutes « , souffle Eric Deflandre, adjoint maison.  » Il traînait des pépins physiques parce qu’il compensait au niveau d’autres muscles par peur du contact avec son genou. Il a d’abord eu du mal à accepter sa blessure, puis à revenir.  »

Regard fâché

En tout cas, il garde surtout cette frustration pour lui.  » Taiseux « ,  » discret « ,  » respectueux  » sont les mots généralement utilisés pour le définir. Mpoku :  » Merveille ne parle pas beaucoup. C’est quelqu’un de très calme, qui montre très peu ses émotions. C’est même un peu compliqué de dire quand il est content, ou pas.  »

Du coup, Bokadi mange son pain noir, sans broncher. Ou presque.  » Vers le mois d’octobre, il venait de revenir à l’entraînement et je lui ai fait une remarque sur une action « , rembobine Poco.

 » Il m’a regardé d’un air fâché. Il ne s’est rien passé de méchant mais normalement, c’est quelqu’un de très à l’écoute. Là, j’ai compris que sa situation commençait à lui peser. Ensuite, on a parlé et il m’a dit que ses blessures l’empêchait de faire ce qu’il voulait.  »

 » Sur la fin, c’était chaud. On arrivait pas à trouver la solution pour lui « , résume encore Mpoku.

Alors Pocognoli prend son rôle de capitaine à coeur. Peu avant le stage hivernal à Marbella, en Espagne, il prend Bokadi à part, lors d’un  » team building « .  » Il ne voyait plus le bout du tunnel. Il devait partir une semaine en Afrique pour se ressourcer. Je lui ai dit qu’à son retour, tout allait bien se passer.

On a parlé pendant une heure et ça lui a fait du bien. C’est mon rôle et franchement, on l’a tous vu traverser cette longue route dans le désert, on avait mal pour lui « , glisse l’arrière gauche des bords de Meuse.

Déclic à Marbella

Poco ne se trompe pas. De nouveau apte à Marbella, Bokadi est aligné dans l’axe de la défense des Standardmen au cours de deux amicaux. À la base, Michel Preud’homme et Emilio Ferrera pensent surtout lui donner du temps de jeu et lui permettre de reprendre un peu de rythme.

 » Le déclic s’est fait à Marbella « , assure Deflandre.  » Bien sûr, avec le départ de Christian Luyindama, on espérait que ça marche, mais on voulait surtout le revoir jouer, enfin, dans un endroit où il n’y a pas trop de concurrence. Au milieu, elle est assez élevée donc c’était plus compliqué pour lui de se montrer.  »

Puis, le coup du sort se transforme en coup de poker. Gagnant. Le 3 février dernier, Merveille Bope Bokadi, qui dépanne déjà avec sa sélection en défense centrale, retrouve officiellement les terrains, seize mois après, titulaire pour la réception d’Anderlecht. Le temps de 90 minutes et de mettre tout le monde d’accord.

 » On aurait pu aligner Milos Kosanovic, mais le coach a fait confiance à Merveille pour les très bonnes choses qu’il avait montrées en stage. On n’avait pas peur de ce choix, mais c’est clair qu’on n’en était pas sûr à 200%, il restait quelques points d’interrogations. Mais, la preuve, on a eu raison de lui faire confiance.  » Quitte à envisager un avenir à ce poste, pour celui pourtant surnommé  » le nouveau Zidane  » au pays, lorsqu’il évoluait bien plus haut, en numéro 10.

C’était avant qu’il signe au Standard, une première fois en janvier 2017, prêté avec ses deux compères du TP Mazembe, Jonathan Bolingi, désormais à l’Antwerp, et Luyindama, parti à Galatasaray. Avant qu’il ne soit éloigné de force des rectangles verts puis qu’il apporte un tout autre registre que son pote Christian à la défense rouche. Moins spectaculaire, peut-être, mais plus fin, plus serein. Même si le naturel revient toujours au galop.

 » Au début, en équipe nationale, je l’appelais  » Pogba  » parce qu’il jouait beaucoup au milieu, qu’il est grand, technique, mais aussi qu’il court beaucoup. Je ne lui pas encore trouvé de surnom pour son nouveau poste « , dit Bolingi. La pioche ?

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire